Quel épisode là encore ! Décidément, même si elle a démarré comme un diesel, G.C.P.D. : The Blue Wall valait la peine qu'on s'y accroche car l'histoire écrite par John Ridley et dessinée par Stefano Raffaele est d'une puissance peu commune. Le scénariste a su tirer le profit maximum de la quantité limitée d'épisodes dont il disposait, servi par un dessinateur très inspiré.
Le meurtre de Benny Montoya et Sondra Wright par Danny Ortega choque toutes les forces de police de Gotham qui se mettent à la recherche de l'assassin, mais il sera difficile à appréhender car il connait leurs méthodes. Renee Montoya s'interroge sur son management et Harvey Dent lui propose de se débarrasser du fugitif pour l'aider...
La fin du précédent épisode créait un électrochoc assez intense pour que les deux suivants entraînent la mini-série dans une direction particulièrement dramatique. Avant son dénouement le mois prochain, G.C.P.D. : The Blue Wall bascule dans le thriller pur sans sacrifier sa qualité psychologique.
John Ridley examine les répercussions du geste fou de Danny Ortega, qui vient de tuer Benny Montoya et sa fiancée Sondra Wright en guise de représailles contre les forces de police qui l'ont broyé en faisant preuve d'un racisme honteux. Le jeune homme veut rendre les coups qu'il a reçus et a commencé par s'en prendre à la chef du GCPD.
La déflagration est terrible et John Ridley passe au crible tous ceux qu'elle touche directement, à commencer évidemment par Renee Montoya. Bouleversée, elle se demande si elle n'est pas responsable de la dérive meurtrière d'Ortega, si elle n'a pas raté quelque chose, d'autant qu'elle avait entendu le jeune homme quand il lui avait signalé le comportement répréhensible de ses collègues officiers.
Ensuite il y a les deux amis de Ortega, Park et Wells. Ce dernier a démissionné, dégoûté comme Ortega du système policier en vigueur à Gotham. Il n'arrive pas à croire que son copain Danny ait pu tué deux innocents, il refuse d'y croire, (se) racontant même qu'il s'agit une nouvelle fois d'une erreur judiciaire. Mais Park le rectifie en expliquant que, désormais membre de la brigade scientifique, elle était présente dans l'appartement du père de Danny pour collecter des indices et elle a observé la rage et même la fierté de ce père qui a vu son fils humilié par ses pairs.
Danny continue sa vendetta en exécutant d'autres policiers de son ancien service. Il les abat froidement, déterminé, implacable. Le lecteur regarde cette scène avec effroi et consternation car il sait que si Ortega commet l'irréparable, il a été également poussé à bout. Ridley montre intelligemment l'ambiguïté de la situation après avoir mis en scène un interrogatoire contre un officier responsable de remarques racistes à l'encontre du jeune homme et qui a minimisé ses propos en les faisant passer pour un bizutage
L'épisode se conclut sur une nouvelle rencontre entre Renee Montoya et Harvey Dent/Double-Face qui propose à la commissaire un marché tentant et radical. Sur ce coup, je dois dire que John Ridley m'a complètement retourné car je craignais au début de la mini-série qu'il exploite encore la relation trouble et tordue entre Montoya et Double-Face. Le scénariste a réussi à déjouer mes appréhensions pour écrire des échanges entre ces deux personnages d'une complexité fascinante, loin du jeu malsain de la victime et de son tortionnaire (comme ce fut le cas dans Gotham Central).
Ce qui surprend, et impressionne le plus, c'est la densité de l'épisode : Ridley aborde beaucoup de points en une vingtaine de pages, sans rien négliger, sans aller trop vite. Il tire le maximum de chaque moment, comme quand Danny braque Wells en pleine rue, prêt à le descendre s'il ne l'aide pas, avant de décamper quand il entend la voix de Park au téléphone. Tout va très vite et en même temps le temps semble suspendu de manière suffisamment efficace pour qu'on mesure le vertige qui s'empare des trois personnages dont le parcours dans la police de Gotham a complètement brisé les attentes, les espoirs, les ambitions.
Mais cela ne serait pas aussi abouti sans un bon dessinateur et il est certain que Stefano Raffaele contribue grandement à la qualité de l'ensemble. Bien qu'on sente encore chez ce jeune artiste italien des progrès à faire, sa façon de découper graphiquement le script, en privilégiant les gros plans sur les visages sert parfaitemetn le propos et l'ambiance étouffants.
Il faudrait évidemment savoir si le scénario mentionne exactement la valeur des plans pour déterminer si Ridley guide fermement la main de Raffaele, mais même sans disposer de ces infos, ce dernier saisit parfaitement les émotions qui traversent les protagonistes. La colorisation sombre de Brad Anderson, que je trouvais un peu terne au début de la mini-série, est progressivement devenue un atout supplémentaire pour le projet alors que le récit plongeait plus profond dans les tourments de ces trois jeunes flics.
La conclusion le mois prochain risque fort d'être très noire et désespérée, mais logique. John Ridley a signé d'ores et déjà un polar très noir, accablant, au réalisme brut, débarrassée de tout super-héroïsme, pour sonder les âmes de trois innocents abîmés. Avec Stefano Raffaele, il a signé une oeuvre forte qui n'attend qu'un dénouement à la hauteur. Peu de risque d'être déçu.
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