vendredi 23 décembre 2022

BATMAN - SUPERMAN : WORLD'S FINEST #10, de Mark Waid et Dan Mora


Le pénultième épisode de cet arc de Batman - Superman : World's Finest réserve un cliffhanger de folie - et je pèse mes mots ! Mark Waid fait très fort, en revisitant un de ses propres classiques, donnant à cette série une dimension et une perspective assez vertigineuses. Dan Mora n'est pas en reste et produit encore une fois débordantes d'énergie.


Enlevé par le Joker et la Clé, David Sekela/Boy Thunder est recherché par Superman les Teen Titans et Batman, qui trouve un indice déterminant en relation avec un bâtiment abandonné de LexCorp.
 

Pendant ce temps, entre deux interrogatoires musclés du Jiker qui veut savoir l'identité de Batman et Superman, David révèle à la Clé qu'il vient d'une Terre parallèle, ce qui fascine le vilain.


Batman, les Teen Titans et Superman arrivent enfin pour sauver David. Le Joker s'enfuit d'un côté et la Clé de l'autre, libérant un monstre d'une dimension parallèle pour occuper les héros.


Une fois délivré, David poursuit le Joker et manque de le tuer, promettant que, quel que soit le temps que ça prendrait, il se vengera de ce qu'il lui a fait subir - et il tiendra promesse...

La tentation est grande de vous dévoiler ce que montre la toute dernière (splash) page de cet épisode car on y découvre quelque chose de véritablement vertigineux. Mark Waid prouve par-là même qu'il n'écrit pas Batman - Superman : World's Finest comme une simple succession d'aventures située dans le passé des deux héros, mais que cela lui sert de passerelle vers le futur du DCU.

C'était déjà le cas avec le premier arc qui a abouti à la mini-série Batman vs. Robin qui, elle-même, débouche sur l'event Lazarus Planet. Mais en vérité, ce qui intervient à la fin de World's Finest #10 est sans aucun doute encore plus fort en termes d'impact dramatique.

Pourquoi ? Parce que, sans donc en dire trop, Mark Waid offre une perspective inattendue et folle à un de ses grands classiques des années 1990. Le citer reviendrait à éventer où il veut en venir. C'est donc très compliqué de rédiger cette critique sans spoiler. Le mois prochain avec le #11, ce sera sans doute inévitable, donc profitez-en.

Cela ne signifie pas qu'avant cette dernière page ce qui se passe revêt un intérêt moindre ou négligeable. Le mois dernier, le Joker et la Clé créaient une diversion spectaculaire pour enlever David Sekela/Boy Thunder et le jeune garçon est désormais entre les mains des deux criminels. L'occasion pour le scénariste là encore d'évoquer des références passées.

En torturant David, le Joker semble répéter ce qu'il infligera des années plus tard à Jason Todd, le deuxième Robin et futur Red Hood, qu'il avait passé à tabac avant de l'assassiner. C'était le climax de Batman ; Un Deuil dans la Famille en 1988 (écrit par Jim Starlin et dessiné par Jim Aparo) au terme duquel les lecteurs furent sollicités par DC pour décider du sort de Jason Todd - condamné alors par des fans qui l'aimaient moins que Dick Grayson, son prédécesseur.

Tandis que Superman, frustré par la tournure des événements et en colère contre lui-même pour avoir perdu de vue David au pire moment, mais aussi Batman et les Teen Titans cherchent Boy Thunder dans Gotham et doivent franchir plusieurs épreuves dans une narration ressemblant aux niveaux d'un jeu  vidéo, les scènes avec le garçon et ses ravisseurs sont d'une intensité exceptionnelle. Waid, en particulier, en profite pour donner un relief particulier à la Clé, en revenant sur l'origine de ses pouvoirs et de son aspect physique, mais surtout sur son obsession d'ouvrir des portes de toutes sortes.

En apprenant que David vient d'une Terre parallèle, il le considère comme la preuve de l'existence du multivers, autrement dit comme une sorte de clé permettant d'accéder à des dimensions inconnues, c'est-à-dire une sorte d'aboutissement pour ce vilain. Cet échange devient le résumé de tout l'épisode (et même de cet arc) car jusqu'à la fin il ne s'agira plus que d'ouvrir des passages et d'atteindre des paliers dramatiques.

Dan Mora n'a pas abandonné son rythme de travail car même s'il en a fini avec Once é Future (la série qu'il a co-créée avec Kieron Gillen), il signe encore de nombreuses couvertures et vient de produire le premier numéro d'un crossover entre les Mighty Power Rangers et les Teenage Mutants Ninja Turtles. A quand cet homme dort-il ?

Cette fantastique santé rejaillit sur son dessin qui déborde d'énergie. Et même si on peut repérer, pour peu qu'on fasse attention, quelques raccourcis graphiques (avec des décors parfois absents ça et là), on ne peut reprocher à Mora de faire les choses à moitié. D'abord parce que son découpage est une emrveille de tonicité et de fluidité. Ensuite, parce que même en étant plus léger sur certains éléments, la quantité d'informations visuelles qu'il fait passer et la densité de ses compositions restent au-delà de la moyenne.

En effet, il doit animer un casting très fourni (Batman, Superman, les cinq Teen Titans, David Sekela, le Joker et la Clé), et le plus souvent quand tout ce monde est réuni, il parvient à les caser dans un même plan dans leur grande majorité. Mais surtout parce qu'il se plie à un script avec une sorte d'amusement sidérant, qu'il s'agisse de montrer l'intérieur d'un bâtiment rempli de portes dans tous les sens ou de fiare jaillir un énorme monstre de l'une d'entre elles.

Il y a une double jubilation dans le dessin de Mora : la première parce qu'on ressent la jouissance de cet artiste à dessiner, et la seconde parce qu'on apprécie ce foisonnement si vif. Ajoutez-y les couleurs parfaites de Tamra Bonvillain, avec laquelle il a ses habitudes, et la lecture est un plaisir sans égal.

Après donc ce climax, comment le prochain épisode va-t-il résoudre cette intrigue en "effaçant" en quelque sorte Boy Thunder de la continuité tout en opérant la liaison vers ce qu'il est devenu ? Cette question explique pourquoi lire Batman - Superman : World's Finest est si palpitant.

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