Encore une série télé que j'avais incompréhensiblement abandonnée après une première saison pourtant formidable... Il y a 5 ans ! Je vais donc rattraper mon retard et pour commencer écrire aujourd'hui sur la saison 2 de Killing Eve, diffusée en 2019. Phoebe Waller-Bridge, qui avait adapté les romans de Luke Jennings, a passé les rênes à la talentueuse Emerald Fennel sans que la qualité s'en ressente.
Eve Polastri vient de poignarder Villanelle qui prend la fuite, mal en point. Eve, elle, est rappelée à Londres pour mener une enquête sur un nouveau meurtre attribué aux Douze. Villanelle réussit à regagner la Grande-Bretagne après un passage dans un hôpital parisien.
Eve fait la connaissance de sa nouvelle équipe au sein du MI6 mais, après avoir examiné le dossier du meurtre sur lequel elle doit investiguer, elle a l'assurance que ce n'est pas Villanelle qui l'a commis. Cette dernière a dupé un homme, Julian, pour qu'il l'héberge mais il la séquestre. Après quelques jours, encore convalescente, elle le tue et s'enfuit avec Raymond, son nouveau contact au sein des Douze.
Tandis que Eve et son équipe continuent leurs recherches sur le tueur surnommé le Fantôme, Villanelle reçoit l'ordre de Raymond de commettre un assassinat à la façon de son rival. Elle élimine sa cible mais laisse un indice pour Eve afin de lui signaler qu'elle est de retour. Niko, le mari de Eve, lui reproche de rester obsédée par Villanelle et de négliger leur vie de couple.
L'enquête sur le Fantôme fait apparaître un nombre croissant de victimes dans l'entourage de l'homme d'affaires Aaron Peel. Villanelle demande à Konstantin son aide pour ne plus dépendre de Raymond et des Douze et il lui propose un partenariat. Leur premier contrat les conduit à Amsteram où Villanelle exécute un homme de manière particulièrement sanglante en espérant attirer l'attention de Eve.
Les efforts de Eve et son équipe paient et le Fantôme est appréhendé mais elle refuse de livrer le nom de son commanditaire. Avec l'accord de sa supérieure, Eve lance un contrat sur sa propre tête afin d'approcher Villanelle mais au lieu de l'arrêter elle lui offre de travailler pour elle. Villanelle doit faire parler le Fantôme qui finit par avouer qu'elle exécutait des contrats pour Aaron Peel.
Eve supervise l'opération au cours de laquelle Villanelle doit apprendre ce que va vendre Aaron Peel. Il reçoit divers clients dont il connaît tous les secrets et à qui il offre de tout savoir sur n'importe qui. Peel est également un voyeur psychopathe qui filme Villanelle à son insu et les meurtres qu'il commet pour son propre plaisir.
Lorsqu'elle avertit, au moyen d'un mot codé, Eve, Villanelle comprend que Peel savait tout de l'opération depuis le début. Elle le tue et prend la fuite avec Eve mais Raymond resurgit et s'interpose. Eve est obligée de le tuer pour sauver Villanelle. Les deux femmes ont conscience d'avoir été des pions dans un complot qui les dépasse. Mais quand Eve veut le mettre à jour, Villanelle lui conseille de partir avec elle. Face au refus d'Eve, elle lui tire dessus dans le dos.
J'ai un peu honte, je vous l'avoue, quand je me rends compte du nombre d'excellents séries que j'ai plantées après une saison. Sans doute, pour la plupart, les ai-je laissées tomber pour aller en découvrir d'autres, mais tout de même...
Malgré tout il y a souvent un vrai plaisir à renouer avec des intrigues délaissées. Il s'est passé cinq and depuis la saison 1 de Killing Eve, la série est désormais terminée, mais j'ai replongé sans difficulté dedans, car les personnages et leur histoire sont forts. C'est comme retrouver un vieil ami et reprendre une discussion.
Logiquement, après avoir fait la chronique de Fleabag, j'ai eu envie de revenir à Killing Eve que Phoebe Waller-Bridge avait adapté pour le petit écran d'après les romans de Luke Jennings. Sauf que cette saison 2 n'est plus pilotée par elle : déjà accaparée par d'autres projets, elle a confié le show à Emerald Fennell. Et c'est un choix évident.
Le nom de Emerald Fennell ne vous dit peut-être rien comme ça mais j'avais eu l'occasion de critiquer son film, Promising Young Woman, avec Carey Mulligan - un bijou noir sur une jeune femme qui s'était fixée comme mission de terroriser des hommes voulant profiter de filles vulnérables. Depuis, hélas ! Fennell n'a plus trop fait parler d'elle, sinon pour un projet de film sur Zatanna (la magicienne de DC Comics), dont il ne semble plus être question depuis la refonte du DCU chez Warner par James Gunn et son partenaire Peter Safran.
En tout Fennell accomplit un travail de reprise remarquable sur Killing Eve dont elle a su conserver les qualités tout en développant le matériau originel dans des directions imprévisibles et terriblement accrocheuses. L'action démarre quelques secondes après la fin de la saison 1 où Eve Polastri, la profileuse du MI6 qui traquait la tueuse à gages Villanelle, l'avait trouvée dans un appartement parisien. Allongées sur un lit côte à côte, Villanelle se figeait de surprise en découvrant que Eve lui avait plantée un couteau dans l'abdomen.
La saison 1 insistait sur la relation ambiguë entre Eve et Villanelle : il était évident que la profileuse était fascinée par cette tueuse excentrique qui cherchait à attirer l'attention. De là à imaginer une attirance sexuelle entre elles il n'y avait qu'un pas que la série franchissait sans équivoque mais sans le formuler clairement. Le téléspectateur lui-même s'identifiait à Eve car il existait un mélange d'effroi et de magnétisme suscité par Villanelle : ses actes étaient terrifiants, mais son pouvoir de séduction indéniable.
La confusion reste intacte dans ces huit nouveaux épisodes qui sont clairement découpés en deux actes. Pendant la première moitié de la saison, les chemins des deux héroïnes sont séparées par ce qui s'est passé à Paris et les conséquences du face-à-face final. Eve se voit confier une nouvelle affaire alors qu'elle reste obsédée par Villanelle et alors qu'elle a caché à tout le monde l'avoir poignardée (et peut-être tuée). Toutefois, sa nouvelle enquête va mobiliser toute son attention.
Elle et son équipe sont sur les traces d'une nouvelle tueuse aux méthodes diamétralement opposées à celles de Villanelle : c'est pourquoi elle est surnommée le Fantôme. Elle exécute ses contrats sans laisser d'indices, en éliminant ses cibles de manière quasi-indétectable. Eve dresse on profil (une femme donc, étrangère, agent d'entretien, avec des connaissances médicales) qui s'avère exact mais ne facilite pas son arrestation pour autant. Lorsqu'elle l'appréhendera, Eve aura la confirmation de ses soupçons : le Fantôme se rendra docilement et s'enfermera dans le silence, résistant à toutes les formes d'interrogatoire.
Les frasques de Villanelle lui coûteront cher : blessée, elle finit dans un hôpital dont elle se tire encore convalescente. Elle regagne l'Angleterre enfermée dans le coffre d'une voiture. Cherchant un pied-à-terre et des médicaments, elle ensorcèle un pigeon qui sera finalement plus retors que prévu. Puis s'en remet aux Douze, cette organisation qui l'emploie et l'exfiltre en la confiant aux bons soins de Raymond, décidé à lui serrer la vis. Finalement, elle s'en remet à Konstantin pour la sortir de là et scelle avec lui un partenariat qui va connaître une forme inattendue.
En effet, alors qu'elle cherche à attirer l'attention d'Eve en commettant des crimes spectaculaires, Villanelle est sollicitée pour l'exécuter. Il s'agit en vérité d'un piège car Konstantin, placé sous la protection du MI6, veut revoir sa famille et vend sa tueuse aux services secrets en échange. La situation aboutit donc à une association ahurissante entre Eve et Villanelle, réunies de la manière la plus étrange.
On entre alors dans la seconde partie de la saison. Et on va constater qu'entre le monde des tueurs et celui des espions, il n'y a pas une grande différence. Eve et Villanelle ne sont que des pions sur un échiquier où les commanditaires misent sur le long terme. Ainsi alors qu'elles pensent toutes les deux devoir coincer rapidement un affairiste désireux de vendre des données sensibles et privées, elles vont se voir manipulées pour savoir le contenu exacte de ces données, à qui elles seront vendues. Après quoi elles seront probablement sacrifiées. Mais évidemment tout ne va pas se terminer aussi simplement car Eve et Villanelle ne sont pas des oies blanches disposées à être plumées...
L'intrigue culmine dans les ruines romaines et un différend profond entre les deux alliées de circonstance. Les cartes sont complètement rebattues à l'issue de cette saison 2 conçue en miroir à la première. Cette fois, c'est Eve qui tombe de haut. Même si on sait qu'elle ne meurt pas (puisqu'il reste deux saisons), il n'empêche qu'on se demande ce que nous réserve la suite.
Réalisés au cordeau, les épisodes défilent, sur un rythme implacable. Une tension permanente les traverse, avec une charge érotique intense. On rit aussi beaucoup grâce à des dialogues étincelants et une interprétation admirable. Sandra Oh est épatante dans le rôle de Eve qui, comme la prévient un psychiatre spécialisé dans les tueurs en série, risque de finir à l'asile ou en prison parce qu'elle ne renonce ni à arrêter les assassins ni à penser à Villanelle.
Pourtant, ce n'est pas mésestimer le talent de Oh que de dire que cette saison 2 de Killing Eve est un vrai festival Jodie Comer. La jeune comédienne britannique est extraordinaire de bout en bout. Elle incarne avec une malice incomparable cette tueuse redoutable et farfelue avec une expressivité d'une précision chirurgicale. Fashionista et imprévisible, glaçante et hilarante, Comer envoûte, fascine, et fait de ce show sa scène. Elle cabotine mais avec un tel génie qu'elle réussit à ne pas vampiriser la série. Du grand art.
Je ne sais pas si je vais enchaîner avec la saison 3 tout de suite, même s'il est difficile de résister. Mais en tout cas, une chose est sûre : je n'attendrai pas cinq ans pour écrire à nouveau sur Killing Eve.
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