samedi 19 juin 2021

NIGHTWING #81, de Tom Taylor et Bruno Redondo


Dernière critique de cette semaine avec le quatre-vingt-unième numéro de Nightwing. La série conduite par Tom Taylor est un vrai plaisir, le scénariste aimant visiblement le héros et ayant donc à coeur de lui rendre son lustre. Il ne déçoit pas sur cet épisode riche en action et au cliffhanger renversant. Bruno Redondo livre lui aussi une copie remarquable et prouve que le titre est entre de bonnes mains.


Alors qu'il fait face à Heartless, qui a provoqué l'incendie dans le camp des enfants perdus de Blüdhaven, Nightwing découvre que cet adversaire a du répondant mais surtout de la malice. En difficulté en effet, il provoque une explosion sur la passerelle ou Red Robin évacue les gamins.


Pris en étau entre le fleuve d'un côté et le feu de l'autre, Red Robin est impuissant et Nightwing appelle sur la fréquence de la police de l'aide. Par chance la brigade fluviale intervient et sauve les enfants. Mais Nightwing, éprouvé, perd connaissance.


Lorsqu'il revient à lui, Dick Grayson, veillé par Red Robin, écoute Barbara Gordon lui apprendre que Melinda Zucco a été intronisée maire de la ville. En voulant en savoir plus sur elle, Oracle est tombé sur un os car les données sur Melinda sont classées par le FBI.


Alors qu'il devrait se reposer, Nightwing ne résiste pas à l'envie de percer le mystère entourant la fille de l'homme responsable de la mort de ses parents. Il est neutralisé en pénétrant chez elle. Lorsqu'il se réveille, il est démasqué et Melinda lui révèle un surprenant secret...

Rassurez-vous, je ne vous dévoilerai pas ce que Melinda Zucco avoue à Dick Grayson mais il faut reconnaître que Tom Taylor m'a bien cueilli sur ce coup. La situation des deux personnages devient tout de suite beaucoup plus trouble que celle qu'elle aurait été en les faisant rester de simples ennemis liés par la mort des parents de Dick.

Avant cela, cependant, on a droit à un épisode déjà remarquable, d'une redoutable efficacité. Taylor sait y faire et le méchant qu'il a créé pour ce run, le mystérieux Heartless, qui fait tant d'orphelins, s'avère coriace. Non seulement physiquement, il tient la dragée haute face à Nightwing (quand bien même grâce à ce qui ressemble à un exosquelette ou en tout cas un supplément technologique) mais surtout il se montre d'un sadisme terrible en détournant l'attention de son adversaire au moment le plus critique.

Un des ressorts qu'a choisi d'exploiter Taylor en renvoyant Nightwing à Blüdhaven, c'est d'en faire un héros qui se résigne pas à l'état dans lequel il retrouve cette ville, corrompue jusqu'à l'os. Il avait d'ailleurs, comme on l'a appris dans le précédent numéro, quitté la police locale à cause de cela. Aussi quand il a besoin de l'aide des autorités pour épargner aux orphelins une mort atroce, on espère avec lui un sursaut.

Parce que Tom Taylor ne semble pas (plus ?) se complaire dans la noirceur de ses hits récents (DCeased et ses spin-off et suites), il offre au héros et au lecteur un lueur d'espoir réconfortante. Tout cela me rappelle, comme je l'avais déjà écrit, ce que Mark Waid et Chris Samnee faisaient sur Daredevil et c'est un compliment car ça ressemble à Nightwing, qui est un justicier différent de son mentor, Batman, et que le décor dans lequel il évolue n'est pas une Gotham-bis.

Passé ce premier acte trépidant, le scénario n'en reste pas là mais s'oriente en direction de Melinda Zucco pour aboutir à ce fameux cliffhanger final. On sait peu de chose de cette jeune femme sinon qu'elle collabore avec le méchant Blockbuster, qu'elle a assisté au meurtre du maire par ce dernier, qu'elle vient d'être élue à son poste. A priori, rien de bon. Sauf qu'en révélant son secret à Dick Grayson, on peut penser qu'elle veut s'en faire sinon un ami, du moins un allié qui lui permettrait de se débarrasser de Blockbuster. Ce serait donc une sorte d'agent double qui fraierait avec des criminels pour mieux les éliminer. Nous verrons si j'ai raison.

Bruno Redondo confirme lui aussi tout le bien qu'on pense de lui sur la série. Il est à l'aise dans tous les registres, qu'il s'agisse de mettre en scène une séquence d'action complexe, avec plusieurs zones de danger, ou qu'il faille composer avec des parties reposant sur les dialogues.

Ce qui est certain, c'est que Redondo, comme Taylor, prend un plaisir évident à dessiner Nightwing, Blüdhaven, et que son coloriste, Adriano Lucas, est sur la même longueur que lui pour entretenir une certaine esthétique à la série. Ce qui est séduisant, c'est qu'il y a toujours une certaine légèreté, une luminosité dans l'ensemble, même au pic de la tension dramatique. Là aussi, la ressemblance avec le Daredevil de Waid-Samnee joue à fond.

Au fond, c'est sur ce point précis sans doute que le projet des deux hommes me plaît le plus : renouer moins avec le super-héros actuel, souvent sombre et sérieux, premier degré, qu'avec l'aventure, un côté bondissant, charmeur. Ce n'est peut-être pas original, mais ça change, je trouve, du tout-venant. J'aurai aimé que Chris Samnee s'engage dans une série comme celle-ci mais finalement que Bruno Redondo s'affirme grâce à Nightwing est un excellent produit de substitution.

Nul doute que Urban Comics veillera, le moment venu, à proposer une traduction attractive à ce run et j'espère vivement que le public français, qui n'aura pas cédé à la vo, lui réservera un accueil digne de ce nom. Ce Nightwing-là éclipse (quasiment) son sidekick Batman (comme l'appelle, malicieusement, Tom Taylor).

Bonus : Bruno Redondo a même le temps de dessiner une variant cover pour ses épisodes et celle de ce numéro est extra.
  

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