vendredi 12 octobre 2018

THE WEATHERMAN #5, de Jody Leheup et Nathan Fox


Pénultième chapitre du premier arc, ce cinquième numéro de The Weatherman s'offre à nouveau avec toute son énergie. Jody Leheup aime bousculer son lecteur et Nathan Fox lui emboîte volontiers le pas. Cela créé une sensation très immersive, où on s'identifie aux héros... Jusqu'à être totalement déboussolé ?


Nathan Bright a été capturé par l'homme le plus puissant et dangereux de Mars, the Pearl. Il exhibe son prisonnier dans un show télé retransmis sur toute la planète et met à prix la tête de celui qu'il pense être Ian Black, le terroriste responsable de l'attentat le plus meurtrier de la Terre.


Celui qui remportera cette enchère pourra à loisir torturer mentalement physiquement Bright/Black pour se venger. The Pearl agit de la sorte moins pour l'argent que cela va lui rapporter que parce que lui-même a perdu sa famille dans ces événements - et que cela, comme il l'avoue, lui a fait perdre le sens commun.


Amanda Cross qui a pu suivre l'émission sait qu'elle ne dispose plus de beaucoup de temps pour retrouver et sauver Bright. Elle aussi remplit moins sa mission pour l'intégrité du suspect que parce qu'elle ne veut pas que ses secrets soient récupérés par ses probables anciens commanditaires. Et même Garren, son ami, ne pourra l'empêcher d'agir.


Une fois le studio d'enregistrement de the Pearl localisé, Amanda s'y rend en vaisseau. Mais la mercenaire White Light s'interpose et provoque son crash. Au même moment, les enchères sont sur le point de s'achever, après qu'une proche de victimes de Black ait testé le matériel de torture sur Bright.


La situation est désespérée pour Amanda, à la merci de White Light, et Nathan, vendu au plus offrant. Sauf qu'un renfort inconnu et inattendu intervient dans les studio sans ménagement...

La variant cover de Marcos Martin.

Lire The Weatherman revient à embarquer dans un grand huit. Il faut avoir le coeur bien accroché, l'estomac solide et être concentré pour tout suivre. Et encore cela risque de ne pas être toujours suffisant - comme en témoigne la scène inaugurale de ce cinquième épisode avec l'exécution d'un flic, dont on ignore le lien avec l'histoire générale. La même confusion s'empare de nous à la toute fin quand un homme équipé d'un bras cybernétique, parachuté depuis l'orbite martienne, atterrit dans le studio de tournage de the Pearl et découpe littéralement ce dernier en deux pour sauver Nathan Bright.

Jody Leheup ne sème sûrement pas tout ça pour rien et des explications auront certainement lieu dans un futur proche - pour la conclusion de l'arc, le mois prochain, avant que la série ne s'interrompe pour plusieurs mois (à la manière de Isola). En tout cas, il faut l'espérer.

Cela impacte en tout cas la lecture de façon conséquente : au début, le pitch, simple, mordant et explosif, mettait en scène un présentateur météo accusé d'avoir été un terrible terroriste à la solde d'une organisation avant un lavage de cerveau et une opération de chirurgie esthétique. Le récit jouait sur le doute des autorités et du lecteur par rapport à l'énormité du propos.

Puis cela s'est insensiblement compliqué. Ce n'est pas toujours désagréable car ça force à être plus attentif et l'expérience devient plus immersive dans la mesure où le lecteur est aussi confus que le héros. Mais il faut veiller à ne pas le priver de trop de repères. Un test simple consiste dans ce cas-là à essayer d'identifier chaque mois tous les personnages : si on commence à ne plus savoir exactement qui est qui, il y a un problème de narration.

C'est ce qui est en train de se passer avec The Weatherman où à force de courir plusieurs lièvres à la fois, à densifier une intrigue d'abord très simple, on lit cela plus viscéralement que clairement. Les chemins de croix d'Amanda Cross et Nathan Bright sont toujours aussi bien transmis mais le focus se perd (tout ce qui concerne le fait que Bright est ou non Black - la variant cover de Ryan Sook, ce mois-ci, ci-dessous, semble indiquer que c'est le cas). Attention donc !

Nathan Fox en est au même point que sa scénariste. Son graphisme hyper-tonique rend la lecture très intense, on est lancé à pleine vitesse dans l'oeil du cyclone, on suit plusieurs pistes à la fois. C'est un exercice acrobatique et la plupart du temps magistralement exécuté.

Mais il faut quand même s'accrocher car, même si Fox dispose d'un coloriste très talentueux avec Dave Stewart, son trait très vif rend certains plans limite au niveau de la lisibilité. Il faut quelquefois attendre la case suivante, la planche suivante, pour être bien sûr du résultat de telle action (par exemple quand White Light découpe avec un sabre laser l'aîle du vaisseau d'Amanda et provoque donc son crash).

Il y a quelque chose de grisant chez Fox mais qui semble parfois lui échapper, comme s'il se laissait emporter par son élan. A force de multiplier les angles de vue pour souligner l'exagération démente de chaque moment, il fatigue le lecteur plus qu'il ne le stimule (à titre de comparaison, Olivier Coipel agit identiquement sur The Magic Order, enchaînant des plans tous différents, mais avec un souci bien supérieur pour rester compréhensible).

Le finale du premier arc est annoncé comme renversant. C'est accrocheur. Mais souhaitons aussi qu'il soit un peu plus posé en termes narratifs : The Weatherman est une série trop excitante pour se perdre dans ses excès. 

La variant cover de Ryan Sook.

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