jeudi 9 août 2018

FANTASTIC FOUR #1, de Dan Slott, Sara Pichelli, Simone Bianchi et Skottie Young


Faut-il que Marvel ait culpabilisé ou cherche désespérement à créer l'événement pour avoir caler la sortie du n° 1 de ce nouveau volume de Fantastic Four un 8 Août, soit exactement cinquante-six ans après la création de la série écrite par Stan Lee et Jack Kirby ? En tout cas, il sera difficile de ne pas en entendre parler, après deux et demi d'absence dans les bacs. Mais cela suffit-il à produire un épisode de qualité ? C'est le périlleux défi de Dan Slott et Sara Pichelli (plus des invités)...


Ben Grimm se promène en ville avec sa fiancée Alicia Masters qui souhaite acheter un chaton comme animal de compagnie. La Chose ne se laisse attendrir qu'une fois les félins en train de ronronner dans ses bras.


Johnny Storm est au stade de New York pour assister à un match de base-ball des Mets en compagnie de son ami Wyatt Wingfoot. On les remarque vite dans les gradins et plusieurs jeunes filles réclament une photo avec la Torche Humaine. Lorsque, soudain, dans le ciel, se dessine le signal des Fantastic Four !


Hélas ! on découvre vite qu'il s'agissait d'un canular commis par deux garnements de Yancy Street qui avait volé le pistolet d'alarme de Ben Grimm dans son pied-à-terre. Il ne souhaite pas porter plainte et Jennifer Walters (alias She-Hulk) obtient des travaux d'intérêt général pour les deux gamins tandis que les proches des FF se désolent de cette mauvaise plaisanterie.


Cependant, ce petit événement a décidé Ben Grimm à rebondir dans sa vie privée et il demande Alicia en mariage. Elle accepte mais lorsque Johnny est sollicité pour être le témoin de la Chose, il s'emporte, affirmant que seul Reed peut mériter cet honneur. Ben est sur le point de se fâcher lorsqu'une lumière rayonne dans le ciel.


Le chiffre "4" luit et tout le monde, héros comme civils, comprend que cette fois-ci, c'est la bonne : Reed Richards, sa femme Sue et leurs enfants Franklin et Valeria sont de retour !

Ben Grimm qui broie du noir, Johnny Storm qui s'enflamme (au propre et au figuré) dès qu'il voit un signe familier... Mais toujours pas de signe de Reed, Sue et leurs deux enfants ! Tout ça vous rappelle quelque chose de récent ? Gagné ! C'était le résumé de Marvel Two-in-One #1 de Chip Zdarsky et Jim Cheung il y a quelques mois (à la nuance près que Johnny déprimait aussi parce qu'en plus il perdait ses pouvoirs).

Cette impression de "déjà-vu" est un curieux tour joué par Marvel et Dan Slott, comme s'il fallait encore éprouver la patience des fans qui attendent le retour de la first family de l'éditeur (rappelons, à toute fin utile, que les Fantastic Four furent les tout premiers héros de la firme... Quand bien même Jack Kirby dut souffler à Stan Lee l'idée qu'une version augmentée des Challengers of Unknown serait un bon départ).

Inutile de tergiverser, cet épisode va en frustrer un paquet, quand bien même des critiques diront qu'il s'agit de traiter du souvenir encore vivace de l'équipe, de l'espoir, et j'en passe. Pour ma part, j'attendais simplement de Slott, qui a eu par le passé, sur son run d'Amazing Spider-Man de témoigner tout son attachement aux FF, de présenter un chapitre aussi vif et enjoué que ce qu'il a réussi avec Tony Stark : Iron Man. Mais ce n'est pas le cas.

Certes, c'est mignon de montrer Ben Grimm céder au caprice d'Alicia Masters d'acheter des chatons, c'est sympa de voir Johnny Storm assister à un match de base-ball avec Wyatt Wingfoot, de convoquer le temps d'une case d'anciens membres provisoires du groupe - Luke Cage, Medusa, Crystal, She-Hulk... Mais vingt pages pour ça, même avec la demande en mariage de la Chose, le coup de sang de la Torche, deux sacripants de Yancy Street, et quelques brefs flash-backs, c'est tout de même pousser le bouchon un peu loin dans la décompression narrative et l'anecdotique. Et pour quel résultat ? Pour quelles raisons sinon celui d'annoncer que le prochain épisode va nous expliquer où étaient et ce que faisaient Reed, Sue et leurs enfants depuis tout ce temps... Avant la réunion au #3 ?!

Ce ne sont pas les back-up stories qui calmeront grand-monde : le segment consacré au retour sur le trône de Latvérie d'un Victor Von Doom à nouveau défiguré et revanchard (dommage après l'évolution intéressante imprimée par Bendis) est d'une laideur absolue (Simone Bianchi s'est une nouvelle fois surpassé).
  

Quant à la page finale dessinée par Skottie Young, avec l'Homme Impossible, elle dit très bien, par avance, ce que ressentiront beaucoup d'acheteurs de la revue (voir ci-dessous).


Pour l'épisode principal donc, c'est à Sara Pichelli qu'échoit le redoutable honneur de dessiner les héros (ou au moins deux des Fantastiques). J'aime beaucoup cette artiste mais il me faut reconnaître qu'elle ne livre pas son meilleur travail ici. La faute à l'épisode des Avengers qu'elle a dû illustrer avant (mais qui n'est pas encore sorti, un comble !) ? En tout cas, beaucoup de pages trahissent un manque de finitions, d'autant plus dommageable qu'elle est soutenue par une encreuse.

Néanmoins, parce qu'elle a de la ressource et du talent, Pichelli se sort habilement de l'exercice consistant à mettre en images un script un peu creux. Au test "savoir dessiner la Chose pour évaluer la capacité de l'artiste à produire les FF", l'italienne a quelque progrès encore à faire (mais elle s'en sort comparativement bien mieux que Esad Ribic sur la couverture). En revanche, elle anime de manière très vivante la Torche Humaine, en évitant le design d'Alex Ross (repris par Steve Epting - inspiré d'une silhouette sur un négatif de pellicule photo). Disons qu'il y a à la fois de la marge et du potentiel, donc le meilleur est certainement à venir.

Souhaitons que ce soit le cas pour la suite de la série. Rien d'inquiétant, mais tout de même un fâcheux retard à l'allumage. 

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