vendredi 22 septembre 2023

UNCANNY SPIDER-MAN #1, de Si Spurrier et Lee Garbett

 

Encore un n°1 d'une mini-série attaché à Fall of X : Uncanny Spider-Man est sans doute le plus inattendu des tie-in à ce nouveau statu quo. Bien qu'il soit écrit par un scénariste dont je n'apprécie guère le travail sur les mutants, Si Spurrier, j'ai cédé à la curiosité car je suis un grand fan de Diablo et du dessinateur Lee Garbett. Et le résultat est somme toute très plaisant. 



Kurt Wagner/Diablo a quitté Krakoa avant le massacre commis sur l'île par Orchis durant le Hellfire Gala. Il a posé ses valises à New York où il tente de faire le bien sous un costume prêté par Spider-Man, tout en échappant aux Sentinelles Stark. Mais pourquoi ne le remarque-t-elle pas ? 


D'abord, il faut que je vous parle de Kurt Wagner alias Diablo (Nightcrawler en vo). Tous les fans de longue date des X-Men ont leur mutant favori dans l'équipe recréé par Len Wein et Dave Cockrum en 1975. Moi, c'est Diablo, et ce, depuis toujours (même si, comme tout le monde, je trouvais aussi Wolverine tellement cool au début).


Pourquoi j'aime tant Diablo ? Parce que, sans doute, il se distinguait naturellement dans l'équipe : tous avaient l'air normal (quand ils n'utilisaient pas leurs pouvoirs du moins), mais Diablo, lui, c'était différent : avec sa peau bleue, ses oreilles pointues, sa queue dans le bas du dos, sa capacité à se téléporter dans une odeur de soufre accompagnée de l'onomatopée "Bamf !", il ne ressemblait à aucun autre.


Et puis Diablo, c'était vraiment la créature de Dave Cockrum, son double. Il l'avait créé d'abord pour une histoire qu'il racontait à ses enfants, en l'imaginant comme un vrai démon qui suivait une sorte de proto-Punisher appelé the Intruder. Puis il l'a designé et l'a proposé à DC pour intégrer les rangs de la Légion des Super-Héros, mais l'éditeur le jugeant trop effrayant l'écarta.

Du coup, quand Cockrum arriva sur Uncanny X-Men et designa les nouveaux mutants de l'équipe (Tornade, Colossus, Thunderbird/l'Epervier), il plaça Diablo sans difficulté même si Wein ne développa pas tellement ce drôle de personnage. Cockrum expliqua ensuite à Claremont qu'il l'imaginait comme une sorte de croisement entre un démon et Erroll Flynn, d'ailleurs c'était un fan de films de cape et d'épée comme sa créature.

Claremont, par la suite, donna à Diablo une caractérisation plus religieuse, ce qui déplut à Cockrum sans qu'il puisse y faire grand-chose - jusqu'à ce que Marvel lui accorde le droit d'écrire et dessiner une mini-série en 1985 où il put rendre à son héros sa personnalité... Même si ce ne fut qu'un intermède. Claremont, pourtant, aimait Diablo qu'il intégra à Excalibur et Alan Davis le conserva quand il en devint le scénariste et artiste.

Depuis le début de l'âge de Krakoa, pourtant, Diablo a été bien mal traité : si Jonathan Hickman, dans House of X 4 et 6 sut l'utiliser à la fois comme Cockrum puis en fit carrément un membre du conseil de Krakoa, la suite ne fut pas aussi heureuse : l'architecte de la franchise revient à un Kurt Wagner travaillé par la religion et désireux d'inventer un culte krakoan. Puis Si Spurrier s'en empara dans Way of X et Legion of X en soulignant encore plus cet aspect. Au passage, ce personnage dont le design est parfait a été relooké de nombreuses fois de manière désastreuse mais durant l'ère krakoane, ce fut encore pire puisqu'il ne portait plus de costume mais une sorte de manteau sans manche, informe.

Avec tout ça en tête, j'étais très curieux de ce Uncanny Spider-Man qui montrer Diablo déguisé en Spider-Man après avoir quitté Krakoa avant le Hellfire Gala 2023 pour se poser à New York. L'idée avait quelque chose de tellement saugrenue que je me suis que Spurrier en voulait vraiment à mon mutant favori...

Mais ce premier épisode (sur cinq) s'avère entraînant. Certes le pitch est déconcertant et le scénariste se joue du lecteur en mettant en scène Diablo dans un rôle de justicier mais que les Sentinelles échouent à localiser et identifier. C'est particulièrement cocasse quand on sait que Diablo est un des plus anciens et plus connus des membres des X-Men, que son pouvoir se manifeste de manière unique et que son aspect est reconnaissable entre mille. Je suis très curieux de voir comment Spurrier va justifier ça.

Spurrier fait référence de manière rapide aux derniers événements survenus dans Legion of X où Diablo s'est transformé en démon cornu et sauvage, mais cela ne nuit pas à la compréhension car le récit y fait uniquement référence pour expliquer que Diablo embrasse sa nouvelle carrière pour se racheter de cette mauvaise passe. Le côté religieux n'est pas trop appuyé, ce qui est un soulagement.

On a droit à quelques rebondissements habiles et accrocheurs comme ce qu'il est advenu de Mystique (la mère de Diablo, rappelons-le) et avec l'apparition du Vautour, désormais à la solde d'Orchis (pour qui il tente de faire de mutants capturés par l'organisation des chasseurs de mutants), ou encore d'une fameuse mercenaire, ennemie de Spider-Man, recrutée pour débusquer ce wallcrawler téléporteur à la queue fourchue.

Surtout, Marvel a eu la bonne idée de confier le dessin de cette mini à Lee Garbett, un artiste que j'apprécie beaucoup depuis Skyward (et malgré l'échec de son autre creator-owned prometteur, Shadecraft). En vérité, je ne pouvais espérer mieux actuellement pour illustrer une histoire avec Diablo.

Certains dessinent l'elfe bleu comme un démon aux dents pointues, trop inquiétant. Or, pour moi, la version de Cockrum reste la référence : Diablo est un personnage bondissant et sympathique, qui peut effrayer au premier abord (c'est l'effet qu'il faisait à Kitty Pryde quand elle apparut), mais qui est aussi doté d'un vrai charme (il a souvent été très proche de Tornade et a vécu une romance avec Rachel Summers - stupidement effacée depuis qu'on a fait d'elle une lesbienne en couple avec Betsy Braddock, et je dis ça sans homophobie, juste que ça n'a ni queue ni tête en tenant compte de l'histoire de Rachel et de Betsy).

Et c'est précisément ce que réussit à saisir Garbett : Diablo est beau, il est virevoltant, un peu torturé aussi, mais c'est le Diablo de Cockrum, de Davis aussi, qu'on retrouve. Le comble, c'est qu'en définitive, Garbett réussit à faire de Diablo plus Diablo que jamais et même plus Spider-Man que Spider-Man, avec de l'humour, de l'agilité, quelque chose qu'on a du mal à voir actuellement avec le tisseur. On se dit que Uncanny Spider-Man, c'est un mash-up détonant mais convaincant. Même si j'espère qu'à l'issue de Fall of X, on retrouvera Diablo tout court, dans son costume, avec la caractérisation de Cockrum, dans une série où il aura un beau rôle, avec un artiste doué et un scénariste qui ne le maltraite plus.

Bref, c'est totalement improbable, mais c'est réussi.

Variant cover de Lee Garbett.

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