mercredi 20 juillet 2016

Critique 956 : BATMAN #43-44 + ANNUAL #4, de Scott Snyder, Brian Azzarello, James Tynion IV, Greg Capullo, Jock et Roge Antonio


BATMAN : SUPERHEAVY, PART THREE est le 43ème épisode de la série, écrit par Scott Snyder et dessiné par Greg Capullo, publié en Octobre 2015 par DC Comics.
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Jim Gordon retrouve Bruce Wayne, bien vivant mais ayant tout oublié de sa vie comme Batman après son dernier combat contre le Joker, et travaillant désormais dans une maison pour jeunes aux côtés d'une de ses anciennes amantes, Julie Madison. L'ex-commissaire lui révèle être le nouveau Batman et, convaincu que son prédécesseur sous ce nom, est encore capable de l'aider, lui donne une des "graines" de Mr Bloom pour qu'il l'analyse.
Leur rencontre est observée par Alfred Pennyworth et Clark Kent/Superman (dont la double identité a été publiquement dévoilée récemment). Dans la Batcave, le majordome de Wayne explique pourquoi il ne souhaite pas que Bruce redevienne Batman et impose ce choix à son interlocuteur quand il proteste.
Le nouveau Batman retourne, sans prévenir sa hiérarchie et Geri Powers, dans le quartier des Narrows pour inspecter la planque du gang de feu Gigi Cheung. Mais il s'y fait piéger... Tout comme Oswald Cobblepot/Le Pingouin lors d'une négociation avec Mr Bloom.

Le cliffhanger de l'épisode 42 (en fait déjà suggéré dès le #41) confirme donc que Bruce Wayne n'est pas mort. C'était prévisible et peu exploité d'ailleurs, donc un peu décevant, il faut bien l'admettre. Mais l'état dans lequel on retrouve le personnage le présente profondément changé (et pas seulement parce qu'il arbore une barbe fourni) : sa situation est protégée en quelque sorte par son fidèle Alfred, dont l'explication avec Superman sonne juste.

Sur ce plan, délicat, Scott Snyder réussit quand même bien son coup. L'épisode s'articule en quatre parties bien distinctes et successives : les retrouvailles assez lunaires entre Gordon et Wayne, le dialogue entre Alfred et Clark Kent, le retour de Gordon/Batman dans le quartier de Narrows (avec une issue très compromise), et la rencontre du Pingouin avec Mr Bloom. L'apparition du vilain de cet arc narratif ne déçoit pas : il en impose, avec un look flippant à souhait - j'ignore s'il s'agit d'une création originale ou d'une nouvelle version d'un ancien méchant, mais l'effet est garanti.

Et Greg Capullo n'est évidemment pas pour rien dans cette réussite. Il réussit deux séquences sensationnelles - la fusillade dans le repaire du gang, avec des requins ; et l'épilogue, saisissant. Le dessinateur est vraiment dans une forme éclatante, avec des partenaires à l'encrage et aux couleurs, qui savent le compléter. En ayant consulté quelques-uns de ses anciens travaux (sachant qu'il avait abandonné les comics pendant plusieurs années), son évolution est stupéfiante et il n'est donc pas étonnant que, son run sur Batman terminé désormais, Mark Millar ait voulu collaborer avec lui (une mini-série en creator-owned chez Image Comics, Reborn, paraîtra à partir de la rentrée).

Après ça, l'histoire va dévier, le temps d'un épisode et pour son quatrième Annual.
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BATMAN : A SIMPLE CASE est le 44ème épisode de la série, co-écrit par Scott Snyder (histoire originale et co-scénario-dialogues) et Brian Azzarello (co-scénario-dialogues) et dessiné par Jock, publié en Novembre 2015 par DC Comics.
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Il y a cinq ans de cela, Batman, alors en activité depuis seulement un an à Gotham, enquêta sur la mort maquillé en règlement de comptes d'un jeune afro-américain, Peter Duggio, originaire du quartier de Corner.
Le justicier interroge le Pingouin, sans grand succès, avant d'orienter ses recherches sur la victime, qui gérait l'épicerie de son père, située dans les 4/5èmes, entre les territoires de deux gangs. Pour protéger son commerce, il avait contacté un certain jardinier, fournissant des graines donnant des super-pouvoirs - mais tuant aussi ses consommateurs à petit feu... 

Cet épisode détone immédiatement grâce (ou à cause, selon qu'on aime ou non son style graphique, et, dans une moindre mesure, sa narration écrite) aux dessins de Jock : l'ambiance est radicalement différente de celle produite par Capullo et aboutit à des planches à mi-chemin entre l'illustration et l'expérimentation. L'artiste insère des (fausses) coupures de presse à ses images, joue avec le lettrage, et la colorisation reconnaissable entre mille de Lee Loughridge ajoute au climat déroutant, avec des tonalités où dominent le noir, le gris et le brun, comme s'il s'agissait effectivement d'un document d'époque.

Scott Snyder, qui signe toujours l'histoire et une partie des dialogues, s'est adjoint les services d'un de ses collègues, réputé pour son goût des séries noires, Brian Azzarello (à qui on doit la saga 100 Bullets, mais aussi un run mémorable de Wonder Woman).

Il semble évident pourtant que c'est Azzarello qui ait pris le dessus dans la rédaction : l'emploi d'une voix off inspiré par le roman criminel, renouant avec les detective stories, diffère très nettement de celle de Snyder, plus tournée sur les réflexions que se fait le héros sur ses capacités et ses actions. Ici, Batman enquête, déduit, remonte la piste de Mr Bloom, déjà, donc, présent à Gotham, dans un coin appelé Blossom Row où la nature a repris ses droits.

Cette révélation apprend donc que ce dealer au coeur de l'intrigue de l'arc Superheavy opère depuis longtemps, assez discrètement pour que Batman ne l'ait jamais arrêté en cinq ans, profitant aussi sans doute des méfaits commis par d'autres vilains. Que Bruce Wayne, désormais amnésique, soit incapable de l'apprendre à Jim Gordon est un twist très vicieux.

Néanmoins, et c'est le gros bémol de cet épisode, on ne sait rien de l'origine des pouvoirs de Mr Bloom, de son identité réelle. J'espère que Snyder y reviendra en temps et en heure. C'est frustrant, mais ça donne encore plus envie de suivre cette intrigue.
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BATMAN : ANNUAL #4 - MADHOUSE est écrit par James Tynion IV et dessiné par Roge Antonio, publié en Novembre 2015 par DC Comics.
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Reconverti momentanément en nouvel asile pour les criminels auparavant détenus à Arkham, le manoir Wayne est rendu à son propriétaire après le transfert de ses derniers locataires. Mais en revenant chez lui pour décider s'il va garder cette demeure ou permettre à Geri Powers (qui a racheté les biens et les entreprises Wayne) de la vendre, Bruce est piégé et harcelé par le Sphinx, Gueule d'argile et Mr Freeze, après avoir été séparé d'Alfred et Julie Madison.
Les trois vilains, ignorant que leur cible a été Batman, mais sachant qu'il a perdu la mémoire, veulent se venger de celui qu'il considère comme le mécène du justicier. Comment ? En le traumatisant assez brutalement pour qu'il devienne aussi fou qu'eux...

Les Annuals d'une série sont souvent ces gros épisodes (ici, pas moins de 40 pages) censés être des bonus pour les fans, mais s'avérant des suppléments dispensables, d'autant qu'ils sont sont rarement réalisés par l'équipe artistique de la série.

Celui-ci, le quatrième, est inégal. L'argument exploité par James Tynion IV (qui a auparavant déjà écrit des tie-in à Batman, et même signé un spin-off consacré à un membre de la Cour des Hiboux, Talion, qui fit long feu) n'est pas inintéressant - trois ennemis de Batman, ignorant qu'ils ont piégé son (ex) alter ego, Bruce Wayne, veulent se venger de lui en le rendant fou. La situation est savoureuse puisqu'on peut légitimement estimer que Wayne a sombré dans la folie en devenant Batman, poursuivant dans une quête morbide et sans fin tous les individus comme l'assassin de ses parents (cette thèse d'un Batman finalement aussi cinglé que ses ennemis a été synthétisée avec une maestria indépassable par Alan Moore dans Killing joke).

Pourtant, est-ce que ça méritait ce gros chapitre parallèle de 40 pages, aux rebondissements convenus, au rythme alternatif, et au graphisme moyen (Roge Antonio a un style qui ressemble à celui de Rafael Albuquerque, mais sans des finitions aussi maîtrisées) ? La réponse est dans la question.

Plus indécis est l'impact de cette épreuve sur Bruce Wayne pour la suite de l'arc Superheavy ? Il faudra attendre le retour de Scott Snyder et Greg Capullo aux manettes pour l'estimer - et donc la parution de "Batman Universe" #6 le mois prochain. Stay tuned !
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Ces épisodes sont disponibles, en vf, dans la revue "Batman Univers" n° 4 et 5.

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