dimanche 10 juin 2018

MAN OF STEEL #2, de Brian Michael Bendis, Evan Shaner, Steve Rude et Jason Fabok


Deuxième épisode sur six pour Man of Steel : cette semaine, Brian Michael Bendis est accompagné par Evan Shaner mais aussi Steve Rude (dont la participation n'était pas prévue, mais sur laquelle je reviendrais plus loin) sans oublier Jason Fabok. Malgré quelques soubresauts donc, ce chapitre donne à voir Superman dans tous ses rôles et prouve que le scénariste a vraiment compris son personnage.


Krypton n'est plus. Deux membres du Conseil Galactique se disputent à ce sujet : Lord Gandelo demande à Appa Ali Apsa, Gardien d'Oa, si Rogol Zaar, qui voulait épurer les kryptoniens, est mêlé à cette tragédie. Mais nul ne le sait et, si c'est le cas, mieux vaut souhaiter que le guerrier ait péri avec ses ennemis - bien que tout le monde en partage la responsabilité.


Sur Terre. La rédaction du "Daily Planet" est en effervescence et la remplaçante de Lois Lane, Robinson Goode, cherche à savoir ce qui s'est passé entre Clark Kent et sa femme. La chroniqueuse mondaine Trish Q. ne lui est d'aucun secours et Kent est absent.
  

L'alter ego du journaliste, Superman, est à Coast City où il affronte Toyman. Il le bat facilement bien que l'inventeur soit enfermé dans un robot géant. Le Green Lantern Hal Jordan vient lui prêter main forte pour embarquer le malfrat.


Mais Jordan en profite surtout pour interroger Superman sur sa situation actuelle - sa vie conjugale, son absence à la dernière réunion de la Justice League... L'homme d'acier rassure son ami et s'éclipse pour aller pleurer sur la Lune.


Aux confins du Systèm Vega. Rogol Zaar interroge une barmaid au sujet de reliques derrière son comptoir : elle lui explique qu'il s'agit de présents laissés là par Superman, le dernier fils de Krypton. A Metropolis, Superman sauve les habitants d'un immeuble en proie aux flammes puis Clark Kent rentre au journal rédiger un article à ce sujet mais Perry White est désespéré car les chaînes toute info évoquent déjà l'accident. Il lui faudrait un scoop, Trish Q. propose un papier sur Lois et Clark - mais celui-ci a de nouveau disparu en voyant sur l'écran de télé l'arrivée de Rogol Zaar...

La première page de cet épisode représente l'image la plus iconique des origines de Superman avec l'explosion de Krypton : Brian Michael Bendis revient aux sources du mythe pour entretenir le doute sur la véritable fin de la planète en enchaînant avec un dialogue inquiet et tendu entre deux membres du Conseil Galactique concernant la possible implication de Rogol Zaar. Mais le scénariste se garde bien de répondre... Pour l'instant.

En vérité, l'intérêt de l'épisode est ailleurs tout en trouvant sa première étape dans cette ouverture : il s'agit de montrer Superman sous toutes les coutures. En remontant à la destruction de son monde, il s'agit donc d'abord de rappeler d'où il vient et ce qu'il est initialement : un survivant.

La suite est une succession de scènes rapides articulées sur ce principe : Superman se bat contre Toyman et prouve sa valeur de héros protecteur du monde en intervenant à Coast City. Puis le Green Lantern Hal Jordan entre en scène et là, Superman devient l'ami d'un autre super-héros (dont les pouvoirs, comme les siens, ont une origine cosmique). Leur bref dialogue fait allusion à la Justice League et renvoie Superman à un autre de ses statuts, celui de membre éminent de cette équipe. Plus tard, après avoir éteint un nouvel incendie (l'autre fil rouge de la mini-série), Superman reprend son déguisement de Clark Kent au sein du "Daily Planet", journaliste réconfortant son rédacteur en chef déprimé par la concurrence des chaînes de télé tout info.

En une vingtaine de pages, Bendis résume toutes les facettes du héros : dernier représentant de son monde, protecteur de la Terre, ami des autres super-héros, membre de la Justice League, journaliste. Cette synthèse est exemplaire et sonne toujours juste, même si le scénariste opte pour un Superman/Clark Kent classique, proche en vérité du héros des dessins animés des studios Fleischer (dans les années 40), le bon samaritain, le boy-scout, mais aussi l'homme pudique qui préfère cacher sa douleur en s'isolant sur la Lune. Il y a une naïveté étonnante dans ce choix, comme si Bendis voulait revenir à la source du personnage, en se moquant des modes, de la modernité - d'une certaine manière, son Superman est comme le Captain America de Waid, un homme hors du temps (d'ailleurs, en civil, Clark Kent est vêtu d'un costume proche de la coupe des 40's, presque anachronique).

Ce sentiment est souligné par le dessin d'Evan Shaner, dont le style rétro mais vif, élégant avant tout, appuie ce décalage : il met en scène un Superman souriant, affûté (moins musclé, sculpté que celui de Reis la semaine dernière), avec son célèbre accroche coeur, comme ressorti du "Silver Age". Ses pages sont superbes et la rencontre avec Hal Jordan concrétise bien les dires de Bendis d'associer le héros à ses confrères occasionnellement.

Mais après treize pages, Shaner passe subitement la main : sa prestation a suscité la colère et la déception de ses détracteurs et de ses fans. Le dessinateur a tenu à s'expliquer sur son blog Tumblr en racontant que, lorsqu'il travaillait à l'épisode en Mars dernier, un problème de santé a frappé sa famille, le stoppant net. Cela devrait inciter les fans intransigeants à davantage de mesure et à considérer que les artistes ne sont pas des machines mais des êtres humains que des imprévus peuvent contrarier.

Jason Fabok signe la double page suivante, en relation avec ce qui a causé la disparition de Lois et Jon Kent... Tout en gardant l'énigme intacte. Bendis joue avec nos nerfs efficacement.

Pour achever l'épisode, Steve Rude a été appelé : on peut trouver pire comme fill-in. Il avait déjà soutenu Shaner sur Future Quest car leurs styles se complètement bien, tous deux partageant des références (Alex Toth, Milton Caniff, Doug Wildey...). Bien entendu, Rude est un dessinateur plus expérimenté et plus virtuose que Shaner : ses neuf planches sont une merveille, avec des compositions extraordinaires, un découpage inventif, un raffinement esthétique imparable. Tout juste sent-on qu'il n'est pas très à l'aise avec l'aspect de Rogol Zaar, mais il contourne le problème en profitant qu'il soit souvent hors-champ ou dans l'ombre.

L'intrigue devrait connaître un tour plus musclé la semaine prochaine, sans se départir d'une grande qualité graphique ; en effet, c'est Ryan Sook qui prend le relais, et Supergirl apparaîtra en guest-star, dans ce qui s'annonce comme la suite directe des pages parues dans Action Comics #1000.   

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