Après la déception que fut la relance de Justice League par Scott Snyder (même si je n'exclue pas d'y revenir au prochain arc, qui sera illustré par Francis Manapul), j'attendais avec excitation et appréhension la reprise d'une série dont j'avais adoré la version "New 52" : Justice League Dark. James Tynion IV en parle comme du projet dont il rêvait tout en sachant que c'est une déclinaison directe de la mini-série Justice League : No Justice. Il est bien accompagné par son partenaire de Detective Comics, le dessinateur Alvaro Martinez. Mais le titre sort juste après The Magic Order (Millar/Coipel). Verdict ?
Lors d'une représentation publique dans le théâtre de feu son père, Giovanni Zatara, Zatanna est dépassée par une soudaine apparition magique qui lui renvoie ses sorts. Wonder Woman surgit et l'aide à juguler cette menace. Puis elle lui propose de se joindre à la Justice League Dark qu'elle tente de monter mais Zatanna refuse.
La magicienne souhaite en effet ne pas ébruiter l'affaire et se rend au manoir Wintersgate où la fine fleur des sorciers est invitée par Jason Blood/Etrigan le démon pour trouver une solution au désordre qui règne dans leur monde. Avant d'assister à la réunion, Zatanna s'entretient avec John Constantine qui ne croit pas à l'efficacité de cette congrégation. Puis elle découvre, à l'intérieur, que Swamp Thing les espionne.
Wonder Woman, elle, se lamente au bar Oblivion dans une dimension parallèle, tenu désormais, depuis la mort de Nightmaster, par le détective Chimp. Gardien de la magie, le singe doué de parole offre son expertise à l'amazone dans l'affaire qui la préoccupe et pour laquelle elle essaie en vain de bâtir une équipe.
Dans une aile du Hall de Justice, Wonder Woman et Chimp trouvent Kirk Langstrom/Man-Bat qui a examiné les cadavres de magiciens trouvés par Diana. Possédés par une force inconnue, les corps reprennent vie et s'en prennent au trio.
Pendant ce temps, à Salem, devant l'Arbre des Merveilles, Zatanna retrouve Swamp Thing qui tente de communiquer avec ce gigantesque végétal venu de la planète Colu. Et, surprise, celui-ci veut parler à la magicienne : son père, Zatara, lui apparaît pour la mettre en garde contre le retour imminent des maîtres de la magie et la destruction consécutive de l'humanité. Zatanna et Swamp Thing rejoignent Wonder Woman, Chimp et man-Bat au Hall de Justice pour les prévenir tout en précisant que l'un d'entre eux sera la cause de la perte de la Terre !
La variant cover de Greg Capullo.
Lorsque, dans la précédente ère de DC Comics, Peter Milligan puis Jeff Lemire (avec Ray Fawkes ensuite - on passera sur les épisodes de J.M. DeMatteis, franchement épouvantables) lancèrent Justice League Dark, ce groupe de héros était conçu pour intervenir sur des menaces occultes contre lesquelles la Justice League était impuissante. La formation connut des compositions changeantes et des aventures épiques - un projet de film (apparemment enterré) fut même en développement (par Guillermo del Toro).
Durant la mini-série Justice League : No Justice, Scott Snyder, Joshua Williamson et James Tynion IV assemblèrent une équipe en relation avec la magie où figuraient déjà Wonder Woman et Zatanna aux côtés d'Etrigan le démon, Raven et Dr. Fate. A la fin de l'histoire, l'Arbre des Merveilles de la planète Colu resurgissait sur Terre, à Salem, annonçant de futurs bouleversements dans le monde des arts occultes.
Cette nouvelle version de la JLD découle directement de ces événements et conserve Wonder Woman à sa tête. Tynion IV la met en scène essayant de former une équipe capable d'enquêter sur des meurtres de magiciens qu'elle croit en rapport avec l'Arbre des Merveilles. Mais l'amazone fait chou blanc à cause de la communauté des sorciers qui préfère résoudre cette affaire discrètement (malgré des tensions dans leurs rangs - John Constantine ne croit pas à ce collège, et ceux qui ont répondu à l'appel de Jason Blood ont des intérêts et des méthodes divergents).
Zatanna est au coeur du dispositif narratif de la série (comment écrire une série pareille sans sa plus séduisante héroïne ?), sollicitée par Wonder Woman, mise en garde par Constantine, curieuse du congrès de ses pairs. James Tynion IV, qui avait déjà utilisé la magicienne le temps d'un arc de Detective Comics (s'appuyant sur le rapport de séduction ambigu entre elle et Batman), s'inspire aussi de Mystik U dans laquelle elle était également au centre d'une intrigue où elle et d'autres étaient susceptibles de détruire le monde.
On est donc dans un autre registre que The Magic Order de Millar et Coipel, mais aussi de la précédente JLD des "New 52". Le groupe construit, à l'arrache, porte en lui son improbabilité puisque le détective Chimp, Swamp Thing et Man-Bat sont des seconds, voire troisièmes couteaux, et à l'instar deWonder Woman, on ne penserait pas spontanément à eux pour affronter pareil péril. Le fait qu'ils ne soit que cinq souligne aussi leur marginalité et leur manque de puissance (même si certains sont tout de même redoutables). On ne sait en tout pas si la réussite les couronnera, ni si Tynion IV procédera comme dans Detective Comics à des corrections progressives dans la composition de la bande (le prochain épisode aura comme guest le Dr. Fate).
Si ce n°1 est aussi réussi, il le doit beaucoup au dessin d'Alvaro Martinez qui va pouvoir travailler mensuellement et s'imposer certainement comme une star. Son travail est somptueux, magnifié par l'encrage de son compatriote Raul Fernandez et les couleurs superbes de Brad Anderson.
L'espagnol est visiblement heureux de représenter ses héroïnes, splendides sans être hyper-sexualisées (avec un nouveau design pour Zatanna, très élégant et pratique), et ses freaks, dont Swamp Thing auquel il a donné un visage évoquant celui de... Alan Moore ! (J'ignore si le scénariste appréciera, mais c'est plus un hommage qu'une pique.) Les décors sont étonnamment fournis et le découpage repose sur des compositions d'ensemble englobant toute la planche, vraiment impressionnantes, avec des effets de fondus enchaînés.
On tient donc là une série parmi les plus belles actuellement sur le marché des comics et qui démarre sur les chapeaux de roues. Le "dream project" de James Tynion IV pourrait bien devenir celui des fans de DC et de ses héros magiques.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire