Quand Brian Michael Bendis prend en main la série Invincible Iron Man après son run sur Guardians of the Galaxy, il ne tarde pas, comme il en l'habitude, à lancer un spin-off : International Iron. Dans ce titre qui comptera finalement une poignée d'épisodes, il retrouve son complice de Daredevil, Alex Maleev, au dessin et résout une intrigue laissée en plan par Kieron Gillen en révélant les origines de Tony Stark, abandonné par sa mère et recueilli par la riche famille Stark. Le récit est peu inspiré mais il prépare un autre projet : Infamous Iron Man. Mais qui est cet "Infâme Iron Man" ?
Victor Von Doom (Fatalis en v.f.) vient d'assister à deux événements majeurs pour lui : durant un bref laps de temps, il a été investi des pouvoirs d'un dieu tout-puissant (la saga Secret Wars) mais il a échoué à remodeler l'univers comme il le désirait, puis il a assisté à la défaite de Tony Stark (la saga Civil War II), un des rares hommes qu'il considérait comme un de ses pairs mais avec lequel il était en compétition pour conquérir le coeur du Dr. Amara Perera. Il visite le laboratoire du milliardaire américain et décide de lui succéder sous l'armure et le nom d'Iron Man. Pour débuter cette surprenante reconversion, il sauve Maria Hill de Diablo, mais celle-ci compte l'arrêter pour ses crimes passés : elle profite du retour sur Terre de Ben Grimm/la Chose pour le recruter et l'envoyer traquer son vieil ennemi.
Von Doom se rend en Bolivie et dérobe un instrument au Penseur Fou qu'il neutralise facilement. Cependant, Grimm se rend à l'ambassade de Latvérie et obtient sous la menace la dernière adresse connue de Von Doom. Celui-ci se rend au domicile d'Amara Perera qui le blesse, effrayée. Elle le soigne ensuite en lui rappelant les sentiments qu'il continue d'inspirer au monde malgré son désir de changer. C'est alors que Ben Grimm fait brutalement irruption dans l'appartement de la jeune scientifique.
Doom se téléporte avec Amara en Suisse où il s'est installé : il justifie sa conduite par le fait que si Dieu n'est pas un homme, aucun homme ne peut prétendre être Dieu. En ayant admis cela, il a compris qu'il devait réparer le mal qu'il avait commis mais aussi stopper les autres criminels de sa connaissances et, pour cela, succéder à Tony Stark en tant qu'Iron Man. Bien qu'elle sache que les autorités la soupçonneront d'être sa complice, Amara exige de Doom qu'il la renvoie chez elle. Pendant ce temps, Grimm se rend en Latvérie et en inspectant le laboratoire de Doom, rencontre sa mère, pourtant supposée morte depuis des années : Cynthia lui lance alors un sort pour l'empêcher de faire du mal à son fils.
Doom s'introduit dans l'héliporteur du SHIELD pour négocier sa collaboration avec Maria Hill et obtenir que Grimm cesse de l'importuner ainsi qu'Amara. Mais quand il a apprend que la Chose se trouve en Latvérie, il interrompt la discussion et part dans son pays. Il découvre son royaume en ruines, négligé par le général Karadick à qui il l'avait confié. Une explosion retentit dans son château où il trouve Grimm sévèrement blessé, devinant immédiatement que c'est à cause de sa mère.
Grimm reprend connaissance dans l'héliporteur du SHIELD, apprenant à Maria Hill que c'est Doom qui l'a sauvé après avoir affronté sa mère. Les agents atterrissent en Latvérie pour agression contre un de leurs agents et réclament Doom mais lui comme sa mère sont repartis. Malgré tout, les retrouvailles ont été hostiles, Cynthia ayant avoué sa déception envers son fils pour son passé criminel et lui l'interrogeant - sans obtenir de réponses - sur le fait qu'elle était en vie. Amara Perera reçoit les visites successives de Doom et du SHIELD et apprend qu'elle est renvoyée de son laboratoire. Observant tout cela depuis leur cache, Cynthia accepte de suivre le plan de son allié : Reed Richards !
Le Sorcier prévient MODOK de la reconversion de Doom après qu'il ait attaqué Diablo et le Penseur Fou. Le nouvel Iron Man surgit pour interrompre leur dialogue mais son adversaire se montre plus coriace et parvient à le semer. Son armure temporairement déchargée, il est encerclé par des agents du SHIELD menés par Sharon Carter. Usant de la ruse, il réussit à s'enfuir mais ses agissements ne passent pas inaperçus et Riri Williams, la mascotte de Tony Stark opérant sous le nom et l'armure d'Iron Heart, part à sa recherche pour savoir si son mentor est de retour ou s'il s'agit d'un imposteur...
Avec ces six premiers épisodes (sur les douze au total que compte le titre), Brian Michael Bendis fait oeuvre de synthèse en réussissant à surprendre, du simple fait de poser Victor Von Doom comme "héritier" de Tony Stark/Iron Man.
Par le passé d'abord, les deux hommes se sont affrontés, une opposition classique pour deux savants équipés d'armures, à l'ego surdimensionné, l'un oeuvrant parmi les héros (tout en ayant une ligne de conduite souvent limite en bien des circonstances), l'autre comptant comme l'un des pires super-vilains (mais avec une certaine noblesse). Ils partagent également une notion au pouvoir développée : Star est un milliardaire qui a fait fortune en vendant des armes puis en en participant à la fondation des Avengers comme leur mécène, Doom est le roi autoritaire d'un petit pays d'Europe de l'Est et un savant dont le génie égale celui de Reed Richards, Mr. Fantastic des Fantastic Four.
Récemment, la trajectoire de l'un et l'autre a connu une courbe inversée : lors de la saga Secret Wars écrite par Jonathan Hickman, Doom a été investi des pouvoirs d'un dieu tout-puissant mais il a failli à modeler l'univers de manière harmonieuse selon ses critères ; lors de la saga Civil War II écrite Par Bendis, Stark a combattu contre les forces menées par Captain Marvel et la mise en place d'une justice pro-active avant d'être défait et plongé dans un coma programmé. Une jeune fille qu'il avait prise sous son aile lui a succédé sous le nom d'Iron Heart depuis.
Bendis s'appuie de manière intelligente sur Secret Wars pour justifier que Doom veuille totalement changer de vie et devenir un héros en utilisant le surnom d'Iron Man : l'explication est donnée durant le troisième épisode de la série en quelques doubles pages, sublimes. Si Dieu n'est pas un homme, alors aucun homme ne peut être Dieu : c'est la leçon qu'a tirée Doom de son expérience récente et qui lui fait admettre que sa soif de pouvoir est vaine, donc il doit se racheter en devenant un héros. Il sait que la tâche ne sera pas aisé car personne ne lui fera spontanément confiance en raison de son passé criminel - et d'ailleurs il conserve durant ce premier arc de vieux réflexes autoritaires.
Son autre motivation est à trouver du côté d'Amara Perera, femme scientifique qu'il espérait conquérir tout comme Stark et qu'il se résigne à perdre tout en déplorant qu'elle souffre d'être liée à lui (elle le paie cher en perdant son travail). A défaut d'être aimé d'elle, il souhaite du moins être digne de sa droiture morale tout comme il cherche à convaincre Maria Hill de ses bonnes intentions. Il y parvient partiellement en sauvant Ben Grimm/la Chose, qui en est tout désorienté.
L'aventure dans laquelle il s'embarque se complique encore plus quand il découvre que sa mère, Cynthia, qu'il croyait morte depuis longtemps, est vivante. Mais leurs retrouvailles sont complexes, elle lui reprochant son attitude passée tout en le félicitant pour la nouvelle voie qu'il emprunte, tandis que lui veut comprendre comment elle peut être en vie et ensuite pourquoi elle le lui a caché tout ce temps. Bendis introduit par ailleurs un allié mystérieux à Cynthia qui ouvre des perspectives passionnantes pour les six prochains épisodes.
Formellement, la série bénéficie à plein du talent d'Alex Maleev, un partenaire de longue date du scénariste aux côtés duquel il accomplit un run d'anthologie sur Daredevil. Depuis l'artiste bulgare a épuré son trait qui s'il souffre toujours d'un manque de dynamisme compense cette faiblesse par le soin apporté aux ambiances. Il a été dit que pour représenter Doom, à présent avec un visage intact (dernier "cadeau" de ses pouvoirs divins), il se serait inspiré de l'acteur Vincent Cassel : on peut le reconnaître sur certaines cases mais disons que cela ne saute pas aux yeux, autant parce qu'il semble que le dessinateur n'ait pas insisté sur ce point et parce qu'en vérité on l'oublie vite.
Maleev s'attache surtout à rendre le plus lisible possible l'histoire : son découpage est sciemment simple, pas d'extravagance, quelques doubles pages (dont deux directement au crayon dans l'épisode 3 - absolument fabuleuses), une attention soulignée aux scènes de dialogues (même si Bendis reste très mesuré sur ce plan), aux attitudes (souvent Doom est représenté lévitant en contre-plongée pour signifier son ascendant sur les civils ou ses ennemis). On peut s'étonner de ce parti-pris qui refuse ostensiblement le spectaculaire mais aussi l'interpréter comme une envie de rappeler au lecteur qu'il s'agit de raconter la reconversion d'un homme plutôt que ses coups d'éclats comme néo-super-héros.
Ajoutez-y la colorisation, superbe, de Matt Hollingsworth et vous aurez un premier volume qui est un régal pour les yeux.
Suite et fin dans The Absolution of Doom : stay tuned !
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