Après Uncanny Avengers et Squadron Supreme, je vais vous parler du contenu du volume de Uncanny Inhumans disponible dans la collection Marvel Gold chez Carrefour pour le prix modique de 3,99 E. Il s'agit encore une fois d'un copieux album qui présente des arcs complets, facilement accessibles. Ici, nous avons les épisodes 0 à 10 écrits par Charles Soule et dessinés successivement par Steve McNiven, Brandon Peterson et Kev Walker, publiés à l'origine entre 2015 et 2016.
Pour situer cette série, nous sommes donc après les events Infinity (au terme duquel Flèche Noire, le souverain des inhumains a libéré les brumes tératogènes pour réveiller des "agents dormants") et Secret Wars (du même Jonathan Hickman, ce qui justifie la présence de Johnny Storm dans le rôle d'un intermédiaire entre humains et inhumains). A cette époque, Marvel (plus précisément Ike Permulter, un de ses cadres, frustré de ne pas pouvoir exploiter pour le cinéma les X-Men dont les droits appartiennent à la Fox) rêve d'évincer les mutants au profit des inhumains, et après quelques péripéties, confie la direction du projet au scénariste Charles Soule qui lance deux titres : All-New Inhumans (où on suit Crystal et son équipe à la recherche des nouveaux inhumains) et Uncanny Inhumans.
L'éditeur y croit assez pour associer Soule à Steve McNiven, l'artiste de Civil War (l'event le plus vendu de tous els temps par Marvel). Soule convoque Kang le conquérant pour son premier arc. Et qui dit Kang dit voyage dans le temps. Flèche Noire lui a confié son fils Ahura pour le protéger mais Kang en fait son pantin et quand Flèche Noire veut le récupérer, Kang se sert d'Ahura pour tuer les descendants des inhumains actuels.
Le résultat est efficace et la caractérisation des personnages tout autant. Charles Soule est un scénariste que beaucoup considèrent avec dédain mais il mérite pourtant plus des respect, s'adaptant facilement et produisant des intrigues captivantes. Il n'a pas peur des inhumains et anime aussi bien des membres célèbres de cette communauté (Flèche Noire, Médusa) que des nouveaux venus (Iso, Lecteur), auxquels sont venus se greffer le Fauve et la Torche Humaine (Johnny Storm qui, avec la Chose, est le seul rescapé des Fantastic Four après Secret Wars).
Visuellement, les planches de McNiven sont superbes, lorgnant de plus en plus sur Barry Windsor-Smith, même si sur la fin de l'arc, il tire visiblement la langue et néglige les décors. En tout cas, il donne une vraie majesté à Flèche Noire et Medusa, et Kang incarne un danger réel sous son crayon.
Une bonne entrée en matière donc.
Suit un arc plus court en deux parties. On remarque d'entrée que McNiven a cédé sa place à Brandon Peterson, mais au moins ce remplacement conserve à la série une belle allure. Soule;, lui, opère un virage brusque en faisant de Flèche Noire le patron d'un club, la Quiet Room, puisqu'il a quitté New Attilan, ne supportant visiblement pas que sa femme ait pris pour amant Johnny Storm. Celle-ci et Ahura, mais aussi Lecteur viennent visiter l'établissement et c'est parti pour une nuit agitée...
Résumé ainsi, cela a l'air superficiel, un arc de transition, et effectivement, on est un peu surpris par ce que raconte Soule, l'évolution de certains personnages. Mais le scénariste en profite pour mettre en place des éléments qu'il développera par la suite (la série comptera au total 20 épisodes), notamment le fait que Ahura s'empare de la direction d'une entreprise et l'apparition de Capo, un inhumain maléfique et revanchard.
Peterson produit de belles planches, parfois un peu trop statiques, mais aux décors soignés, et qui montrent la diversité des looks des inhumains. Encore une fois, Flèche Noire et Medusa tiennent le haut de l'affiche et affichent leur classe royale. On voit tout le potentiel du projet et l'investissement de l'équipe artistique pour lui rendre justice.
L'album se conclut déjà avec deux autres arcs très brefs. Dans La Torche et la Reine, Charles Soule va dévoiler la liaison entre Medusa et Johnny Storm à Crystal. Celle-ci fut longtemps l'amoureuse de la Torche Humaine et intégra même les Fantastic Four avant d'épouser Quicksilver, d'avoir un enfant avec lui, puis d'être remarié à Ronan l'accusateur pour des raisons diplomatiques (les kree étant à l'origine des expériences subies par des humains primitifs pour en faire les inhumains).
Le prétexte que choisit Soule pour amener cette révélation est tiré par les cheveux (heureusement Medusa les a longs) et aussitôt fait, il entraîne le trio dans une rapide aventure spatiale vite expédiée. C'est dommage car cela aurait pu alimenter les séries All-New et Uncanny Inhumans à la manière d'un vaudeville super-héroïque, mais comme All-New s'achèvera seulement au bout de 11 n°, il a certainement compris que ce serait en pure perte.
Au dessin, un troisième artiste prend les commandes et c'est Kev Walker qui succède à Peterson. le changement de style est radical et le trait anguleux du dessinateur n'est pas toujours flatteur. En revanche, ce qu'on perd en séduction, on le gagne en dynamisme. Toutefois, inutile de se voiler la face, cette succession d'artistes, montre bien que chez Marvel les ambitions ont été revues à la baisse et l'échec de All-New Inhumans ne précédera que de 9 mois celui de Uncanny. Au moment où cet arc sort, les carottes sont déjà cuites.
Un seul épisode suffit à l'arc suivant où Lecteur tient le rôle principal. Cet inhumain aveugle peut disposer de pouvoirs ou créer des choses de manière limitée en lisant des cartes en braille et c'est un personnage que Charles Soule semblait apprécier puisqu'il l'utilisera aussi de manière spectaculaire dans son run sur Daredevil (et aussi dans des épisodes de Wolverine, je crois).
L'hsitoire reprend le fil du deuxième récit avec Capo qui a pris possession du chien-guide de Lecteur. L'animal risque de mourir vite car il est consumé par son occupant... Soule emballe cette histoire avec une remarquable densité. Toute la détresse et la détermination de Lecteur mais aussi toute la cruauté de Capo donnent à cet épisode une intensité exceptionnelle.
Les dessins de Kev Walker rendent eux cette course contre la montre viscérale.
Les épisodes de cet album rappellent que les intentions de Marvel pour les inhumains étaient maladroites (il était parfaitement idiot de vouloir remplacer les mutants, dont la popularité, même quand ils sont mal écrits, ne s'est jamais démentie) mais honorables. En tout cas, Charles Soule, qui avait récupéré ces personnages après la défection de Matt Fraction (dont le projet ne convainquit pas l'éditeur), les écrivait avec intelligence, sans complexes. Et malgré le défilé d'artistes, la lecture demeurait agréable. Pas sûr que les inhumains aient droit à une seconde chance.
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