Avant-propos :
Après avoir parlé des huit tomes qui constituent le Cycle Spatial de la série, je vais donc rédiger les critiques des épisodes du CYCLE TEMPOREL.
Cependant, hélas ! je dois le dire tout de suite, je ne pourrais pas tous les passer en revue car je ne dispose pas des tomes 19 à 22 (qui forment la dernière saga et l'épilogue de toute la série).
La construction du Cycle Temporel diffère de celle du Cycle Spatial en cela qu'elle propose des histoires possédant un fil chronologique, qui doivent donc se lire comme un feuilleton à suivre.
Cette suite court sur les tomes 1, 2, 6, 9, 10, 11, 12, 13, 15 et 18. Les tomes 9 et 10 forment un diptyque, de même que les tomes 11 et 12. Pour respecter ces compositions, je vais donc procéder par des entrées qui compteront parfois les critiques de trois albums (comme celle-ci), puis de deux (pour respecter les diptyques).
Concrètement je parlerai donc d'abord :
- des tomes 1 (La Cité des eaux mouvantes), 2 (L'Empire des mille planètes) et 6 (L'Ambassadeur des ombres) ;
- puis des tomes 9 et 10 (Métro Châtelet, Direction Cassiopée et Brooklyn Station, Terminus Cosmos) ;
- puis des tomes 11 et 12 (Les Spectres d'Inverloch et Les Foudres d'Hypsis) ;
- et enfin des tomes 13 (Sur les Frontières), 15 (Les Cercles du Pouvoir) et 18 (Par des Temps incertains).
- des tomes 1 (La Cité des eaux mouvantes), 2 (L'Empire des mille planètes) et 6 (L'Ambassadeur des ombres) ;
- puis des tomes 9 et 10 (Métro Châtelet, Direction Cassiopée et Brooklyn Station, Terminus Cosmos) ;
- puis des tomes 11 et 12 (Les Spectres d'Inverloch et Les Foudres d'Hypsis) ;
- et enfin des tomes 13 (Sur les Frontières), 15 (Les Cercles du Pouvoir) et 18 (Par des Temps incertains).
Stay tuned !
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VALERIAN : LA CITE DES EAUX MOUVANTES est le premier tome de la série (et le premier chapitre du CYCLE TEMPOREL), écrit par Pierre Christin et dessiné par Jean-Claude Mézières, publié en 1970 par Dargaud.
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Au XXIVème siècle, Galaxity est la capitale de l'empire galactique terrien. Deux de ses agents, Valérian et Laureline, sont appelés pour une nouvelle mission : il leur faut pourchasser un dissident qui vient de s'évader de prison, le super intendant des rêves, Xombul, qui veut prendre le pouvoir en remontant le temps pour réécrire l'Histoire.
Xombul réussit à atteindre la Terre du XXème siècle, en 1986 exactement, où il pense profiter du cataclysme nucléaire qui a dévasté la planète - et marqué le début de l'Âge Noir sur lequel subsiste le plus grand secret au point que les autorités de Galaxity y interdisent tout voyage.
Valérian est autorisé par son supérieur à enfreindre les règles et débarque dans New York submergé par les eaux, à cause de la fonte des glaciers. Tandis que Xombul espère s'emparer des connaissances scientifiques de l'époque pour devenir le maître de l'univers, Sun Rae, un pillard, et Schroeder, un jeune savant, aident Valérian et Laureline, qui l'a rejoint, à le poursuivre.
En s'emparant d'un prototype de machine spatio-temporelle conçue par Schroeder, Xombul disparaît, dématérialisé, car l'équipement n'était pas pleinement opérationnel. Valérian et Laureline n'ont pas pu (d'ailleurs ils n'ont pas le droit de modifier le cours de l'Histoire) éviter le cataclysme mais ont neutralisé l'ennemi.
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VALERIAN : L'EMPIRE DES MILLE PLANETES est le deuxième tome de la série (et le deuxième chapitre du CYCLE TEMPOREL), écrit par Pierre Christin et dessiné par Jean-Claude Mézières, publié en 1971 par Dargaud.
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En 2720, Valérian et Laureline, partis enquêter sur la planète Syrte-la-magnifique afin de déterminer si elle ne représente pas une menace pour l'empire terrien, vont prêter main forte à la guilde des commerçants dirigée par le marchand Elmir à rétablir l'ordre et la justice sur place.
Ce monde est effectivement sous la coupe des Connaisseurs, un ordre religieux strict et redouté, mais dont Valérian va découvrir la véritable identité : il s'agit en vérité des rescapés terriens d'une expédition spatiale lancée à la recherche d'une planète pour accueillir la race humaine après le cataclysme nucléaire de 1986.
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VALERIAN : L'AMBASSADEUR DES OMBRES est le sixième tome de la série (et le troisième chapitre du CYCLE TEMPOREL), écrit par Pierre Christin et dessiné par Jean-Claude Mézières, publié en 1975 par Dargaud.
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Valérian et Laureline sont réquisitionnés pour être les gardes du corps de l'ambassadeur de la Terre qui veut imposer un nouvel ordre à Point Central.
A peine arrivés, Valérian et l'ambassadeur sont enlevés par un commando de mercenaires. Laureline et le responsable du protocole, le geignard colonel Diol, partent à leur recherche en explorant le dédale de Point Central où chaque information se monnaie.
Laureline finit par découvrir que Valérian et l'ambassadeur sont captifs du puissant mais pacifiste peuple des Ombres, le premier à s'être établi à Point Central. L'ambassadeur porte leur parole devant le grand conseil... Qui décide d'exclure la Terre pour 100 ans en représailles à son hégémonie.
Avec ces trois albums, nous remontons aux sources de la série créée par Pierre Christin et Jean-Claude Mézières, et bien que la première histoire (La cité des eaux mouvantes) date de 1968, on peut mesurer sa modernité intacte et son efficacité imparable. C'est vraiment l'oeuvre de deux visionnaires, par la narration et l'esthétique.
Le premier tome prend la forme classique d'un pur récit d'aventures auquel sont ajoutés des éléments fantastiques dans la plus pure tradition de la science-fiction : un malfrat remonte le temps, le héros l'y poursuit, bientôt rejoint par sa partenaire, ils y croisent des individus dépassés par la situation mais dont le rôle sera déterminant dans la résolution de l'intrigue. Le tout est mené sur un rythme très vif, sans temps mort, dans des décors impressionnants (maintes fois revus depuis - New York submergé par l'océan suite à la fonte des glaciers du Pôle Nord).
Ce qui frappe aussi, c'est que, dès le début, Christin établit la série sur, non pas un héros solitaire (quand bien même Valérian agit seul pendant une douzaine de pages), mais sur le couple formé par Valérian et Laureline, et la jeune femme n'est pas un faire-valoir mais bien une femme d'action au caractère affirmé. Toute la construction de la série s'en trouvera atteinte et lui assure une modernité étonnante pour l'époque.
L'affrontement contre Xombul repose sur des motifs classiques (le méchant qui veut dominer l'univers en réécrivant l'Histoire à sa convenance) mais le scénario sait déjouer les clichés en n'accumulant pas les combats. Il s'agit davantage d'une course-poursuite, pleine de rebondissements, où les bons ont souvent un coup de retard, qu'ils compensent par leur ténacité et leur vigueur.
Christin glisse aussi des éléments comiques qui permettent de faire respirer l'intrigue tout en la faisant progresser : le personnage de Schroeder est ainsi directement inspiré par celui incarné par Jerry Lewis dans Dr Jerry et Mr Love, l'archétype du savant qui ne se doute pas de l'aspect précurseur de ses inventions (en l'occurrence la première machine à voyager dans le temps). Le personnage de Sun Rae (dont le nom évoque celui du jazzman Sun Ra) est aussi une parodie de gangster-gourou dont l'opportunisme dépasse en quelque sorte la malfaisance (dans la mesure où il aide les héros).
L'Empire des mille planètes voit la série monter en gamme avec un récit très ambitieux, suggéré par son titre. L'album connaîtra certainement un regain d'intérêt pour le public quand, en 2017, le film de Luc Besson qui en est l'adaptation sortira au cinéma : le cinéaste n'a pas choisi la facilité en jetant son dévolu sur cette aventure qui a toute d'une superproduction mais qui se double d'une réflexion sur l'obscurantisme religieux et le mercantilisme.
Dans cette histoire, Valérian et Laureline subissent plus souvent qu'ils ne contrôlent la situation : rapidement confrontés aux mystérieux et inquiétants Connaisseurs, ils s'allient ensuite à la Guilde des marchands, mais ces deux camps ne sont pas vraiment recommandables (les Connaisseurs sont présentés comme des fanatiques religieux, esclavagistes ; les marchands pensent d'abord à rétablir des relations commerciales avec l'empire galactique).
Lorsque Valérian - et le lecteur - découvre la vérité sur l'identité et le passé des Connaisseurs, il apprend aussi leur triste condition, leur rôle sacrificiel. Mais Christin a ainsi la possibilité d'inscrire la série, encore toute récente, dans une perspective à la fois prometteuse et vertigineuse. Replacé dans sa continuité complexe, ce tome se déroule l'année (2720 donc) où Laureline a intégré officiellement le SST (Service Spatio-Temporel) et où les troubles provoqués auparavant par Xombul entament le statut de Galaxity.
L'Ambassadeur des ombres est encore plus déterminant dans la trame chronologique de la série : l'action se passe en 3005 et aboutit à l'exclusion de Galaxity de Point Central. On apprend pourquoi et la raison n'est pas banale : l'ambassadeur terrien venu pour imposer au grand conseil une stricte remise en ordre est enlevé par un peuple premier qui le convertit à une philosophie pacifiste, qui sera rejetée.
Chez Christin, on le sait, toute société a ses classes, les civilisations sont très hiérarchisées, ce qui a pour effet d'en souligner les inégalités et les défauts : Point Central est ainsi décrit comme un endroit tentaculaire, aux dimensions spectaculaires, mais profondément corrompu, avec des castes opprimées et des privilégiés indifférents. Ce que suggère l'auteur, c'est que cette place forte est déclinante parce qu'elle reproduit à une plus grande échelle les tares de Galaxity : c'est une version futuriste et cosmique de l'O.N.U., qui réagit radicalement à l'hégémonie terrienne - à laquelle Laureline répond en la déjouant lorsqu'elle plaide pour la libre détermination des peuples.
Mais, avant tout cela, c'est un récit jubilatoire et surprenant : Valérian est très vite mis sur la touche et Laureline tient la vedette (confirmant son statut d'héroïne à part entière). Pour la première fois, on fait la connaissance du transmuteur grognon de Bluxte (cet alien capable de répliquer des objets de valeur et toutes les monnaies sonnantes et trébuchantes, d'une manière très drôle) et des Shingouz (ces trois extra-terrestres qui monnaient n'importe quelle information, tout en étant d'excellents indics), qui reviendront régulièrement dans la série. Flanquée de ces bestioles et d'un responsable protocolaire couard, Laureline explore les méandres de Point Central, faisant connaissance avec quantité de créatures avec courage jusqu'à ce qu'elle retrouve enfin son partenaire (persuadé d'avoir fait le plus dur dans cette affaire).
Visuellement, ces trois tomes sont notables pour l'évolution du graphisme de Mézières : au départ, son style a un côté cartoony, les personnages ont une physionomie semi-réaliste, tandis que les décors possèdent déjà un sens du détail minutieux remarquables. Le découpage est cependant parfois maladroit comme en témoigne la présence de flèches indiquant fréquemment au lecteur le sens dans lequel s'enchaînent les cases. Mais la force de séquences comme la fuite de New York ou la traversée mouvementée du parc de Yellowstone sont indéniables.
Avec L'Empire des mille planètes, on comprend ce qui a décidé Luc Besson à l'adapter : la planète de Syrte-la-magnifique offre une variété de sites et d'ambiances qui, avec les possibilités illimitées des effets spéciaux aujourd'hui, garantit au cinéma une histoire très dépaysante. Mézières y affiche des dispositions exceptionnelles pour représenter un monde inventé de toutes pièces, avec géographie, ses habitants (aux physionomies extraordinaires), que traverse le couple de héros avec un mélange de sentiments égale au lecteur (tour à tour fasciné et angoissé). Le découpage a gagné en fluidité, même s'il y a encore de menus défauts (une dernière page mal montée qui rend le dénouement trop vite expédié). Néanmoins, la gestion des cases, quelques splash-pages sensationnelles, des jeux d'ombres et de lumières produisant des ambiances intenses, sont épatantes.
L'Ambassadeur des ombres profite de l'expérience engrangée par Mézières : il s'agit de son sixième tome et se situe après des opus majeurs comme Le Pays sans étoiles, Bienvenue sur Alflolol et Les Oiseaux du Maître (tomes 3, 4 et 5, appartenant au Cycle Spatial), le dessinateur est désormais un artiste plus accompli, dosant parfaitement ses effets, maîtrisant bien ses personnages et sa narration. L'aspect le plus spectaculaire de cet album tient encore une fois dans la représentation des aliens auxquels Mézières donne les apparences les plus folles et une expressivité fabuleuse. Il prouve aussi, si besoin était, qu'il est aussi à l'aise pour animer une histoire avec une femme au premier plan, sans que son trait soit affecté.
Tout cela forme donc un trio de premier ordre. (Re)lire Valérian confirme bien que c'était une série hors normes qui, partie sur des bases ambitieuses, a su conserver un niveau prodigieux.
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