jeudi 6 novembre 2014

Critique 522 : CAPTAIN MARVEL, VOLUME 1 - HIGHER, FURTHER, FASTER, MORE, de Kelly Sue DeConnick et David Lopez


CAPTAIN MARVEL : HIGHER, FURTHER, FASTER, MORE rassemble les épisodes 1 à 6 de la série, écrits par Kelly Sue DeConnick et dessinés par David Lopez, publiés en 2014 par Marvel Comics.
*

Carol Danvers est pilote dans l'armée de l'air américaine dans le civil et, sous le pseudonyme de Captain Marvel, membre des Avengers. Après un récent conflit cosmique, la jeune femme éprouve le besoin de faire le point et décide de partir en mission dans l'espace, où elle servira d'agent de liaison entre les Avengers et d'autres formations galactiques pour le maintien de la paix.
Juste avant son départ, elle et Iron Patriot (alias James "Rhodey" Rhodes, son petit ami du moment) récupèrent une capsule dans laquelle repose une extra-terrestre. Elle provient d'une planète qui a détruite mais on ignore où s'est depuis réfugié son peuple.
Captain Marvel recontre les Gardiens de la Galaxie qui l'orientent vers le monde de Torfa. Une fois sur place, après quelques péripéties, l'héroïne et sa passagère, réveillée durant le voyage, font le point et la situation est délicate : Torfa se meurt à cause d'une étrange maladie qui décime ses habitants et se trouve au coeur d'un conflit d'intérêts entre l'alliance galactique, dirigée par J'Son de Spartax, et des mercenaires, les Haffensyes. Mais pourquoi une planète à l'agonie intéresse-t-elle ces gens ?

Créée en 1968 par Roy Thomas et Gene Colan, Carol Danvers est un des personnages féminins majeurs attachés aux aventures des Avengers, au même titre historique que la Guêpe ou la Sorcière Rouge. A ce jour, pas moins de huit volumes de la série Ms Marvel ont vu le jour, même si l'héroïne n'a pas toujours été la jolie blonde animée par Kelly Sue DeConnick dans cet album.

La scénariste (qui est aussi l'épouse de Matt "Hawkguy" Fraction) aime visiblement Carol Danvers puisqu'elle s'occupait de sa précédente série avant qu'elle soit relancée dans le cadre de l'opération "All-New Marvel Now !". Mais cette fois, l'éditeur a aussi, semble-t-il, décidé de vraiment miser gros sur le titre en lui donnant un dessinateur régulier et de très bon niveau, en associant le personnage à deux autres séries populaires (Avengers, par Jonathan Hickman, et Guardians of the Galaxy, par Brian Michael Bendis), et en annonçant il y a quelques jours à peine qu'un film lui serait prochainement consacré (sans encore annoncer le réalisateur ni l'actrice principale).

Kelly Sue DeConnick, qui travaille aussi pour Image Comics (la série Pretty Deadly, un western fantastique dessiné par Emma Rios), réussit avec ce premier arc, qui forme un récit complet, à la fois, à bien présenter le personnage (aussi bien pour les nouveaux lecteurs que pour ceux qui la trouvent ailleurs) et à construire une intrigue intéressante et rythmée.

Carol Danvers, telle qu'elle est au début de cette histoire, est marquée par la saga Infinity (écrite par Jonathan Hickman) mais son malaise reste compréhensible même pour ceux qui ne l'ont pas lue : c'est une héroïne qui cherche un second souffle, elle n'est plus épanouie comme membre d'une équipe pléthorique comme les Avengers mais ne sait pas non plus comment elle pourrait se situer comme justicière solitaire sur Terre. Elle aspire à aller dans l'espace (après tout, elle doit ses pouvoirs à un accident auquel fut mêlé le premier Captain Marvel, un Kree) et Iron Man lui offre de devenir une sorte d'ambassadrice. Pour cela, elle doit mettre entre parenthèses sa romance avec James Rhodes/Iron Patriot, qui l'accepte pour ne pas être celui qui la retiendra contre son gré.
Une fois dans le cosmos, le récit alterne brillamment les séquences d'action, souvent spectaculaires et avec du swing (une bataille contre des pirates, la récupération du vaisseau Harrison, l'affrontement avec la garde de l'alliance galactique), et des scènes déroulant une intrigue dense mais racontée avec fluidité (la convoitise du vibranium sur Torfa par J'Son de Spartax, quitte à sacrifier des apatrides).

On pouvait craindre que l'inclusion des Gardiens de la Galaxie soit une greffe un peu forcée, pour surfer sur le succès de leur comic-book et du film qui en a été tiré, mais DeConnick arrive là encore à insérer leur présence avec beaucoup d'habileté, en profitant même pour s'amuser (et nous avec) avec l'impayable Rocket Raccoon contre le chat de Carol Danvers. 
Le choix du méchant est une exploitation tout aussi positive de ce qu'en a tiré Bendis dans Guardians of the Galaxy : J'Son est devenu une sorte de Dr Fatalis de l'espace, comploteur et redoutable, qui va certainement devenir un adversaire récurrent dans pas mal de titres de la gamme "cosmique" de Marvel.
Des personnages secondaires comme Tic, Gil, Bé, et Jackie, confèrent à l'ensemble un côté cartoon, proche du Scooby-gang, très sympathique.

Les dessins de David Lopez contribuent aussi, pour une large part, au succès (critique et public) de cette nouvelle formule de la série : l'espagnol, jusqu'à présent, était bien mal utilisé par Marvel, trimballé de titres en titres, pour des poignées d'épisodes signés par des scénaristes inégalement inspirés (comme le duo Abnett et Lanning durant leur passage sur New Mutants). 
Ce gâchis est réparé désormais car Lopez apparait à son meilleur niveau dans cette production taillée pour son style expressif, dynamique, au trait rond et épuré, dont il effectue aussi l'encrage. Si, parfois, on peut trouver ses cases un peu pauvres en arrière-fond, quand il choisit de soigner ses décors ou les véhicules, comme ses designs (il n'a pas dessiné le costume de Captain Marvel - repensé par Jamie McKelvie, avec une élégance certaine, si ce n'est cet horrible casque que l'héroïne doit porter dans l'espace - mais il a créé ceux de tous les autres seconds rôles), il ne fait pas les choses à moitié. 
Il n'abuse pas non plus des "splash" et doubles pages, dosant ses effets pour quelques images aux perspectives profondes, superbement composées.

La colorisation a été confiée à l'excellent Lee Loughridge, qui privilégie une palette de couleurs chaudes et lumineuses (des jaunes, des oranges, des rouges, contribuant aussi au look agréable de la série - dans la même veine que ce que fait Javier Rodriguez sur le Daredevil de Mark Waid).

Tout ça donne envie de suivre les nouvelles aventures de Carol Danvers. Les lecteurs de vf peuvent déjà retrouver ces épisodes dans le n° 12 de la revue trimestrielle Avengers Extra chez Panini Comics, sortie en Octobre.     

Aucun commentaire: