Je m'étais posé deux conditions avant de lire ce cinquième épisode, qui clôt le premier arc narratif de Death or Glory : la première était que Rick Remender et Bengal se ressaisissent ; la seconde était que le dénouement de ce premier acte soit assez accrocheur pour poursuivre. La mission est globalement remplie...
Glory, Pablo et sa nièce Isabelle s'arrêtent à une station-service. L'occasion de faire le point après leurs aventures mouvementées : le bon point est qu'ils disposent d'un rein provenant d'un donneur universel donc capable de convenir à une greffe pour Red (le père de Glory) ; le mauvais est que la jeune femme est désormais recherchée par la police et sans connaissance d'un médecin pouvant pratiquer une telle opération.
Ils rentrent ensemble à Yuma. Glory prépare un repas pour Isabelle pendant que Pablo va aux toilettes. C'est alors que surgit Toby (l'ex de Glory), pistolet au poing. Il est pourtant disposé à lui pardonner le remue-ménage qu'elle a provoqué si elle accepte de revenir vivre avec lui.
Pablo revient des W.C. et Toby va l'abattre lorsque Glory empoigne une poêle et lui en assène un violent coup à l'arrière du crâne. Pablo lui flanque un coup de pied au visage puis se jette sur lui. Les deux hommes se disputent le pistolet que reprend Toby. Il est désarmé par un tir de Winston, à qui Glory, avant son départ, avait confié la garde Red.
Toby détale mais dehors le shérif et les mexicains du cartel attendent et ouvrent le feu. Glory, Pablo, Isabelle, Winston et Red fuient de leur côté. Les mexicains les prennent en chasse en leur tirant dessus. Glory réussit à atteindre la route lorsqu'un camion surgit par un côté.
Heureusement, il s'agit des renforts : Winston a averti Cindy et ses amis de venir leur prêter main forte. Les camions emboutissent la voiture des mexicains puis forment une escorte pour Glory. Direction : Mexico où Cindy connaît un médecin capable d'opérer Red.
C'était moins une ! A l'image de l'héroïne et ses alliés qui se sortent (au moins pour un temps) d'un sale guêpier, Rick Remender a trouvé les ressources pour redresser le cap d'une histoire qui piquait dangereusement du nez en se vautrant dans le glauque - alors qu'elle avait si bien démarré en mixant drame familial et braquage foireux sur fond de poursuite en bagnole.
Le scénariste avait entre temps entraîné Glory et compagnie dans une sous-intrigue de trafic d'organes humains et d'immigrés clandestins en multipliant les intermédiaires (Toby, Korean Joe, le shérif Dillard, les mexicains masqués). Assez complaisamment, l'intrigue sombrait dans un registre provoquant des sentiments de dégoût mais perdait sa ligne directrice - les efforts désespérés parce que maladroits d'une fille désirant sauver son père sur le dos de son ex.
Il fallait conclure ce premier arc en bouclant cet écart et opérer une synthèse, pour mieux aller ailleurs. Bien entendu, et c'est la limite de l'épisode, rien n'est vraiment soldé dans ce chapitre : les mexicains masqués réclament vengeance (et la petite Isabelle semble avoir reconnu leur chef), comme l'action se déplace à Mexico (pour l'opération de Red) ils vont coller aux basques de Glory.
Toby ne va certainement pas en rester là non plus, mais le shérif Dillard va sûrement quitter la partie (qui ne se jouera plus dans sa juridiction). Quid de Korean Joe, ou plutôt de son organisation (puisque lui est mort) ? Je parie que les diaboliques soeurs jumelles Dutch vont remontrer leurs cornettes. Il reste donc du monde. Mais disons que Remender en déportant l'action et ses enjeux avec (il ne s'agit plus de trouver de l'argent ou un remède, mais un médecin) donne un peu d'air frais à son projet.
A l'évidence, l'auteur a senti que son histoire piétinait puisque ce "final" file à toute allure et les dessins de Bengal ont retrouvé leur tonicité. L'artiste n'est jamais meilleur que dans le mouvement, voire l'agitation, la vitesse. Son style, qui emprunte à l'énergie des mangas en forçant un peu les expressions et en adaptant le découpage selon le tempo des scènes, reprend des couleurs.
Passé un prologue dialogué et calme, la suite enchaîne sans temps mort les pics de tension, et on sent bien cela entre Glory et Toby, puis, surtout, lors de la folle cavale avec les mexicains et l'arrivée digne de la cavalerie dans un western des camions de Cindy. Là, Bengal régale le lecteur avec des angles de vue percutants, une succession de plans fulgurants, un montage frénétique (certaines cases ressemblent à des photogrammes sans mise au point). C'est grisant.
Death or Glory n'est pas à l'abri d'une rechute. Remender est un auteur que je préfère quand même dans le registre des super-héros, mais s'il est plus rigoureux, avec le dessinateur donc il dispose, sa série peut devenir un divertissement trépidant et jubilatoire, à condition d'abandonner des éléments écoeurants.
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