Ce quatrième tome de Uncanny X-Men est l'antépénultième du run de Brian Michael Bendis et le scénariste entame son arc narratif le plus abouti jusqu'à présent. Exploitant un subplot pratiquement développé depuis le début de la série, il pousse les curseurs à fond et il est bien aidé par Chris Bachalo qui signe les épisodes 19 à 22 et 25 tandis que Kris Anka s'occupe des numéros 23 et 24.
Maria Hilla interroge Hijack chez lui après qu'il a été banni de l'équipe de Cyclope mais il jure ne pas pouvoir localiser la base de l'équipe. Pendant ce temps, Dazzler est toujours captive de Mystique à Madripoor qui se sert d'elle pour approvisionner le marché avec de l'horme de croissance mutante. Magneto découvre ce sinistre manège et délivre Dazzler. Cependant, Cyclope embarque toute son équipe à Chicago où Cerebro a détecté un nouveau mutant. Mais ce sont des sentinelles qui les attendent et comble de malchance, leurs pouvoirs se détraquent.
Les Uncanny X-Men réussissent à s'enfuir grâce à Magik mais Cyclope a désormais la conviction que ces Sentinelles ont été conçues par quelqu'un connaissant leurs faiblesses. Grâce aux Stepford Cuckoos, il entre en contact avec Maria Hill qu'il suspecte mais qui lui jure n'y être pour rien. Cyclope décide alors d'interroger son second suspect : le Fauve à l'école Jean Grey.
Mais une fois sur place, Cyclope et Magik voient leurs pouvoirs à nouveau échapper à leur contrôle. Tornade les neutralise juste avant que Maria Hill et Dazzler (dont l'apparence est toujours usurpée par Mystique) n'arrivent pour les arrêter. C'est alors que l'héliporteur du SHIELD ouvre le feu sur l'école Jean Grey, provoquant un mouvement de panique. Cependant, Magneto arrive au QG des Uncanny X-Men avec Dazzler qu'il confie aux bons soins de Triage.
Hijack arrive à l'école Jean Grey et pirate les commandes de l'héliporteur mais c'est alors que des Sentinelles surgissent. Pendant ce temps, le Fauve a transporté Magik et Cyclope dans son laboratoire pour les examiner et il découvre alors que leur organisme est infesté de nanites à l'origine des perturbations de leurs pouvoirs. Magik revient à elle puis Cyclope et le Fauve les mène jusqu'à leur ennemi : le Fauve noir qui agonise à cause des expériences qu'il s'est infligé. Les Sentinelles sont détruites par les X-Men de l'école.
Dazzler se rétablit et avec l'aide de Emma Frost et Magneto traque Mystique à Madripoor, sans succès. Elle a annoncé à Maria Hill qu'elle quittait le SHIELD. L'école Jean Grey a souffert d'importants dégâts suite aux attaques de l'héliporteur du SHIELD et des Sentinelles du Fauve Noir. C'est ce moment que choisit She-Hulk pour prévenir qu'elle détient le testament de Charles Xavier dont la lecture ne pourra se faire qu'en présence de...
... Cyclope !Celui-ci refuse d'abord de suivre le Fauve, Tornade et Iceberg, ne voulant pas être mêlé à ça, mais il s'y résout finalement sur les conseils de Emma qui l'accompagnent avec Magik et Dazzler. She-Hulk révèle que Charles Xavier avait épousé Mystique. Tout le monde est sidéré. Mais ce n'est pas tout : le Professeur X a également dans le passé détecté un mutant surpuissant, Matthew Malloy, dont il a bloqué psychiquement les pouvoirs afin de protéger l'humanité. Maintenant qu'il est mort, la menace resurgit.
Effectivement, Matthew Malloy perd sa femme dans une attaque menée par des skrulls et perd la tête. Ses pouvoirs de débloquent et provoquent des catastrophes. Le SHIELD est en alerte mais impuissant à le raisonner ou le stopper : Maria Hill n'a d'autre choix que de faire appel aux X-Men. Tout comme Charles Xavier qui, post-mortem, confie à Rachel Summers, Wolverine et Cyclope la mission de neutraliser à tout prix Matthew Malloy - condition sine qua non pour que la fin de son testament sosit révélée !
Au cours des trois tomes précédents de Uncanny X-Men, Brian Michael Bendis a pu donner l'impression de ne pas savoir où il allait, avançant sans que le lecteur ne perçoive clairement l'objectif de la série. Il était question d'une révolution mutante menée par Cyclope, mais quels en étaient les termes ?
Ensuite, il y avait la formation d'une école concurrente à celle de Wolverine dans la base désaffectée de l'Arme X et de l'entraînement de ses recrues qui présentaient toutes des pouvoirs très variés, exigeant de réfléchir à leur efficacité sur le terrain de combat.
Enfin, il y avait deux menaces sous-jacentes : d'une part, le fait que Mystique ait usurpé l'identité de Dazzler au sein du SHIELD, et d'autre part, les traquenards récurrents dans lesquels tombaient les Uncanny X-Men face à des Sentinelles de plus en plus coriaces.
Et puis, avec ce quatrième tome, tout prend forme, enfin le lecteur obtient des réponses et il a même droit à des épisodes tie-in à l'event Original Sin (écrit par Jason Aaron et dessiné par Mike Deodato Jr.) qui sont magistralement exploités par Bendis. La patience du fan est vraiment récompensée avec ces sept chapitres.
D'abord, Bendis met fin au calvaire de Dazzler, libéré par Magneto. L'épreuve subie par Alison Blaire va durablement l'impacter et cela se traduit en premier lieu par un changement de look radical. Esthétiquement, c'est plus douteux, mais disons que si la ficelle est grosse, elle fonctionne quand même.
Ensuite, le scénariste va orchestrer la résolution du mystère entourant les Sentinelles. Cyclope suspecte d'abord le SHIELD et Maria Hill puis le Fauve. Mais l'identité du véritable ennemi est plus étonnante et ironique. Pour Bendis, qui, à travers ses deux séries mutantes, a exploré la question du double, convoquer le Fauve Noir importé de l'univers de l'Âge d'Apocalypse est somme toute bien trouvé. C'est surtout l'occasion pour Hijack, banni de l'équipe de Cyclope à la fin du tome précédent, de se racheter et de prouver sa valeur dans une séquence très spectaculaire.
Bien sûr, on peut trouver un peu facile la façon dont Maria Hill laisse finalement tomber les poursuites contre Cyclope et ses complices, mais, hé, c'est Bendis et il n'a brillé par la finesse de ses dénouements. D'une certaine manière, semble-t-il nous dire, le SHIELD ne vaut pas mieux que Cyclope et continuer la traque du second par le premier aurait forcément conduit à une impasse narrative, contrariant forcément ce qu'il avait en tête pour la fin de Uncanny X-Men.
Non, ce que voulait surtout Bendis, c'est préparer la suite, avec Mystique qui, profitant du chaos, s'est fait la belle, et devient le nouveau souci de Maria Hill et la cible de Dazzler. Et puis, plus immédiatement, et c'est finalement, le coeur de cet album et du suivant, les dernières volontés et le testament de Charles Xavier.
Original Sin était une histoire écrite par Jason Aaron pour devenir l'event Marvel de 2014, et l'éditeur, comme d'habitude, a forcé nombre d'auteurs à coller à cette intrigue pour justifier la révélation de secrets honteux chez la plupart des héros. Le plus souvent, ce procédé a abouti à des exhumations plus ou moins compromettantes, parfois maladroites (par exemple dans Daredevil de Waid et Samnee où nous a racontés que Joe Murdock avait été un mari violent).
Mais Bendis, lui, a creusé le thème frontalement et s'en est servi pour sortir quelque chose de vraiment parfait. Si bien qu'on en oublie que les épisodes sont des tie-in tellement ils sont bien intégrés à la série en cours. Ce que Xavier, grand cachottier et manipulateur devant l'éternel, a réservé à ses élèves est diabolique et ouvre la porte à des réactions épidermiques et un nouvel arc cathartique (qui sera développé dans le tome 5).
Chris Bachalo enchaîne ici quatre épisodes de rang et de haute volée avant de conclure le tome par un 25ème numéro extraordinaire. L'artiste a eu besoin de pas moins de 8 (!) encreurs et a laissé à José Villarubia le soin de coloriser l'épisode 22, mais franchement, ça en vaut la peine. Le niveau de ses planches est fabuleux, d'une énergie époustouflante.
On ne peut toujours pas en dire autant de Kris Anka dont je me demande pourquoi Marvel lui a confié la tâche de signer les épisodes quand Bachalo avait besoin de souffler. N'y avait-il vraiment que lui de disponible ? J'en doute. L'éditeur a-t-il voulu le tester sur un titre exposé pour voir s'il avait le niveau ? Dans ce cas, c'est raté. Et là, même José Villarubia ne peut rien faire pour améliorer ses pages. Dommage.
Quoi qu'il en soit, Uncanny X-Men vs. The SHIELD (en vo) est certainement le meilleur tome de la série à ce stade. A ce stade, car le suivant franchit un cap encore plus élevé... Mais ça, ce sera pour une prochaine critique.
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