samedi 11 avril 2009

Critique 25 : MARVELS, de Kurt Busiek et Alex Ross


Marvels est une mini-série en quatre épisodes, écrite par Kurt Busiek et peint par Alex Ross, publiée en 1994. 
Marvels fut un succès immédiat dès sa sortie, séduisant les lecteurs et gagnant nombre de récompenses prestigieuses. L'éditeur en tira même une version parodique très sombre, intitulée Ruins, conçue par Warren Ellis et le couple d'artistes-peintres Cliff et Therese Nielsen, et une suite officielle, Marvels : Eye of the camera, en 6 chapitres, toujours écrite par Busiek mais illustrée cette fois par Jay Anacleto.
*
L'histoire démarre en 1939 avec la création de la Torche Humaine originelle, un androïde créé par Phineas Horton, qui fait sensation grâce à sa faculté de s'enflammer au contact de l'air. Mais redoutant qu'une telle créature ne soit un danger pour les civils, elle est enfermée dans un caisson et enfermée. Ainsi pendant des années, ce prodige de la science reçoit un enseignement et réfléchit à sa condition de paria malgré la révolution qu'il représente.
Une fissure dans la coque de son caisson lui permet finalement de s'échapper : cela marquera le début de ce qu'on nommera "l'âge d'or" des super-héros.
A la même époque, le jeune Phil Sheldon commence sa carrière de photographe aux côtés de son ami J. Jonah Jameson, qui se montre choqué par la "merveille" (en vo, the "marvel")qu'est la Torche Humaine. Bientôt le public découvre une autre créature aussi extraordinaire en la personne de l'impétueux Namor, qui veut faire comprendre au monde qu'il répliquera violemment à toute agression contre son royaume sous-marin. En prenant des clichés d'un duel spectaculaire entre la Torche et Namor, Sheldon perd un oeil mais gagne le coeur de Doris Jacquet, sa fiancée.
Les évènements s'accélèrent encore avec l'entrée en guerre des Etats-Unis, qui ont crée le super-soldat Captain America. Namor et la Torche Humaine s'allient pourr lutter à ses côtés en Europe.
Plus tard, dans les années 60, la communauté surhumaine a encore augmenté tandis que Sheldon est à présent marié et père de famille. Le photographe prépare un ouvrage rassemblant ses clichés sur les super-héros intitulé "Marvels". New York héberge deux équipes de justiciers : les Quatre Fantastiques et les Vengeurs

C'est aussi l'époque où apparaissent les mutants, qui suscitent méfiance puis rejet car ils sont assimilés à des monstres, des abérrations de la nature. Les représentants les plus connus de "la prochaine étape de l'évolution humaine" sont les X-Men, qui eux-mêmes considèrent avec dédain ceux qui les pointent du doigt.
Fasciné par les sujets de son livre, Sheldon leur sacrifie sa vie de famille jusqu'à ce qu'une menace inédite et terrifiante remette tout en question. Avec l'arrivée du Surfeur d'Argent, la fin du monde semble annoncée : elle revêt l'aspect d'une créature aussi gigantesque que puissante, celle du dévoreur de planètes, Galactus. Mais les 4 Fantastiques réussissent à faire fuir le géant cosmique. Ce véritable miracle décide Sheldon à passer plus de temps avec ses proches au lieu de chasser le scoop.
Enfin, au début des années 70, paraît "Marvels", l'oeuvre de toute une vie pour Sheldon et qui devient aussitôt un best-seller. Son affection pour les surhommes n'est toujours pas partagée par son camarade J. Jonah Jameson, devenu rédacteur en chef du "Daily Bugle" et qui mène une violente campagne contre Spider-Man, impliqué dans le décés tragique du capitaine de la police George Stacy. Sheldon décide de mener son enquête et rencontre en prison l'ennemi du Tisseur, le Dr Octopus, également mêlé à l'affaire. L'innocence de Spider-Man est soutenue par la propre fille de la victime, Gwen Stacy. Mais celle-ci est kidnappée par le Bouffon Vert.
Un affrontement l'oppose sur le Brooklyn bridge à Spider-Man au cours duquel Gwen Stacy est tuée à son tour, malgré (ou à cause de) l'intervention du justicier. Cette mort atteint profondèment Sheldon et ébrranle sa foi dans les super-héros : c'est symboliquement, pour lui (comme pour le lecteur) la fin de l'âge de l'innocence et le moment de se retirer auprès des siens.
*
Alex Ross et Kurt Busiek ont réalisé une impressionnante reconstitution du passé des éditions Marvel. Si le résultat peut parfois dérouter à cause de certaines scènes rapidement relatées et se rapportant à des épisodes précis, probablement connues de seulement quelques fans avisés, l'impression générale reste quand même très positive.
Busiek narre avec beaucoup de justesse et d'humanité cette plongée au coeur d'un monde fantasmagorique, peuplée de créatures insensées, traversant l'Histoire au gré de moments forts, spectaculaires et émouvants à la fois. Comme il le reproduira avec Astro City, raconter cela du point de vue d'un civil, observateur à la fois émerveillé et inquiet, permet au lecteur d'être impliqué, concerné, touché. C'est très habile, mais il faut surtout un grand talent pour nous embarquer ainsi.
*
Visuellement, même s'il n'avait pas encore atteint son apogée, comme avec Kingdom Come ensuite, Alex Ross nous offre des planches déjà renversantes de beauté. Ce qui pourrait passer pour un roman-photo est tout bonnement saisissant et des séquences comme l'attaque d'une forteresse nazie, l'apparition de Galactus ou le duel entre le Bouffon Vert et Spider-man sont inoubliables.
En découvrant cela, on sait tout de suite qu'on a entre les mains un objet exceptionnel, qui échappera toujours aux critères habituels.
*
Bref, ne vous passez pas de ce classique indémodable et essentiel !

Aucun commentaire: