BRUNO BRAZIL : SARABANDE A SACRAMENTO est le sixième tome de la série, écrit par Greg (sous le pseudonyme de Louis Albert) et dessiné par William Vance, publié en 1974 par les Editions du Lombard.
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La ville de Sacramento est gangrenée par la mafia tenue par les deux parrains, Don Leone Adosimo et Pascale Scampa. Bruno Brazil leur déclare la guerre en direct à la télé et son plan est simple : faire croire à Scampa que le commando "caïman" a conclu une alliance avec Adosimo.
La riposte de Scampa est immédiate : il fait brûler les écuries puis la villa de Adosimo. Mais ces règlements de comptes déplaisent à l'inspecteur Quincannon, ami de "Gaucho" Moralés à qui il révèle que sa soeur, Concepcion, a été enlevée. Elle est la prisonnière, comme le lui apprend le patron du "Tropico" où elle travaille, de Sardano, l'avocat véreux d'Adosimo, qui veut évincer le parrain.
Le commando libère la jeune femme. Les deux bandes rivales de la mafia s'entre-tuent, Quincannon n'a plus qu'à arrêter les survivants tandis que Brazil laisse Adosimo et Scampa filer afin que leur défaite instruise tous les autres barons de la pègre qui voudraient défier ses agents.
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BRUNO BRAZIL : DES CAÏMANS DANS LA RIZIERE est le septième tome de la série, écrit par Greg (sous le pseudonyme de Louis Albert) et dessiné par William Vance, publié en 1975 par les Editions du Lombard.
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Gina Loudéac, touriste en Thaïlande, est témoin d'une fusillade sur un port de pêche. Une des victimes, Walter Aldorf, lui remet un briquet à donner à Bruno Brazil. Or le guide de la jeune femme, Maï, connaît bien l'espion qui est d'ailleurs descendu dans le même hôtel qu'elle.
Bruno visionne les microfilms cachés dans le briquet : ce sont des clichés datant de 1942 sur un missile japonais désormais en possession d'Iko Mitsushido qui veut le vendre au plus offrant. D'autres images montrent une rizière, certainement là où il se cache.
Bruno, Gina et Maï s'enfoncent dans la jungle pour gagner la planque de Mitsushido tandis que le commando "caïman", divisé en deux groupes ("Texas" Bronco et "Big Boy" Lafayette d'un côté, "Whip" Rafale", Billy Brazil et "Gaucho" Moralés de l'autre), sont en aussi en route.
La mission se termine sur une demi-victoire : si Mitsushido et arrêté et le missile mis hors d'état de nuire, un des membres de l'équipe meurt...
N'ayant pu me procurer le tome 5, je passe donc donc directement aux 6ème et 7ème épisodes de la série : on peut d'ailleurs noter qu'ils présentent respectivement le meilleur et le pire de la production écrite par Greg.
Sarabande à Sacramento délaisse le récit d'espionnage, genre dans lequel s'inscrivait le titre, pour un registre plus proche du polar avec une spectaculaire histoire de règlements de comptes entre le commando "caïman" et deux factions mafieuses. L'intrigue est articulée sur une manipulation habile de Bruno Brazil pour que deux parrains alliés deviennent rivaux en croyant que l'un trahit l'autre : cette trame évoque La moisson rouge de Dashiell Hammett (1929), qui inspira le film d'Akira Kurosawa Yojimbo/Le garde du corps (1961) dont Sergio Leone tira une version western avec Pour une poignée de dollars (1964). Un procédé courant chez Greg...
Il n'empêche, ce tome est redoutablement efficace et s'impose comme le meilleur depuis le début de la série : le scénario est riche, épique, plein de rebondissements, abondant en scènes d'action. La dynamique du commando est aussi plus tonique et l'usage de gadgets ajoute au divertissement (le yo-yo métallique de "Big Boy" Lafayette, les colts de "Texas" Bronco ou les escarpins aux talons lacrymogènes de "Whip" Rafale).
Hélas ! Des caïmans dans la rizière ne confirme pas cette embellie et se distingue, lui, comme un sommet de n'importe quoi : Greg a fait fort en accumulant des situations invraisemblables dont on ne peut que rire. Les personnages secondaires sont grotesques : de Gina Loudéac (rien que le nom...), touriste prise dans une affaire qui la dépasse et successivement prête à tout pour s'en mêler avant de s'indigner des méthodes de Bruno Brazil, jusqu'au jeune guide Maï qui semble connaître toute la Thaïlande comme sa poche au point de localiser une rizière entre milles sur une simple photo, en passant par Mitsushido qui a caché un énorme missile dans un éléphant de pierre mais sans se soucier de l'entretenir !
Le périple à bicyclette (!) de Bruno, Gina, et Maï à travers les chemins thaïlandais, est aussi passablement ridicule mais surtout interminable : pourquoi donc Brazil, d'une part, s'encombre-t-il de cette femme et du garçon et, d'autre part, ne part-il pas soit avec "Big Boy" et "Texas", soit avec "Whip", Billy et "Gaucho" ? Il faut aussi dire que, encore une fois, plusieurs membres du commando ne servent ici à rien (Billy comme d'habitude surtout).
Graphiquement en revanche, Vance est plus inspiré : son découpage s'affranchit nettement pour proposer des compositions percutantes, aux perspectives profondes. Le nombre de cases par page diminue au profit de plans plus larges, voire de pleines pages, avec des décors très fouillés (le "Blue casino" de Sacramento par exemple). Il semble évident que l'artiste a intégré l'émancipation visuelle que la BD franco-belge connaissait à cette époque sous l'impulsion, notamment, de Druillet et Moebius.
Sa représentation des personnages ne bénéficie pas de la même audace et leur expressivité est toujours limité ainsi que leur gestuelle. Mais tout de même, Vance, chez qui l'influence de Jim Holdaway (Modesty Blaise) est notable, sait dessiner les femmes en leur donnant une sacrée allure ("Whip" Rafale en est le meilleur exemple), ce qui compense légèrement la raideur et la ressemblance de ses héros masculins.
A la fin du tome 7, on pourrait facilement penser que la série est terminée (Bruno s'est marié et a adopté Maï, le commando a perdu un de ses membres), mais les aventures des "caïmans" ont encore quelques chapitres à vivre...
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