Ce mercredi est sorti le 30ème et dernier épisode de Fire Power, que j'avais cessé de lire au n°24. Avant la parution du tome 6 la semaine prochaine, je vous propose un retour de lecture sur cet ultime arc narratif. Evidemment, ce qui suit comporte quelques spoilers (mineurs) donc à vous de voir si vous préférez profiter de l'histoire tout de suite ou plus tard.
Wei Lun vient de révéler à Owen Johnson qu'il a autrefois tué ses parents biologiques alors qu'ils avaient quitté le temple du poing de feu pour rejoindre le clan de la terre écorché.. Owen choisit de régler cela plus tard car il lui faut entraîner ses alliés pour combattre Maître Shaw et son dragon.
Shaw et son dragon quittent justement Hong Kong pour les Etats-Unis afin de prouver sa supériorité. Direction : Chicago...
Ma Guang échoue à maîtriser le pouvoir du feu et Kellie se sent inutile en vue de la bataille à venir. Elle a aussi peur pour Owen et leurs enfants, Doug et Haley. A Chicago, Shaw et son dragon sème la dévastation. Grâce à ses serpents, il asservit les militaires qui tentent de le repousser puis de négocier...
Kellie Johnson parvient à créer des boules de feu d'une puissance insoupçonnée. Peu après cette bonne nouvelle pourtant, les nouvelles en provenance de Chicago lui parviennent et elles ne sont pas bonnes.
Shaw contrôle la ville dont les habitants fuient, n'étant plus protégés par l'armée. Owen décide de précipiter les manoeuvres et de partir à l'attaque avec les hommes et les femmes prêts au terme de l'entraînement qu'il a prodigué.
C'est la bataille de Chicago. Dans un premier temps, Owen et son armée libèrent les militaires de l'emprise des serpents. Puis il affronte Shaw en duel mais sans réussir à le dominer. Heureusement, il reçoit le renfort de Wei Lun, Kellie, Doug et Haley.
Les épreuves changent tout le monde. Après avoir, semble-t-il, réussi à terrasser le dragon, qui ravage un quartier entier de la ville, les Johnson découvrent parmi les civils morts un de leurs proches...
Shaw est capturé et ses serpents tués. Perdant son pouvoir, il vieillit prématurément mais a le temps de confier à Ma Guang le secret pour tuer le dragon qui s'est réveillé et quitte Chicago pour rejoindre son repaire.
Ma Guang révèle au groupe qu'il a hérité du feu de Shaw, seul capable de blesser gravement le dragon. Mais cela suffira-t-il vraiment à en venir à bout ? Et si oui, à quel prix ?
La publication de ces six derniers épisodes s'est étalée de Juillet 2023 à Février 2024. L'explication se trouve dans la longueur de deux des numéros : le #25 compte 44 pages et le #30 une soixantaine. Cela fera donc du tome 6 de la série un copieux volume, disponible dès la semaine prochaine, le 28 Février, en VO (et peu après certainement chez Delcourt).
Pour ma part, j'avais cessé de lire Fire Power au n°24, lassé par la décompression excessive de la narration de Robert Kirkman. J'estimais aussi que le scénariste abusait de Chris Samnee à qui il demandait de livrer des pages très exigeantes mais indignes de son immense talent. A l'heure qu'il est, l'artiste a déjà commencé à travailler sur un nouveau projet mais attend avant de communiquer à ce sujet. Néanmoins, il y a peu de chance de retrouver Samnee sur du work for hire chez un des Big Two, même s'il signe les couvertures de la série Titans (de Tom Taylor) et les variants de Shazam !. Tout ce que j'espère, c'est qu'il ne va pas rempiler avec Kirkman...
Vous l'aurez deviné : il n'y a pas de miracle dans cet épilogue. Les défauts que je pointais restent présents et pesants et on lit ces épisodes en attendant en vain que Kirkman leur donne plus de consistance. Cela n'a jamais lieu, tout est désespérément dilaté, décompressé, jusqu'à l'écoeurement. Le moindre rebondissement est exploité ad nauseam, la caractérisation est grossière, les coups de théâtre sont misérables.
Pour résumer le malaise, il suffit de suivre ce que fait Kirkman avec le dragon qu'on croit terrassé durant l'épisode 28, qui se veut épique, mais qui se résume à une succession de splash pages certes spectaculaires visuellement mais d'une indigence narrative embarrassante avec comme contrepoint aux images de la bataille de Chicago les lettres envoyées par Doug Johnson à son grand-père. Un moyen assez putassier de tirer des larmes au lecteur et qui s'achève sur une scène qui se veut poignante mais qui est en vérité tellement téléphonée qu'elle produit l'effet inverse. Le pire étant que dans l'épisode suivant, les conséquences de cette scène sont expédiées de manière cavalière, comme si Kirkman s'en fichait...
Que l'on loue Kirkman pour les succès que furent The Walking Dead ou Invincible, soit. Je ne vais pas juger ce que je n'ai pas lu (la vision de la première saison de l'adaptation en dessin animé d'Invincible m'a suffi). Mais qu'on accorde du crédit à un auteur aussi piteux que celui qui commet les scripts de Fire Power, voilà qui franchement me dépasse. C'est mauvais, il n'y a rien à sauver. Et pourtant, sur la foi du tome 0, le Prologue, la série avait un potentiel, une bonne série B. Mais c'est comme si le sujet était constamment survolé, les ellipses jamais comblées, l'objectif improbable. Qu'a voulu raconter Kirkman avec Fire Power ? Avait-il seulement un propos à tenir ? J'en doute. Quel lecteur en retiendra quoi que ce soit ? Relira tout ça ?
Au fil de ces six épisodes, trop longs, trop laborieux, l'acquisition du pouvoir du feu par divers personnages à des moments extraordinairement opportuns relève de la paresse créative et parfois du plagiat (voir le sens donné aux couleurs des différents feux créés par ceux qui le peuvent : on est dans un mix qui évoque clairement Green Lantern, Powers Rangers et autres combinaisons de héros associés à des pouvoirs et des codes couleurs). Et même la boucle que forme le récit à sa toute fin, qui aurait pu être émouvante, tombe à plat, là encore trop prévisible, trop convenue. C'est désespérant, vous dis-je.
Que Samnee ait consacré presque quatre ans de sa carrière à un projet pareil me dépasse. D'un côté, il est compréhensible qu'il ait voulu tenter l'aventure du creator-owned, qui plus est en s'associant à un scénariste responsable de deux séries à succès. Mais de l'autre, pour quel résultat ? Samnee n'a jamais déçu et il produit encore des planches, des épisodes de haute volée. Mais quand on l'a apprécié sur Thor the Mighty Avenger, Daredevil, Black Widow, Captain America, on ne peut se satisfaire de Fire Power. En comparaison, son autre titre avec sa femme Laura, Jonna and the Unpossible Monsters (j'essaierai d'y revenir bientôt puisque là aussi, c'est bouclé), possédait quelque chose d'éminemment plus sympathique, personnel, quoique tout aussi peu mémorable. E si, tout simplement, Samnee avait surtout besoin d'un vrai bon scénariste pour se transcender ? Mais on ne trouve pas un partenaire de jeu comme Mark Waid facilement (d'ailleurs, ce dernier s'est trouvé un nouvel artiste, Dan Mora, aussi performant que le fut Samnee)...
Kirkman est depuis occupé avec son univers Energon et sa série Void Rivals et ses titres attachés (la relance des franchises Transformers, G.I. Joe), entre deux procès que lui font ses anciens collaborateurs (Tony Moore à qui il déniait la co-création de The Walking Dead, Bill Crabtree qu'il a voulu priver de royalties sur Invincible). C'est un personnage apparemment aussi peu inspiré que peu honnête.
Croisons les doigts pour que le nouveau projet de Samnee soit d'une autre trempe : il n'a rien perdu de son talent, mais a gâché trop d'années.
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