jeudi 4 novembre 2021

FIRE POWER #17, de Robert Kirkman et Chris Samnee


Dixit Robert Kirkman, Fire Power #17 est l'épisode le plus important de la série... Jusqu'au #18 ! Ironie mise à part, c'est vrai que ce numéro envoie du bois et nous offre du grand spectacle. Il est évident que le scénariste prépare quelque chose d'important pour la fin d'année, peut-être une redistribution des cartes. De son côté, Chris Samnee donne tout, comme toujours et ses planches combleront les plus gourmands.


Maître Shaw est revenu à la vie et incarne l'Esprit du Serpent. Chou Feng, qui attendait le retour de son mentor, se prosterne devant lui en lui avouant avoir échoué à établir la paix par la force. Il est aussitôt et impitoyablement exécuté. Wei Lun sonne la contre-attaque avec Owen.
 

Mais Shaw est trop fort et il peut compter sur les serpents pour maîtriser ses assaillants et les asservir. La situation devient désespérée quand Wei Lun et Ling Zan tombent. Owen et Kellie sont encerclés. Le Présage du Serpent désigne Owen comme le détenteur du Pouvoir du Feu. Shaw le défie.


Owen a beau répliquer avec tout ce qu'il a, il ne fait pas le poids et il est balayé avec Kellie. Déçu par cette faible opposition, Shaw ordonne au Présage du Serpent de les tuer puis entre dans le Temple où il invoque le dragon.


Profitant du chaos qui s'ensuit, Owen et Kellie prennent la fuite. Wei Lun tente de les arrêter mais, à cet instant, le temple explose et la terre gronde, agie par des forces inconnues et terrifiantes; Owen explique à Kellie qu'il leur faut gagner les montagnes pour semer leurs ennemis...

Sans le dernière page, qui voit l'arrivée aux abords du temple du Poing Enflammé ravagé de trois personnages familiers, c'était un épisode parfait. On se demande bien alors ce qui est passé par la tête de Robert Kirkman, mais espérons que le mois prochain, avec ce fameux 18ème chapitre de Fire Power, annoncé comme un tournant décisif, ce sera justifié.

Ce qui est certain, en revanche, c'est que ce deuxième acte de la série s'avère bien plus maîtrisé que le premier. La menace représentée par les serpents est vraiment terrifiante et le retour à la vie de Maître Shaw est un coup de théâtre sensationnel (même si, il faut le dire, plutôt convenu). Pour la première fois, on a vraiment le sentiment que Owen Johnson ne va pas gagner (ou en tout cas pas facilement).

Kirkman a fait monter la pression jusqu'à cet épisode qui rassasiera le lecteur le plus affamé : c'est une succession d'actions virevoltantes et explosives, superbement mises en scène, menées sur un rythme très soutenu mais jamais bourratif. C'est surtout plus captivant qu'une simple rivalité comme dans la première "saison" entre le temple du Poing Enflammé et le clan de la Terre Ecorchée qui déboucha sur une longue (très, très longue) baston où Owen, présenté comme l'arme décisive, fut relégué au second plan, emporté par un tourbillon brouillon.

En entretenant habilement le danger des Serpents, leur emprise, au fil des épisodes, Kirkman a fait douter le lecteur et son héros, à tel point que, désormais, il est certain que produire des boules de feu ne suffira pas à stopper quoi que ce soit. D'ailleurs, il suffit de voir la démonstration de puissance de Maître Shaw face à Owen pour comprendre qu'il y a un monde d'écart entre l'élu (Owen) et le fondateur du temple. Il semble aussi, surtout, que le serpent est un antagoniste bien plus redoutable et ancien que le feu, qui a certainement précédé ce dernier, ce qui explique que Shaw (et donc Chou Feng) le serve(nt) ainsi.

Bien entendu, si on adhère à cette théorie (l'antécédent du serpent sur le feu, établis comme les deux adversaires primordiaux de la mythologie de la série), on pense au dragon, évoqué mais jamais vu. Or, dans cet épisode, Shaw, après avoir corrigé Owen, entre dans le temple et la pièce interdite du bâtiment et invoque la créature mythologique. Quelque pages plus tard, le temple est pulvérisé par un rayon provenant des entrailles de la Terre, qui ne laisse guère planer de doutes sur l'ascension du dragon (même si on ne voit toujours pas la bestiole, sans doute pour en préserver l'effet dans le #18 là encore).

Difficile, pour ne pas dire impossible de ne pas être captivé par cet épisode, d'autant que Chris Samnee est déchaîné. Mû par une énergie prodigieuse, le dessinateur envoie du bois dans des planches ahurissantes de dynamisme. L'artiste a un sacré souffle et une inspiration impressionnante : il varie les angles de vue, trouve toujours la bonne valeur de plan, propose des découpages nerveux et compose des images qui sautent au visage. 

Il y a quelque chose de cartoonesque dans la manière de Samnee : tout est mouvement, tout est puissance, tout est intensité. Il pousse les personnages et le lecteur dans les cordes. Mais ne l'assomme, ne l'achève jamais. C'est alors qu'il dégaine une généreuse double page, le calme au milieu de la tempête, avec une figuration importante mais un climat tendu à l'extrême (voir ci-dessus). Cette pause dans le récit est à la fois une respiration et la promesse que la suite va être encore plus épique.

Lorsque Owen et Kellie battent retraite, c'esst carrément la terre qui se soulève, comme prise convulsions. Les personnages deviennent des pantins dérisoires dans un environnement soumis à des spasmes délirants, dans des couleurs éblouissantes de Matt Wilson. Le titre, Fire Power, prend alors une autre dimension, évoquant des forces primordiales dont les hommes seraient à la fois les jouets et les provocateurs. Le lecteur éprouve alors ce délicieux frisson de ne plus tout savoir comment tout ça va se terminer, si les héros vont même y survivre. Ce suspense exquis est la signature des meilleurs divertissements, car tout redevient imprévisible.

Mais, comme je le disais plus haut, Kirkman gâche un peu la fête avec l'arrivée de trois personnages qu'on ne pensait pas revoir là, maintenant, qui n'ont même franchement rien à faire ici. Sans ça, c'était parfait. Peut-être que je me trompe et que le mois prochain tout sera justifié. Je croise les doigts. Mais je ne boude pas mon plaisir devant cette "saison" 2 jubilatoire.

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