ALL-NEW X-MEN, VOLUME 3 : OUT OF THEIR DEPTH rassemble les épisodes 11 à 15 de la série écrite par Brian Michael Bendis, publiés en 2013 par Marvel omics. Stuart Immonen
signe les dessins des #11 à 14, David
Lafuente ceux du #15.
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(Extrait de All-New X-Men #10. Dessins de Stuart Immonen.)
Entretemps, le SHIELD a prévenu Wolverine qu'une série de vols d'importantes sommes d'argent a été commis par Mystique et ses compères, qui ont pris pour cela l'apparence des premiers X-Men. Ensemble, ils décident de rechercher Raven Darkholme mais sont interceptés rapidement par les Uncanny Avengers.
(Extrait de All-New X-Men #12. Dessins de Stuart Immonen.)
Cette rencontre s'avère riche en émotions fortes : Scott découvre son frère Alex (alias Havok), désormais doté de pouvoirs mutants et à la tête de ce groupe, Jean Grey apprend télépathiquement que Scarlet Witch a provoqué la décimation des mutants (durant la saga House of M), tandis que Wolverine doit convaincre Captain America, Thor et Rogue que les jeunes mutants n'ont rien à voir avec les cambriolages commis par la bande à Mystique.
Logan ment toutefois à ses collègues des Uncanny Avengers en leur jurant qu'ils leur laissent régler son compte à Mystique pour mieux la pister de son côté. En se rendant sur le site de Stark Resistance où le gang a sévi, Wolverine remonte la trace des malfrats qui sont sur le point de négocier le rachat de l'île de Madripoor, carrefour de nombreux trafics, à l'organisation terroriste de l'Hydra.
Les mutants s'interposent et une bataille éclate, durant laquelle Lady Mastermind, complice de Mystique, tente de faire perdre la raison à Jean Grey pour venger la mort de son père. Les Uncanny Avengers arrivent à la fin du combat pour embarquer Mystique et Lady Mastermind (Dents-de-Sabre et l'Hydra ont pris la fuite, profitant de la confusion).
(Extrait de All-New X-Men #13. Dessins de Stuart Immonen.)
Après ce nouveau tourbillon, les jeunes mutants ont droit à un peu de repos à l'école de Wolverine. Le Fauve moderne entraîne Jean Grey à exercer sa télékinésie, mais la jeune femme est distraite et troublée par une pensée de son professeur sur les sentiments qu'il éprouvait pour elle autrefois. Scott Summers et Bobby Drake s'offrent une virée en ville pour rencontrer d'autres adolescents et découvrir comment ils vivent et les perçoivent.
(Extrait de All-New X-Men #15. Dessins de David Lafuente.)
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Le programme de ces cinq nouveaux épisodes est toujours aussi dense que les dix précédents : Brian Michael Bendis réussit à exploiter le postulat de départ de la série, à développer des intrigues et enrichir les relations entre les personnages sur un rythme soutenu.
Pour commencer, on découvre donc lequel des cinq premiers X-Men rallie le camp du Cyclope actuel : ce n'est pas une surprise si on a fait attention aux réactions antérieures du personnage, mais Bendis prend le temps de justifier son choix et d'en montrer les conséquences immédiates, avec une belle empoignade en prime. Pourtant, le long dialogue que le scénariste impose au lecteur passe bien : il a beau occuper la moitié de l'épisode 11, il est très bien argumenté, la tension qui se dégage de toute cette séquence est magistralement rendue, mélange de frustration, d'anxiété et d'inéluctabilité. On touche à un des points essentiels de l'affaire depuis son départ : le scénariste profite d'avoir des personnages quasiment vierges placés dans une situation qui agit sur eux comme un accélérateur de particules, les obligeant à mûrir plus vite, à prendre des décisions radicales, provoquant des déchirements, et donc impactant tout le tissu de la série. De ce point de vue, il y a une vraie progression en une dizaine de chapitres, alors même qu'on n'a pas pratiquement pas changé de décor et que peu de temps a passé du point de vue des personnages.
Bendis décrit avant tout donc de jeunes héros déboussolés, qui utilisent leurs pouvoirs d'autant plus maladroitement qu'ils sont inexpérimentés mais aussi parce qu'ils sont soumis à des épreuves initiatiques, des révélations sur eux-mêmes, qui leur font perdre tout sens des mesures (ainsi, si Jean Grey cherche à forcer le destin, c'est plus par désarroi que par autoritarisme, et donc ce n'est pas qu'un moyen pour crééer un moment saisissant dans le fil du récit). Avec ce passage, Bendis semble aussi vouloir marquer le coup et désormais développer la série All-New X-Men de manière plus autonome, en ne la liant plus intimement de celle des Uncanny X-Men (qu'il écrit aussi en parallèle).
Par conséquent, les mutants adultes autour des premiers X-Men les traitent comme des jeunes victimes d'un traumatisme, déplacés dans le temps sans avoir eu le temps de considérer toutes les répercussions et sans avoir eu toutes les données en main pour le faire (les déclarations du Cyclope moderne pointent bien du doigt ce que le Fauve moderne a dissimulé aux jeunes héros pour les faire venir). Cela aboutit à des personnages novices, maladroits aux combats et dans leurs rapports entre eux et avec les yeux, et le souci de Wolverine et Kitty Pryde est d'abord de les ménager, voir de les écarter, pour qu'ils ne soient pas en danger... Mais ils sont également désobéissants, ce qui complique la tâche de leurs chaperons.
Néanmoins, Bendis s'arrange très bien pour ne pas les écrire comme des acteurs passifs, subissant ce qui leur arrive : il équilibre ce sentiment en veillant à leur donner des sentiments qui leur sont propres, donc des réactions distinctes (le malaise de Scott, par exemple, ou l'ahurissement de Bobby). On peut s'identifier à eux, ou en tout cas comprendre ce qu'ils traversent car leurs comportements sont toujours crédibles, et éclaire chaque rebondissement avec à-propos.
Ainsi quand Jean Grey découvre que Wanda/Scarlett Witch (dont la présence au sein des Uncanny Avengers étonne déjà tout le groupe) a failli effacer la race mutante, le scénariste fait non seulement référence à la saga House of M qu'il a écrite mais aussi au fait qu'une mutante a été sur le point d'anéantir toute ses semblables sans savoir qu'elle était alors en proie à une crise de folie.
Les retrouvailles entre Scott et Alex Summers donnent aussi lieu à un passage troublant et émouvant (résumé par Captain America qui fait remarquer à Havok qu'il a pu revoir son frère sous son meilleur jour).
On peut aussi évoquer ce moment où, en plein combat, les jeunes X-Men répètent une manoeuvre apprise en salle des dangers, ce qui traduit déjà leur progression comme équipe depuis qu'ils sont arrivés à notre époque. Le scénariste a ainsi, plusieurs fois, au cours de ces nouveaux épisodes, à coeur de montrer des situations nouvelles, des questionnements divers auxquels les personnages répondent de manière spontanée ou réfléchie, toujours organique. Quelques exemples : comment réagir aux propos de Havok qui refuse publiquement d'être résumé à un super-héros mutant (l'argumentation de Kitty Pryde établissant un lien avec ses origines juives est à la fois pertinente et poignante) ? Lady Mastermind (Regan Wyngarde) réussira-t-elle à corrompre, comme son père, Jean Grey ?
Parfois même, Bendis, qui est connu (et aussi bien apprécié que détesté pour son goût des dialogues abondants) ose se passer de mots pour résumer de manière à la fois comique et astucieuse la complexité d'un instant entre deux personnages de la même famille (voir l'irrésistible page où Jean Grey tombe sur sa fille Rachel, chacune lisant dans l'esprit de l'autre avant de s'éloigner, désorientées). Ces passages sont autant de révélateurs très efficaces pour répondre ou déjouer les attentes des lecteurs, le scénariste ne se défile pas mais les résout avec malice ou sérieux, mais en veillant toujours à ne pas ralentir le tempo.
Néanmoins, Bendis s'arrange très bien pour ne pas les écrire comme des acteurs passifs, subissant ce qui leur arrive : il équilibre ce sentiment en veillant à leur donner des sentiments qui leur sont propres, donc des réactions distinctes (le malaise de Scott, par exemple, ou l'ahurissement de Bobby). On peut s'identifier à eux, ou en tout cas comprendre ce qu'ils traversent car leurs comportements sont toujours crédibles, et éclaire chaque rebondissement avec à-propos.
Ainsi quand Jean Grey découvre que Wanda/Scarlett Witch (dont la présence au sein des Uncanny Avengers étonne déjà tout le groupe) a failli effacer la race mutante, le scénariste fait non seulement référence à la saga House of M qu'il a écrite mais aussi au fait qu'une mutante a été sur le point d'anéantir toute ses semblables sans savoir qu'elle était alors en proie à une crise de folie.
Les retrouvailles entre Scott et Alex Summers donnent aussi lieu à un passage troublant et émouvant (résumé par Captain America qui fait remarquer à Havok qu'il a pu revoir son frère sous son meilleur jour).
On peut aussi évoquer ce moment où, en plein combat, les jeunes X-Men répètent une manoeuvre apprise en salle des dangers, ce qui traduit déjà leur progression comme équipe depuis qu'ils sont arrivés à notre époque. Le scénariste a ainsi, plusieurs fois, au cours de ces nouveaux épisodes, à coeur de montrer des situations nouvelles, des questionnements divers auxquels les personnages répondent de manière spontanée ou réfléchie, toujours organique. Quelques exemples : comment réagir aux propos de Havok qui refuse publiquement d'être résumé à un super-héros mutant (l'argumentation de Kitty Pryde établissant un lien avec ses origines juives est à la fois pertinente et poignante) ? Lady Mastermind (Regan Wyngarde) réussira-t-elle à corrompre, comme son père, Jean Grey ?
Parfois même, Bendis, qui est connu (et aussi bien apprécié que détesté pour son goût des dialogues abondants) ose se passer de mots pour résumer de manière à la fois comique et astucieuse la complexité d'un instant entre deux personnages de la même famille (voir l'irrésistible page où Jean Grey tombe sur sa fille Rachel, chacune lisant dans l'esprit de l'autre avant de s'éloigner, désorientées). Ces passages sont autant de révélateurs très efficaces pour répondre ou déjouer les attentes des lecteurs, le scénariste ne se défile pas mais les résout avec malice ou sérieux, mais en veillant toujours à ne pas ralentir le tempo.
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(Extrait de All-New X-Men #13. Dessins de Stuart Immonen.)
Une fois encore, Stuart Immonen fait la preuve de sa complémentarité avec Bendis et de sa faculté à produire des planches d'exception. Compte tenu des délais de production, le soin qu'il apporte à la réalisation de l'ouvrage est tout à fait fabuleux : son point fort reste l'expressivité, qu'il s'agisse de la plasticité faciale des personnages ou de leurs attitudes, toujours justes, propres à chacun, le tout intégré à des compositions très vivantes, avec un découpage varié.
Il a, en soutien, un encreur qui sait mieux que quiconque appuyer la force de son graphisme avec Wade Von Grawbadger, qui sait donner de la texture au dessin, souligner les contrastes. Les crayonnés d'immonen sont déjà très précis, mais son partenaire soigne les finitions en parvenant à la fois à respecter le trait du dessinateur et apporter sa propre patte.
Il m'a fallu un peu de temps pour m'habituer à la la mise en couleurs de Marte Gracia, ici secondé par Rain Breredo (sur les #12-13), mais désormais j'apprécie ses choix, qui savent donner une ambiance sophistiquée et intelligente à chaque scène et chaque émotion (y compris dans le huis clos aux lumières rouges du Blackbird).
Surtout, le travail d'Immonen mérite qu'on revienne sur chaque page pour en apprécier les dispositions : la manière dont il peut placer une grande quantité de personnages dans un plan (ou une série de plans) tout en veillant à sa lisibilité et en lui insufflant du dynamisme, en variant les angles, la dimension des cadres, en jouant sur une planche ou deux pages en vis-à-vis, est éblouissante. Il sait parfaitement typer un personnage en lui donnant une morphologie, des mimiques, de façon à ce que le lecteur sache à qui il a affaire. Avec Immonen, une image parle autant que ce que dit le dialogue (et c'est aussi pour cela que les passages où les héros ne font que parler restent divertissantes car ils se déplacent, on peut lire sur leurs visages l'émotion correspondant à leur propos, etc). Et quand il s'agit de produire une représentation spectaculaire (comme la manifestation du Phénix), c'est également très puissant, non seulement parce que le dessin est impressionnant mais aussi parce qu'auparavant Immonen a su ménager son effet avec une mise en page plus sage.
En comparaison, comme c'était déjà le cas avec l'intérim de David Marquez, lorsque David Lafuente prend le relais, le résultat est nettement moins flamboyant. L'espagnol n'a pas un style réaliste, il évolue même dans un registre quasi-cartoony, naïf. C'est tout à fait séduisant quand il s'agit de représenter des instants humoristiques ou romantiques, mais moins probant lorsqu'il faut servir quelque chose de plus mouvementé (la seule scène d'action semble bâclée, en tout cas mal composée).
Mais, bien que je n'ai jamais été un grand fan de l'artiste, je reconnais à Lafuente un côté très sympathique. C'est juste un peu tendre, et parfois (un comble quand on n'a qu'un épisode à traiter) un peu expédié (là encore, l'absence de décors dans des vignettes de grande taille ou le manque de diversité dans l'expressivité des personnages passent mal).
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Avec ce troisième recueil, la série ne connaît pas de faux pas ni de baisse de régime, elle prend même un relief et une ampleur qui lui vaut un succès public et (dans l'ensemble) critique très méritée. Bendis est vraiment inspiré et peut compter sur Immonen pour nous accrocher durablement dans un récit bien construit, rythmé, alternant intimisme et action en quantités égales.Espérons que cette belle mécanique ne sera pas grippé par le crossover Battle of the Atom (imaginé par Jason Aaron et Brian Wood) qui suit ces épisodes (et implique aussi les séries Uncanny X-Men, X-Men et Wolverine & the X-Men), conçu pour célébrer le cinquantenaire des mutants.
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