Ainsi s'achève la maxi-série Dial H for Hero. Ce serait mentir de prétendre que cette conclusion n'est pas bienvenue car le projet a souffert d'indéniables longueurs, mais il faut aussi reconnaître à Sam Humphries et Joe Quinones d'avoir mené leur barque avec assurance et panache. Le terme de l'aventure de Miguel et Summer se termine en beauté, sur une note résolument optimiste, qui fait vraiment du bien.
Aspirés dans le K-Dial, Miguel et Summer pensent avoir perdu la partie contre Mr. Thunderbolt. Mais la jeune fille n'en veut pas à son ami, qui a perdu ses repères au pire moment. L'espoir demeure et c'est ce qui va les sortir de ce mauvais pas.
Le temps presse car Mr. Thunderbolt est désormais en possession des quatre cadrans magiques et s'apprête à doter tous les habitants du multivers de super-pouvoirs pour leur épargner souffrance et peine comme lui quand il a perdu son grand-père.
Miguel et Summer surgissent dans l'Hyper-Néant de Mr. Thunderbolt, juste à temps pour l'empêcher d'accomplir son plan. Miguel affronte son double maléfique, Thunder Montez, tandis que Summer se sert du C-Dial pour neutraliser Thunderbolt.
Le vilain est piégé dans un réalité parallèle tandis que Miguel annihile son double. Reste pour les deux adolescents à trouver le chemin pour réintégrer leur dimension d'origine. Summer échange les combinés avec les cadrans et trouvent ainsi un passage entre les pages du Multivers.
Ils regagnent ainsi le repaire de l'Opérateur. Celui-ci a mesuré le danger de cacher les cadrans et va désormais les garder à l'oeil dans un endroit unique. Il renvoie Summer et Miguel à Metropolis où, escortés par les fantômes de SuperMiguel et Lolo Kick You, ils profitent de le retour à la normale.
Le succès critique et commercial de Mister Miracle (par Tom King et Mitch Gerads) a motivé DC Comics a multiplié les projets sous la même forme, des maxi-séries en douze épisodes, soit un an de publication. C'est devenu particulièrement flagrant ces derniers mois avec la parution de Martian Manhunter (Steve Orlando/Riley Rossmo), Batman's Grave (Warren Ellis/Bryan Hitch) et la semaine prochaine le lancement de Strange Adventures (Tom King/Mitch Gerads et Evan Shaner). Sous la bannière "Wonder Comics", le label de Brian Michael Bendis, on a eu droit à Wonder Twins (Mark Russell/Stephen Byrne) et donc Dial H for Hero.
Pourtant, on le sait, ce dernier titre n'était pas destiné à un tel format puisque seuls six épisodes avaient été programmés. Mais les bons retours ont incité l'éditeur à prolonger l'histoire. Cela s'est senti quand, précisément à mi-chemin, le scénario a connu quelques signes d'essoufflement, visiblement pas conçu pour une rallonge pareille.
Sam Humphries a meublé avec le plus de maîtrise possible, tandis que son dessinateur, Joe Quinones, déjà généreux dans l'effort, tirait la langue et devait être suppléé par des invités. On pouvait alors craindre que Dial H... ne sombre.
Après un passage à vide de quelques épisodes, pourtant, les auteurs ont su rebondir et nous entraîner vers une conclusion digne du projet. Comme quoi, il ne faut pas partir à l'aventure sans disposer de suffisamment de munitions et surtout sans un plan d'ensemble à la mesure du format. Il y a bien une différence de taille entre un scénariste qui s'engage dans douze épisodes dès le départ et un autre qui doit improviser, visiblement, pour étirer son récit sur un an de publication.
Avec disons deux ou même quatre épisodes en moins, la série aurait indéniablement gagné en efficacité et en densité, conférant à son propos une solidité plus évidente, sans compter que Joe Quinones aurait sans doute assuré toute la partie graphique sans soutien. Il ne faut pas blâmer Sam Humphries qui a dû composé avec une situation inattendue.
A partir du moment où l'intrigue a promis une étape décisive à Apokolips, le lecteur s'est mis à espérer un dénouement spectaculaire. Mais en fin de compte, on a eu droit qu'à une brève escale chez Darkseid (qui n'a d'ailleurs pas montré son nez). D'une certaine manière, Humphries a eu le nez creux en nous décevant sur ce point car il a choisi de recentrer in extremis, in fine, son intrigue sur ses deux héros et leur adversaire plutôt que de s'attarder chez les Néo-Dieux de Kirby - et d'affronter la concurrence terrible de la maxi-série de King et Gerads.
Ce qu'on retiendra de Dial H... dans son ultime chapitre, c'est sa naïveté assumée mais agréable où l'héroïsme fait place à l'espoir : une astuce plus fine qu'elle n'en a l'air puisqu'elle repositionne l'obsession de Mr. Thunderbolt, méchant qui voulait donner des super-pouvoirs à tous les habitants du Multivers pour qu'il ne souffre pas comme il a souffert de la mort d'un proche. Ainsi, cette objectif pathétique acquiert une certaine noblesse, maladroite certes mais qui révèle au lecteur le visage d'un vilain plus désespéré que vraiment maléfique.
Elle montre aussi que les deux jeunes héros, en particulier Miguel, en perdant le Nord (selon la formule de Summer), n'ont pas été sans reproches mais que la solidarité les sauve. Eux aussi ont été maladroits, mais cela les rend identiquement attachants. Humphries est en définitive un sentimental qui ne se résout pas à séparer le monde entre des mauvais irrécupérables et des gentils impeccables : chacun porte en lui des regrets et cela l'humanise au-delà du fait d'acquérir ou de distribuer des super-pouvoirs. D'ailleurs à la fin, on voit que les fantômes de SuperMiguel et Lolo Kick You accompagnent Miguel Montez et Summer Pickens dans les rues de Metropolis comme des reliquats de leur aventure, des sortes d'anges gardiens, mais les deux adolescents ont prouvé leur valeur sans leurs avatars - et trouvé leur bonheur sans eux.
Quinones fait une dernière fois feu de tout bois au dessin et nous régale d'excentricités bien dosées. Il convoque notamment John Romita Sr., mais l'essentiel n'est plus dans la citation. Lui aussi de dépouille de ses artifices pour livrer des planches très belles où ses deux jeunes héros reviennent au centre. Ce sont eux qui trouvent la solution pour neutraliser Thunder Montez et Mr. Thunderbolt, pour regagner le Heroverse, pour rentrer à Metropolis.
Malgré tout, Quinones et son coloriste, l'excellent Jordan Gibson, ne se privent pas de quelques planches fabuleuses comme quand Miguel et Summer sont coincés dans le K-Dial, ou encore lorsqu'ils traversent des moments forts de l'Histoire du DC Univers le temps d'une double-page magnifique, sans oublier la page finale, superbement composée (notez la présence aérienne de Superman, figure emblématique de toute la série).
Comme je le disais plus haut, avec moins d'épisodes, et peut-être un petit break d'un mois à mi-parcours, Quinones aurait sûrement pu dessiner l'intégralité de la série. Mais on ne peut guère se plaindre des artistes invités pour le remplacer ponctuellement, et qui ont maintenu à l'ensemble une belle allure. L'un dans l'autre, visuellement, Dial H... aura été un régal pour les yeux.
Reste à savoir si tout cela aura une quelconque influence sur le reste du DCU. En l'état, les publications du label "Wonder Comics" semblent déconnectées, tout au plus s'adressent-elles des clins d'oeil entre elles et certains personnages passent d'un titre à l'autre (pour atterrir dans Young Justice). Pourtant, avec ces cadrans magiques, Sam Humphries a prouvé qu'il y avait matière à peser sur le cours des affaires.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire