Le quatrième numéro de Empyre m'avait laissé une impression de gâchis. Dan Slott et Al Ewing devaient donc se rattraper en beauté pour le pénultième épisode de leur saga. D'autant que Marvel a décidé de publier la fin dans... Trois semaines ! Mission (presque) accomplie avec ce chapitre nerveux, dense, superbement dessiné par Valerio Schiti... Même s'il souffre encore de quelques bizarreries.
Dans l'appartement de Wiccan, Captain Marvel et la Torche Humaine apprennent que Billy Kaplan et Hulkling se sont mariés en secret avant que ce dernier ne prenne place sur le trône de l'alliance Kree-Skrull. Le jeune magicien sait donc que l'empereur actuel est un imposteur et sait comment le prouver.
Wakanda. La Chose se fait massacrer par le Cotati qui a pris l'apparence de She-Hulk. Celle-ci a besoin de son cadavre pour en faire un terreau grâce à son corps. Mantis et la Femme Invisible asssistent, umpuissantes, à la correction de leur ami.
Un peu plus loin, Black Panther affronte seul l'armée Cotati et il est désormais clairement dépassé. Un de leurs chefs plante une graine dans le sol enrichi en vibranium, créant un portail. De celui-ci surgit Swordsman qui empale T'Challa sur son épée avant d'accueillir Quoi.
Wiccan, avec la Torche Humaine et Captain Marvel, se téléporte dans le vaisseau amiral de l'alliance Kree-Skrull et démasque le faux empereur en délivrant Hulkling. Hélas ! Il est trop tard car l'imposteur a activé le Bûcher, condamnant la Terre pour exterminer les Cotati.
La Montagne des Avengers. Mr. Fantastic résume la situation à Tony Stark qui l'équipe de sa nouvelle armure...
Finies les palabres, retour à l'action : ainsi pourrait-on résumer le contenu de cet avant-dernier épisode de Empyre. Il était temps et à la fin de cette histoire, on retiendra certainement ce ventre mou juste au milieu de la saga. Il demeure quelques curiosités dans ce chapitre mais il faut saluer le sursaut des auteurs.
Tout d'abord, comme le résumé ci-dessus le prouve (j'espère), le récit est clairement découpé. On va d'un point à l'autre, l'action rebondit de manière très rythmée et claire, les enjeux sont bien (re)définis, les personnages ont tous une mission à accomplir et les méchants sont bien disposés. Un très bon point.
Si, disons, le premier tiers de Empyre ne laissait guère de doute quand au conducteur de la saga (Al Ewing), il semble que maintenant on assiste à une reprise en main par Dan Slott. En effet, contrairement à son partenaire, il a la charge d'une série directement impactée par les événements (Fantastic Four) et il se sert de chaque membre du quatuor pour, en quelque sorte, baliser le scénario. Johnny Storm avec Captain Marvel et Wiccan, Ben Grimm avec Mantis (à laquelle Schiti a donné un look de giesha surprenant mais séduisant) et Sue Richards, Reed Richards avec Tony Stark. On peut même ajouter qu'il emploie Black Panther comme une sorte de personnage-relais entre FF et Avengers puisque T'challa a souvent servi de suppléant dans les 4 Fantastiques.
Comme le cliffhanger de l'épisode précédent nous le révélait, l'astuce consiste à dévoiler que Wiccan et Hulkling se sont mariés en secret juste avant que Hulkling devienne empereur de l'alliance Kree-Skrull. Valerio Schiti s'amuse au passage à donner les visages de Jim Cheung et Allan Heinberg, les créateurs de Hulkling et Wiccan, aux deux hommes chargés d'officialiser l'union des deux jeunes héros. Unis par les liens du mariage mais aussi par une sorte de lien magique, ils sont toujours en contact : Wiccan sait donc que son mari a été emprisonné et qu'un imposteur a pris sa place - on apprend d'ailleurs que les conseilleirs Kree et Skrulles n'ont eu de cesse depuis le mariage de vouloir le faire annuler.
D'une certaine manière, cette astuce se retourne contre les scénaristes car elle arrive trop tardivement : tous les héros auraient dû avoir un peu plus de bon sens et solliciter Wiccan quand la situation a dégénéré. Ewing et Slott nagent donc contre le courant qu'ils ont eux-même créé, et ce pendant tout cet épisode. Parfois ils surnagent, parfois ils dérivent, incapables de corriger quelque chose qui n'a que trop duré.
Le plus évident, c'est la position de Black Panther qui affronte à lui seul tous les Cotati débarqués au Wakanda. Alors, certes, il y a là une mauvaise gestion éditoriale : en effet, la crise sanitaire a motivé la décision de Marvel de réduire le nombre de tie-in, et l'un en particulier se fait cruellement sentir - il s'agit de celui avec Thor. Le dieu du tonnerre est absent depuis le deuxième épisode, on sait juste qu'il est parti en quête d'une solution alternative (comme l'a expliqué Tony Stark à Reed Richards dans le #4). Mais comme Empyre : Thor a été annulé, on ignore tout de cette "quête" et on constate juste qu'un des poid lourds des Avengers manque à l'appel dans un moment critique. Va-t-il, opportunément, revenir dans le #6 pour sauver le Wakanda et infliger une correction à Quoi ? Cela ressemblerait fort à une scène mémorable de Avengers : Infinity War.
Mais au-delà de l'absence du seul Thor, il est complètement aberrant de mettre en scène Black Panther de cette manière. Ce n'est pas comme si les héros manquaient pour le soutenir, mais visiblement personne n'a l'idée de se rendre au Wakanda (par exemple, où est passé Ghost Rider ? Lui aussi est invisible depuis le n°1). Dès lors, sa défaite est inévitable et on peut dire qu'elle ne souffre aucune discussion. Je ne crois guère cependant que Ewing et Slott aient eu a permission de le tuer vraiment, malgré les apparences (Black Panther est devenu un symbole trop important depuis le succès du film, et comme il est le chef des Avengers de Jason Aaron, il est de facto protégé).
En revanche, et cela confirme la reprise en main des affaires par Slott, l'affrontement entre She-Hulk et la Chose est un grand moment, douloureux, cruel. On a rarement vu Ben Grimm morfler autant, ça fait mal au coeur. La fin de l'épisode s'emballe, de façon réjouissante, avec des positions radicales de part et d'autre (l'alliance Kree-Skrull a activé le Bûcher, Quoi accède à un niveau divin). Cela compense le fait que Tony Stark et Reed Richards aient été eux aussi trop mis à l'écart (même si l'issue du combat dépend en grande partie d'eux désormais).
Reste que cet event est remarquablement dessiné. C'est même certainement le plus abouti depuis Fear Itself et Secret Wars. Valerio Schiti pète le feu et envoie du bois. Son dessin est généreux avec un découpage très dynamique et des personnages très expressifs. Il sait représenter avec force les pouvoirs de chacun (en particulier donc le combat sanglant entre She-Hulk et la Chose) et les décors sont soignés. Les couleurs de Marte Gracia veillent à privilégier une gamme chromatique distincte pour chaque site, ce qui facilite là aussi la lecture et l'identification des protagonistes. Parfois on aimerait juste que le script lui donne plus d'espace pour quelques scènes d'envergure (comme l'attaque aérienne commandée par Black Panther), mais on ne va pas chipoter.
C'est très frustrant, surtout après avoir dévoré cinq épisodes d'affilée en autant de semaines, mais il faudra s'armer de patience pour connaître le dénouement de cette saga (qui gagne aussi un numéro "Omega", qui reviendra sur le mariage Wiccan-Hulkling).
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