jeudi 10 mars 2016

Critique 836 : CHALAND - FREDDY LOMBARD, INTEGRALE TOME 2, d'Yves Chaland, avec Yann Lepennetier


CHALAND, FREDDY LOMBARD 2 est le deuxième tome de l'Intégrale de l'oeuvre d'Yves Chaland et rassemble les deux derniers albums de la série Freddy Lombard en un seul volume, publié en 1996 par Les Humanoïdes Associés.
Le premier récit s'intitule Vacances à Budapest, écrit par Yann Le Pennetier et Yves Chaland et dessiné par Yves Chaland en 1988, et compte 46 pages.
Le second récit s'intitule F.52, écrit par Yann Le Pennetier et Yves Chaland et dessiné par Yves Chaland en 1989, et compte 46 pages.
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LES AVENTURES DE FREDDY LOMBARD : VACANCES A BUDAPEST est le quatrième tome de la série, écrit par Yann Le Pennetier et Yves Chaland et dessiné par Yves Chaland, publié en 1988 par les Humanoïdes Associés.
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Eté 1956, en Italie. Dina Martino gagne sa vie en enseignant le latin à Laszlo Karczi, un adolescent hongrois, pendant que Freddy Lombard, son ex-mari, et leur ami, Jean "Sweep" Dupuis campent près de l'hôtel au bord du lac.
Laszlo veut regagner la Hongrie toujours sous la domination de la Russie trois ans après la mort de Joseph Staline comme il l'a confié à Dina, mais pour cela il doit fausser compagnie à sa tante.
Freddy et Sweep décident de conduire le garçon dans son pays sans Dina. L'oncle de l'adolescent est un dignitaire complice des russes, mais sa situation est compromise quand le peuple de Budapest s'insurge le 23 Octobre.
La révolte est cependant vite matée par l'armée soviétique et Laszlo, capturé, risque d'être déporté en Sibérie si Freddy, Sweep et Dina ne le sauvent pas...
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FREDDY LOMBARD, SWEEP ET DINA DANS F.52 est le cinquième et dernier tome de la série, écrit par Yann Le Pennetier et Yves Chaland et dessiné par Yves Chaland, publié en 1989 par les Humanoïdes Associés.
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1957. Freddy, Sweep et Dina sont engagés comme "extras" à bord du F.52, un avion révolutionnaire à propulsion atomique capable de rallier Paris à Melbourne en 24 heures.
Les passagers embarquent, ravis pour certains des bons prix accordés aux familles modestes, curieux de découvrir le pays des kangourous, toujours impatients pour les plus riches d'entre eux. Parmi eux se cache un espion russe chaussé pour capter des poussières de l'alliage secret du F.52.
Durant le vol, la petite Isadora Léger échappe à la vigilance de sa mère et tombe entre les griffes d'un couple de passagers en première classe qui veulent alors l'enlever et se débarrasser de leur propre fille mongolienne.
Sweep aide la mère éplorée de la fillette à la retrouver avec le concours de Freddy, qui tient le bar en première classe, et Dina, que le chef du personnel tente de séduire, tandis que l'équipage est occupé à démasquer l'espion...

Cette deuxième Intégrale de l'oeuvre de Yves Chaland clôt donc la série consacrée à son héros Freddy Lombard. Ce bel album ne compte que deux histoires, mais qui sont plus longues (46 pages chacune), et de superbes bonus sur les coulisses de la création des cinq tomes.

Dans cette section finale intitulée Images et Repentirs, on peut lire des déclarations témoignant des ambitions de Chaland : ses propos paraissent à la fois péremptoires, arrogants, et définitifs, mais expriment aussi la volonté de cet auteur de livrer des histoires où le lecteur serait mis à contribution, presque testé. En initiant des récits à la pagination plus conséquente, il était évident qu'il entendait mettre en application ses théories.

Dans Vacances à Budapest, Chaland dénonce ce qu'il considère comme une lâcheté des bandes dessinées contemporaines des événements qu'il aborde : en 1956, le journal de "Spirou" ou de "Tintin" ne firent pas allusion au drame hongrois. Le jugement de l'artiste est sévère car Franquin, par exemple, épinglait avec beaucoup d'audace les dérives politiques en Amérique du Sud dans Spirou et Fantasio : Le Dictateur et le champignon. Par ailleurs le traitement qu'il fait de l'insurrection de Budapest contre les tanks russes n'a rien d'un cours d'histoire magistral réparant une injustice littéraire : c'est un récit d'aventures au ton fantaisiste dont le dénouement est assez angélique.

Néanmoins, on ne peut que reconnaître l'efficacité narrative du projet, rehaussé par les dialogues piquants de Yann et des personnages bien définis, moralement assez ambigus pour que le trio de héros conserve la sympathie du lecteur. Dans cette configuration, Chaland expliquait que "Freddy Lombard serait un bélier, il fonce d'abord et réfléchit ensuite. Dina, c'est la tête qui parle peu et pense, et Sweep, c'est l'élément plus fort, il a une carrure, il n'est pas trop bête et arrive à faire la liaison entre les deux autres."

Mais la vraie réussite de ce volume et de toute la série reste l'ultime tome, F.52. Chaland a déclaré à son sujet : "Je me suis inspiré des "Science & Vie" de la fin des années quarante. On y voyait des avions à l'image de mon F.52. On pensait que les avions du futur seraient géants, stratosphériques et atomiques."

Ce superbe appareil est un personnage à part entière d'une histoire très originale, référentielle et efficace. Si l'artiste est toujours à l'origine du synopsis, la contribution à l'écriture de Yann est essentielle : on devine qu'il a charpenté l'intrigue, en a souligné les temps forts, défini la caractérisation des personnages avec une galerie de seconds rôles déterminants, ajouté des dialogues bien sentis.

Les influences qui traversent ces pages sont multiples mais reconnaissables : des clins d'oeil sont adressés à Blake & Mortimer : Le secret de l'Espadon d'Edgar P. Jacobs, Une Femme disparaît d'Alfred Hitchcock et même... Les frères Igor et Grichka Bogdanov (qui étaient des stars de la télé et de la vulgarisation scientifique dans les années 80) ! Le résultat est jubilatoire, troublant, atypique.

Et graphiquement, Chaland est au sommet de son art : il met en images ce huis clos en plein ciel en en conservant toute l'intensité dramatique, découpe en virtuose les parenthèses humoristiques, ose des planches (dont une pleine page psychédélique magistrale) tirant l'entreprise vers le fantastique, soutenu par la colorisation de Baumenay-Joannet.

Yves Chaland était un créateur unique et son oeuvre a conservé sa modernité tout en s'inscrivant dans un hommage à l'âge d'or de la bande dessinée franco-belge. (Re)lire Freddy Lombard permet de mesurer la singularité de cette oeuvre fulgurante dont les principes parfois cassants pour le lecteur ne doivent pas masquer les qualités narratives et esthétiques.    

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