Pour l'heure, en tout cas, Waid ouvre l'épisode par un léger retour en arrière, avant que Superman, Batman et les Teen Titans n'arrivent pour sauver David Sekela/The Boy Thunder des griffes du Joker et de la Clé.
La Clé justement a relevé que le garçon avait avoué venir d'une Terre parallèle et que son vaisseau garé dans la Forteresse de Solitude de Superman pourrait être le véhicule pour explorer le Multivers. Il le drogue donc afin de savoir comment pénétrer dans le bâtiment et accéder à l'engin.
Ignorant cela, Superman doit d'abord s'occuper de David, dont le comportement trop impulsif et les pouvoirs trop puissants sont devenus une menace. Robin l'accompagne à la Forteresse où va se nouer le destin de David dans un déluge d'action et de grand spectacle.
Dan Mora est infatigable quand on voit les planches qu'il produit : on a droit à des scènes d'une intensité incroyable, qui défilent à un rythme effrené. Waid lui donne de quoi faire et l'artiste s'en empare avec une sorte de gourmandise, de voracité même, qui fait franchement plaisir. Même si son style n'a rien à voir avec celui de son homologue, il y a du Stuart Immonen chez Mora, pour cette capacité à embrasser le script et le mettre en valeur, à ne jamais s'économiser, à toujours y aller à fond.
J'ai d'ailleurs vu sur YouTube des critiques mitigées sur World's Finest bien que très flatteuses pour Mora, mais où il était fréquemment exprimé que Waid ne forçait pas son talent dans un récit où l'action primait, au détriment de la caractérisation. Il me semble qu'il y a une dose de mauvaise foi dans ces propos car l'intention de la série est claire : il s'agit d'un divertissement plein de rebondissements et qui mise à la fois sur la complicité de Superman et Batman mais aussi sur l'accord tacite passé avec le lecteur sur le fait qu'on n'était pas là pour une étude psychologique des héros.
A partir de là, reprocher à World's Finest d'être trop léger, et donc décevant, c'est vraiment comme dire qu'on attendait autre chose que ce qui était précisément annoncé. Il est indéniable que Dan Mora constitue l'attraction de la série car son desssin posséde une vigueur jouissive, totalement en phase avec la tonalité du récit. L'artiste nous régale de pages dynamiques, avec des personnages expressifs, archétypaux, soutenu par les couleurs vives de Tamra Bonvillain.
Mais ensuite critiquer l'insouciance, le manque de fond de Mark Waid, c'est tout de même un peu poussé. Car Waid est quelqu'un qui écrit sans se moquer du lecteur, en concevant des intrigues surprenantes et en même temps entraînantes, fluides. Ce qu'il écrit là est dans la droite ligne de ces travaux chez Marvel (Daredevil, Captain America, Fantastic Four), ce mix parfait de swing et de tension, où tout n'est pas si léger que ça.
La démarche de Waid est celle d'un auteur qui a toujours été humble et discret mais consciencieux. Ce n'est pas un scénariste qui fait parler de lui, ses brouilles avec certains sont toujours restés contenues, mais ce n'est pas une diva. En outre, au regard de sa longévité, la fraîcheur de sa production est admirable. Il se fait plaisir et cherche à faire plaisir au lecteur. Lui reprocher cela, c'est comme minorer la qualité de son oeuvre au prétexte qu'elle serait cantonné à ce registre (ce qui est faux). J'ai plutôt envie de dire deux choses : 1/ trouvez-en qui font aussi bien après tant d'années, et 2/ arrêtez de juger avec condescendance le bon divertissement, appréciez-le comme un exercice de style pas si évident à maintenir à ce niveau.
Dans cet arc qui offrait un écho troublant avec le propre parcours de Superman, on finit sur une note émouvante, là aussi sans fioritures. Avant donc un épilogue qui promet une prolongation prometteuse. Comment, dans ces conditions, ne pas aimer World's Finest ? Allez, maintenant, courez acheter le tome 1 ! (Et le mois prochain, un épisode done-in-one, avec Robin et Supergirl, illustré par Emanuela Lupacchino.)
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