De manière assez malicieuse, Marguerite Bennett a choisi de conclure son run sur Batwoman par un arc narratif en deux parties sur le thème du temps. Le mois prochain, cette excellente série s'arrêtera (avant d'être un jour relancée ? En tout cas, une série télé avec l'héroïne est en pré-production chez Warner) mais ni sa scénariste ni son dessinateur, Fernando Blanco, ne se sont résolus à bâcler leur sortie.
Six mois se sont écoulés depuis que Batman a répudié Batwoman, l'avertissant au passage qu'à la prochaine erreur de sa part il l'empêcherait de porter son pseudo et le signe de la chauve-souris. Kate Kane s'est installée à Gotham où elle partage un appartement avec sa soeur Beth, qui suit avec succès un traitement contre sa schizophrénie, et Julia Pennyworth. Sur son temps libre, elle combat le crime en ville.
C'est ainsi qu'elle vient en aide à son amie, l'inspectrice de police Renee Montoya, attaquée par un automate dans le commissariat central. Une fois le robot neutralisé, Renee explique à Batwoman qu'elle enquête justement en ce moment sur des engins identiques qui dealent une nouvelle drogue : le Kairos.
Ceux qui la consomment ont un bref aperçu de leur futur et peuvent ainsi planifier crimes et délits sans risquer d'être pris. Mais comment savoir qui est derrière ce trafic et ces robots ? Batwoman va aider à le découvrir en utilisant la technologie mise à disposition des alliés de Batman.
Elle se rend dans la "chambre froide" équipée d'un super ordinateur pour localiser la provenance d'un rouage de l'automate. En attendant le résultat de l'examen, Kate se souvient de sa dernière entrevue avec Safiyah Soheil à la prison de Gotham où elle lui avait offert un moyen de s'échapper mais avait refusé de la suivre en cavale.
Kate et Renee, avec le support de Julia Pennyworth, s'invitent à la Crystal Tower où a lieu une réception en l'honneur des clients du dealer de Kairos : le Roi des Horloges (Clock King). Mais ce dernier sait qu'elles sont là et les invités, tous des automates, reçoivent pour consigne de les tuer !
Le jeu auquel nous convie Marguerite Bennett est amusant : comment terminer une série en deux épisodes ? En racontant une histoire sur un vilain qui procure un moyen de lire l'avenir ! Cette mise en abyme est savoureuse puisque c'est comme si l'auteur nous glissait à l'oreille qu'elle avait prévu depuis longtemps le terme de son aventure, comme si, avec un brin de fatalisme, Batwoman était condamnée à être annulée...
L'espèce de poisse qui s'accroche au personnage a de quoi interroger en effet : malgré des équipes créatives talentueuses, et une volonté éditoriale de DC de soutenir l'héroïne depuis ses débuts dans la saga hebdomadaire 52, c'est comme si les fans n'étaient jamais assez nombreux pour permettre à Batwoman de s'imposer sur la durée. Il est certes difficile de vivre dans l'ombre de Batman, mais Batgirl, Nightwing y parviennent bien, alors pourquoi pas Batwoman ?
Il est pourtant évident que l'éditeur et la scénariste avaient de grands projets pour Kate Kane avec le statu quo "Rebirth" puisqu'elle apparaissait dans Detective Comics et que, à la fin du premier arc de sa série, on découvrait son futur à la tête de la Colonie fondée par son père.
En attendant, ce dix-septième épisode ne démérite pas par rapport à ceux qui l'ont précédé : Marguerite Bennett ne perd pas de temps pour résumer les six mois qui se sont écoulés depuis le n°16 ni pour introduire une nouvelle menace. Elle le fait d'ailleurs via Renee Montoya, reformant son couple avec Kate Kane (même si cela reste uniquement professionnel, car un flash-back nous rappelle que le souvenir de Safiyah reste vivace), et on peut penser que si Batwoman avait continué, la possibilité que la détective du GCPD redevienne la justicière The Question aurait été abordée. Le cliffhanger est accrocheur, plaçant les deux amies dans une situation périlleuse.
Le dessin de Fernando Blanco est toujours aussi séduisant et attractif : lui aussi sait comment mettre en images sur une page plusieurs mois passés, de manière inventive et élégante. Puis, comme l'histoire le lui permet, il alterne avec un égal talent scènes d'action (la bagarre dans le commissariat) et dialoguées (le repas avec Beth et Julia) ou descriptives (l'attente dans la "chambre froide").
Le découpage offre des enchaînements à la fois vifs et fluides, et Blanco soigne les décors, les costumes : cet artiste vous en donne pour votre argent sans chercher à épater la galerie, tout ça en assurant dessin et encrage, laissant à John Rauch la tâche d'une colorisation qui sait mettre en valeur ses planches.
Suite et fin, donc, le mois prochain.
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