JOY est un film réalisé par David O. Russell, sorti en salles en France le 30 Décembre 2015.
Le scénario est écrit par David O. Russell et Annie Mumolo, librement inspiré de la vie de Joy Mangano.
La photographie est signée par Linus Sandgren. Le film est produit par John Davis, Megan Ellison, John Fox, Jonathan Gordon et Ken Mok.
Dans les rôles principaux, on trouve : Jennifer Lawrence (Joy Mangano), Robert de Niro (Rudy Mangano), Edgar Ramirez (Tony Mirrane), Elisabeth Röhm (Peggy Mangano), Isabella Rossellini (Trudy), Bradley Cooper (Neil Walker), Diane Ladd (Mimi Mangano), Virginia Madsen (Terry Mangano).
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Dans les années 80, Joy Mangano vit dans l'Etat du Massasuchetts : elle est divorcée de Tony Mirrane, chanteur de bal, qui co-habite au sous-sol de sa maison avec son père Rudy Mangano, tandis que sa mère, Terry, passe ses journées devant la télé à regarder des soap operas dans sa chambre au rez-de-chaussée, et que sa grand-mère, Mimi, l'aide à élever ses deux enfants. Sa demi-soeur, Peggy, aide Rudy à gérer leur garage de camions.
Joy
(Jennifer Lawrence)
Rudy séduit une riche veuve, Trudy, qui invite toute la famille Mangano à une sortie en mer sur le voilier de son défunt mari. La traversée se passe dans une ambiance tendue : en servant du vin, Tony renverse son verre sur le pont et Joy doit nettoyer en s'écorchant les mains avec les bris.
Cet incident va pourtant lui inspirer une idée comme celle qu'elle avait enfant : elle dessine les plans, sommaires mais ingénieux, d'un balai-serpillière qui s'essore tout seul grâce à un mécanisme manuel.
Joy, son père Rudy Mangano, et son ex-mari, Tony Mirrane
(Jennifer Lawrence, Robert de Niro et Edgar Ramirez)
Trudy accepte de financer l'assemblage de l'engin qui est monté dans le garage reconverti de Rudy avec la main d'oeuvre mexicaine locale et à partir de pièces fournies par un sous-traitant en Californie.
Pour commercialiser son invention, Joy démarche les magasins du coin, sans succès, jusqu'à ce que Teddy la mette en relation avec un de ses anciens amis, lui-même en affaires avec Neil Walker, directeur d'une chaîne de télé-achat.
Rudy Mangano, Neil Walker et Joy
(Robert de Niro, Bradley Cooper et Jennifer Lawrence)
Joy convainc Neil de promouvoir son produit et il en confie la présentation à l'animateur vedette du show. Mais la démonstration en direct est lamentable et aucune commande n'est prise par les téléspectateurs. Joy ne renonce pas et insiste auprès de Neil pour présenter elle-même son balai : c'est un succès !
La famille Mangano et Trudy devant le télé-achat
(Isabella Rossellini, à la droite de Robert de Niro,
et Diane Ladd, à la gauche de Jennifer Lawrence)
La jeune femme doit ensuite faire face à de nouveaux obstacles : sa grand-mère, la seule à à avoir toujours cru en elle, meurt. Puis sa demi-soeur paie, sans son accord, l'augmentation que réclame le fournisseur des pièces en Californie.
Joy sait que ce sous-traitant l'escroque et menace de couler son affaire : elle se rend dans son usine et découvre qu'il l'a spoliée en s'alliant avec un affairiste texan qui a breveté son invention. Elle tente de récupérer son bien mais la police l'arrête.
Peggy, Joy et Rudy Mangano
(Elisabeth Röhm, Jennifer Lawrence et Robert de Niro)
L'avocat de Trudy explique à Joy qu'elle doit déposer le bilan. Elle renonce à tout, puis se resaisit et épluche tous les documents juridiques où elle découvre les fraudes concernant la rédaction de ses contrats et de la comptabilité.
Elle donne rendez-vous à l'homme d'affaires texan et menace de révéler ses malversations s'il ne la dédommage pas et ne lui rend pas la propriété de son invention. Cette victoire sera la première d'une longue série qui va en faire une puissante patronne et inventrice, uniquement entourée de son ex-mari et sa meilleure amie, prête à donner leur chance à d'autres mais sans pardonner à ceux qui l'ont lâchée, y compris dans sa famille.
J'ai eu l'occasion récemment de vous dire tout le bien que je pensais de l'avant-dernier film de David O. Russell, Happiness Therapy, et j'attendais donc avec appétit de découvrir son nouvel opus, un biopic inspiré de la vie de Joy Mangano, sorti en France le 30 Décembre dernier. Le fait que le cinéaste y retrouve ses interprètes fétiches, en premier lieu Jennifer Lawrence, ne pouvait que me mettre en confiance.
Il arrive parfois ainsi qu'un réalisateur rencontre sa muse, l'acteur/trice, qui incarne parfaitement son cinéma. Ainsi John Ford et John Wayne, John Huston et Humphrey Bogart, Alfred Hitchcock et Grace Kelly, Billy Wilder et Audrey Hepburn, Martin Scorsese et Robert de Niro puis Leonardo di Caprio, Sydney Pollack et Robert Redford, François Truffaut et Jean-Pierre Léaud, Claude Sautet et Romy Schneider, Tim Burton et Johnny Depp... Et tant d'autres. Le comédien devient alors le véhicule emblématique de l'univers d'un artiste de la mise en scène, en qui il peut projeter ses fantasmes, qui joue ses partitions mieux que les autres.
C'est ce qui est visiblement arrivé à David O. Russell avec Jennifer Lawrence. Bien entendu, on peut penser que leur relation aurait été fort différente si Happiness Therapy n'avait pas connu un tel succès, critique et public, valant même à l'actrice son Oscar (elle est à nouveau en lice cette année pour Joy et figure comme une des favorites parmi les cinq prétendantes - à égalité avec Cate Blanchett et Brie Larson). Mais il y a comme une évidence dans leur association : Russell a gagné avec Lawrence une interprète parfaite et dévouée, Lawrence a accédé à une crédibilité d'actrice (que ne lui autorisait pas la franchise Hunger Games ou ses participations aux films X-Men) au contact de Russell.
Comme le disait Truffaut : " Le cinéma est un art de la femme, c'est-à-dire de l'actrice. Le travail du metteur en scène consiste à faire faire de jolies choses à de jolies femmes." et Joy en est l'illustration par David O. Russell avec Jennifer Lawrence; Le film entier apparaît comme une ode à cette jeune comédienne qui porte cette histoire sur les épaules avec une grâce incroyable. Il ne s'agit pas d'une de ces performances comme le cinéma américain adore en demander à ses acteurs : ici, pas de perruques, de maquillage outrancier, de prothèses, de prise ou perte de poids. Jennifer Lawrence joue juste et justement, si bien que jamais le spectateur ne se rappelle qu'elle est plus jeune que la vraie Joy Mangano, qu'elle domine une prestigieuse distribution sans être éclipsée par elle. Elle habite son rôle comme la patronne que devient son personnage, avec une détermination impressionnante qui lui vaut la sympathie immédiate du public.
Pourtant, cette fois, David O. Russell n'est pas aussi brillant : en effet, son long métrage est un peu trop long. Pas beaucoup, il ne dure après tout que 125', ce qui, par les temps qui courent, est raisonnable, et raisonnable pour un biopic, genre où, presque par définition, on a droit à des formats plus généreux. Non, là où Joy peine un peu, c'est à démarrer : le cinéaste traîne un peu trop avant d'arriver au véritable enjeu de son histoire, lorsque son héroïne invente son fameux balai. Du coup, ce début un peu laborieux impacte la fin du film où on voit un empire commerciale bien installé après une audacieuse ellipse, tout juste éclaircie par la voix-off de la narratrice (la grand-mère, Mimi, nous apprenant que Joy a déposé plus d'une centaine de brevets entretemps).
Le premier acte du récit, qui montre donc la situation familiale et professionnelle sinistrée de l'héroïne, est un bloc assez curieux où Russell s'inscrit dans le registre du conte et le ton de la comédie de moeurs, avec une galerie abondante de personnages : l'ex-mari aux ambitions grotesques mais à la loyauté exemplaire, le père de famille indigne, la demi-soeur jalouse, la grand-mère soutien indéfectible, la mère accro à la télé... Dans le lot, beaucoup plus de caricatures grossières que de bons seconds rôles, rarement finement joués (Virginia Madsen est pathétique, Diane Ladd grimaçante). Mais Edgar Ramirez (malgré un doublage français lamentable), Elisabeth Röhm (odieuse à souhait) et même Isabella Rossellini (qui prend cher, au propre comme au figuré) sont bien mieux.
Le deuxième acte relève nettement le niveau : c'est le coeur du film et sa partie la plus aboutie, quand Joy touche le fond, rebondit, rechute, contre-attaque. L'énergie qui irrigue les scènes est euphorisante et correspond à l'entrée en scène de Bradley Cooper. Même si la présence effective du partenaire de Lawrence dans Happiness Therapy (et aussi American Bluff) est plus modeste que ne le suggère l'affiche, son personnage électrise l'intrigue. Cooper a un regard étonnant, celui d'un homme qui semble constamment au bord des larmes, comme bouleversé par la résolution de Joy, et en même temps implacable en affaires - en fait, la somme de ces deux courants en fait un businessman revenu de tout, qui veut être ami avec cette jeune femme tout en prévoyant déjà qu'un jour ils seront concurrents.
Le troisième et dernier acte est plus inégal mais quand même plaisant : l'héroïne perd (littéralement) tout, mais dans la plus pure tradition des success stories à l'américaine, trouve les ressources in extremis pour repartir à l'assaut. Son coup de bluff face à l'escroc texan est un moment d'anthologie, mis en scène comme une vraie séquence de polar - presque un film dans le film, ou la promesse de ce que pourrait être un polar de Russell avec Lawrence. Malheureusement, donc, comme si le cinéaste s'était rendu compte de la durée de son long métrage, il préfère expédier la suite du destin de Joy en quelques saynètes, sous la forme de flash-forward, plutôt que d'y consacrer un peu plus de temps ou de conclure sur ce duel jubilatoire dans l'hôtel (et, mettons, un "carton" expliquant ce que la jeune femme allait vivre ensuite).
Le procédé de la voix-off, surtout quand on comprend qu'elle est celle d'un personnage à la fois secondaire et qui meurt avant la fin du film, est un pari risqué, qui ne fonctionne pas complètement. Ce côté "il était une fois", souligné grassement par des flash-back sur l'enfance de Joy, est même assez horripilant au début. Il faut tout le souffle et l'ironie de Russell, qui traite autant en vérité du dépassement de soi qu'il égratigne la famille traditionnelle américaine, pour que le spectateur ne décroche pas. Et ça en vaut quand même le coup, donc, quand cette biographie décolle : la vraie performance, en fait, est là, car, après tout, il s'agit de l'histoire de l'inventrice d'un balai !
Le réalisateur confirme l'influence de Scorsese sur son oeuvre désormais : en plus de Robert de Niro (un peu cabotin, mais tout de même excellent, car dirigé), on a droit à une vraie compilation musicale très entraînante, comprenant une majorité de chansons rock (Rolling Stones, Neil Young...) et jazz (avec l'emploi merveilleux du titre The Sidewinder de Lee Morgan), accompagner une mise en images virevoltante, avec des mouvements de caméra ostentatoires et un montage fluide.
Joy est donc un écrin superbe pour son interprète principale, effectivement magistrale. Le résultat est inégal, mais ne manque pas d'allure. Espérons que le quartet magique Jennifer Lawrence-Robert De Niro-Bradley Cooper-David O. Russell se retrouvent vite !
Il arrive parfois ainsi qu'un réalisateur rencontre sa muse, l'acteur/trice, qui incarne parfaitement son cinéma. Ainsi John Ford et John Wayne, John Huston et Humphrey Bogart, Alfred Hitchcock et Grace Kelly, Billy Wilder et Audrey Hepburn, Martin Scorsese et Robert de Niro puis Leonardo di Caprio, Sydney Pollack et Robert Redford, François Truffaut et Jean-Pierre Léaud, Claude Sautet et Romy Schneider, Tim Burton et Johnny Depp... Et tant d'autres. Le comédien devient alors le véhicule emblématique de l'univers d'un artiste de la mise en scène, en qui il peut projeter ses fantasmes, qui joue ses partitions mieux que les autres.
C'est ce qui est visiblement arrivé à David O. Russell avec Jennifer Lawrence. Bien entendu, on peut penser que leur relation aurait été fort différente si Happiness Therapy n'avait pas connu un tel succès, critique et public, valant même à l'actrice son Oscar (elle est à nouveau en lice cette année pour Joy et figure comme une des favorites parmi les cinq prétendantes - à égalité avec Cate Blanchett et Brie Larson). Mais il y a comme une évidence dans leur association : Russell a gagné avec Lawrence une interprète parfaite et dévouée, Lawrence a accédé à une crédibilité d'actrice (que ne lui autorisait pas la franchise Hunger Games ou ses participations aux films X-Men) au contact de Russell.
Comme le disait Truffaut : " Le cinéma est un art de la femme, c'est-à-dire de l'actrice. Le travail du metteur en scène consiste à faire faire de jolies choses à de jolies femmes." et Joy en est l'illustration par David O. Russell avec Jennifer Lawrence; Le film entier apparaît comme une ode à cette jeune comédienne qui porte cette histoire sur les épaules avec une grâce incroyable. Il ne s'agit pas d'une de ces performances comme le cinéma américain adore en demander à ses acteurs : ici, pas de perruques, de maquillage outrancier, de prothèses, de prise ou perte de poids. Jennifer Lawrence joue juste et justement, si bien que jamais le spectateur ne se rappelle qu'elle est plus jeune que la vraie Joy Mangano, qu'elle domine une prestigieuse distribution sans être éclipsée par elle. Elle habite son rôle comme la patronne que devient son personnage, avec une détermination impressionnante qui lui vaut la sympathie immédiate du public.
Pourtant, cette fois, David O. Russell n'est pas aussi brillant : en effet, son long métrage est un peu trop long. Pas beaucoup, il ne dure après tout que 125', ce qui, par les temps qui courent, est raisonnable, et raisonnable pour un biopic, genre où, presque par définition, on a droit à des formats plus généreux. Non, là où Joy peine un peu, c'est à démarrer : le cinéaste traîne un peu trop avant d'arriver au véritable enjeu de son histoire, lorsque son héroïne invente son fameux balai. Du coup, ce début un peu laborieux impacte la fin du film où on voit un empire commerciale bien installé après une audacieuse ellipse, tout juste éclaircie par la voix-off de la narratrice (la grand-mère, Mimi, nous apprenant que Joy a déposé plus d'une centaine de brevets entretemps).
Le premier acte du récit, qui montre donc la situation familiale et professionnelle sinistrée de l'héroïne, est un bloc assez curieux où Russell s'inscrit dans le registre du conte et le ton de la comédie de moeurs, avec une galerie abondante de personnages : l'ex-mari aux ambitions grotesques mais à la loyauté exemplaire, le père de famille indigne, la demi-soeur jalouse, la grand-mère soutien indéfectible, la mère accro à la télé... Dans le lot, beaucoup plus de caricatures grossières que de bons seconds rôles, rarement finement joués (Virginia Madsen est pathétique, Diane Ladd grimaçante). Mais Edgar Ramirez (malgré un doublage français lamentable), Elisabeth Röhm (odieuse à souhait) et même Isabella Rossellini (qui prend cher, au propre comme au figuré) sont bien mieux.
Le deuxième acte relève nettement le niveau : c'est le coeur du film et sa partie la plus aboutie, quand Joy touche le fond, rebondit, rechute, contre-attaque. L'énergie qui irrigue les scènes est euphorisante et correspond à l'entrée en scène de Bradley Cooper. Même si la présence effective du partenaire de Lawrence dans Happiness Therapy (et aussi American Bluff) est plus modeste que ne le suggère l'affiche, son personnage électrise l'intrigue. Cooper a un regard étonnant, celui d'un homme qui semble constamment au bord des larmes, comme bouleversé par la résolution de Joy, et en même temps implacable en affaires - en fait, la somme de ces deux courants en fait un businessman revenu de tout, qui veut être ami avec cette jeune femme tout en prévoyant déjà qu'un jour ils seront concurrents.
Le troisième et dernier acte est plus inégal mais quand même plaisant : l'héroïne perd (littéralement) tout, mais dans la plus pure tradition des success stories à l'américaine, trouve les ressources in extremis pour repartir à l'assaut. Son coup de bluff face à l'escroc texan est un moment d'anthologie, mis en scène comme une vraie séquence de polar - presque un film dans le film, ou la promesse de ce que pourrait être un polar de Russell avec Lawrence. Malheureusement, donc, comme si le cinéaste s'était rendu compte de la durée de son long métrage, il préfère expédier la suite du destin de Joy en quelques saynètes, sous la forme de flash-forward, plutôt que d'y consacrer un peu plus de temps ou de conclure sur ce duel jubilatoire dans l'hôtel (et, mettons, un "carton" expliquant ce que la jeune femme allait vivre ensuite).
Le procédé de la voix-off, surtout quand on comprend qu'elle est celle d'un personnage à la fois secondaire et qui meurt avant la fin du film, est un pari risqué, qui ne fonctionne pas complètement. Ce côté "il était une fois", souligné grassement par des flash-back sur l'enfance de Joy, est même assez horripilant au début. Il faut tout le souffle et l'ironie de Russell, qui traite autant en vérité du dépassement de soi qu'il égratigne la famille traditionnelle américaine, pour que le spectateur ne décroche pas. Et ça en vaut quand même le coup, donc, quand cette biographie décolle : la vraie performance, en fait, est là, car, après tout, il s'agit de l'histoire de l'inventrice d'un balai !
Le réalisateur confirme l'influence de Scorsese sur son oeuvre désormais : en plus de Robert de Niro (un peu cabotin, mais tout de même excellent, car dirigé), on a droit à une vraie compilation musicale très entraînante, comprenant une majorité de chansons rock (Rolling Stones, Neil Young...) et jazz (avec l'emploi merveilleux du titre The Sidewinder de Lee Morgan), accompagner une mise en images virevoltante, avec des mouvements de caméra ostentatoires et un montage fluide.
Joy est donc un écrin superbe pour son interprète principale, effectivement magistrale. Le résultat est inégal, mais ne manque pas d'allure. Espérons que le quartet magique Jennifer Lawrence-Robert De Niro-Bradley Cooper-David O. Russell se retrouvent vite !
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