THE AUTOBIOGRAPHY OF A MITROLL : MUM IS DEAD est le premier tome de la série écrite et dessinée par Guillaume Bouzard, publiée en 2008 par Dargaud.
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Guillaume Bouzard a vu sa vie changer il y a un an quand sa mère est morte. Il lui rend une dernière visite à l'hôpital où elle lui révèle qu'il est le fruit de ses amours avec... Un troll !
Cet aveu délirant, Guillaume le prend au sérieux et, pour le vérifier, s'en remet à son meilleur ami, David, qui, depuis un accident mobylette (qui coûta la vie à une vache) s'est reconverti comme généticien (avec son laboratoire chez lui).
Un prélèvement d'ADN plus tard, les résultats confirment une bizarrerie génétique chez Guillaume. Il annonce à sa compagne, Cécile, qu'il part pour la terre des trolls, en Bretagne, pour y trouver son père, en compagnie de son chien (qui parle et revêt un bermuda, tee-shirt et un chapeau), Flopi (pressé de fuir Mme Cruche, dont il a engrossée la chienne).
La quête de Guillaume le dirige vers la forêt de Paimpont, Brocéliande...
J'ai découvert la personnalité détonante de Guillaume Bouzard dans les pages de "Spirou" avec ses strips dans L'Atelier Mastodonte et ses récits complets, Ma grand-mère est une sorcière. Son humour délirant et décalé sont remarquables, et la réputation de The Autobiography of a mitroll (histoire en deux tomes) flatteuse.
Dès la première page, on est sidéré par l'audace de l'auteur qui promet de nous amuser tout en précisant que c'est la mort de sa mère qui a inspiré son projet. Ce qui suit prolonge cette stupéfaction en même temps qu'elle confirme le talent de Bouzard à faire rire et déconcerter avec un point de départ aussi dramatique.
Certes, il n'est pas question de croire au fait qu'il est effectivement le fruit des amours d'une humaine et d'un troll, mais pourtant la relation de cette quête initiatique totalement frappadingue réussit à être émouvante et de la tragédie surgissent de francs éclats de rire. Un vrai exploit, digne d'un équilibriste, qui évite tout mauvais goût.
The Autobiography of a mitroll est une sorte de suite à une ouvre antérieure de Bouzard, publié chez l'éditeur indépendant Requin, intitulée The Autobiography of Me : développée en trois tomes, en noir et blanc, et constituée de chapitres courts, elle a révélé l'artiste, dont les débuts remontent à la fin des années 80 (il est né en 1968) et qui sera récompensé par le prix Coup de Coeur au festival d'Angoulême. Certains fans de la première heure considèrent que le diptyque du Mitroll, publié chez Dargaud (dans la collection Poisson Pilote), en couleurs, comme le début de l'embourgeoisement : jugement sévère de fâcheux qui pensent toujours que dès qu'un auteur rencontre un plus large public, il vend son âme...
Le culot de Bouzard est pourtant indéniable et son sens du dialogue formidable, aussi bien dans le registre de l'émotion ("J'ai remarqué une chose avec la mort d'un proche... C'est que le jour où ça arrive... Tout reste gravé dans ta mémoire... Chaque détail.") que dans l'humour (avec d'innombrables perles : "Il me semble que si j'allais voir des trolls, j'irai pas en voiture, ça fait trop l'américain qui débarque. Mais si ça se trouve, ils s'en foutent.", ou le désopilant "Hola ! Como esta bigoudène !").
La narration est aussi épatante par sa rigueur formelle car Bouzard compose chaque planche avec un gaufrier de douze cases (sauf les pages 1, avec un gaufrier de neuf cases, et 46 avec 5 cases). Ce cadre strict contient sa fantaisie tout en lui autorisant des enchaînements subtils et très fluides, avec des continuités séquentielles, évoquant parfois Philémon de Fred.
Le dessin de Bouzard n'a rien de sophistiqué : les personnages sont représentés de manière épurée mais expressive, avec une abondance de plans serrés, encrés finement, avec une colorisation sobre (de Philippe Ory). Mais il n'a pas besoin d'en rajouter car sa singularité comique se suffit à elle-même : un graphisme plus maniéré n'améliorerait rien.
BD incroyable, attachante et irrésistible, cette autobiographie d'un fils à la recherche de ses origines possède une fulgurance impressionnante.
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