DCeased va vite, très vite - si vite que le sixième et dernier numéro sortira à la fin de ce mois. La fin du monde n'attend pas. Et Tom Taylor doit finalement se réjouir de cette parution accélérée qui ne peut que valoriser les qualités de son projet. Encore une fois, il n'épargne rien à personne et cette radicalité donne tout son sel à cette histoire, tout comme le dessin vif et brut de Trevor Hairsine.
Captain Atom est mort en se faisant exploser pour écarter Superman et Wonder Woman. La déflagration a rasé Washington, Baltimore et Metropolis. Mais heureusement Black Canary, grâce à son anneau de Green Lantern, a sauvé les vies des proches des héros depuis le sommet du "Daily Planet"
.
Ensemble les héros survivants à l'apocalypse zombie détruisent les moyens de communication électroniques afin de freiner la contagion. Themyscira mais aussi Gotham, devenue une jungle grâce à Poison Ivy, deviennent des refuges pour les civils.
La Forteresse de Solitude devient celui des héros. Lex Luthor et Cyborg conçoivent les plans pour des arches afin d'évacuer la Terre. Mais cette concentration de sauveurs dans un seul endroit devient un piège mortel quand le Martian Manhunter, infecté, y pénètre et commet un massacre.
Flash/Barry Allen, contaminé par le martien, sème le chaos sur la Terre à toute vitesse. Superman part à sa poursuite et réussit à le tuer avant qu'il ne soit trop tard. Mais dans le choc, l'homme d'acier est touché à son tour.
Profitant que son métabolisme freine la maladie, Superman prend le temps de dire adieu à sa mère, sa femme, son fils. Il quitte la Terre en espérant l'épargner mais l'infection le gagne avant qu'il ne s'en soit suffisamment éloigné...
Ce cinquième épisode confirme ce que j'ai dit de cette saga depuis son début : en se déroulant hors de la continuité et en osant tout ce que les auteurs d'events ne peuvent se permettre dans pareil cas, DCeased réussit à réveiller chez le lecteur des sentiments qu'il n'éprouve plus guère dans ce genre d'histoires. On frissonne, on vibre, on a peur. En somme, on ressent tout, à nouveau, ce que ce type de projet devrait susciter.
Récemment, je lisais un article émettant l'hypothèse que tous les events se passaient hors continuité, comme des "Elseworlds", comme DCeased. Ce qui autoriserait toutes les libertés, permettrait de faire avaler toutes les morts et résurrections. En somme, ces sagas se passeraient dans des univers parallèles où tout pourrait être détruit et recomposé à loisir.
Bien entendu, ce n'est pas si simple et les éditeurs répètent à l'envi que leurs events se déroulent bien dans le même monde que les séries régulières, que les événement impactent bien les héros et les vilains impliqués. Ce sont comme des ponctuations dans une année de parution. DC a même innové en distillant sa Year of the Villain pendant tout 2019, au travers de titres phares et avec plus ou moins de fluidité. Quant à Marvel, selon la formule consacrée (et vidée de tout son sens à force d'être utilisée à chaque fois), "rien ne sera jamais plus pareil" après chaque event...
Tom Taylor a trouvé une parade avec DCeased puisque, là, on est effectivement pas dans la continuité, c'est un authentique "Elseworld", où tout est possible. Mais une autre option serait de revenir à ce que Jim Shooter avait mis en place dans les années 80 avec la première saga Secret Wars, qui se déployait tout en n'empêchant pas les séries régulières de continuer sans devenir des tie-in (par exemple Spider-Man apparut dans son titre avec son costume noir sans qu'on sache qu'il s'agissait d'un reliquat de son séjour sur le monde du Beyonder. Les fans étaient intrigués et il fallait attendre la fin de la saga pour comprendre le pourquoi du comment.).
DCeased en fait s'offre comme une alternative, au même titre que Mister Miracle de King et Gerads. C'est une parenthèse "auteuriste" plus habile qu'on ne le croit, et que DC se permet (contrairement à Marvel) tout en publiant Event Leviathan (qui, lui, se déroule bien dans le monde DC habituel).
C'est aussi l'occasion d'apprécier un dessin qui, sans doute, ne serait pas choisi dans une formule normale. Trevor Hairsine, même encré par Stefano Gaudiano et colorisé par Rain Breredo, a un côté sale, brut, douteux dans son graphisme. Ce n'est pas toujours joli, bien achevé, c'est même souvent limite, avec des finitions absentes, une sorte d'urgence dans le trait. Mais qui colle avec le propos puisque tout le monde est esquinté, "zombifié".
Hairsine, c'est un peu comme du Bryan Hitch moche, sans tous les détails ahurissants, ce côté touffu, impressionnant. Mais l'énergie que diffuse son dessin convient à l'histoire, qui file à une allure folle, au gré de rebondissements énormes, qui ne s'embarrasse pas davantage d'être séduisante, mais est complètement efficace.
C'est étrange, et même savoureusement paradoxal, mais cette fin du monde a quelque chose de vivifiant. Et pour ça aussi, DCeased tranche vraiment avec les conventions. Rendez-vous le 30 Octobre pour un dénouement qui s'annonce, vraiment pour le coup, définitif.
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