vendredi 5 juillet 2019

SPACE BANDITS #1, de Mark Millar et Matteo Scalera


Mark Millar a beaucoup à se faire pardonner après avoir commis le calamiteux Prodigy. Mais le turbulent écossais a l'art du rebond et ne tarde pas pour dégainer sa nouvelle mini-série (en cinq épisodes) : Space Bandits, soit, selon ses termes, "Butch Cassidy et le Kid version féminine dans l'espace." Pour cette aventure, il a, comme d'habitude, réussi à ferrer un artiste de première classe, Matteo Scalera. Et ça commence bien !


Cody Blue voyage sur le vaisseau de croisière galactique "Lionel Ritchie" où elle fait la connaissance d'un aimable couple de retraités qui fête leur soixante ans de mariage. Elle leur révèle qu'elle prépare un casse.


Grâce à son lézard, Cosmo, Cody endort les passagers et permet à son gang de les détrousser sans violence - ce qui déplait à ses complices. En conséquence, une fois à leur planque, ils la trahissent en la brutalisant et filent avec le magot.


Ailleurs. Theena Cole et son fiancée Viggo Lust ont monté une arnaque juteuse basée sur le casier judiciaire chargé de la jeune femme. Il la livre aux autorités, empoche la prime puis la libère. Et répéte l'opération.


Mais Theena en a assez et voudrait profiter de leur argent. Viggo la convainc d'un dernier coup. Mais cette fois, il la trahit en filant avec l'oseille. Elle comprend trop tard et est convoyée dans une prison haute sécurité.
  

Ce pénitencier, c'est le Crustacé, où les gardiens laissent les détenus livrés à eux-mêmes. La loi du plus fort domine. Theena enrage. Elle n'est pas la seule puisque Cody Blue a également échoué là.

Empress et Reborn l'ont prouvé, Mark Millar écrire des héroïnes sans les hyper-sexualiser ni en faire des garçons manqués. C'est donc en toute confiance qu'on commence la lecture de ce Space Bandits qui est un western spatial aux références vite identifiables.

Cody Blue, c'est Paul Newman dans Butch Cassidy et le Kid : la chef d'un gang de voleurs mais avec une âme de romantique - elle refuse la violence. Cela ne plaît guère à ses hommes de main, une bande de brutes qui considèrent cela comme de la mollesse et en veulent aux nantis. Ces machos dégénèrés finiront logiquement par la trahir en la laissant pour morte dans leur planque et en filant avec leur magot.

Theena Cole, c'est Tuco dans Le Bon, la Brute et le Truand : avec son amant, Viggo Lust, elle est fréquemment remise au poste de police afin que son complice empoche la prime pour sa capture. Puis il organise son évasion et répéte l'opération. Jusqu'à ce qu'elle se lasse et qu'il décide de l'abandonner.

Evidemment, Cody et Theena vont se rencontrer en prison et partager un objectif commun : la vengeance. Millar emballe ça avec un swing emballant, même s'il emprunte sans se gêner chez George-Roy Hill et Sergio Leone. Qu'importe, on est là pour s'amuser, et effectivement, c'est distrayant. Surtout, ce qui faisait défaut à Prodigy (un ennemi bien identifié, des héros faillibles) est corrigé ici : en simplifiant, le scénariste renoue avec l'eficacité.

Millar a aussi pris le parti d'inscrire son récit dans une ambiance étonnante puisque, visuellement, tout évoque les années 80, avec des couleurs flashy, des coupes de cheveux sculptés, des vêtements coupés façon stylisme de l'époque, bref un côté vintage assumé. Le coloriste Marcelo Maiolo s'est visiblement lui aussi beaucoup amusé avec cette palette bien vive.

Pour illustrer cela, il fallait un artiste qui ne soit pas forcément un réaliste : Millar a réussi à attirer dans ses filets le partenaire de Rick Remender sur Black Science, l'italien Matteo Scalera. Avec son trait souple, à l'expressivité cartoony et aux compositions très toniques, c'est une excellente pioche.

Scalera croque à merveille des méchants, rustres ou filous, avec des trognes irrésistibles, et n'a pas peur de donner un look dément aux deux divas de l'histoire. Surtout, il soigne des décors époustouflants, totalement délirants, comme le vaisseau "Lionel Ritchie", ou cette étrange prison en forme de crustacée. On en prend plein la vue.

Enfin, en habile commercial, Millar a rameuté de prestigieux copains pour signer des variant covers exceptionnelles pour ce numéro 1 (et les suivants). Bref, tout est là pour séduire le chaland : ce n'et peut-être pas très subtil, mais c'est quand même drôlement bien foutu !

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Les variant covers de :

 Sara Pichelli
 Bryan Hitch
Travis Charest

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