La période du DC "New 52" a réservé son lot de réussites, d'échecs, mais aussi de curiosités, comme si, prévue pour ne durer qu'un temps, elle était un laboratoire. C'est du moins ainsi que je la conçois avec le recul, et à la lecture d'une des séries les plus étonnantes de cette époque : la version des Secret Six par Gail Simone, Ken Lashley, Dale Eaglesham et Tom Derenick.
Le titre n'a pas duré bien longtemps, à peine 14 n°, mais l'expérience vaut le détour pour qui est amateur de bizarreries. Voyons ce que donne le premier arc narratif, comptant six épisodes.
Catman, après une bagarre dans un bar, est "tasé" par Sue Dibny. A son réveil, prisonnier de Mockingbird, il est enfermé dans un immense cercueil sous l'eau en compagnie de cinq autres individus : Big Shot (un détective colossal), Porcelain (un transsexuel capable de fragiliser tout ce qu'elle touche), la Ventriloque (capable d'animer les objets) et sa marionnette, Strix (de la Cour des Hiboux), et Black Alice (magicienne). Sur un écran apparaît une question à leur adresse : "quel est le secret ?", à laquelle ils doivent répondre sinon l'un d'eux sera exécuté.
Ils réussissent à s'évader et se réfugient dans le pavillon de banlieue de Big Shot où ils doivent affronter aussi bien des flics corrompus et violents que la bande de Scandal Savage (avec Ragdoll et Jeanette). Par hasard, Catman découvre le double jeu et la véritable identité de Big Shot : il s'agit de Ralph Dibny et il est complice de Mockingbird, derrière lequel se cache le Riddler... Qui détient Sue Dibny !
Mais pourquoi le Riddler en veut à ces Secret Six ? Parce qu'il est convaincu que l'un d'eux lui a volé un précieux diamant, qu'il voulait offrir à Sue Dibny pour la demander en mariage lors d'une réception sur un yacht. Tous les six étaient présent ce soir-là, Catman assurait la sécurité, les Dibny enquêtaient sur le diamant volé, les autres le convoitaient... Il est temps de s'expliquer, mais les choses vont dégénérer.
Gail Simone adore visiblement le personnage de Catman à qui elle a redonné du lustre depuis Villains United (souvenez-vous, c'était avant Infinite Crisis), puis dont elle a fait le leader des Secret Six dans plusieurs volumes du titre. Elle en fait donc logiquement le héros de cette nouvelle version qui se distingue par son ton déjanté.
L'intrigue démarre très fort et maintient ce niveau jusqu'à son 5ème épisode. Le dénouement est plus convenu, mais au centre de cette arche narrative, la scénariste laisse espérer au lecteur un objet curieux qu'elle n'assume pas complètement (à mois que l'editor ne l'ait rappelée à l'ordre). Lorsque les Six doivent cohabiter chez Big Shot et voisiner avec un environnement hostile, c'est un vrai festival, tellement absurde qu'on croirait lire un titre Vertigo égaré dans du DC classique : Catman casse la figure à un flic qui maltraite son chien - intolérable ! - , la transsexualité de Porcelain, Strix qui pouponne un nain de jardin, la dégaine décharnée de la Ventriloque, l'autonomie flippante de sa marionnette, la relation quasi-filiale entre Big Shot et Black Alice... Tout ça compose un ensemble réjouissant et franchement atypique.
La partie graphique est très inégale en revanche : on passe des pages de Lashley, mochissimes (pour les #1-2 et 4), à celles, splendides, fourmillantes de détails, d'une expressivité fabuleuse, d'Eaglesham (sur les #3 et 5), en passant par du bon Derenick (qui seconde Lashley sur le #4 et soutient Eaglesham sur le #5, et signe seul le #6). Cette disparité visuelle est au diapason de l'histoire qui n'est jamais meilleure que dans ses passages les plus étranges et quelconque que lorsqu'elle renoue avec le folklore super-héroïque.
Très original (comme les pouvoirs des persos), solide (un plot bien fichu), à suivre pour savoir si les prochains (et derniers) épisodes tiennent ces promesses. Avant un retour sous la bannière "Rebirth" des Six ?
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