C'est son fils John Romita Jr. qui l'a annoncé Lundi dernier : son père, John Romita Sr., est mort à 93 ans, paisiblement, dans son sommeil, entouré de ceux qui l'aimaient.
Avec Romita Sr. s'éteint non seulement un géant des comics mais surtout un des derniers fondateurs du Marvel moderne. Il ne reste plus guère, à cet âge avancé, que Sal Buscema ou Ramon Fradon pour encore témoigner de cette époque, le Silver Age des comics, cette bascule où les illustrés américains avec des super-héros bascula dans une autre dimension, après la décennie des années 1950 où ils faillirent disparaître.
Sur l'image ci-dessus, dessinée par John Romita Sr. et peinte par Alex Ross, on peut voir le Marvel univers par un de ses créateurs et un de ses admirateurs. En son centre se trouve Mary Jane Watson, la créature de JR Sr., mais on en reparlera plus loin, après avoir passé un peu en revue son extraordinaire carrière.
John Romita Sr. naît à Brooklyn en 1930. Il dessine très tôt et s'inscrit dans une école pour parfaire son art. Il en sortira diplômé en art industriel et décrochera ses premiers jobs dans l'illustration publicitaire. A 17 (!) ans, il entre chez Timely Comics, l'ancêtre de Marvel, pour devenir un "ghost artist", c'est-à-dire pour dessiner des planches que d'autres, plus connus que lui signeront. Il prête son talent et sa jeunesse également chez DC Comics.
Mais c'est au début des années 1960 que l'Histoire s'écrit et avec elle la légende de Romita Sr. : Stan Lee entend parler de lui et le convainc lors d'un repas de réintégrer Marvel en tant qu'encreur. C'était d'ailleurs sa vocation première, préférant rester dans l'ombre. Il va ainsi embellir des pages de Jack Kirby et Don Heck, entre autres.
Pendant ce temps, les relations entre Stan Lee et Steve Ditko se tendent tant que ce dernier claque la porte. The Amazing Spider-Man doit se trouver un nouveau dessinateur et Lee pense aussitôt à Romita Sr, cet artiste si rapide et appliqué. Ce sera le début d'un run formidable de près de cinquante épisodes d'affilée (du n°39 au n°95), sans compter des Annuals ! Les rares fois où Romita Sr. fait défection, il livre quand même les layouts qui seront finalisés par un autre dessinateur ou directement par l'encreur (Jim Mooney, Frank Esposito).
Surtout, avec Lee, Romita Sr. va introduire dans la série quantité de nouveaux personnages comme le Rhino, le Shocker, le Caïd (qui a donc été un ennemi de Spider-Man avant de devenir la némésis de Daredevil), George Stacy... Et Mary Jane Watson !
De l'époque où il dessina des romance comics dans les années 50, Romita Sr. a gardé le goût de croquer de superbes filles. Et celle qui va lui inspirer Mary Jane sera l'actrice Ann-Margret dans le film Bye bye Birdie ! (1963). Cette flamboyante rousse, souvent partenaire à l'écran d'Elvis Presley, aura prêté sans le savoir son visage et ses formes avantageuses à la fille qui fera tourner la tête de Peter Parker, éclipsant même Gwen Stacy son premier amour (même si la mort de celle-ci hantera pour toujours le Tisseur comme son oncle Ben).
Au début des années 1970, John Romita Sr. est au faite de sa gloire. Il a marqué pour l'éternité le personnage de Spider-Man, autant si ce n'est plus que d'autres artistes comme Ditko évidemment mais aussi Mark Bagley et... Son propre fils John Romita Jr. ! Quelle dynastie !
Que faire ensuite ? Stan Lee a compris l'empreinte historique de son partenaire et il va en faire l'art director de Marvel. Peut-être plus encore que Kirby, c'est Romita Sr. qui va influencer le plus toute une génération d'artistes en devenir chez Marvel - et ailleurs (on pense à Steve Rude qui le vénérait autant que Alex Toth, mais Romita Sr. était l'opposé de Toth, aussi bienveillant que son collègue était intransigeant, aussi corporate que l'autre était indépendant). Désormais, plein de débutants vont apprendre à dessiner non pas comme Romita Sr. mais suivant ses conseils et depuis son décès, on ne compte plus les témoignages de ceux à qui il a prodigués son enseignement et ses encouragements.
Il se fera aussi character's designer et attention ! pas sur des seconds couteaux : Wolverine, le Punisher, Bullseye, Tigra, Luke Cage, Brother Voodoo et le costume noire moulant de Black Widow (inspiré par celui de Miss Fury), c'est lui !
En 2002, il recevra, et c'est amplement mérité, le Will Eisner award Hall of Fame, couronnant une carrière à la longévité et à l'influence majeures.
Désormais, John Romita Sr. profite d'un repos bien mérité, certainement entouré de toutes les vénus qu'il a dessinées amoureusement, comme sur cette couverture du magazine Marvel Age. Merci pour tout, Monsieur !
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