mercredi 7 juin 2023

DARK KNIGHTS OF STEEL #11, de Tom Taylor et Yasmine Putri


Dark Knights of Steel s'achèvera dans deux mois, quasiment deux ans depuis le début de sa parution (c'était en Novembre 2021). D'où un légitime sentiment de lassitude, de ne pas en voir le bout. Editorialement, j'ai déjà eu l'occasion de le dire, ce n'est pas fameux. Mais Tom Taylor aura, tant bien que mal, su préserver un intérêt à son projet, bien aidé par la dessinatrice Yasmine Putri. Et ce pénultième épisode est une belle veillée d'armes.



Les martiens blancs ont mis la main sur la kryptonite, grâce à laquelle ils ont un avantage sur le royaume des El. Avec les Pierce et les Amazones, ceux-ci se préparent à la guerre, grâce à J'onn J'onzz mais aussi aux prisonniers des donjons qui sont libérés. Ce qui déplaît à la général Waller...


La désastreuse gestion éditoriale de cette mini-série obligera, je l'espère, les editors du DC Black Label à réfléchir à leur manière de sortir de futurs projets sous cette bannière. Car, avec deux sous d'intelligence, et davantage de bon sens, Dark Knight of Steel aurait été bouclé depuis un moment et ses lecteurs moins frustrés.


Je ne vais pas revenir là-dessus, j'en ai déjà parlé dans de précédentes critiques, mais tout de même, quel gâchis que de ne pas avoir mieux anticiper le temps nécessaire à Yasmine Putri pour dessiner ses épisodes. Démarrée en Novembre 2021, la série ne se conclura qu'en Août 2023, ayant épuisé pas mal de fans entre temps.


C'est d'autant plus dommage que Tom Taylor a sans doute écrit son magnum opus avec Dark Knights of Steel. Si, avec une série comme Nightwing, le scénariste m'a déçu et découragé, en revanche, quand il imagine des récits "elseworlds", il se montre bien plus inspiré, libéré de toute contrainte.

La révélation que Alfred, le valet du prince Bruce, était en réalité le martien J'onn J'onzz dans cette réalité a permis de justifier beaucoup d'événements antérieurs. A commencer par le fait que les vrais méchants de l'histoire étaient des martiens blancs métamorphes venus conquérir la Terre après la destruction de leur planète. Dans un contexte médiéval, teinté de fantastique, c'est une fantaisie supplémentaire qui n'a aucun mal à trouver sa place, même si elle survient tardivement.

Il est désormais acquis que Dark Knights of Steel s'achèvera dans une bataille qui promet d'être spectaculaire et mortelle pour nombre de protagonistes, entre les kryptoniens de la maison El, les amazones, la famille Pierce, sans doute les Titans, et quelques sorciers. Aussi, ce onzième chapitre est une veillée d'armes.

Taylor prend donc le temps de montrer comment les adversaires d'hier se préparent au conflit en utilisant ce que redoutent le plus leurs ennemis, le feu, ici creusant des tranchées, là incendiant des terrains. La reine Lara et ses deux enfants déterrent de quoi forger un projecteur de la zone fantôme où expédier les martiens blancs. Poison Ivy met à disposition sa forêt pour concevoir des armes. John Constantine comprend à quel point il a mal interprété la prophétie. Les mystérieuses créatures enfermés dans les donjons de la maison El sont libérés pour grossir les rangs de l'armée.

Cette dernière initiative a pour conséquence de déplaire à Amanda Waller, qui a souffert la perte de nombre de ses soldats à cause de ces vauriens. Et elle trahit donc les El en allant proposer une alliance aux martiens blancs. Je spoile mais ce n'est pas méchant dans la mesure où ce comportement correspond à celui de la Amanda Waller qu'on connaît dans la continuité classique, prête à composer avec la pire engeance contre des dangers surhumains. C'est le point le plus convenu, le plus téléphoné de cette partie de l'épisode.

Ce qui l'est moins, c'est la réconciliation entre Kal et Bruce quand on se souvient que le premier avait voulu tuer le second quand il lui avait révélé être son demi-frère. Mais ça, c'était avant, avant qu'on sache que Protex, le chef des martiens blancs, avait usurpé l'identité et l'apparence de Kal. Taylor s'est joué du lecteur, quitte parfois à miser sur des coups de théâtre un peu poussifs, un casting un chouia trop fourni (je compte sur le retour des Titans, d'Etrigan, mais sans en avoir l'assurance). Le scénariste apprécie visiblement d'abuser son audience, ce qui ne serait pas gênant si sa série sortait régulièrement, alors que là, avec cette périodicité chaotique, l'astuce est moins efficace.

Yasmine Putri a un peu de mal à dissimuler sa fatigue. Quand on dessine sur une si longue durée une histoire, difficile de garder la même énergie, la même exigence. Elle accomplit une prestation très honorable à laquelle on peut juste reprocher d'être trop légère sur les décors, avec beaucoup trop de plans sans arrière-fond (et que le coloriste Arif Prianto doit donc remplir).

Le charisme de ses designs et l'allure de ses personnages comblent un peu ces failles, mais il faut bien avouer que l'épisode ne permet pas non plus à Putri de fournir un découpage spectaculaire. Elle s'acquitte avec professionnalisme de scènes dialoguées, souvent en tête-à-tête, et certains moments sont tout de même touchants et beaux (je retiens l'échange entre le prince Bruce et J'onn J'onzz).

C'est vraiment, je le répète, que l'éditorial ait échoué à trouver une parution plus adaptée, qui nous aurait épargné des fill-in trop moyens et une pause de plusieurs mois à mi-parcours qui n'a pas permis à Yasmine Putri d'engranger assez d'épisodes d'avance. Souhaitons à présent que Tom Taylor nous donne un final à la hauteur, en attendant de relire tout ça d'une traite, apaisé.

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