dimanche 28 septembre 2014

Critique 513 : JOHAN ET PIRLOUIT, TOME 3 - LE LUTIN DU BOIS AUX ROCHES, de Peyo


JOHAN ET PIRLOUIT : LE LUTIN DU BOIS AUX ROCHES est le 3ème tome de la série, écrit et dessiné par Peyo, publié en 1955 par Dupuis.
L'album comporte cinqs histoires : LE LUTIN DU BOIS AUX ROCHES (44 pages, 1955) ; ENGUERRAN LE PREUX (4 pages, 1956, parue à l'origine dans Risque-Tout n° 9) ; SORTILEGES AU CHÂTEAU (4 pages, 1956, parue à l'origine dans Risque-Tout n° 22) ;  A L'AUBERGE DU PENDU (4 pages, 1956, parue à l'origine dans Risque-Tout n° 25) et LES MILLES ECUS (3 pages, 1957, parue à l'origine dans Spirou n° 1000). 
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- Le Lutin du Bois aux Roches (44 pages, 1955). De retour au château du Roi, Johan trouve François le bûcheron bien déprimé à cause d'un certain Pirlouit, qu'il décrit comme un lutin démoniaque, vivant dans le Bois aux Roches voisin et qui vole des provisions aux gens de la région. Personne n'a pu jusqu'ici le capturer.
Peu après, Johan reçoit du Roi une importante mission : il doit préparer l'arrivée de sa nièce, la princesse Anne, et aussi neutraliser Pirlouit. Dès le lendemain l'écuyer se met a la recherche de ce dernier dans le Bois aux Roches et lui tend un piège avec de la nourriture. La ruse fonctionne et le lutin est attrapé. Mais Johan se rend compte que Pirlouit n'est pas un mauvais bougre et devient son ami en lui promettant de le recommander au Roi pour qu'il devienne son bouffon.
Mais quand il revient au château, Johan apprend par le Roi que la princesse Anne a été kidnappée et que deux de ses escortes, Philibert et Angelot (en vérité deux traîtres à la solde de Girard de Watriquet), accusent Pirlouit du forfait. La tête du lutin est mise à prix.
Johan parvient à prévenir Pirlouit qui jure qu'il n'est pour rien dans cette histoire et pense au contraire que les deux gardes sont mêlés à l'affaire. Ensemble, l'écuyer et le lutin découvrent qui sont les vrais coupables et leur mobile (piéger le Roi pour le détrôner) et s'emploient à sauver la demoiselle et sauver le souverain.

- Enguerran Le Preux (4 pages, 1956). Enguerran de Bauvallon arrive au château du Roi et se vante de plusieurs exploits. Johan et Pirlouit doute de leur véracité et mettent au point un plan pour tester la bravoure du chevalier.

- Sortilèges au Château (4 pages, 1956). En revenant au château du Roi, Johan et Pirlouit croisent un marchand ambulant qui quitte l'endroit, l'air préoccupé. Les deux amis trouvent ensuite tous les habitants de la forteresse endormis, comme drogués. Le marchand est leur suspect mais la vérité relève d'une malencontreuse étourderie.

- A L'Auberge du Pendu (4 pages, 1956). Johan et Pirlouit s'arrêtent pour la nuit dans une auberge dont le tenancier leur raconte que la région est terrorisée par une bande de brigands. Le lutin va découvrir que leur hôte n'est pas innocent dans cette affaire et, avec l'écuyer, mettre un terme aux agissements des vilains.

- Les Mille Ecus (3 pages, 1957). Le Roi et Johan élaborent un stratagème pour que Pirlouit cesse de les importuner en chantant (aussi fort que faux). Mais leur plan va aboutir à une situation inattendue et encore pire.

Tout comme ce sera plus tard le cas avec les Schtroumpfs (dans La Flûte aux Six Schtroumpfs, tome 9 - critique 502), Peyo a eu pour l'histoire principale de cet album une idée qu'il ne comptait pas développer et qui transformera toute la série. En effet, le personnage de Pirlouit ne devait pas revenir après cette histoire, qui d'ailleurs fut initialement publiée comme la troisième aventure de Johan seul.

En lisant ce récit, cependant, on peut se douter que Peyo avait deviné le potentiel de son lutin : il prépare tout d'abord son apparition en ne faisant qu'évoquer les méfaits de Pirlouit, décrit comme un démon, puis à la planche 7, on découvre enfin à quoi il ressemble mais il ne s'exprime d'abord que par borborygmes et en grimaçant. Néanmoins, on sait que c'est juste un petit bonhomme véloce et qui, malgré un caractère bien trempé, volontiers râleur, est plutôt facétieux, vivant dans les bois pour subsister après être allé de ferme en ferme d'où on le chassait en se moquant de lui. Difficile de ne pas éprouver de la sympathie à son égard : comme Johan, nous devenons son ami, et Peyo nous a bien eus.

L'intrigue peut ensuite se déployer autour de l'enlèvement de la princesse Anne (dont le prénom a peut-être inspiré l'héroïne du Royaume de Benoît Féroumont) : cette trame est classique et d'ailleurs Peyo dévoile l'identité des coupables et leur mobile dès la planche 21 (soit avant la moitié du récit) pour offrir aux lecteurs une succession de péripéties haletantes, qui deviendra sa marque de fabrique sur la série. 
Bien qu'appartenant à "l'école de Marcinelle" (comme on surnommait les auteurs oeuvrant pour la revue Spirou), Peyo est aussi un héritier de Hergé pour son goût de l'aventure au-delà du suspense. Ce qu'il privilégie, c'est l'action, le mouvement, traduits par des scènes de courses, de poursuites, de bagarres, de batailles. Et même s'il n'a pas encore atteint les sommets narratifs qu'on lui connaîtra ensuite, cette histoire montre déjà un auteur au savoir-faire épatant.

Visuellement, le trait est encore un peu épais et naïf : Peyo cherche encore ses personnages, il en a défini les grandes lignes mais il va les affiner progressivement, cela se remarque à quelques détails (par exemple, Johan est plus grand qu'il ne le sera par la suite).
Sa narration est aussi encore stéréotypée avec un usage abondant du "gaufrier", ses planches sont très denses, avec de petites vignettes (souvent plus d'une douzaine), et quand il ose un plan général avec un cadre aux dimensions plus grandes, c'est exceptionnel (voir page 40, quand les troupes du Roi assiègent le château de Watriquet - un plan superbe d'ailleurs). 
Toutefois, la manière dont Peyo orchestre ses séquences de combat est déjà impressionnante, comme en témoignent les pages 32 à 34 puis 42 à 45, quand Johan et la princesse Anne s'enfuient, puis avec Pirlouit courent après Guillaume de Basenhau.

Pour compléter le programme, Dupuis a greffé à l'histoire qui donne son titre à l'album quatre courts récits réalisés par Peyo ultérieurement : les trois premiers furent publiés à l'origine dans les n° 9, 22, et 25 de la revue Risque-Tout en 1956. Il s'agit des 4ème, 8ème, et 9ème aventures de Johan et Pirlouit : ce sont des fables joliment menées, l'une sur la vantardise d'un chevalier, l'étourderie d'un commerçant, et la duplicité d'un aubergiste. Peyo y démontre une nouvelle fois sa capacité à animer des formats très courts sans sacrifier à l'action, au mouvement, en s'appuyant sur la parfaite complicité de ses deux héros.
Les Mille Ecus, paru à l'origine dans le millième numéro de Spirou, tient en trois pages et dispense une morale malicieuse à souhait, encadrée par un découpage incroyablement dense (29 cases !) et dynamique : du grand art.

Un album-clé pour la série et un menu copieux donc.

samedi 27 septembre 2014

LUMIERE SUR... DARWYN COOKE

Darwyn Cooke a peint plusieurs illustrations
inédites pour la réédition des romans de la série Parker
écrits par Richard Stark (aka Donald Westlake).










Critique 512 : SPIROU N° 3989 (24 Septembre 2014)


La couverture met la série Soda à l'honneur : le tome 13 commence à être pré-publié cette semaine, avec toujours Tome aux commandes mais un nouveau dessinateur à ses côtés.

Allez, consultons le menu.

J'ai aimé :

- Soda : Résurrection 1. Soda, flic de New York mais qui cache sa profession à sa mère en lui faisant croire qu'il est prêtre, se remémore ce qu'il faisait le 11 Septembre 2001. Les attentats hantent encore tous ses collègues et lui se défoule en boxant avec sa partenaire, Linda...
Philippe Tome n'avait plus écrit d'aventures de cette série depuis neuf ans et, comme il l'explique dans l'interview en préambule de ce premier chapitre, il y est revenu après s'être beaucoup interrogé sur les conséquences du 11-Septembre. Ces 7 premières planches ne disent rien de l'histoire à venir, même si cela s'annonce très noir.
Dan remplace Bruno Gazzotti (désormais occupé par Seuls, écrit par Vehlmann) dans un style voisin : ses pages sur fond noir sont efficaces, avec un découpage bien pensé. Tout ça est très prometteur.

- Spirou et Fantasio : Le Groom de Sniper Alley 4. Spirou et Fantasio arrivent au musée mais voient la stèle leur échapper quand deux hommes, dont le conservateur de l'endroit, s'en empare. Heureusement, l'homme consent à les laisser en disposer tandis que le comte de Champignac, de son côté, a appelé des collègues en renfort pour aider les héros dans leur quête...
Ce nouvel épisode est plus bref mais toujours aussi mouvementé : Vehlmann arrive à la seconde partie de son histoire qu'il a annoncé plus inspirée par Indiana Jones. Jusqu'à présent, c'est un sans-faute, sans doute ce que le scénariste a produit de mieux avec la série.
Yoann est également en forme, réussissant notamment une scène de fusillade complètement délirante.

- Ernest et Rebecca : La Boîte à blagues 7/7. Pépé Bestiole est de nouveau hospitalisé et Rebecca distribue les blagues qu'elle a récoltées en espérant que cela accélèrera sa guérison.
C'est la fin de l'aventure pour Rebecca : le dénouement concocté par Bianco est à la fois rapide (un petit peu trop) mais bien dosé dans l'émotion. J'ai beaucoup aimé cette histoire, une vraie découverte. Les dessins de Dalena ont été une autre révélation, qui ajoute au charme de cette série.

- Katz. Del et Ian Dairin servent deux gags très marrants : le premier respire le vécu, le second est d'un délire réjouissant. J'aime bien ce minou.

- Mélusine. Clarke s'amuse (et nous avec) avec la fée Mélisande lors d'une visite au cimetière pour un nouveau cours bien spécial. Depuis quelques semaines, les gags sont moins percutants, mais ça reste délicieux.

- Les Campbell : Sous le masque de Morgan 2/2. Campbell tombe dans un traquenard tendu par le Turc. Malgré ses efforts, il est vaincu et se rappelle quand il a découvert qui était le pirate Morgan. Itaca et Genova attendent leur père sans savoir ce qui lui est arrivé...
La seconde partie de l'épisode de Munuera offre une spectaculaire scène de bagarre et annonce une suite qui, on l'espère, ne se fera pas trop attendre. C'est donc assez frustrant niveau scénario mais visuellement, les planches confirment le talent de l'artiste dans ce registre.

- Kid Paddle. Midam livre deux planches très marrantes sur l'ingestion des liquides et leur effet cellulaire : de quoi reconsidérer la consommation d'eau et de bière... Je préfère l'auteur quand il co-signe Game Over, mais cet épisode est très bien mené.

- Capitaine Anchois. Floris donne aussi dans le récit de piraterie mais avec un humour absurde réjouissant : les personnages sont tous de sombres crétins mais leurs mésaventures (en une planche comme en un strip) sont un régal.

- Rob. James et Boris Mirroir continuent d'ironiser sur le sport. Au point d'avoir raison de leur robot ? A suivre, toujours avec le sourire.

- L'Atelier Mastodonte. Mathilde Domecq entraîne Jérôme Jouvray dans le monde de la moto, après avoir eu raison de Lewis Trondheim. Les semaines passent et cette série est toujours aussi jubilatoire, les auteurs se succédant avec un égal bonheur.

- Le Petit Spirou. M'sieur Mégot découvre le secret de la bonne humeur permanente de son élève, mais la technologie résistera-t-elle au terrible prof de sport du petit groom ? Tome et Janry réussissent un bon gag - en attendant le retour du Dad de Nob. (Voir ci-dessous :)   


En Direct de la Rédak offre une interview du réalisateur Benoît Mariage, membre du jury pour le prochain défi Spirou. Et la semaine prochaine, Buck Danny revient dans la revue.
Les Aventures d'un Journal revient sur un concours lancé en 1964 par Peyo quand il signait Johan et Pirlouit. 

Enfin, les abonnés ont entre les mains la 4ème et dernière pièce du poster Zombillenium d'Arthur de Pins (un bien beau poster d'ailleurs).

vendredi 26 septembre 2014

Critique 511 : JERÔME K. JERÔME BLOCHE, TOME 24 - L'ERMITE, de Dodier


JERÔME K. JERÔME BLOCHE : L'ERMITE est le 24ème tome de la série, écrit et dessiné par Dodier, publié en 2014 par Dupuis.
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Jérôme se rend chez Me Sénéchal, qui veut l'engager pour une mission inattendue : il s'agit de remettre en main propre une lettre d'un de ses clients, récemment décédé des suites d'une longue maladie, à un homme habitant dans un village rayé de la carte après la construction d'un barrage il y a une trentaine d'années. 
Le détective doit prendre l'avion, dont il a la phobie, pour se rendre dans les environs et peut compter sur le soutien de sa fiancée Babette, qui l'accompagne. Après avoir dû abandonner leur voiture de location, accidentée après un orage de grêle, ils trouvent enfin le destinataire de la lettre, un vieil homme vivant tel un ermite, du nom de Antoine Oliveira, qui leur réserve un accueil fruste. 
Cet hôte inquiète Babette qui le surprend la nuit en train de creuser dans la cour derrière sa maison et qui croit qu'il va les tuer. Mais la vérité est tout autre et Jérôme va découvrir une très ancienne et tragique histoire qui a dévasté la vie de deux familles...

Ce récit sur le temps, les secrets et les regrets est peut-être le meilleur de toute la série d'Alain Dodier, ce qui n'est pas un mince exploit quand on se rend compte qu'il s'agit du 24ème tome de Jérôme K. Jérôme Bloche. Après plus de trente ans d'existence et une telle quantité d'aventures, on peut toujours, et légitimement, se demander ce qu'une bande dessinée peut encore proposer de suffisamment palpitant pour contenter ses fans de la première heure et conquérir de nouveaux lecteurs. A cette question, l'auteur a su répondre avec cette intrigue qui le confirme comme un des plus discrets mais des plus efficaces.

La conception de cet album a été laborieuse : Dodier en a eu l'idée il y a plus d'une vingtaine d'années, mais il l'a plusieurs fois remaniée jusqu'à obtenir ce qu'il voulait. Il a même songé, comme il l'a confié dans une interview à Spirou (lors de la prépublication de l'histoire), en faire un one-shot, avant de l'intégrer aux enquêtes de JKJB.
Mais si l'oeuvre a réclamé à Dodier de la patience, si l'on sent son exigence, le déroulement de l'intrigue constitue dans sa fluidité et l'émotion qu'elle produit témoigne de son degré de maîtrise comme scénariste. Il y a deux niveaux de narration : l'un avec de nombreux flashbacks, qui occupe pas moins de 21 planches sur les 50 de l'album, ce qui est plus que conséquent ; et l'un avec la mission actuelle de Jérôme. Le procédé peut étonner mais répond à une priorité : en articulant le récit différemment, voire en supprimant ces retours en arrière, cela aurait obligé l'auteur à des pavés de textes explicatifs indigestes et privé le lecteur à la fois du plaisir d'une lecture plus souple et de la palette de sentiments convoqués.

Dodier a aussi révélé que l'inspiration lui est venue d'un fait divers partant d'un postulat identique : la disparition administrative et physique d'un village entier à la suite de l'édification d'un barrage et de la submersion d'un territoire entier. Cela lui a en tout cas fourni un de ses décors les plus originaux, un cadre non urbain comme il aime à les représenter (en alternance avec les enquêtes en ville de Jérôme), propice au suspense et justifiant le titre de l'histoire.

L'explication du drame et la résolution de l'affaire ne s'effectuent que très progressivement et le lecteur n'en connaît le fin mot qu'au même rythme que le héros. Plus que jamais, il y a du Simenon chez Dodier avec une galerie de personnages mémorables, des situations étonnantes, des climats forts, un mystère savamment élaboré. La dimension humaine n'est jamais éclipsée par l'énigme policière : au contraire, elle la nourrit, elle la crée, elle la raffine. C'est aussi pour cette raison que ce 24ème épisode est un des (sinon le) plus aboutis.

Visuellement, comme je le suggère plus haut, l'histoire dispose d'un environnement exceptionnel, que Dodier, toujours en s'appuyant sur une documentation très fournie (et désormais facilitée, comme il l'a avoué, par la photographie numérique), représente avec tout son talent. Le réalisme est d'autant plus puissant qu'il est servi par un trait sans fioritures, sans détails superflus, mais avec ce qu'il faut de précision pour que le lecteur y croit.
Les dessins des véhicules, qui ont une grande importance dans l'affaire, sont également dignes de tous les éloges, prouvant encore une fois le brio avec lequel l'artiste sait les traiter.
Quant aux personnages, les fans de longue date comme moi seront heureux de suivre le couple de Jérôme et Babette tout au long du récit : il fonctionne parfaitement et forme un binôme très divertissant, graphiquement crédible et peu commun (Jérôme n'étant pas un héros conventionnel, et Babette loin d'un faire-valoir sexy). Les seconds rôles sont aussi soignés, qu'il s'agisse d'Antoine Oliveira (aux deux âges de sa vie), Denis Sagary (lui aussi évoluant physiquement pour les besoins de l'intrigue), ou le notaire Maréchal (Dodier est toujours aussi inspiré pour ce genre de personnages).

Il faut enfin mentionner spécialement la mise en couleurs de Cerise, qui a su trouver (certainement après de nombreux essais avec Dodier) une palette nuancée et distincte pour les séquences au présent et au passé, répondant idéalement à une idée du découpage très simple mais inspirée (des planches de cinq bandes pour les flashbacks, de quatre pour l'action actuelle).

Une éblouissante réussite : un grand cru pour le détective Bloche.  

lundi 22 septembre 2014

Critique 510 : SPIROU N° 3988 (17 Septembre 2014)


La couverture annonce le retour des Campbell, la série de pirates de Munuera : c'est une bonne nouvelle.

Attardons-nous un peu sur ce sommaire et ce qu'il propose de bon.

J'ai aimé :

- Spirou et Fantasio : Le Groom de Sniper Alley 3. Spirou échappe de façon peu orthodoxe à un sniper en retrouvant une connaissance de son aventure sur la lune (voir La Face cachée du Z, tome 52). Puis avec Fantasio, il est reçu à l'ambassade où ils rencontrent Victor Véritas, un communicant, et Omar Jalil, à qui ils promettent de tenir une séance de dédicaces en pleine ville. L'homme est susceptible de les renseigner sur le fameux trésor d'Alexandrie...
Cette nouvelle aventure tient décidément ses promesses : Vehlmann a réussi un dosage parfait entre humour (la scène du sniper avec un hommage au "moonwalk" de Michael Jackson et la réapparition de l'hilarant Poppy Bronco) et action (et la quête du trésor en point de mire). Le scénariste glisse même quelques répliques inspirées sur les pays du Moyen-Orient libérés de leurs dictateurs mais plongés depuis dans des guerres civiles.
Yoann, lui, produit des planches très toniques (les meilleurs depuis son arrivée sur le titre), bien servis par les couleurs de Laurence Croix, avec un superbe travail sur les décors, échappant aux clichés.

- Ernest et Rebecca : La Boîte à blagues 6/7. Rebecca se fait gronder par son père après l'escapade de Pépé Bestiole, mais Ernest va tenter de sauver ce dernier en affrontant les virus qui l'accablent. De son côté, Coralie tente de faire face à la déconvenue subie face à Eric...
Bianco et Dalena n'esquivent pas la gravité des situations traversées par leur héroïne et cet avant-dernier épisode illustre parfaitement leur maîtrise : c'est subtil et merveilleusement mis en images. Du coup, on espère vraiment que Pépé Bestiole va s'en tirer et que Coralie et Eric vont se réconcilier.

- Katz. Le minou déjanté de Del et Ian Dairin revient faire des siennes. Le premier gag n'est pas très bon, mais le second offre une chute amusante.

- Mélusine. Clarke se contente de quatre cases (et autant de bandes) pour un gag très léger, mais je reste indulgent parce que je n'arrive pas à me fâcher avec cette série.

- Les Campbell : Sous le masque de Morgan 1/2. Campbell et ses deux filles, Itaca et Genova, vont faire quelques emplettes. La librairie du coin va servir de carrefour aux retrouvailles avec l'adolescente Itaca et Luca le blond, son ex-fiancé, tandis que Campbell retrouve le turc, toujours prêt à lui proposer un mauvais coup...
José-Luis Munuera propose un récit en deux parties de sa série (suite et fin au prochain n°) sur une famille de pirates, que j'avais découverte dans le Méga Spirou de Juillet (un best-of de la revue, épais mais à petit prix). Ces 7 pages ne permettent pas de se faire un avis tranché sur le résultat, mais c'est accrocheur.
Surtout, les dessins de Munuera (qui dessina Spirou et Fantasio avant Yoann, durant le bref run de Morvan) sont un régal : l'artiste, qui vient de l'animation, est à son avantage dans cet univers.

- Minions. Un gag en une page de Didier Ah-Koon et Renaud Collin, très marrant : c'est pas tout de vouloir se relaxer, mais je ne vous en dis pas plus pour ne pas vous gâcher le plaisir de la chute.

- Rob. James et Boris Mirroir livrent encore deux fois deux strips réjouissants : une réflexion bien sentie sur l'art de glander la conscience tranquille, et une autre sur la mocheté des vêtements de sport.

- Imbattable. Pascal Jousselin met en scène son super-héros qui doit former un apprenti aux pouvoirs étonnants. L'inventivité du découpage et la malice de l'écriture font de ce titre un constant enchantement.

- L'Atelier Mastodonte. Bianco, dans un tout autre registre qu'Ernest et Rebecca, prend une bonne leçon pour avoir été sarcastique. Puis Pascal Jousselin se fait mener par le bout du nez par la fille de son collègue Alfred. Toujours aussi jubilatoire.

- Tash et Trash. Un gag absurde mais encore une fois réjouissant. / Capitaine Anchois. Une pique bien sentie contre Twitter.

- Dad. Les filles à Papa ont l'art et la manière de lui faire passer certains messages. Et Nob a le génie pour produire un nouveau gag tordant, toujours aussi superbement mis en images. (voir ci-dessous :)  

En Direct de la Rédak offre une interview de Munuera et la réponse très drôle de Nob à une lectrice.
Les Aventures d'un Journal nous ramène en 1954, à une époque où Dupuis commandait à ses auteurs de faire eux-même leur promo, ce qui fournit à Jijé l'opportunité d'un gag savoureux.

La semaine prochaine, la mythique série Soda revient et pour les abonnés, la quatrième et dernière partie du poster Zombillenium.

jeudi 18 septembre 2014

Critique 509 : PAGE NOIRE, de Frank Giroud, Denis Lapière et Ralph Meyer


PAGE NOIRE est un récit complet, écrit par Frank Giroud et Denis Lapière et dessiné par Ralph Meyer, publié en 2010 par Futuropolis.
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Après avoir quitté la ferme de son père au Texas, dont elle refusait de s'occuper, Kerry Stevens, une jeune femme, est devenue critique littéraire au magazine "Tales and Writers" à New York. Son ambition est de rencontrer l'écrivain Carson McNeal, un auteur de best-sellers dont le style l'impressionne mais qui vit retiré du monde.
En rusant, Kerry a accès à une adresse où sont envoyés ses relevés de droits d'auteur depuis le siège de sa maison d'édition. Elle se rend ainsi dans un patelin, Blue Falls et approche un certain Lewis Shiffer, qui reçoit le courrier de McNeal et qui est peut-être le romancier lui-même. Elle réussit à se rapprocher de lui jusqu'à ce qu'ils deviennent amants et lui accorde une interview exclusive. Kerry découvre ainsi le dernier manuscrit sur lequel il travaille, "Le Diable et la Poupée", l'histoire d'une jeune palestinienne amnésique suite à un traumatisme durant son enfance, en pleine guerre...  
Or, cette histoire, c'est exactement celle de Afia Maadour, une ancienne toxicomane et prostituée, qui vient de sortir de prison, et qui cherche à se rappeler son passé pour se venger d'un soldat qui a tué toute sa famille...
 
Ce one-shot d'une centaine de pages est un objet curieux dans sa réalisation et sa présentation. Il a été écrit par deux auteurs vedettes, d'un côté Frank Giroud (les sagas Le Décalogue et Quintett) et de l'autre Denis Lapière (le récit complet Un peu de fumée bleue... , le dyptique La dernière des salles obscures, la série Clara), qui se sont véritablement partagés le travail tout en veillant à livrer une histoire cohérente.

Concrètement cela signifie que Giroud s'est occupé de toutes les scènes mettant en scène Kerry Stevens tandis que Lapière s'est chargé de celles avec Afia Maadour. L'expérience narrative est en soi une gageure, mais le projet est doté de grandes ambitions dramatiques à travers les thèmes qu'il brasse.

Le genre du récit est trouble : on peut l'assimiler à un polar puisque les deux héroïnes enquêtent chacune de leur côté - Kerry pour retrouver McNeal, Afia pour localiser son bourreau - , mais des éléments familiers de la série noire sont absents (pas de policiers, à peine un détective). En vérité, puisque le sujet traite aussi de littérature, du rapport entre le réel et la fiction, et n'hésite pas à citer plusieurs auteurs ayant vraiment existé (comme Robert Louis Stevenson, Ernest Hemingway et surtout John Steinbeck), on peut aussi penser à la "série blême", cette variation de la série noire où s'illustra William Irish avec des romans et nouvelles dont les personnages principaux étaient souvent des femmes aux prises avec des situations extraordinaires les révélant à elles-mêmes. 

Pourtant, cette belle mécanique, bien huilée et efficace, donne le sentiment d'une bande dessinée en deçà de son vrai potentiel : avec des protagonistes pareils, une intrigue aussi ciselée, des notions aussi puissantes que la vengeance/le pardon/la culpabilité/la quête de vérité, on pouvait espérer mieux que ce résultat qui manque un peu de nerf, d'intensité, d'ambiguïté. 

C'est que Giroud comme Lapière n'ont pas su ménager suffisamment leur suspense : on devine trop vite la relation entre le trio de héros, en particulier on se doute rapidement que les pages consacrées à Afia ne sont pas un dispositif suggérant une histoire dans l'histoire. Cela pourrait encore passer si, au moment inéluctable où les trames se rencontrent, cela aboutissait à un effet renversant, éclairant d'un jour nouveau la personnalité de Carson McNeal et désorientant le lecteur, mais ce n'est pas le cas car, là encore, on se doute depuis un bon moment que le mystérieux écrivain ne se cache pas pour une raison artistique et noble.

Le concept même de Page Noire se mord la queue en voulant à la fois produire un récit palpitant et une mise en abyme troublante. C'est "juste" une bonne histoire, mais ce n'est jamais une histoire suffisamment surprenante pour que le lecteur ressente des émotions aussi intenses que ses héroïnes.
Ce qui est rageant, c'est qu'il est fort possible que, seul aux commandes, Frank Giroud en aurait tiré un divertissement tortueux et habile, ou que Denis Lapière en aurait fait un album émouvant et subtil, mais le style des deux ne produit pas l'étincelle attendue, comme si leurs talents conjugués se neutralisaient.

Visuellement, Page Noire bénéficie d'un grand dessinateur en la personne de Ralph Meyer, qui, pour adapter originalement le projet, a adopté une technique audacieuse. 
Il a ainsi dessiné, selon le contexte, différemment : pour le parcours de Kerry, un graphisme au trait classique, avec une mise en couleurs de Caroline Delabie (qui aurait mérité d'avoir son nom sur la couverture) en à-plats de bleus et verts ; pour celui d'Afia un traitement en couleurs directes par Meyer lui-même dans des lavis à dominantes brunes et rouges. 
Meyer est un des innombrables artistes influencés par Jean "Moebius" Giraud, mais son talent lui a permis de digérer cela pour produire un dessin réaliste, expressif, aux détails bien dosés. Lorsqu'il passe en couleurs directes, son sens du volume est parfois un peu englouti par un manque de nuances, mais le rendu n'en demeure pas moins beau, avec des ambiances évoquant justement la confusion du personnage concerné.
 
Vous l'aurez compris : ce n'est pas une totale réussite. La lecture est agréable, la production efficace. C'est toujours frustrant de lire une BD et, une fois finie, de constater qu'elle n'a pas exprimé tout son potentiel, malgré une équipe artistique prestigieuse.
 

mercredi 17 septembre 2014

Critique 508 : JOHAN ET PIRLOUIT, TOME 10 - LA GUERRE DES 7 FONTAINES, de Peyo


JOHAN ET PIRLOUIT : LA GUERRE DES 7 FONTAINES est le 10ème tome (et la 17ème histoire) de la série, écrit et dessiné par Peyo, publié en 1961 par Dupuis.
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Egarés dans un territoire sec et hostile, Johan et Pirlouit, pour échapper à un orage, se réfugient dans un château abandonné. Mais des bruits suspects et le son de la cloche à minuit empêchent Pirlouit puis Johan de trouver le sommeil, et les deux amis partent à la recherche de l'importun.
C'est ainsi qu'ils vont rencontrer le fantôme de Sire Aldebert de Baufort, l'ancien seigneur de l'endroit, mort depuis cent ans, et responsable de l'état désolé de la région. En effet, après avoir croisé la vieille sorcière Sara, cet amateur de vin, dont le vignoble finit par ne plus produire qu'une infâme piquette, fut exaucé d'un voeu : transformer toutes les sources d'eau du pays en rivières de vin.
Tous ses sujets sombrèrent comme lui dans l'alcoolisme, et le domaine dans l'anarchie. Aldebert retourna voir Sara pour qu'elle rétablisse la situation mais elle refusa au prétexte qu'il n'avait droit qu'à un souhait. Il insista mais sa colère provoqua celle de la sorcière qui assécha alors toutes les courants. Le pays déclina et ses habitants en partirent.
A sa mort, les aïeux d'Aldebert lui refusèrent sa place au ciel et le condamnèrent à hanter son château jusqu'à ce que son descendant légitime lui succède sur le trône. 
Avec l'aide de la sorcière Rachel et des Schtroumpfs, Johan et Pirlouit entreprennent de rendre l'eau au pays tout en devant composer avec une douzaine de Baufort et Beaufort prétendant régner sur place. Le véritable héritier, Jean, devient alors l'homme à abattre et celui à protéger pour les deux héros...


Peyo commence la réalisation de ce 10ème tome dans les pages de Spirou en 1959, après la publication de La Flûte à Six Schtroumpfs. Comme son éditeur le lui permet désormais, il développe une longue histoire de plus de 60 pages, qui, avec le temps, sera reconnue comme un (sinon le) sommet de la série. C'était en tout cas le récit que préférait l'auteur.

Il est vrai qu'avec cette Guerre des 7 Fontaines, on trouve réunies toutes les qualités de Peyo et assemblés les éléments majeurs de son oeuvre : beaucoup d'action, un zeste d'humour, l'inspiration fantastique, un brin de poésie, un tempérament de fabuliste (avec une morale malicieuse sur les méfaits de la boisson et le bon usage du pouvoir).
Surtout, l'aventure est menée sur un rythme soutenu, ce qui permet aux nombreux évènements de se dérouler sans jamais ennuyer. Il y a trois actes distincts mais qui s'enchaînent avec fluidité : dans un premier temps, la rencontre entre les deux héros et le fantôme, la découverte de la situation ; dans un deuxième temps, l'arrivée des prétendants et la menace qui pèse sur l'héritier légitime ; puis dans un troisième et dernier temps, le retournement de situation avec l'alliance entre les deux héros et le descendant et leur bataille contre leurs adversaires. 
La limpidité de cette construction associée à la densité du récit assurent une lecture riche et divertissante, aux climats variés, aux coups de théâtre fréquents, avec de vrais morceaux de bravoure. Les personnages sont tous bien campés, et on peut même s'amuser du fait que l'histoire commence de manière similaire au tome 5 (Le Serment des Vikings, critique 507) - avec Johan et Pirlouit fuyant le mauvais temps et impliqués dans une intrigue à cause de cela - mais infiniment mieux développée. Même la figure du fantôme de Sire Aldebert est finement écrite, Peyo ne l'employant pas dans le but de susciter l'épouvante (ou alors de manière détournée, ironique) mais plutôt de la compassion pour ce pauvre damné.

Les dessins proposent sans doute ce que Peyo a accompli de plus impressionnant dans la série, notamment dans le dernier tiers de l'album : la séquence où Jean de Baufort, avec Johan et Pirlouit, et ses troupes prennent d'assaut le château et la lutte très disputée que se livrent les deux camps est éblouissante. 
Franquin avait longtemps regretté ne jamais avoir réussi à animer la foule dans Spirou et Fantasio, estimant ne jamais parvenir à un résultat à la fois assez clair, assez vif et assez impressionnant visuellement. Hé bien, ce tour de force, Peyo l'accomplit ici, en particulier pages 32, 41 et 57, avec des plans bluffants, au sein de planches incroyablement denses (toujours plus de dix cases !).
L'artiste réutilise un casting très fourni, avec tous les Baufort/Beaufort, mais aussi les Schtroumpfs, les sorcières Sara et Rachel (il ne manque guère que l'enchanteur Homnibus dans cette galerie magique).

Un album impressionnant, qui ne vole pas son titre de grand classique.

mardi 16 septembre 2014

Critique 507 : JOHAN ET PIRLOUIT, TOME 5 - LE SERMENT DES VIKINGS, de Peyo


JOHAN ET PIRLOUIT : LE SERMENT DES VIKINGS est le 5ème tome de la série, écrit et dessiné par Peyo, publié en 1957 par Dupuis.
*

De retour d'une mission chez le baron de Troumanach, sur la côte, Johan et Pirlouit regagnent le château du bon Roi quand ils sont surpris par la pluie. Ils trouvent heureusement rapidement refuge chez une famille de pêcheurs non loin de la plage. 
Alors que Pirlouit distrait les trois enfants en leur racontant un conte, Johan remarque l'intelligence de l'aîné, Jacques, mais son père déplore de ne pouvoir encore le garder longtemps auprès de lui, en expliquant que le baron l'engagera certainement comme valet d'écurie. L'écuyer propose une alternative : l'emmener avec lui pour qu'il devienne page. Mais Johan se heurte au refus du père.
Le lendemain matin, un viking se présente à la porte de la maison et annonce à Johan qu'il vient chercher Jacques. Le garçon est enlevé sans que l'écuyer et Pirlouit puisse l'empêcher.
C'est alors qu'un second drakkar passe par là et embarque nos deux héros, l'équipage désirant comme eux libérer le garçon qui est au centre d'une lutte pour le trône du Snoeland...

Cela fait trois ans qu'il est publié dans les pages de Spirou quand Peyo se lance dans cette 5ème aventure de Johan et Pirlouit. Il est devenu une des vedettes de la revue et la série jouit d'une popularité grandissante auprès des lecteurs.

A ces titres, il participe au projet Risque-Tout, un nouveau journal de bande dessinée que lance les éditions Dupuis dès 1955 et dans laquelle il place plusieurs histoires courtes : Le Dragon vert (au n°2), Enguerran le preux (au n°9), Sortilège au Château (au n°22) et L'Auberge du Pendu (au n°25).
 
Mais le format long manque visiblement à Peyo et, dès le n° 920 de Spirou, fin 1955, il commence la publication du Serment des Vikings. La série n'a pas encore atteint des sommets artistiques, mais son auteur a acquis une vraie maîtrise de narrateur et c'est un artiste en constant progrès.
L'argument peut sembler assez banal avec son duo de héros embarqué dans une aventure qui les dépasse, dont ils ignorent les tenants et aboutissants : Johan croit bien faire en s'en mêlant mais entraîne un Pirlouit réticent dans l'affaire, avant de savoir le fin mot de l'histoire.

En examinant attentivement le découpage de cet album de 44 planches, on se rend néanmoins vite compte qu'il s'agit d'un récit très dense : on a droit à une moyenne de 11 à 12 plans par page, et il faut bien ça pour illustrer lisiblement la succession soutenue de rebondissements de cette longue course poursuite à bord de drakkars, à l'assaut d'un château, aux nombreux combats, aux retournements de situations multiples. En outre, le casting des seconds rôles est abondant et les patronymes des vikings, bons et méchants, offrent une note d'exotisme certain (on y croise des Olaf, Thor, Ingjald, Sveinn, Karle, Bodhvar, Mjolnir, Starkadh, Sigurd...).

Peyo fait feu de tout bois : visuellement, cette histoire réserve son lot de pages superbes, aux décors soignés, aux costumes évocateurs. Les scènes les plus spectaculaires, avec les flottes de drakkars, ou les batailles en mer ou dans le château  de Sigurd (dans lequel Johan et Pirlouit s'introduisent au moyen d'une ruse savoureuse), sont merveilleusement composées, sans pourtant requérir de grandes cases mais en utilisant au maximum l'espace de chaque cadre (une leçon que ferait bien d'étudier bon nombres d'artistes actuels...).

Il manque peut-être la pointe de poésie qui transformera les futurs albums en des récits de qualité encore supérieure, mais l'efficacité de l'action et les quelques notes de fantaisie suffisent à assurer une lecture très divertissante. 

dimanche 14 septembre 2014

Critique 506 : SPIROU N° 3987 (10 Septembre 2014)


La couverture de cette semaine met à l'honneur Nelson : pas très excitant... C'est aussi le retour de Détective et Cie. Et, pour les abonnés, la 2ème partie (sur 4) du poster Zombillenium par Arthur de Pins (qui s'annonce gigantesque à la vue des 2 premières pièces).
Epluchons un peu ce sommaire, et causons un peu de ce qui vaut le plus le détour.

J'ai aimé :

- Spirou et Fantasio : Le Groom de Sniper Alley 2. Fantasio trouve un stratagème pour entrer dans l'Aswana et bénéficier de la protection de la force militaire "Gros-Nez". Il faudra bien ça pour commencer leur périple qui est très vite très mouvementé...
Ces nouvelles pages sont jubilatoires, avec un humour pince-sans-rire (l'astuce pour rhabiller Spirou en groom est bien trouvée), de l'action (on est tout de suite dans le vif du sujet). Yoann est également très en forme : comme il le raconte dans l'interview en préambule, il s'est solidement documenté pour les uniformes, les véhicules, les armes, les décors.
On dirait bien que le duo d'auteurs a (enfin) trouvé le bon bout.

- Ernest et Rebecca : La Boîte à blagues 5/7. C'est parti pour l'évasion de Pépé Bestiole, organisée par les "tripotes" et la complicité de la postière Cassiopée. Pour cette échappée nocturne, Rebecca découvre des coins de la campagne où son grand-père a vécu de grands moments...
On approche tout doucement de la fin et déjà, j'ai un pincement au coeur car je fonds devant les aventures de cette gamine avec son grand-père. Guillaume Bianco sait parfaitement doser les moments drôles, loufoques, et les autres, plus émouvants, sans jamais tomber dans la mièvrerie. Les dessins de Dalena et les couleurs de Giumento ajoutent à l'enchantement.

- Mélusine. La chute (au sens propre et figuré) est efficace, comme toujours, mais cette fois, Clarke ose l'émotion avec cette page touchante où sa jolie fée se rappelle son amie disparue.

- Détective et Cie : Retour à la case pétard. Un privé cherche, et retrouve, une jeune femme disparue, retenue prisonnière par le malfaisant Ted Bormist. Reste que l'enquêteur a peut-être un peu enjolivé son récit lorsqu'il explique comment il a sauvé la demoiselle...
Ce récit court de Fardin est très drôle et mouvementée, et son dénouement est sarcastique à souhait. Les dessins de Baron Brumaire m'enthousiasment moins, mais ça ne suffit pas à gâcher le plaisir.

- Rob. James et Boris Mirroir continuent de s'amuser (et nous avec) sur la romance entre leur héros et la conseillère de l'agence pour l'emploi, sous l'oeil goguenard du robot. Ces strips sont efficaces et marrants, d'un humour subtil.

- Imbattable. Pascal Jousselin confronte son super-héros à un savant fou et tricote encore une fois un bijou narratif, au découpage diabolique. Mine de rien, c'est du grand art, très inventif.

- Pinpin Reporter. Mathieu Sapin prépare les repérages de son court métrage au Jardin des Plantes. Du comique de situation très bien vu, mais pas super bien dessiné hélas !

- L'Ateleir Mastodonte. Guillaume Bouzard revient à l'atelier après une longue absence : de quoi provoquer un joyeux quiproquo, que Alfred va amplifier. Absurde et très rigolo. Une valeur sûre de la revue.

- Tash et Trash. Trois cases très marrantes : c'est d'une efficacité redoutable. / Kahl et Pörth. 2 cases, encore plus concis mais aussi bien senti.

- Dad. Nob livre chaque semaine une planche magique : il transforme une situation banale en un gag qui tape dans le mille, le tout superbement dessiné et mis en couleur. Quel régal ! (voir ci-dessous)

En Direct de la Rédak ne propose rien de bien notable (une interview de Bertschy, le créateur de Nelson, le retour la semaine prochaine des Campbell de Munuera).
Les Aventures d'un Journal revient sur la chronique tenue de 2004 à 2008 par Martin Winckler (successeur du Fureteur de Jean Doisy, rebaptisé Dr Je sais tout).

Bon, après, comme toujours, y a des trucs pas folichons pour remplir le programme, et je me rends compte que, depuis que j'achète régulièrement l'hebdomadaire, c'est bien là que la bât blesse : un numéro, c'est 50 pages, dont, dans le meilleur des cas, deux tiers (dans le pire, la moitié) valent le coup et le reste n'est vraiment pas au même niveau (avec des titres repris sans inspiration ou des séries originales pas terribles).
On peut s'interroger sur ce qui pourrait remplacer ces séries moins bonnes, en donnant plus de place au rédactionnel, à de nouveaux auteurs (le principe de la page "Cartes blanches" plus développée, car on y trouve souvent de très bonnes choses), des interviews plus longues et qui ne donneraient pas que la parole à la série d'ouverture (parce que c'est intéressant d'apprendre comment les auteurs écrivent et dessinent).
Mais, bon, je ne râle pas trop parce que j'y trouve quand même mon compte (surtout en étant abonné) et que, jusqu'à présent, depuis fin Juillet que suis fidèle, le bilan a été quand même positif.

mercredi 10 septembre 2014

LUMIERE SUR... DARWYN COOKE

En Novembre, Darwyn Cooke signe de magnifiques "variant covers" 
pour les séries DC Comics.

 Action Comics
 Aquaman
 Batgirl
 Batman & Robin
 Batman
 Catwoman
 Detective Comics
 Flash
 Grayson
 Green Lantern
Green Lantern Corps
 Harley Quinn
 Justice League Dark
 Justice League United
 Justice League
 He-Man & The Masters of the Universe
 Sinestro
Star-Spangled War Stories, featuring GI Zombie
 Supergirl
 Superman/Batman
 Superman/Wonder Woman
 Teen Titans
 Wonder Woman