LA VIE AQUATIQUE (en v.o. : The Life Aquatic with Steve Zissou) est un film réalisé par Wes Anderson, sorti en salles en 2005.
Le scénario est écrit par Wes Anderson et Noah Baumbach. La photographie est signée Robert Yeoman. Les séquences d'animation ont été conçues par Henry Selick. La musique est composée par Mark Mothersbaugh, avec les chansons originales de David Bowie ou adaptées par Seu George.
Dans les rôles principaux, on trouve : Bill Murray (Steve Zissou), Owen Wilson (Ned Plimpton / Kingsley Zissou), Cate Blanchett (Jane Winslett-Richardson), Anjelica Huston (Eleanor Zissou), Jeff Goldblum (Alistair Hennessey), Willem Dafoe (Klaus Daimler), Michael Gambon (Oseary Drakoulias), Seymour Cassel (Esteban Du Plantier), Noah Taylor (Vladimir Wolodarsky), Bud Cort (Bill Ubell), Seu George (Pelé Dos Santos), Robyn Cohen (Anne-Marie Sakowitz).
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Steve Zissou
(Bill Murray)
A l'occasion de la présentation de son nouveau film documentaire au festival de Loquasto, l'océanographe Steve Zissou révèle que son meilleur ami, Esteban Du Plantier, a été dévoré lors de leur dernière plongée par un requin-jaguar. Il est désormais résolu à en prouver l'existence mais surtout à le tuer pour venger son mentor - projet qui lui vaut les moqueries de l'assistance et la désapprobation de sa femme, Eleanor, financière des expéditions.
Steve et Eleanor Zissou
(Bill Murray et Anjelica Huston)
Qu'importe : Zissou entraîne l'équipage de son navire, le "Belafonte", dans cette aventure à laquelle se joignent Ned Plimpton, un pilote de ligne, qui se présente à l'océanographe en prétendant être son fils, et un groupe de sept étudiants de l'Université de l'Alaska du Nord.
Steve Zissou et Ned Plimpton
(Bill Murray et Owen Wilson)
Ned, qui vient d'hériter d'une forte somme, gagne sa place à bord en acceptant de payer la traversée. Le reste de l'argent est apporté par des partenaires de l'associé de Zissou, Oseary Drakoulias, contre la présence à bord d'un homme de confiance, Bill Ubell, et d'une journaliste enceinte, Jane Winslett-Richardson, qui écrira un article sur le voyage.
Ned Plimpton et Klaus Daimler
(Owen Wilson et Willem Dafoe)
Mais rapidement, l'ambiance est tendue : la reporter n'est pas là pour flatter son hôte ; Ned la séduit alors que son père la courtise ; Klaus Daimler, le second de Zissou, est jaloux de Ned ; et le rival de l'océanographe, dont la carrière décline à la suite des échecs commerciaux de ses derniers films, Alistair Hennessey, a entrepris de reconquérir Eleanor.
Alistair Hennessey et Steve Zissou
(Jeff Goldblum et Bill Murray)
Les péripéties les plus insensés rythment l'expédition : Zissou pille une des bases de Hennessey, sillonne des mers non protégées, affrontent des pirates... Le requin-jaguar est enfin localisé et Ned encourage son père à le filmer plutôt qu'à le tuer. L'animal est effectivement un spécimen magnifique qui éblouira tout le monde mais qui, pour être immortalisé sur la pellicule, aura coûté de douloureux sacrifices à Steve Zissou.
Steve Zissou et Jane Winslett-Richardson
(Bill Murray et Cate Blanchett)
Le commandant Jacques-Yves Cousteau (à la mémoire duquel le film est dédié tout en précisant que "la Fondation Cousteau n'a aucunement été impliquée dans la réalisation de ce film") est comme un fantôme qui hante l'oeuvre de Wes Anderson : il était cité dans Rushmore, son deuxième opus, et sera à nouveau convoqué dans Moonrise Kingdom (2012). Fasciné par le personnage depuis l'adolescence, il était naturel et inévitable que le cinéaste lui consacre un hommage, décalé ça va de soi, et il a pu le faire, en disposant d'un confortable budget (50 M $), avec La Vie aquatique en 2004.
Steve Zissou est le héros inoubliable de ce récit d'aventures farfelu, co-écrit avec Noah Baumbach, et ce nom est aussi inspiré par le photographe Jacques-Henri Lartigue dont Zissou était le surnom. Le personnage doit aussi beaucoup à un autre explorateur, Thor Eyerdahl. Pour en arriver à ce résultat, il faudra pourtant quatre ans d'échanges entre le réalisateur et son co-scénariste, chacun inventant les scènes au fur et à mesure de son côté puis les confrontant, les sélectionnant, les structurant.
Steve Zissou est le héros inoubliable de ce récit d'aventures farfelu, co-écrit avec Noah Baumbach, et ce nom est aussi inspiré par le photographe Jacques-Henri Lartigue dont Zissou était le surnom. Le personnage doit aussi beaucoup à un autre explorateur, Thor Eyerdahl. Pour en arriver à ce résultat, il faudra pourtant quatre ans d'échanges entre le réalisateur et son co-scénariste, chacun inventant les scènes au fur et à mesure de son côté puis les confrontant, les sélectionnant, les structurant.
Mis en scène après La Famille Tenenbaum (2001), The Life aquatic with Steve Zissou en prolonge les motifs et les thèmes, ceux d'une grande famille (ici incarnée par l'équipage du "Belafonte", dont le nom lui doit tout au chanteur Harry Belafonte) dysfonctionnelle mais qui apprend à se connaître et se transcender dans les épreuves. En y ajoutant la rencontre d'un fils avec le père qu'il n'a connu que de réputation, la mort d'un mentor, le souvenir d'un illustre modèle (Lord Mandrake, dont la photo est un portrait de Jacques-Henri Lartigue justement), la grossesse d'une journaliste embarquée dans l'aventure vengeresse contre le légendaire requin-jaguar (avec donc pour finalité la naissance d'un enfant, lui aussi conçu dans la clandestinité - le père étant le rédacteur en chef déjà marié de la reporter - mais aussi la mort de l'animal mythique), tout ici souligne les obsessions fondatrices du cinéma de Anderson.
Cette notion de succession, d'héritage se prolonge dans le casting même puisque Bill Murray (encore une fois impérial) prend la place de Gene Hackman dans le rôle du chef de clan indigne, Owen Wilson (parfait comme d'habitude dans cet univers) joue un jeune homme désireux d'être reconnu par un père idéalisé, Anjelica Huston reprend sa place de mère détachée mais vraie clé de voûte de toute cette bande ("the spirit of team Zissou"). Cela aurait pu aller encore plus loin si Gwyneth Paltrow n'avait pas décliné le rôle tenu finalement par Cate Blanchett (un peu gauche dans ce délire).
L'incontrôlable et immature Zissou révèle ses failles tout au long de ce qu'il finit par accepter comme son dernier voyage : sa quête folle contre le requin-jaguar évoque celle du capitaine Achab dans Moby Dick de Herman Melville, sa volonté de tuer cet animal à la dynamite et son ignorance souvent remarquée de vrais noms des poissons ou sa manie de tout faire filmer (souvent en manipulant ostensiblement les faits) trahit un caractère plus attiré par la notoriété et l'appel du large que par une réelle volonté d'instruire les foules, et ses amours sont toutes de cuisants échecs.
Cette notion de succession, d'héritage se prolonge dans le casting même puisque Bill Murray (encore une fois impérial) prend la place de Gene Hackman dans le rôle du chef de clan indigne, Owen Wilson (parfait comme d'habitude dans cet univers) joue un jeune homme désireux d'être reconnu par un père idéalisé, Anjelica Huston reprend sa place de mère détachée mais vraie clé de voûte de toute cette bande ("the spirit of team Zissou"). Cela aurait pu aller encore plus loin si Gwyneth Paltrow n'avait pas décliné le rôle tenu finalement par Cate Blanchett (un peu gauche dans ce délire).
L'incontrôlable et immature Zissou révèle ses failles tout au long de ce qu'il finit par accepter comme son dernier voyage : sa quête folle contre le requin-jaguar évoque celle du capitaine Achab dans Moby Dick de Herman Melville, sa volonté de tuer cet animal à la dynamite et son ignorance souvent remarquée de vrais noms des poissons ou sa manie de tout faire filmer (souvent en manipulant ostensiblement les faits) trahit un caractère plus attiré par la notoriété et l'appel du large que par une réelle volonté d'instruire les foules, et ses amours sont toutes de cuisants échecs.
Pourtant, malgré ce portrait pathétique, le film échappe à a morosité grâce à l'accumulation de trouvailles amusantes, parfois franchement hilarantes (pour qui aime, en tout cas, l'humour pince-sans-rire), et de détails fétichistes (comme la lycée Rushmore ou le manoir Tenenbaum, le navire Belafonte est une maison de poupées qui échappe au réalisme - il est d'ailleurs détaillé à deux reprises par des plans en coupe, d'abord lors d'une présentation par Zissou, ensuite lors d'un extraordinaire plan-séquence durant une dispute entre Steve et Ned depuis la cabine de Jane jusqu'au pont en passant par divers pièces intermédiaires).
L'autre décor marquant est l'île Pescecado, qui sert de base à la team Zissou, où, de façon troublante, les occupants s'y marchent plu sur les pieds que dans les traverses du bateau, où les tensions y sont plus vives : comment en serait-il autrement puisqu'en étant là, on n'est pas en mer, en action, en mouvement, tout entier consacré à l'expédition ? Se poser, se faire face, dialoguer contrevient à des explorateurs qui fuient en réalité davantage le quotidien et les responsabilités qu'ils ne négocient avec l'intimité, l'introspection, l'avenir. Une île est en fait trop petite pour un ego surdimensionné comme celui de Zissou, être sur la terre ferme (même à l'écart d'un continent), c'est devoir composer avec les devoirs (l'argent, le couple, la famille...), alors que partir en mer c'est y échapper, même ruiné et ridiculisé. L'arrogance de ce leader contredit son incompétence manifeste et celle de ses hommes et la décrépitude de son équipement, mais le contraste entre le panache dérisoire des personnages et les illusions dont ils se bercent fournissent justement les gags de l'histoire, gags qui gagnent en démesure au fur et à mesure que les avanies se multiplient.
L'autre décor marquant est l'île Pescecado, qui sert de base à la team Zissou, où, de façon troublante, les occupants s'y marchent plu sur les pieds que dans les traverses du bateau, où les tensions y sont plus vives : comment en serait-il autrement puisqu'en étant là, on n'est pas en mer, en action, en mouvement, tout entier consacré à l'expédition ? Se poser, se faire face, dialoguer contrevient à des explorateurs qui fuient en réalité davantage le quotidien et les responsabilités qu'ils ne négocient avec l'intimité, l'introspection, l'avenir. Une île est en fait trop petite pour un ego surdimensionné comme celui de Zissou, être sur la terre ferme (même à l'écart d'un continent), c'est devoir composer avec les devoirs (l'argent, le couple, la famille...), alors que partir en mer c'est y échapper, même ruiné et ridiculisé. L'arrogance de ce leader contredit son incompétence manifeste et celle de ses hommes et la décrépitude de son équipement, mais le contraste entre le panache dérisoire des personnages et les illusions dont ils se bercent fournissent justement les gags de l'histoire, gags qui gagnent en démesure au fur et à mesure que les avanies se multiplient.
Anderson s'est aussi amusé à pasticher génialement l'aspect suranné des documentaires de Cousteau (il sera intéressant de voir comment cela sera abordé dans L'Odyssée, le biopic plus classique, quoique promis comme sans concessions, sur le vrai commandant, par Jérôme Salle, avec Lambert Wilson, en salles cet automne). Pour ces séquences-là, le cinéaste a sollicité l'aide de Henry Selick, qui avait réalisé L'Etrange Noël de Mr Jack (1993, écrit et produit par Tim Burton), utilisant la technique stop-motion (de l'animation de maquettes et modelages miniatures image par image) : le résultat est superbe et contribue à insuffler une poésie touchante dans cette fantaisie délirante (à l'instar de ce passage mémorable où Zissou chasse, à lui seul, une horde de pirates de son navire, leur réglant définitivement leur compte plus tard sur une des îles Ping à coup de dynamite !).
Les seconds rôles sont savoureux et rendent la distribution éblouissante (Anderson, comme Woody Allen, a le privilège de séduire les plus grands acteurs désireux de s'offrir une escapade loin des productions plus formatées) : ainsi retiendra-t-on le numéro très marrant de Willem Dafoe en second jaloux ("Tu es dans l'équipe B, mais tu es le leader de l'équipe B. Ignores-tu que moi et Esteban t'avons toujours considéré comme notre petit frère ?" le réconforte Zissou), la prestation jubilatoire de Jeff Goldblum en rival "à moitié homosexuel" ("comme nous tous", dixit Zissou), ou la présence du chanteur brésilien Seu George qui a adapté plusieurs chansons de David Bowie en mode bossa-nova (étonnant mais très beau).
Certes, c'est assez inhabituel pour être noté, La Vie aquatique pâtit de quelques chutes de rythme (c'est aussi le film le plus long de Anderson : presque 120'), mais c'est une merveille d'extravagance et de non-sens, avec une émotion inattendue, contenue et poignante au final : cela suffit pour le distinguer et en faire un des opus les plus attachants de son auteur.
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