Je vais enchaîner les critiques des tomes 7 et 8 de All-New X-Man car la fun du run de Brian Michael Bendis se trouve dans les pages de Uncanny X-Men. Commençons donc par le septième album de All-New X-Men au titre accrocheur mais un peu exagéré : L'Aventure Ultime, autrement dit en anglais The Ultimate Adventure. Vous avez deviné que Bendis, en compagnie de Mahmud Asrar, a décidé d'organiser une rencontre en ses héros et ceux de l'univers Ultimate qui vivait ses dernières heures alors.
Les jeunes X-Men (Marvel Girl, le Fauve, Iceberg, Angel et X-23) partent pour Austin où a été détecté un mutant. Il s'agit de Carmen Cruise, une lycéenne qui est capable d'ouvrir des portails inter-dimensionnels mais qui ne maîtrise pas son pouvoir. Affolée, elle expédie les jeunes X-Men ailleurs, dans l'univers Ultimate, sur la Terre 1610...
Séparée de ses amis, Jean Grey est découverte par Spider-Man (Miles Morales) qui accepte de lui ouvrir son esprit. Elle comprend alors qu'elle a changé de Terre et lui qu'elle connaît Peter Parker (qu'il a déjà croisé à deux reprises). Iceberg, lui, fait face à l'Homme-Taupe et ses moloïdes, Angel atterrit en Terre Sauvage où il fait la connaissance de Jimmy Hudson/Wolverine, X-23 surgit dans un stade de foot où elle est prise à parti par la foule. Quant au Fauve, il est capturé par le Dr. Fatalis en Latvérie.
Iceberg réussit à échapper à l'Homme-Taupe mais se fait ensuite arrêter par la police. X-23 trouve refuge dans une base désaffectée de l'Arme X où se trouvent également Jimmy Hudson et Angel. Drogué, le Fauve raconte tout ce qu'il sait à Fatalis. Et Jean Grey est conduite par Miles Morales à Westchester à l'école Charles Xavier où ils sont accueillis froidement par les Ultimate X-Men.
Une fois qu'ils leur ont expliqué la situation, Jean a accès à Cerebro pour localiser ses amis. Iceberg réussit à échapper aux policiers qui l'ont appréhendé. A la base de l'Arme X, Jimmy Hudson raconte à X-23 et Angel l'histoire tragique des mutants sur cette Terre.
Fatalis vaincu, les mutants retrouvent la Carmen Cruise de cet univers et lui apprennent à se servir de son pouvoir pour rentrer sur la Terre 616. Une fois revenus à l'école Jean Grey, Carmen y est admise tandis que Jean réfléchit au moyen de rendre leur monde meilleur que la Terre 1610 dans le futur.
Quand débute la parution de ce pénultième arc de All-New X-Men, Marvel a sans doute déjà décidé du sort de l'univers Ultimate et donc Brian Michael Bendis sait qu'il est condamné. Il obtiendra que Miles Morales en soit un des rescapés au terme de l'event Secret Wars écrit par Jonathan Hickman en 2015, mais avant cela, il profite du temps qu'il reste pour organiser la rencontre entre ses héros.
Bendis a toujours eu plusieurs plats sur le feu, c'est un scénariste alors très productif, qui a largement contribué à alimenter les franchises que Marvel lui a confié depuis le début des années 2000, aussi bien dans l'univers classique que dans l'univers Ultimate qu'il a d'ailleurs bâti avec Mark Millar.
Cette productivité en fera un auteur clivant car ses détracteurs lui reprocheront d'être partout, sur trop de titres. C'est évidemment moins simple mais pas totalement faux : Bendis a quasiment monopolisé les Avengers en multipliant les titres et son éditeur a développé la marque en s'appuyant sur le succès des personnages sur grand écran. Rarement Bendis s'est contenté d'écrire une seule série à la fois et Marvel l'a compris en s'appuyant sur son imagination fertile, son fort rendement et l'accueil favorable des lecteurs.
Car, c'est bien là la singularité de Bendis : sans faire l'unanimité, il a quand même été un scénariste au succès insolent sur de nombreuses années et sur plusieurs titres très différents. Si on veut être franc, c'est plutôt les fans les plus bruyants sur els réseaux sociaux, les forums, qui n'aimaient pas Bendis, car dans les faits et les chiffres, sa fan base répondait souvent présent, garantissant à Marvel de bons tirages de ses séries.
Donc, la rencontre entre All-New X-Men et l'univers Ultimate était couru d'avance. Elle accouche d'une histoire sympathique mais paresseuse. Comme si Bendis n'avait pas trouvé l'idée forte qui aurait justifié ce crossover. Comme à son habitude, il place Jean Grey au centre de tout, alors qu'en vérité le Fauve tient un rôle déterminant aussi. Il convoque Miles Morales, qu'il a co-créé avec Sara Pichelli, mais aussi les Ultimate X-Men (qui restaient), mais pas les Ultimates (ils n'auraient servi à rien et pour une fois, le scénariste a su résister à la tentation de surpeupler une intrigue).
Après, il faut bien reconnaitre que le prétexte à la visite des All-New X-Men sur la Terre 1610 est vraiment très faible et grossier. Cette mutante qui créé des portails entre les dimensions est vraiment un gadget bien pratique et elle ne sert qu'à ça. A la fin de cette aventure ultime, elle sera admise à l'école Jean Grey mais en vérité elle finira aux oubliettes puisqu'on ne l'a plus jamais revue. Les rebondissements sont eux aussi accessoires comme le fait de séparer les All-New X-Men (qui n'est qu'une manière très voyante de justifier que cet arc compte autant d'episodes) ou de faire tomber ce pauvre Fauve directement dans les pattes de Fatalis (vraiment pas de pot).
La série doit aussi composer avec le départ de Stuart Immonen et on imagine alors l'editor de la série s'arracher les cheveux pour trouver un remplaçant aussi solide, capable de tenir les délais et de produire des planches d'un niveau similaire. Jusqu'à se rappeler que quelque temps auparavant Mahmud Asrar avait dépanné avec conviction.
Asrar, paradoxalement, n'a pas encore atteint sa maturité stylistique mais ses planches ont une fraîcheur, une spontanéité, une énergie qu'elles me semblent avoir perdu depuis. Son trait est plus brut, plus anguleux, mais son découpage a un dynamisme assez irrésistible. On sent qu'il a la niaque, envie d'épater Marvel, de prouver qu'il peut assurer sur une grosse série écrite par une star maison. Et ça fonctionne.
C'est certes un cran en dessous de Immonen (mais qui ne le serait pas ?), toutefois c'est une solution de remplacement très valable, sans doute la meilleure compte tenu des circonstances (et compte tenu des exigences du poste : déjà à cette époque, il n'y avait pas des tas de dessinateurs capables d'animer un team book en n'étant pas à la bourre et en étant de bonne qualité).
Sympa, mais un peu trop facile. Ce que confirmera le tome suivant, le dernier du run de Bendis sur le titre, à bout de souffle.
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