LUCKY LUKE : L'HERITAGE DE RAN-TAN-PLAN est le 41ème tome de la série, écrit par René Goscinny et dessiné par Morris, publié en 1973 par Dargaud (numéroté tome 11 au dos de l'album).
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Le joueur Oggie Svensson est mort et le notaire J.S. Chester se rend à la prison pour dévoiler les dernières volontés de son client qui lègue tous ses biens à... Ran-tan-plan ! Si toutefois il arrivait malheur au chien, c'est Joe Dalton qui deviendrait l'héritier !
Lucky Luke est naturellement chargé de la protection de Ran-tan-plan et l'emmène jusqu'à Virginia City (Nevada) où Svensson possédait entre autres l'Hotel International qui va les loger.
Les Dalton s'évadent entretemps et Joe a la ferme intention de supprimer le chien pour recevoir les biens de feu Svensson. Pour cela, les frères infiltrent le quartier chinois de la ville dont les habitants s'estiment lésés par les loyers fixés par le défunt.
Encore une fois, Lucky Luke aura fort à faire pour apaiser la situation.
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LUCKY LUKE : 7 HISTOIRES DE LUCKY LUKE est le 42ème tome de la série, écrit par René Goscinny et dessiné par Morris, publié en 1974 par Dargaud (contre toute logique numéroté tome 15 au dos de l'album).
A noter que cet album est également paru sous le titre 7 Histoires Complètes.
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- 1/ Le desperado à la dent de lait (6 pages). Lucky Luke croise la route d'un pionnier dont le chariot a une roue brisée. Or il doit déposer son fils chez le dentiste. Le cowboy accepte de s'en occuper mais le gamin va lui attirer une série de problèmes pour tenter d'échapper au médecin.
- 2/ L'hospitalité de l'Ouest (6 pages). Fatigué après une journée d'exploits en tout genre, Lucky Luke est recueilli par les Flaherty et les Blaston réunis pour élire la reine d'une soirée entre leurs familles. Invité à les départager, le cowboy se trouve au coeur d'un imbroglio et ne parvient pas à se reposer.
- 3/ Maverick (6 pages). Un veau échappe à son propriétaire avant qu'un autre éleveur le réclame. La situation s'envenime rapidement et attire l'attention des Apaches, au grand dam de Lucky Luke qui espère alors une intervention de la cavalerie.
- 4/ L'égal de Wyatt Earp (6 pages). Leroy Blastwater est un tireur incroyablement maladroit qui veut impressionner sa fiancée Louella Jingle. Il convainc Lucky Luke de l'aider en improvisant un duel au cours duquel la chance va bouleverser le destin du jeune homme.
- 5/ Le colporteur (6 pages). W. Flatshoe est un marchand itinérant que Lucky Luke sauve de deux brigands. Mais les Sioux les attaquent ensuite et les deux hommes ne devront leur salut qu'aux articles du colporteur.
- 6/ Passage dangereux (6 pages). Un couple de colons doit traverser un cours d'eau large et profond. Lucky Luke leur propose son aide mais doit composer avec le caractère de l'épouse, Edna, rechignant à se séparer d'objets de famille, puis, une fois sur l'autre rive, effrayée par la proximité avec des Pawnies.
- 7/ Sonate en Colt majeur (6 pages). Robert Flaxhair est pianiste dans un saloon de Nothing Gulch mais son rêve est de jouer au théâtre de Houston. Encouragé par Lucky Luke, il envoie sa candidature et est invité à s'y produire. Mais le soir venu, il est rongé par le trac devant un public si différent de ses habitudes.
Après un enchaînement d'albums exceptionnels, ces deux nouveaux tomes marquent un peu le pas dans le run de Goscinny et Morris chez Dargaud. Comme un signe, la numérotation de ces épisodes par l'éditeur est invraisemblablement désordonnée puisqu'au dos on lit qu'il s'agirait des numéros 11 puis 15 !
Mais revenons au contenu. L'héritage de Ran-tan-plan montre dès sa couverture le retour des Dalton et du chien le plus stupide de l'Ouest, absents de la série depuis 2 ans et 3 albums (le précédent étant Ma Dalton, tome 38). Depuis que la série a changé d'éditeur, les frangins sont d'ailleurs plus discrets (un seul autre album les met en scène avant, Dalton City). Comme je n'ai jamais considéré qu'ils apportaient un plus au titre, même si on les associe pourtant systématiquement à Lucky Luke, ils ne me manquaient pas tellement.
Pourtant, cette aventure démarre bien avec un argument loufoque : Ran-tan-plan hérite d'une fortune considérable qui, s'il meurt à son tour, reviendra à Joe Dalton. La suite est évidente : Joe veut faire la peau au cabot qui voue pourtant une affection indéfectible au malfrat (et se méfie de Lucky Luke, qu'il sèmera à la première occasion). La réalité a souvent dépassé la fiction pourtant dans ce type d'histoires puisqu'on entend régulièrement parler d'excentriques qui lègue leurs biens à leur animal de compagnie.
Quand Goscinny s'emploie à démontrer toute l'absurdité de la situation, l'album est vraiment impayable. Mais le souci est que cela ne fonctionne que par intermittences car le scénario pâtit de chutes de rythme à cause de séquences s'intégrant mal à l'ensemble, fonctionnant comme des sketches un peu faciles. L'exemple le plus frappant se trouve lorsque Ran-tan-plan fausse compagnie à Lucky Luke et s'égare dans la nature voisine de Virginia City : sa bêtise, son absence totale de sens de l'orientation, son inaptitude à chasser, le fait qu'il confond les animaux est en soi marrant, mais le souci est que cela dure plusieurs pages pendant lesquelles l'intrigue principale est totalement oubliée. Goscinny s'est certainement fait plaisir avec ce passage mais j'estime qu'il nuit à l'efficacité du récit en s'écartant trop du sujet.
C'est dommage car, par ailleurs, des éléments originaux sont abordés, confirmant la tendance de la série à traiter frontalement certains aspects de l'Histoire américaine, comme l'exploitation des chinois et leur repli sur soi dans un quartier ethnique de la ville. Malheureusement, Goscinny ne fait qu'effleurer cela alors qu'il aurait pu en tirer une formidable source de gags, lui qui était si fort pour épingler les particularismes étrangers.
De même, on sent bien que les Dalton n'évoluent plus, figés dans leur emploi de bandits plus bêtes que méchants, et ce même si, pour une fois, Jack et William existent un peu plus et que Averell passe une partie de l'histoire séparé de ses frères. Mais sinon, ils sont comme les légionnaires dans Astérix : supposément menaçants pour Lucky Luke, ils n'existent plus que pour provoquer des gags et quiproquos.
7 Histoires de Lucky Luke est un autre opus mineur dans la série. Là encore, il faut être vigilant car Dargaud a aussi publié l'album sous le titre de 7 Histoires complètes.
Cette collection de short stories est d'un intérêt très discutable : aucune d'elles n'est ni originale ni remarquable. L'indulgence incite à écrire que les auteurs se sont accordés une pause dans une production très soutenue, mais à vrai dire on aurait préféré que Morris et Goscinny fassent carrément un break d'un an et reviennent avec une vraie bonne histoire plutôt que de proposer un menu aussi faible. C'est un peu comme si on écoutait un disque composé d'ébauches de titres inachevés ou de démos tout en ayant conscience que les auteurs n'avaient rien là-dedans de valable pour un LP.
Lucky Luke y est mis en scène dans des séquences sans relief, à nouveau dans un rôle de redresseur de torts - quitte à passer pour le dindon de la farce. Goscinny avait pourtant réussi depuis plusieurs tomes à clarifier un peu la situation du cowboy, alternativement employé au bureau des affaires indiennes ou escorte pour l'armée ou des compagnies privées, ce qui présentait le mérite de socialiser le personnage, de dépasser le cliché du justicier nomade (d'ailleurs on le voyait de plus en plus souvent intervenir dans des Etats précis comme le Texas, le Nouveau-Mexique, et sa base était Nothing Gulch).
Les gags sont pauvres, ils ne nous arrachent guère plus que des sourires, et le format très court de chaque chapitre n'autorise pas à développer les autres rôles (à part Jolly Jumper, et encore).
Morris lui-même accuse le coup : s'il produit encore de belles planches, découpées avec savoir-faire (avec des gaufriers irréguliers), c'est sans éclat. Jamais on ne sent l'artiste très motivé au point de livrer des séquences mémorables, il s'appuie sur son adresse naturelle mais sans forcer son talent.
La colorisation de L'héritage de Ran-tan-plan est par ailleurs un authentique saccage : certes Lucky Luke a rarement été bien traité à cet égard, comme si ce n'était pas la priorité de la série, de ses éditeurs ni un souci pour Morris, mais là, on atteint des sommets dans le n'importe quoi, avec une impression désastreuse, des à-plats chromatiques criards... Tout ça n'est pas sérieux, indigne même. Peut-être qu'un jour Lucky Comics s'attellera à une restauration rigoureuse (comparable à ce que Dupuis et la famille de Franquin réalisent pour Spirou et Fantasio et Gaston Lagaffe).
Bon, vous l'aurez compris, ce n'est pas bon. Mais ça va vite se redresser...
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