Après un premier épisode qui était un vrai festival, le risque était grand pour Kelly Thompson et Stefano Caselli de faire moins bien. Mais West Coast Avengers va s'imposer comme l'archétype du "feel-good comic", l'emblème du "Fresh Start" de Marvel car les deux auteurs n'ont décidément peur de rien.
Les West Coast Avengers, fraîchement rassemblés par Kate Bishop et Clint Barton, doivent tenter de stopper une Tigra devenue géante et incontrôlable sans la blesser. Leurs manoeuvres échouent jusqu'à ce qu'America Chavez prenne les choses en main et et la frappe assez fort pour la renverser dans la mer. B.R.O.D.O.K. (pour BioRoboticOrganismDesignedOverwhelminglyforKissing) raisonne Tigra et elle s'éloigne.
Mais qui est BRODOK ? Sur le conseil de Clint, Kate l'invite à prendre un verre à leur quartier général où il se met à raconter son histoire tranquillement. Il serait ainsi arrivé à Los Angeles il y a peu pour monter son entreprises, A.I.M. (pour Advance Image Mechanics), et trouver l'amour.
Personne ne croit un traître mot à ce qu'il a dit - sauf Gwenpool. Kate décide donc d'aller visiter l'AIM avec Clint, laissant aux autres la surveillance de BRODOK, à leur grand dam.
La fouille des locaux de l'entreprise ne donne pas grand-chose mais les deux Hawkeye filent rapidement avec quelques dossiers lorsqu'une alarme retentit. Pendant ce temps au Q.G. de l'équipe, Quentin Quire et Gwenpool se disputent au sujet du film qu'ils ont regardé avec leurs partenaires et leur invité... Avant d'échanger un baiser fougueux.
BRODOK s'apprête à prendre congé mais Kate veut garder un oeil sur lui et lui offre de coucher sur place. Ne trouvant pas le sommeil, l'invité déjoue la surveillance de Quentin Quire, assoupi, et trouve les dossiers volés à son entreprise par Kate et Clint. Furieux, il appelle télépathiquement des renforts...
Certes, l'épisode est moins mouvementé que le premier et donc certains seront déçus. Mais il le fallait en quelques sorte, pour ménager les effets à venir (le cliffhanger promet) et poser les enjeux de l'intrigue. La menace représentée par Tigra est ainsi vite évacuée, trop vite pour ne pas éveiller nos soupçons, et révèle la construction même du récit de Kelly Thompson.
La jeune scénariste ne va dès lors cesser de tromper son monde (nous, ses lecteurs) en lui racontant des sornettes énormes, dont personne n'est dupe - sauf Gwenpool (ce qui cadre avec la loufoquerie du personnage et trouvera son aboutissement dans une scène déjà culte) - pour mieux préparer les catastrophes à venir.
Il est fait une large part au mystérieux et grotesque BRODOK, dont l'acronyme est lui-même une plaisanterie savoureuse (même si le "Kissing" résumé par la dernière lettre doit plutôt signifier "Killing", comme le relève Clint avec à-propos). Avec son physique de surfeur sur lequel on a posé une tête démesurée, il créé un léger malaise et un sourire amusé qui désamorce la menace. Pourtant, là encore, en conclusion, on comprend que cet ange blond mal proportionné est un sérieux danger.
Ce décalage entre ce qui est montré, dit, et ce qui est vrai, voilà tout le sel de la narration de Thompson. Le lecteur a un temps d'avance sur les héros car il se doute bien que quelque chose cloche mais les héros se rattrapent vite. Pas assez cependant, et guère aidés par la présence de l'équipe de tournage qui les suit et qui va compliquer sensiblement la situation...
Mais le dispositif offre des moments vraiment très drôles où la scénariste s'en donne à coeur joie, depuis la relation des origines de BRODOK jusqu'au baiser entre Quentin Quire et Gwenpool en passant par le non-vote pour désigner qui va aller visiter l'entreprise AIM et qui va surveiller leur invité. Le ton oscille constamment entre le n'importe quoi immédiatement marrant et quelque chose de plus spirituel, déjà à l'oeuvre dans les précédentes productions de Thompson (en particulier la "screwball comedy").
Pour illustrer cela, il faut un dessinateur qui non seulement est sur la même longueur d'ondes, c'est-à-dire qui partage cette forme d'humour, mais surtout qui ait les armes pour la mettre en valeur. Stefano Caselli réalise un superbe travail à ce niveau-là en soignant particulièrement l'expressivité des personnages, élément essentiel pour traduire les émotions face aux situations. Ainsi la désapprobation générale des membres de l'équipe vis-à-vis des décisions stratégiques de Kate devient un leitmotiv hilarant (elle ne veut pas blesser Tigra - les autres préféreraient en finir vite, elle est attendrie par BRODOK - Clint la rappelle à l'ordre, elle choisit d'aller inspecter l'entreprise - tout le monde veut y aller mais elle y va avec Clint). Quand elle demande à Clint à quel point elle est médiocre, lui-même croit d'abord qu'elle parle de la manière dont elle s'infiltre dans le bâtiment de l'AIM et pas de ses talents de meneuse.
Caselli profite aussi d'une coloriste, en la personne de Triona Farrell (qui contribue aussi à la série Crowded), suffisamment solide et experte pour respecter son trait et y appliquer des couleurs directes le temps d'une double-page pour un flash-back. Le résultat est remarquable et souligne le talent de Caselli pour la caricature.
Enfin, le découpage offre des plans très variés mais toujours justes, dans leur valeur, et agréables dans leur composition. Tout participe à ce que la série ait une remarquable allure.
Difficile (pour ne pas dire impossible) de résister à cette pépite qui résume parfaitement l'ambition affichée du dernier slogan de Marvel.
Les fiches des membres des W.C.A. par Kate Bishop.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire