jeudi 3 mars 2016

Critique 829 : ZOOTOPIE, de Byron Howard et Rich Moore


ZOOTOPIE (en version original : Zootopia) est un film d'animation réalisé par Byron Howard et Rich Moore, produit par John Lasseter et Osnat Shurer pour Walt Disney Production, sorti le 17 Février 2016 en France.
Le scénario est écrit par Jared Bush.
La musique est composée par Michael Giacchino, la chanson Try Everything est interprétée par Shakira.
Les voix françaises des personnages principaux sont assurées par :
 Alexis Victor
 Marie-Eugénie Maréchal
 Pascal Elbé
 Claire Keim
 Fred Testot
 Thomas N'Gijol
 Teddy Riner
*
*
Bienvenue à Zootopie ! 

Depuis qu'elle a neuf ans, Judy Hopps, une lapine qui vit à la campagne, est résolue à intégrer la police de la grande ville de Zootopie, ce qui  inquiète vivement ses parents. 
Maman et Papa Hopps 

A l'académie de police, la formation est rude mais Judy ne se décourage pas et finit par s'imposer grâce à son intelligence et son adresse. Major de sa promotion, elle obtient le grade de lieutenant et gagne donc Zootopie où elle est sous les ordres du chef Bogo, un bufle qui répond aux ordres du maire Lionheart.
Monsieur le Maire de Zootopie

Mais c'est la désillusion car, alors qu'une enquête sur la disparitions de plusieurs prédateurs est confiée aux autres policiers, Judy est affectée à la circulation. Alors qu'elle dresse, avec beaucoup de zèle, des contraventions, elle repère un renard roux, Nick Wilde, au comportement louche - à moins qu'elle ne le juge mal parce qu'elle avait été brutalisée, enfant, par un de ses congénères, Gideon Grey.
"Renard malin, lapin crétin !"

Mais, en le suivant, elle a la confirmation qu'il s'agit d'un escroc, opérant en binôme avec le fennec Finnick.
L'irascible Finnick
(doublé en français par... Teddy Riner !)

Cynique, Nick ne croit pas qu'on puisse échapper aux préjugés et même qu'il faut en tirer parti pour survivre. Néanmoins, Judy devine que ce renard, qui se vante de connaître tout le monde, surtout les animaux les moins fréquentables, pourrait l'aider à retrouver les prédateurs mystérieusement disparus, et le piège pour qu'il soit obligé de l'aider dans son enquête. 
"Lapin malin, renard crétin !"

Pour convaincre le chef Bogo de lui donner sa chance, Judy arrête Duke, un voleur de fleurs rares et sauve du même coup une musaraigne.
L'arnaqueur Duke

Elle obtient 48 heures pour retrouver le mari de Mrs Otterton, dont elle est sans nouvelles depuis dix jours.
L'attendrissante Mrs Otterton

Si elle échoue, elle devra démissionner !

Judy remarque en examinant la dernière photo de Mr Otterton, prise par une caméra de vidéo-surveillance, que celui-ci a croisé Nick Wilde. Le renard la conduit jusqu'à un club de naturistes où il a vu entrer le disparu et, grâce au réceptionniste Yax, ils apprennent qu'il est ensuite monté dans une limousine blanche.

Grâce au numéro d'immatriculation du véhicule, ils retrouvent le propriétaire qui n'est autre que Mr Big, le chef de la mafia de Zootopie, que Nick a eu le malheur d'arnaquer.
L'inattendu Mr Big.

Heureusement, Mr Big est aussi le père de la musaraigne qu'avait sauvée Judy quand elle avait arrêté Duke. Il était en affaires avec Otterton mais celui-ci ne s'est jamais présenté à leur dernier rendez-vous. Peut-être que le chauffeur de la limousine, le jaguar Manchas, pourra leur en dire plus...

En allant chez ce dernier, Nick et Judy le découvrent blessé et défiguré et racontant que c'est Otterton qui lui a fait cela, dans un accès de folie subit. Manchas devient soudainement déchaîné à son tour et attaque la lapine et le renard. Judy réussit à le menotter et prévient le chef Bogo mais, entretemps Manchas a réussi à s'échapper.

Il ne reste que dix heures pour boucler l'enquête. Nick et Judy accèdent à vidéo-surveillance de Zootopie grâce à l'adjointe au maire, Bellwether, et voient ainsi que ce sont des loups qui ont libéré le jaguar puis l'ont conduit jusqu'à un bâtiment à l'écart de la ville. Là-bas se trouve un laboratoire où sont retenus les prédateurs portés disparus, détenus avec l'accord du maire. Judy alerte Bogo qui procède à un coup de filet.

Lors d'une conférence de presse, Judy commet cependant un terrible impair en indiquant que les prédateurs sont tous susceptibles de redevenir sauvages. La conséquence de cette déclaration provoque une division dans la population de la ville où les proies se méfient des autres animaux. Nick se sent trahi et abandonne Judy, qui finit par donner sa démission et rejoindre ses parents à la campagne.

C'est pourtant ainsi que la lapine va apprendre le fin mot de cette intrigue, grâce l'intervention inattendue d'un Gideon Grey désolé de son comportement passé et de fleurs plantés par le père de Judy pour protéger son champ de carottes des nuisibles : des "hurleurs nocturnes"...

Retournant à Zootopie, elle convainc Nick de l'excuser et de reprendre l'enquête. L'identité du véritable responsable de cette machination sera surprenante et l'appréhender sera difficile...

C'est en étant abonné au blog de Cory Loftis le character's designer du film que je me suis intéressé il y a plusieurs mois à Zootopie.
Etude graphique des personnages
de Nick Wilde et Judy Hopps
par Cory Loftis

Les bandes-annonces qui se sont succèdés ensuite n'ont fait que confirmer m'on envie d'aller voir ce long métrage d'animation produit par John Lasseter, le créateur de Pixar, pour Disney : on y devinait une ambition narrative et visuelle rare et prometteuse.

Promesse tenue : c'est une réussite exceptionnelle !

L'histoire, écrite par Jared Bush, influencée autant par La ferme des animaux de George Orwell que par Le Grand Sommeil de Raymond Chandler, est une variation très intelligente et diablement efficace sur les préjugés : en associant à chacun des animaux du film les qualités mais surtout les défauts que les croyances personnelles ou les observations scientifiques leur ont prêtés, cette comédie policière prend le parti de s'en amuser tout en les dénonçant. 

Mené tambour battant, le récit se déploie avec une profusion d'idées, exploitant au maximum le cadre de l'action - cette cité-monde qu'est Zootopie avec ses quartiers correspondant aux écosystèmes (la jungle, les territoires polaires, la ville...) - et en joignant aux différents rôles tenus dans la société par des animaux selon leur potentiel humoristique - des paresseux aux guichets de l'administration (ce qui produit une séquence déjà culte, un vrai sommet d'absurde), des musaraignes à la tête de la mafia avec des ours comme gardes du corps, etc. 

Le film plaira aux plus petits car il s'agit d'une aventure palpitante et très drôle, mais séduira aussi les plus grands grâce à sa machination bien conçue, sa caractérisation bien définie, ses dialogues dynamiques et ses références cinéphiles savoureuses - ainsi la première apparition de Mr Big est un clin d'oeil irrésistible au Parrain de Francis Ford Coppola, et le tandem formé par l'opiniâtre lapine Judy Hopps et le renard filou Nick Wilde renvoie au meilleurs duos des buddy movies, tandis que le délai accordé par le chef Bogo à Judy pour boucler son enquête est une citation directe à 48 heures de Walter Hill. 

La mise en images de Byron Howard, qui avait déjà réalisé les très réussis Volt star malgré lui et surtout Raiponce (en 2008 et 2010), et Rich Moore, qui avait signé Les Mondes de Ralph (en 2012), est éblouissante : le film est d'une telle richesse esthétique qu'une seule vision ne suffit pas à apprécier toutes ses subtilités, mais le résultat est impressionnant, qu'il s'agisse de la représentation de Zootopie (avec une abondance de décors vertigineuse) ou des personnages (animés d'après nature, après des repérages au Kenya notamment).

Je n'ai pu voir le film qu'en version française mais le doublage est tout à fait exemplaire : contrairement à beaucoup de productions de cet acabit, le choix des interprètes n'a pas privilégié des personnalités à l'identité vocale trop marquée ou retenues en fonction de leur popularité. Il y a certes des seconds rôles connus, comme Fred Testot (pour Clawhauser, le réceptionniste du poste de police), Claire Keim (pour Bellwether, l'adjointe au maire), Thomas N'Gijol (désopilant pour Yax, l'agent d'accueil du club naturiste), ou Pascal Elbé (pour le chef Bogo), mais on n'est jamais gêné par leur présence car ils ont su modifié leurs intonations. Même le judoka Teddy Riner est utilisé habilement (pour Finnick, le complice occasionnel et acariâtre de Nick).
Marie-Eugénie Maréchal (pour Judy) et Alexis Victor (pour Nick) sont impeccables, très expressifs.

Il faut, enfin, saluer la bande originale composée par Michael Giacchino, aux ambiances sonores très variées et souvent toniques. La chanson interprétée par Shakira, Try everything, n'est pas extraordinaire (c'est un hymne classique à la gloire du dépassement de soi et de la tolérance) mais on ne l'entend que raisonnablement et souvent avec malice (le personnage de pop-star, Gazelle, jouant un rôle à la marge, bien amusant).

Zootopie est une vraie merveille, et le potentiel de ses héros et du décor plus le succès déjà acquis du film ouvrent la voie à une suite. Mais, en l'état, c'est un authentique bijou, dont les qualités lui donnent toute sa place à côté d'autres pépites comme Ratatouille et les meilleurs longs métrages de Pixar avec lequel Disney Animations partagent le même directeur artistique. 

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