X of Swords arrive (presque) à son terme avec ces chapitres 20 et 21 correspondant à X-Men et Excalibur #15. Jonathan Hickman et Tini Howard préparent le grand final en appuyant sur l'accélérateur, de fait ces épisodes sont intenses et alternent en scènes grandioses et moments plus intimes avec brio. Au dessin, Mahmud Asrar se taille la part du lion, secondé par Stefano Caselli.
Après l'appel au secours de Cable, Jean Grey et Cyclope se présentent devant le conseil de Krakoa pour l'informer qu'ils vont partir sauver les X-Men engagés dans le tournoi. Leur choix interroge les membres du gouvernement qui le contestent.
Dans l'arène de l'Outremonde, Apocalypse affronte Genesis et parvient difficilement à la vaincre mais refuse de l'achever comme elle et Saturnyne l'exigent. Genesis reprend le casque d'Annihilation pour défier la makestrix du Multivers et forcer le sort du tournoi...
Pour ce pénultième épisode de la saga, tout se met en place pour la conclusion. Notons donc que Mahmud Asrar se partage le dessin avec Stefano Caselli, chacun des deux artistes étant assignés à des scènes précises.
Genesis/Annihilation a sonné la charge de la horde d'Amenth contre la citadelle de Saturnyne qui se réfugie dans ses quartiers. Les X-Men tentent de convaincre Apocalypse de quitter l'Outremonde avant qu'il ne soit trop tard mais il résiste, refusant d'abandonner sa femme et son ancien peuple.
Saturnyne récupère dans un coffret des bris de verre multicolores correspondant au corps de Captain Britain après sa défaite contre Isca. Elle se met à composer une mosaïque dont le dessin lui révèlera comment sauver son royaume et l'Outremonde.
Dehors,, malgré le renfort des prêtresses de Saturnyne emmenés par Jubilé, les X-Men sont dépassés par le nombre des guerriers adverses. Bei la lune sanglante s'est rangé du côté de Cypher et des Krakoans encerclés Genesis/Annihilation. Saturnyne termine sa mosaïque...
Le duel entre Apocalypse et Genesis devait, à la fin du chapitre 19, la semaine dernière, décider du gagnant du tournoi. L'affrontement promettait d'être tragique puisque les deux adversaires étaient mari et femme et qu'à son terme Krakoa risquait d'être envahie par ceux d'Arakko.
Pourtant, Jonathan Hickman choisit de concentrer l'essentiel de l'épisode 15 de X-Men à Cyclope, Jean Grey et au conseil de Krakoa. Les deux premiers alertés par leur fils Cable de la déroute des X-Men ont décidé d'aller les secourir avec une équipe. Mais ce choix est contesté par le gouvernement de l'île.
On devine, on sait que ce débat laissera des traces et qu'elles perdureront au-delà de X of Swords. Cela valide la direction narrative de Hickman qui prépare non seulement le grand final du crossover mais aussi l'après. Le scénariste ne déçoit pas avec des échanges dramatiques où Cyclope est admirablement écrit.
On aura noté qu'en vérité depuis la relance de la série pas une seule fois les groupes dirigés par Cyclope pour les diverses missions qu'ils ont accomplies n'ont été appelés "X-Men" et une data page vient l'expliquer en informant qu'avec le nouveau statut des mutants, le terme "X-Men" est désormais devenu obsolète et interdit. Pourtant en le revendiquant à nouveau, Cyclope va pointer sa différence entre le passé et le présent au sein de la nation X.
Du point de vue des leaders que sont Charles Xavier et Magneto, les X-Men représentent une notion dépassée, il ne s'agit plus de s'afficher comme des héros mutants aux yeux du monde, comme des équivalents aux Avengers, aux Fantastic Four. Désormais Krakoa et son peuple sont des mutants, qui vivent entre eux et protègent leurs semblables. Dès lors, il n'y a plus de X-Men au sens d'ue équipe constitué de héros mutants.
Du point de vue de Cyclope, qui est le capitaine en chef de Krakoa, chargé de sa sécurité, les X-Men n'ont jamais cessé d'exister et ne doivent pas être remisés. A l'heure où le destin de Krakoa se joue dans l'Outremonde et que les mutants engagés dans le tournoi sont en déroute, les X-Men sont même plus nécessaires que jamais. C'est avec des X-Men qu'il va sauver son fils, ses amis. Non pas pour jouer les héros, mais pour rappeler que les X-Men ont en fait précédé tout nation X : ils ont toujours protégé les mutants et continueront à le faire. Ils existeront toujours même si le gouvernement de l'île ne désire plus appeler les mutants des X-Men.
L'argument développé par Cyclope, soutenu par Jean Grey, séduit Charles Xavier et Magneto, qui apprécient l'honnêteté de leur capitaine en chef et reconnaissent sa justesse. D'autres sont moins emballés, comme, évidemment, Sebastian Shaw, qui pousse par deux fois au vote pour encadrer l'expédition de Cyclope et qui sanctionne à la fois son possible (probable) échec mais aussi la place de Jean Grey à la table du conseil. Jean en prend acte, avec déception mais aussi lucidité. Et ce faisant elle met les leaders de Krakoa face à leurs contradictions : eux qui se proclament père et mère de la nation X, au moment où leurs enfants (leurs champions dans le tournoi) sont en danger, ils préfèrent les condamner qu'essayer de les sauver. Tandis qu'elle et Cyclope vont sauver leur fils, et leurs amis, en parents aimants, responsables, solidaires.
Cette dimension familiale, filiale même, se retrouve de manière plus musclé et tragique dans le duel opposant Genesis à Apocalypse, qui se déroule simultanément à la réunion de crise du conseil. Il s'agit d'un mari et de son épouse qui se battent à mort pour la survie de leurs peuples respectifs. Les coups portés ne sont pas retenus, mais la détermination de Genesis tranche avec la tristesse poignante d'Apocalypse, jusqu'à ce qu'il blesse mortellement sa femme. Avant, nénamoins, de refuser de l'achever. Et cela ouvre la porte aux événements relatés dans Excalibur #15.
Tini Howard a depuis le début de sa série fait d'Apocalypse le pivot de ses histoires et on sent fortement à quel point elle s'est attaché au personnage en lui conférant un relief nouveau, plus touchant, émouvant. Elle a défini, précisé, affiné la silhouette esquissée par Hickman depuis House of X, celle d'un géant, hanté par son passé, ayant renoncé à ses rêves de domination pour épouser une cause plus grande, plus noble. Mais cette masse colossale est désormais soumise à une mélancolie étonnante, une mémoire dévorante, En Sabah Nur est fatigué, il mène son dernier combat, embrasse son ultime aventure. Là aussi, on devine, on sait intuitivement que son issue sera tragique. Jamais, pour ma part, je n'avais vu ni considéré le personnage ainsi et ça restera une des grandes réussites de Dawn of X.
L'autre défi auquel est confronté la scénariste, c'est de composer une épisode qui mêle avec équité l'épique et l'intime, le bruit et la fureur et le calme, le grand spectacle et les scènes d'alcôve. Apocalypse n'a pas vraiment vaincu sa femme qui survit en coiffant à nouveau le casque d'Annihilation et joue son va-tout an sonnant la charge de son armée contre la citadelle de Saturnyne et forcer le passage vers Krakoa.
On passe donc de scènes sur le champ de bataille où la poignée champions krakoans finit encerclée par la horde d'Amenth à celles où Saturnyne s'enferme dans une pièce pour composer une mosaïque avec les bris de verre multicolores correspondant à ce que fut Betsy Braddock/Captain Britain lorsqu'elle fut tuée par Isca l'imbattable dans le premeir duel du tournoi.
Mahmud Asrar produit un travail impressionnant puisque, après avoir assuré l'intégralité de l'épisode de X-Men #15, il est encore à l'oeuvre sur les scènes de bataille de ce numéro d'Excalibur. Et l'artiste turc ne ménage pas sa peine en livrant des planches scotchantes. La figuration abondante, la représentation des pouvoirs, la traduction des sentiments de chaque côté sont superbement restituées. La supériorité des Arakki est écrasante, la bravoure désespérée des Krakoans est pathétique. On ressent vraiment, puissamment ce parfum terrible de déroute, de défaite, et on craint réellement le pire pour nos héros.
Stefano Caselli s'occupe donc des scènes avec Saturnyne. Il ne faut pas croire qu'il a la partie la plus facile car la majestrix apparaît pour la première fois vraiment débordée par la tournure des événements. Son geste de composer une mosaïque avec les restes de celle qu'elle a honnie apparaît d'abord surréaliste, absurde, grotesque. Il faut attendre la dernière page pour mesurer la qualité du cliffhanger concocté par la scénariste et la révélation jubilatoire par son ironie qui s'impose à Saturnyne. Le trait très expressif de Caselli fait merveille autant que celui, tout en énergie d'Asrar.
Tout est en place pour une conclusion mémorable et énorme. Sans en dire encore trop, car j'y consacrerai une critique dédiée, c'est une réussite, à la fois spectaculaire et intelligente, qui redessine vraiment, durablement, profondément, le statu quo mutant. Rendez-vous demain pour cette analyse de X of Swords : Destruction.
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