Tales of The Human Target est une parution curieuse, produite en vérité pour faire patienter les fans de la mini-série The Human Target de Tom King et Greg Smallwood - dont le n°7 paraît à la fin du mois prochain après six mois d'interruption. Mais le scénariste a fait preuve d'ingéniosité pour ce one-shot, où il est sacrément bien accompagné sur le plan graphique.
Don Salinger est un écrivain à succès mais dont la tête est mise à prix à cause de ses révélations sur Ra's Al Ghul. Booster Gold se met en tête de devenir son garde du corps...
Sander est un photographe de mode qui est abattu durant un shooting avec Beatriz da Costa/Fire. Elle refuse de le laisser seul jusqu'à son enterrment... Quel est le point commun entre ces trois personnes qui ne se connaissent pas ?
Revenons un instant sur la curiosité d'une telle parution. Voix cinq mois que la mini-série The Human Target écrite par Tom King et dessinée par Greg Smallwood a suspendu sa publication pour laisser à l'artiste le temps de compléter les six derniers chapitres de l'histoire. Le n°7 sortira fin Septembre.
Pour faire patienter les fans, DC annonce qu'un one-shot, dont l'action se situe avant l'intrigue de la mini-série, sortira entretemps. Résultat : ce gros épisode est disponible depuis hier, un mois avant la sortie du prochain numéro de The Human Target. Pour patienter, c'est un peu tard.
Dans ces conditions, il fallait vraiment que le contenu de ce hors-série, ce numéro spécial soit de qualité, et pas seulement un bouche-trou tardif. Mais comme Tom King semble particulièrement inspiré par The Human Target, il ne déçoit pas et même il enthousiasme.
Effectivement, le résultat est très efficace, divertissant, et ludique. Contrairement à ce que mon résumé peut faire croire, il ne s'agit pas de trois nouvelles qui se succèdent : la narration passe de l'une à l'autre et pour les distinguer, le style des trois dessinateurs suffit.
Nous avons donc affaire à un antépisode, un prequel à The Human Target, et même si on peut certainement s'en passer, il me paraît judicieux de lire Tales of the Human Target car l'ensemble éclaire sur les relations qu'entretient Christopher Chance avec trois des membres de la Justice League International, suspectés ensuite de l'avoir empoisonné en ayant visé Lex Luthor.
Il faut également prévenir d'emblée que Greg Smallwood se "contente" de réaliser la couverture (sublime) et trois pages intérieures (pour illustrer les crédits) plus la toute dernière planche avec Ice. Si vous comptiez vous procurer ce floppy pour les dessins de Smallwood, vous risquez d'être frustré. Mais il reste du très beau monde.
Le principe de ce chapitre est ludique : Tom King soumet trois énigmes au lecteur (les hasards du calendrier des sorties veut que Tales of the Human Target sorte quelques jours après Batman : One Bad Day - The Riddler, un one-shot de King et Mitch Gerads sur le roi des énigmes, Edward Nygma), qu'il faut tenter de résoudre avant la fin. Elles ne sont pas toutes évidentes, mais leurs réponses sont imparables et amusantes.
Guy Gardner s'occupe de retrouver et de ramener à la raison un fils de riches producteurs enlevé par la secte de Brother Blood. Fidèle à lui-même, le Green Lantern ne fait pas dans la dentelle, l'affaire se régle à grand coup de taloches. Mais au final, sans vous révéler quoi que ce soit, ce qu'il découvre justifie son comportement odieux dans The Human Target (même si Gardner est naturellement un âne bâté). King joue particulièrement bien sa partition sur cette partie-là.
C'est Rafael Albuquerque qui dessine les pages de cette histoire, dans son style nerveux et dynamique. C'est totalement raccord avec le personnage de Gardner qui cogne d'abord et réfléchit ensuite, et qui est idéalement représeenté ici, avec sa tronche de butor, ses manières rustres, son plaisir à être violent, et son arrogance absolue (qu'il reproche, bien sûr, à sa cible). Le découpage est très énergique, avec des cases de dimensions généreuses, des enchaînements rapides, mais aussi des compositions un peu expédiées et des décors très irréguliers. Bref, tout ce que on aime et tout ce qu'on peut reprocher à ce dessinateur pressé et très doué.
Booster Gold apprend par la télé qu'un écrivain a sa tête mise à prix à cause de révélations faites sur Ra's Al Ghul. La prime est d'un montant affolant, au point que Skeets, le robot qui assiste Booster pense d'abord que ce dernier va vouloir tuer l'écrivain pour toucher l'argent; Mais si Michael Carter n'est pas une lumière, ce n'est pas un criminel. Il se met donc en tête de protéger Don Salinger, quand bien même celui-ci se montre très réticent devant cette initiative.
Qui d'autre que Kevin Maguire pouvait dessiner ce segment ? Personne. Et Tom King lui a livré une partition impeccable. le génie expressif de Maguire n'est plus à prouver et il transforme le script en une hilarante comédie où ce brave couillon de Booster Gold, pot-de-colle comme pas un, ne quitte jamais des yeux son protégé. On ne peut lui reprocher ni son zèle ni son courage ni sa vista quand on compte le nombre d'agressions, de tentarives de meurtre, d'attentats dont il sauve Salinger. Même si celui-ci a vraiment l'art de s'exposer au danger...
Maguire est génial, c'est un fait, et sa complicité, qui n'allait pas de soi avec le "sérieux" King, donne envie de les voir recollaborer dans le futur.
Enfin, la troisième intrigue met en scène Beatriz da Costa avant qu'elle ne devienne Fire. A cette époque, elle est mannequin en Espagne, après avoir fui la misère du Brésil. Malheureusement, la déveine la poursuit car elle assiste, impuissante, au meurtre du photographe avec lequel elle faisait un shooting. Comme il n'a aucune famille, aucun ami ici, elle l'accompagne partout, tout le temps, depuis l'ambulance jusqu'à l'hôpital puis la morgue et le cimetière. Où l'attend une énorme surprise...
Bien que dans The Human Target, Christopher Chance ne rencontrera Beatriz da Costa que dans le n°7 le mois prochain, cette histoire nous enseigne que els deux personnages se sont déjà croisés auapravant. Il sera donc intéressant d'analyser comment se passeront leurs retrouvailles, compte tenu de ce qu'on apprend dans ce morceau de Tales of the Human Target. Tom King tease le lecteur avec adresse dans des pages où son style volontiers bavard domine.
On retiendra aussi que King renoue avec Mikel Janin, qui dessina la majorité de son run sur Batman. Je me demandais si et quand les deux hommes retravalleraient ensemble et c'est un plaisir de lire leurs pages communes (rappelons qu'avant Batman, King et Janin étaient déjà associés sur Grayson, avec Tim Seeley comme co-scénariste). J'aime beaucoup le trait élégant de Janin et je suis heureux à la perspective de le revoir bientôt (en Novembre prochain) pour la relance tant attendue de Justice Society of America (que Geoff Johns a enfin eu la permission de réécrire).
En filigrane de ces trois récits, il me semble aussi (surtout ?) que King rend un hommage à son prédécesseur sur The Human Target, l'excellent Peter Milligan, auteur d'un extraordinaire run (avec le regretté Edvin Biukovic, puis Javier Pulido et Cliff Chiang - dispo en deux tomes chez Urban Comics). Une manière de boucler la boucle avant de renouer avec l'actuelle mini-série de King et Smallwood.
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