Pour son neuvième épisode, Marauders voit revenir au dessin Matteo Lolli. Il est cependant clair que désormais ce dernier est devenu le remplaçant de Stefano Caselli (qui revient d'ailleurs pour les #10 et 11). Gerry Duggan, lui, poursuit sur sa lancée avec un numéro qui revient sur un subplot du premier arc narratif.
Emma Frost, en sodant l'esprit de Pyro (et ses fantasmes), a repéré la présence de l'espion miniature des Homines Verendi, Yellowjacket. La vigilance de ce dernier est déjouée.
Avec le concours des Stepford Cuckoos et de Magneto, il s'agit à présent d'extraire Yellowjacket du corps de Pyro. Ceci fait, Emma efface de la mémoire de l'espion ce qu'il a pu apprendre sur Krakoa.
Et tandis que Magneto renvoie Yellowjacket au large, Emma avec Pyro flanque une bonne frousse aux Homines Verendi afin qu'ils n'essaient plus de surveiller et d'escroquer les mutants...
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Comme dans ma critique précédente, je passe directement à l'épisode suivant pour en tirer un article global. Cela permet de confirmer que cet arc forme un tout rythmé et cohérent.
Tornade apprend à Forge qu'un de ses anciens assistants a reproduit une arme de son invention capable de priver les mutants de leurs pouvoirs. Les Marauders doivent empêcher cela.
Un sous-marin russe est abordé par l'équipe. Tandis que Forge et Bishop récupèrent Daniels, l'ancien partenaire de Forge, Emma Frost, Pyro et Callisto s'occupent de substituer le prototype de l'arme.
Les cerveaux de l'équipage puis de Daniels sont lavés. A Madripoor, Lockheed se rétablit et repart pour Krakoa. Le Pr. X doit, lui, prendre une décision difficile après un énième échec des Cinq pour ressuciter Kitty Pryde...
Un des atouts indéniables de Marauders réside dans ses couvertures signées Russell Dauterman. Comment ne pas avoir envie d'ouvrir un livre avec un dessin aussi accrocheur à chaque fois ? Et quand l'intérieur est à la hauteur, c'est la statisfaction.
Gerry Duggan a prouvé avec les deux épisodes précédents qu'il savait se ressaisir et la série en trouvé à la fois son rythme de croisière et surtout une ligne directrice plus affirmée qu'à ses débuts. En fait, tout le postulat de base (le sauvetage de mutants étrangers, le transport des drogues produites par les mutants sur Krakoa) a été sagement relégué au second plan. On peut trouver ça dommage car il y avait matière à produire une série passionnante sur les plans symbolique (Krakoa devient une terre promise, un asile de réfugiés) et politico-commerciale (le business mutant qui assure leur indépendance économique). Mais à l'évidence, le programme est trop copieux pour Gerry Duggan, et sans doute pour une seule série.
Le scénariste est définitivement plus inspiré quand il écrit un récit de pirates, d'aventuriers mutants, désormais motivés par la vengeance et veillant à leurs intérêts commerciaux. Duggan chasse d'abord, dans le #9, sur les terres de Benjamin Percy et X-Force en révélant une faille (une de plus) dans la sécurité de l'île puisque Yellowjacket, au service des Homines Verendi, s'y trouve. L'espion miniature est en effet à l'intérieur du corps de Pyro, à l'insu de celui-ci.
L'ouverture de l'épisode 9 fait un moment craindre le pire puisqu'il met en scène les fantasmes du mutant (on découvre son attirance pour Jean Grey). Mais Duggan se reprend vite, encore une fois, en construisant un scénario à la manière de poupées russes. Tout ici est illusion, jeu de télépathes - Emma Frost, les Stepford Cuckoos. En sondant l'esprit surchauffé de Pyro, Yellowjacket est repéré puis maîtrisé et enfin expulsé (de Pyro et de Krakoa).
La contribution ponctuelle de Magneto (et les notes finales du Fauve) rappellent que tout ce beau monde travaille ensemble, et c'est bienvenu car on peut déplorer que la franchise "X" n'insiste pas davantage sur la coopération entre les diverses équipes (il est en effet rare que X-Force soit mentionnée ailleurs tout comme Marauders ou Excalibur, ce qui donne la fâcheuse impression que personne ne se parle). Pourtant, dans X-Men, Jonathan Hickman, en recourant souvent à divers mutants en renfort de Cyclope, suggère bien que tout le monde est susceptible d'être sollicité pour une mission en dehors de son groupe de référence (d'ailleurs, l'arc de New Mutants qu'il a écrit a servi de base pour deux épisodes de X-Men).
Est-ce que la mise en garde d'Emma Frost contre les Verendi suffira à les éloigner durablement des affaires mutantes ? L'avenir nous le dira. En revanche, j'ai bien aimé cette "data page" où le Fauve note qu'il faut redéployer les télépathes pour mieux couvrir d'éventuelles intrusions, et aussi la déclaration de Magneto qui veut que le Quiet Council de Krakoa réfléchisse à l'éventualité de menaces internes - ce dernier point souligne que, le moment venu, le sort de Sebastian (et Shinobi) Shaw se réglera certainement aussi sévèrement que celui de Dents-de-sabre (dans House of X), et j'avoue que j'attends avec impatience que cette crapule prenne cher...
L'épisode suivant est encore plus exquis, même s'il comporte une scène stupide au possible. Forge, avant d'être un allié des mutants, a travaillé pour le gouvernement, tous ceux qui ont lu les épisodes de Chris Claremont et John Romita Jr s'en souviennent : c'est à cette époque qu'il conçoit un pistolet capable de priver un mutant de son pouvoir, que l'arme lui est retiré par Henry Gyrich et que Tornade en fera les frais dans un épisode dramatique et mémorable. Aujourd'hui, un ancien assistant de Forge a reproduit cette arme pour les russes.
Bon, les russes, voilà une cible vieille comme le monde, et parfois on se demande si les scénaristes américains savent que le Mur de Berlin est tombé et que la Guerre Froide est terminée (même si, dans les faits, elle a repris d'une façon différente "grâce" aux sinsitres Trump et Poutine). Pour ma part, j'y vois surtout une béquille scénaristique pratique : il serait plus logique en un sens de faire des terroristes du Moyen-Orient les vrais nouveaux ennemis et on peut imaginer des fanatiques comme Al-Qaida, Daech et autres en vouloir aux mutants comme à des "infidèles" ou des "monstres" (surtout que la dimension religieuse, divine, a été bien soulignée durant House of X, et même avant). Mais bon, va pour les russes.
Il s'agit donc à la fois de récupérer Daniels, l'ancien assistant de Forge, et son prototype. Un sous-marin russe les transporte et se fait aborder spectaculairement par les Marauders au complet. Il y a même une soucoupe volante ! Et c'est jubilatoire. L'action est menée tambour-battant, on apprécie l'efficacité avec laquelle les héros prennent le bâtiment d'assaut, exfiltrent Daniels, maitrisent l'équipage. Malgré un moment embarrassant comme Duggan ne peut, apparemment, pas s'empêcher d'en écrire parfois.
En effet, pour neutraliser des soldats qui pointent leurs armes contre Pyro et elle, Emma Frost a l'idée de leur montrer sa poitrine. Ainsi, ils pensent tous à la même chose et elle peut les forcer à se tirer dessus plus facilement. La ruse est tellement imbécile et machiste qu'on est gêné à la lecture, surtout que Pyro traîne inutilement dans les pattes d'Emma Frost (inutilement parce que, finalement, il sera le seul à ne rien faire à l'intérieur du sous-marin - il ne le coulera qu'une fois l'équipage téléporté au-dessus de la Place Rouge). On déplore d'autant plus ce passage ridicule que Callisto apparaît ensuite et que j'aurai largement préféré que ce soit elle qui soit avec Emma tout du long (plus efficace, charismatique que ce crétin fini de Pyro).
L'épisode se clôt sur deux notes opposées : d'une part, Lockheed, repêché par un père et sa fille au large de Madripoor, est rétabli et entreprend de rentrer à Krakoa. On est soulagé de voir le petit dragon bien vivant, et surtout dans le numéro suivant, il va être essentiel. D'autre part, comme à la fin du #8, inexplicablement, les Cinq sont incapables de ressuciter Kitty Pryde et le Pr. X doit prendre une décision à ce sujet (persévérer ou abandonner). C'est une préparation habile pour la fin de l'arc.
Visuellement donc, on assiste au retour de Matteo Lolli pour l'épisode 9. L'italien, sur lequel Marvel misait visiblement beaucoup en lui confiant le titre, a déçu : incapable de tenir les délais, il a produit un dessin pauvre, paresseux même. Désormais, il est clair qu'il est un second choix et qu'il a perdu sa place de titulaire. Mais c'est un mal pour un bien car sa prestation en fill-in suffit. C'est toujours aussi peu consistant, les décors sont souvent absents, les personnages peu expressifs, le découpage très plat, en somme ce que fait un intérimaire résigné à son statut.
Le contraste avec Stefano Caselli qui revient pour le #10 est total. Rien que l'encrage permet de constater à quel point son dessin est plus solide, assuré, précis, texturé. Les émotions qui traversent les acteurs sont limpides et leurs gestuelles sont mieux composées. Caselli a le sens du cadre, il sait poser une scène, ceux qui la peuplent, l'animent, il sait situer un environnement, un décor et en tirer parti pour produire une image, puis une suite de plans, et une série de pages dynamiques. C'est un régal.
Par ailleurs, le coloriste Edgar Delgado est sur la même longueur d'ondes que Caselli alors qu'il ne peut pas faire grand-chose d'autre que "meubler" les images de Lolli, où tout semble désincarné. J'espère vraiment que Caselli va rester sur le titre et en devenir le vrai patron au niveau visuel, en tenant le rythme. A cette condition, Marauders gardera du cachet et rendra Lolli supportable.
Le meilleur reste à venir avec le prochain épisode, pour lequel, cette fois, je reviendrai à un format critique plus habituel.
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