Après un démarrage canon, Flashpoint Beuond marque un peu le pas dans ce deuxième épisode, plus calme et psychologique. On peut y voir la marque des trois scénaristes, chacun tentant de se faire une place, même si la tonalité générale et quelque indices à la fin confirment que Geoff Johns est bien aux commandes; Xermanico, de son côté, assure grave, tandis que Mikel Janin s'acquitte des deux dernières planches.
De retour de son périple londonien, Thomas Wayne établit des liens entre les victimes du Tueur de l'Horloge, tous en rapport avec la manipulation du temps. Puis il se rend à son casino détruit.
Un bref échange avec l'officier de police responsable de l'enquête conduit Flashpoint Batman à l'asile d'Arkham où il trouve le Psycho-Pirate suicidé, mais ayant laissé plusieurs indices avant son meurtre.
Quittant la cellule du Pyscho-Pirate, Flashpoint Batman est interpelé par Gilda Dent qui lui assène quelque vérités cruelles sur ses échecs en tant que mari et père.
Quittant l'asile, il se passe les nerfs sur une bande de voyous en train de rançnner une femme dans une ruelle. Mais son intervention est interrompue lorsqu'il va tuer le chef de ces voleurs...
C'est ce qui s'appelle entraîner le lecteur (comme le héros) sur une fausse piste : le mois dernier, dans le premier épisode de Flashpoint Beyond, on pouvait croire que cette mini-série allait revenir sur les grands événements de Flashpoint, avec notamment la guerre entre atlantes et amazones. Mais ce n'étiat qu'une diversion.
Thomas Wayne a été éloigné de Gotham à dessein par un tueur en série, le Tueur de l'Horloge (Clockwork Killer en vo) qui s'en prend à des individus manipulant le temps. Reliant ces meutres à la mort de Barry Allen, Wayne comprend que quelqu'un cherche à restaurer sa ligne temporelle, mais sans encore comprendre pourquoi. Il comprend également qu'il n'a pas la patience de son fils (notre Batman, Bruce Wayne) pour résoudre cette affaire et qu'il va employer sa méthode, la manière forte, pour obtenir des informations.
Ses investigations le mènent à l'asile d'Arkham où il apprend que le Psycho-Pirate est enfermé. Or il sait que ce vilain n'a rien à faire dans sa dimension mais qu'il pourrait lui apporter des réponses précieuses sur le Tueur et son objectif. Mais il est devancé...
Avec cette ambiance poisseuse, très noire, on est plein grim'n'gritty, ce qui est familier à Geoff Johns. Si on en doutait encore, c'est donc bien lui le chef d'orchestre de Flashpoint Beyond, et c'est normal puisque, après tout, il revient sur l'évent qu'il avait écrit il y a une dizaine d'années. Mais on sent aussi dans cet épisode des lignes de tension dues à la cohabitation entre Johns et ses deux co-scénaristes, Jeremy Adams et Tim Sheridan, dont, eux, on peut se demander quel est leur rôle.
Il me semble évident que Johns n'a pas demandé à être assisté sur cette mini-série. Est-ce à dire que DC lui a imposé ces collaborateurs ? On ne le saura jamais, mais ça en a tout l'air. A quel fin ? Mystère.
Toutefois, il est certain que la rédaction du script témoigne des tensions. D'un côté, on a, non pas vraiment des scènes entières, mais des pages, des narratifs, curieux, qui freinent la progression de l'histoire, qui décompressent bizaremment. Et de l'autre, des coups d'accélérateurs, des mentions frappantes.
Quand est cité, subrepticement, dans un dialogue, Dark Crisis (l'event actuellement publié par DC), on ne voit franchement pas trop l'intérêt, sinon pour suggérer au lecteur que l'univers Flashpoint fait bien partie de l'Omnivers théorisé par Joshuia Williamson. Et bon, comment dire ? L'Omnivers est quand même une idée totalement conne : il s'agit d'un ensemble de Multivers, et déjà que la notion de Multivers a du mal à être exploité pleinement par DC (comme par Marvel), que c'est suffisamment dense et riche à explorer, à quoi bon parler d'Omnivers pour dire qu'il existe quelque chose qui rassemble des Multivers ? Va falloir arrêter de jouer avec ça parce que ça ne sert à rien, sinon à rendre encore plus confus ce qui l'est déjà assez. Le Multivers est bien suffisant pour qu'on ne rajoute pas un étage supplémentaire.
Mais au fond, qu'est-ce que ça dit de l'écriture de Flashpoint Beyond ? Que certainement, à mon avis, Tim Sheridan et Jeremy Adams sont là pour intégrer des directives éditoriales de DC dans la mini-série, en quelque sorte de porter la parole du nouvel architecte qu'est Williamson.C'est un peu cacophonique.
Johns sait raconter ses histoires comme un grand, parfois avec réussite, parfois en étant scotché à des obsessions un peu vaseuses (notamment sa fixette sur Alan Moore, comme on a l'occasion de se le rappeler dans les deux dernières pages de l'épisode - car, oui, Johns a encore réussi à glisser du Watchmen dans cette histoire !).
D'où l'impression forcément mitigée que produit cet épisode : il y a les citations à Dark Crisis, à Watchmen. Et il y a le reste, qui est bien meilleur mais surtout suffisant. L'enquête du Flashpoint Batman, son portrait psychologique, c'est vraiment très bon. Ce Tueur de l'Horloge est vrraiment retors et énigmatique, l'apparition du Psycho-Pirate (même si je ne crois guère qu'il soit définitivement mort, c'est un vilain trop emblématique de l'Histoire de DC et des Crisis), et le face-à-face électrique entre Wayne et Gilda Dent fournissent leur lot de moments intenses, et limite gore (du Johns tout craché donc).
Pour compenser cette écriture un peu boîteuse, on peut encore compter sur une prestation remarquable de Xermanico, décidément très inspiré par cet univers. Mitch Gerads, qui signe les couvertures régulières de la mini-série, a dit sur Twitter à quel point le Flashpoint Batman était amusant à dessiner, et effectivement, Xermanico lui donne du relief.
Avec ses yeux rouges sous son masque, sa cape aux épaulettes pointues, sa silhouette plus massive, c'est un bulldozer flippant, loin du Batman classique, mais pas si décalé quand on se rappelle qu'à ses tout débuts l'homme chauve-souris se baladait avec un flingue et utilisait des méthodes expéditives comme sou double actuel.
Romulo Fajardo applique aux planches de Xermanico des couleurs somptueuses, qui soulignent le look série noire du projet, avec des décors grisâtres, sinistres à souhait, son héros ombrageux, mais aussi avec des nuances vraiment jubilatoires comme lors du dialogue hallucinant entre Thomas et Gilda quand le visage de cette dernière fait subitemetn et brièvement place à celui de Martha Wayne avant de redevenir celui de la veuve de Harvey Dent. Un court instant, on partage vraiment le trouble du héros, le brouillage de la perception. Magistral.
Mikel Janin intervient pour les deux dernières pages se situant dans notre dimension, avec Bruce Wayne et Corky Baxter, dans la Batcave. C'est là qu'est cité Watchmen, via Jenny Slater et le Dr. Manhattan (sans qu'il soit nommé, mais bon, la déduction se fait toute seule). Jordie Bellaire s'occupe des couleurs pour cette scène.
Même si donc Flashpoint Beyond est parfois cacophonique et bancal, sa bizarrerie en fait quelque chose de prenant. C'est superbement mis en images par ailleurs. J'ai envie de voir où ça va aller.
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