J'avais beaucoup aimé le premier épisode de Knights of X et bien entendu, j'attendais confirmation pour le suivant. Tini Howard signe un numéro très rythmé et très dense, comme à son habitude. La quête de ses chevaliers mutants ne laissent aucun répit ni à ses héros ni au lecteur. Bob Quinn se cale sur ce script et aligne des planches très dynamiques.
La Citadelle Lunatique. Furieux des renforts acquis par Betsy Braddock, Merlin décide de compter des alliés et congédie les Mercator et fait enfermer Mad Jim Jaspers, lui-même mutant.
Rachel intercepte l'appel au secours de Jaspers qui convainc Betsy de l'envoyer, avec Gambit, Meggan, Bei Lune Rouge et Kylun délivrer le maître déchu de Fourbe Foire.
De son côté, Betsy avec Rictor, Shatterstar et Mordred est téléportée dans les Phriches car Roma Regina a relevé l'absence de Giada Whitechapel à la Citadelle Lunatique et le pense en danger.
Il y a quelque chose de formidablement dépaysant dans cette série, comme c'était le cas déjà dans Excalibur, mais ici de façon encore plus prononcée. Il paraît évident que Tini Howard a les coudées plus franches et en ayant situé l'action de sa série dans l'Outremonde, elle ne dépend plus de ce qui se joue sur Krakoa.
C'est évident que la scénariste a calculé son coup : alors que durant son run sur Excalibur, elle a dû composer avec des éléments qu'elle ne maîtrisait pas ou auxquels elle avait accepté de se soumettre (qu'il s'agisse de l'intégration de Malicia aux X-Men ou des péripéties de X of Swords), avec Knights of X, elle joue sur le terrain qu'elle a élu. Personne ne viendra lui piquer ses personnages ni interférer avec ses intrigues.
Du coup, on évolue dans un espace qui n'a rien à voir avec les autres titres de la franchise X (bien qu'avec le nouvel arc de New Mutants qui vient de débuter, dans les Limbes, Vita Ayala manoeuvre un peu identiquement). Et le lecteur peut apprécier la série sans avoir à se préoccuper de ce qui se passe ailleurs.
Mais que se passe-t-il justement ? Forte d'un casting fourni, Howard doit trouver le moyen d'hononrer chacun de ses personnages. Elle opte pour une formule qui a fait ses preuves en divisant ses dix chevaliers en deux groupes. A chacun sa mission sur la base du nouvel ordre de l'Outremonde. Merlin est furieux que ses alliés n'aient pas pu empêcher Betsy Braddock de s'être renforcée et il préfère écarter ceux qu'ils soupçonnent de ne pas le servir ou qui ne choisissent pas un camp. Les impénétrables Mercator sont ainsi mis au ban (sans qu'on devine bien sûr si cela les dérange). Mais surtout, il inhibe les pouvoirs de Mad Jim Jaspers et le fait enfermer - logique : c'est un mutant et un marchand, suspect de se vendre au plus offrant (et Merlin ne commerce pas).
L'autre élément qui va obliger l'équipe des chevaliers à se scinder en deux, c'est l'absence inquiétante de Giada Whtechapel, la shériff des Phriches. Roma Regina a remarqué qu'elle n'était pas là lors de la fameuse réunion à la Citadelle et la question se pose de savoir si Merlin s'en est aussi pris à elle ou si Giada (une mutante elle aussi) a préféré tourner le dos à ses semblables.
Le premier groupe se constitue autour de Rachel Summers, avec Gambit, Meggan, Bei Lune Rouge et Kylun. C'est une formation séduisante, plus sexy, avec de forts caractères, des visages familiers pour le lecteur. Il m'a semblé en tout cas que Howard lui prêtait plus d'attention, lui offrait un parcours plus captivant, avec le décor de Fourbe Foire désormais quadrillée par les Furies : cela évoque forcément des images plus anciennes au fan des X-Men avec les Sentinelles qui veillent, détectent et éliminent. La bataille à laquelle on assiste est spectaculaire mais si en observant Kylun à la fin, on devine que la partie n'est pas gagnée pour Rachel et compagnie.
Le second groupe se prive de Shogo, que Betsy a juré à Jubilé de protéger (lors d'une communication télépathique avec le conseil de Krakoa au sujet du Siège Périlleux). Roma, qui parle presque pour le lecteur, avertit Betsy qu'elle sacrifie un élément important pour sa quête, mais je parie que le dragon ne restera pas longtemps dans sa réserve du Royaume Flottant de Regina. Accompagnée par Rictor, Shatterstar et Mordred, Betsy part pour les Phriches où, en effet, Giada Whitechapel est en fâcheuse posture, captive des Vescora (pour rappel : il s'agir de ces créatures apparues lors de X of Swords dans la station abandonnée du SWORD et qui étudient puis tuent tout ce qu'elles trouvent sur leur route). Merlin les a, apparemment, soumises ou en tout cas s'en est fait des alliées. Giada se sacrifie pour permettre à Betsy et sa bande de poursuivre leur chemin, en direction du Royaume de Sevalith (des vampires, à la solde de Merlin).
Une page doit retenir notre attention quand Howard retranscrit un échange épistolaire entre Rictor et Cypher à propos d'un document très ancien laissé par Apocalypse et dont le déchiffrage, partiel, fait avec Bei Lune Rouge, laisse penser que En Sabah Nur a caché dans l'Outremonde quelque chose de très précieux. A quelle fin ? Pour qui ? Contre qui ? A mon avis, ce sera une quête dans la quête, en plus de trouver le Siège Périlleux. J'espère aussi que ça augure d'un retour sur le devant de la scène d'Apocalypse car j'avais adoré ce que Hickman avait fait de lui et je me rappelle qu'à la fin de X of Swords, En Sabah Nur avait promis à Cyclope qu'il reverrait Xavier ("le professeur").
Au dessin, Bob Quinn m'épate vraiment. Je ne l'attendais pas à ce niveau. Déjà, le mois dernier, j'avais été positivement surpris par sa prestation, et il confirme cette excellente impression. Non pas qu'il ait un style ébouriffant : comme beaucoup, il dessine numériquement et son encrage est trop lisse parfois. De même, on sent qu'il se retient parfois dans les expressions pour ne pas aller trop loin dans le cartoony, un peu à la manière de ce que pourrait faire un Humberto Ramos.
Mais, ces détails mis à part, il faut bien avouer qu'il fait le job, et il le fait remarquablement. Dessiner un team-book n'est pas chose aisée, c'est exigeant. Imaginez les difficultés d'avoir à dessiner une série sur un héros solo : multipliez ces difficultés par le nombre de personnages que compte l'équipe et vous aurez un aperçu des efforts à fournir pour produire vingt pages mensuelles. (J'emprunte cette réflexion, qui est tout à fait fondée, à Patrick Zircher, qui en paralait récemment sur son fil Twitter - c'est toujours passionnant ce que Zircher raconte).
En prime, Quinn doit faire avec des décors qui n'ont rien d'évident puisque l'Outremonde, ses Royaumes sont autant d'endroits étranges, inquiétants, farfelus, qu'il faut sinon inventer en tout cas avec lesquels il faut composer. Pour ne rien arranger, les protagonistes ne sont pas des super-héros classiques mais des chevaliers aux looks revus et corrigés pour la cicronstance. Et opposés à des adversaires tout aussi fantasques.
Lorsque Quinn doit découper le sauvetage de Giada Whitechapel dans une carrière remplie de Vescora, c'est un vrai test pour mesurer l'investissement de l'artiste. Et de ce côté-là, on peut dire qu'il ne fait pas les choses à moitié en privilégiant des cases de dimensions généreuses qu'il faut remplir. Du côté de Fourbe Foire, Quinn soigne aussi l'intérieur d'une taverne et le combat de la bande de Rachel dans les rues contre des Furies géantes a une sacrée patate.
Knights of X est un divertissement haletant et riche. On voit que Tini Howard a beaucoup de choses à raconter, qu'elle a une histoire sur le long terme, et elle bénéficie d'un partenaire remonté comme un coucou avec Bob Quinn. Difficile de résister à ce tandem si motivé pour nous embarquer dans leur épopée.
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