Los Angeles; 1977. Le détective privé Holland March est engagé par Mme Glenn pour retrouver la fille de celle-ci, une actrice porno connue sous le nom de Misty Mountains. Le hic, c'est qu'elle est morte mais sa mère jure l'avoir revue ensuite. L'enquête de March le mène à Jackson Healy, qui le brutalise pour qu'il cesse de fouiner après qu'il ait importuné Amelia Kuttner. Mais la situation se renverse lorsque, à son tour, Healy est menacé par deux voyous qui veulent savoir où se cache Amelia.
Comme Kiss Kiss Bang Bang, l'intrigue est particulièrement filandreuse : il est d'abord question de retrouver une actrice prono, puis la bobine d'un film mêlant porno et investigation pour dénoncer un scandale de corruption. S'agit-il d'une embrouille paranoïaque de la part de la fille d'une membre du Département de la Justice ? Ou justement d'un vrai coup d'éclat tordu pour confondre des officiels et des industriels s'échangeant des pots-de-vin contre des services ? Le récit laisse longtemps planer le doute jusqu'à ce qu'on comprenne dans le dernier tiers qui sont les bons et les méchants.
Peut-être connaissez-vous cette anecdote au sujet du Grand Sommeil de Howard Hawks (1946) dont le scénario était si compliqué que même Raymond Chandler, son auteur, affirmait qu'il ne savait pas de quoi il parlait ? The Nice Guys en est le digne héritier moderne, c'est-à-dire que le film prend le parti de se moquer ouvertement de ce méli-mélo dans une lecture ironique du genre noir. Une forme de désenchantement accompagne le dénouement quand les héros admettent que tout ça est bien trop gros pour espérer avoir résolu quoi que ce soit. Le bénéfice est donc ailleurs : le détective privé et l'homme de main décident de faire contre mauvaise fortune bon coeur et ayant constaté leur complémentarité continuent leur partenariat.
Puisque l'histoire est touffue, on s'attache donc aux protagonistes, merveilleusement croqués par Black, maître-es losers magnifiques. Avant de se pencher sur March et Healy, il faut savourer la galerie de seconds rôles impeccables, qui font que c'est aussi ce qui permet à ce genre de film de fonctionner. Il y a la fille de March qui a le don (héréditaire) de de fourrer dans les pires situations, la fille et sa mère qui s'affrontent pour l'une faire éclater un scandale et l'autre l'étouffer, la secrétaire qui s'avère une liquidatrice particulièrement sexy mais manipulatrice, et le tueur dingue.
Les interprètes s'en donnent à coeur joie, conscients de tenir là des rôles en or : la jeune Angourie Rice est parfaite, Yaya DaCosta est divine, Kim Basinger épatante, Margaret Qualley comme d'habitude est fabuleuse, et Matt Bomer est complètement déchaîné.
Mais c'est bien le duo Ryan Gosling - Russell Crowe qui remporte tous les suffrages. Déjà dans Kiss Kiss Bang Bang, Shane Black avait créé un couple détonant en associant Robert Downey Jr. (avant Iron Man) et Val Kilmer. Gosling et Crowe forment un tandem encore plus efficace, moins exubérant, mais dont la sobriété souligne le je-m'en-foutisme de leurs rôles. Et en même temps on suit leurs investigations improbables avec une pointe d'admiration, à ces deux David contre Goliath : ils n'ont aucune chance, mais ils symbolisent le buddy movie dans sa forme la plus aboutie, deux hommes mal assortis mais en vérité complémentaires et éminemment sympathiques. On sait qu'ils ne vont pas gagner mais on ne cesse jamais de l'espérer.
Alors, oui, The Nice Guys représente une sorte d'excellence du cool. On aurait bien aimé les revoir, dans une suite, ou dans une mini-série façon True Detective en franchement plus déconnant.
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