Cinq and après la première adaptation au cinéma mise en scène par David Ayer, c'est donc au tour de James Gunn de proposer sa version de The Suicide Squad, qui n'est ni une suite ni un reboot, mais une vraie tentative pour le DCEU (DC Extended Universe) de trouver la bonne formule. Bonne pioche car, en récupérant le cinéaste un temps tombé en disgrâce chez Marvel, Warner Bros réussit un très joli coup et surtotu, enfin, un vrai bon film. Qui devrait indiquer la direction à suivre pour le studio désormais...
Amanda Waller envoie deux équipes de la Task Force X, l'une commandée par le colonel Rick Flagg, l'autre par le super-mercenaire Bloodsport, au large de l'Amérique latine, sur l'île de Corto Maltese. L'endroit vient de subir un putsch militaire par des généraux anti-américains. En échange de leurs services, les criminels ayant accepté la mission bénéficieront d'une remise de peine. L'objectif : identifier le projet Starfish et le détruire.
Le groupe de Flagg accoste le premier mais, trahi par un de ses agents, Blackguard, il est massacré par des soldats. Seule Harley Quinn survit mais elle est capturée et emmenée jusqu'à Silvio Luna, chef des putschistes. Flagg est porté disparu. Pendant ce temps, Bloodsport et son unité, profitant de cette diversion, s'enfonce dans la jungle de Corto Maltese. Ils attaquent un camp où Flagg a été récupéré par Sol Soria, chef des rebelles, et qui compte sur leur aide pour renverser le nouveau régime contre son aide pour accéder au projet Starfish.
Ayant gagné discrétement la capitale de l'île, Bloodsport et Flagg kidnappent le Penseur, un savant méta-humain en charge du projet Starfish. Mais avant d'attaquer la tour Jotunheim qui l'abrite, ils doivent sauver Harley Quinn. Celle-ci ne les attend toutefois pas : torturée par les putschistes, elle réussit à s'évader et retrouve Flagg alors qu'il s'apprêtait à entrer dans le bâtiment où elle était retenue.
La Suicide Squad - composée de Flagg, Harley, Bloodsport, Peacemaker, King Shark, Polka-dot Man, Ratcatcher II et King Shark - pénétrent dans la Tour Jotunheim grâce au Penseur et s'y enferme. Ils piègent le bâtiment avec des explosifs pendant que l'armée l'encercle, laissant aux rebelles la voie libre pour atteindre le palais des généraux et les abattre. Flagg , Peacemaker, Ratcatcher II suivent le Penseur au coeur de Jotunheim et découvre ce que cache le projet Starfish. Flagg comprend surtout que le gouvernement américain a participé à cela et veut le dénoncer aux médias. Mais Peacemaker s'interpose, sur ordre de Waller.
Le Penseur est tué alors que les charges explosives dévastent la Tour Jotunheim et pendant que Flagg et Peacemaker s'affrontent pour la disquette contenant les infos compromettant les Etats-Unis, c'est Ratcatcher qui la récupère. Harley, King Shark et Polka-dot Man sautent de la Tour qui s'effondre tandis que Bloodsport chute jusqu'au niveau où se trouvent Peacemaker et Ratcatcher. Bloodsport abat Peacemaker en apprenant qu'il a tué Flagg. Starro, le projet Starfish, est libre et fait des ravages dans la capitale.
La Suicide Squad désobeit à l'ordre de Waller de se replier pour arrêter ce monstre et sauver les civils. Au terme d'une bataille épique, Bloodsport obtient que Waller ne traque pas l'équipe sinon il transmettra les infos accablant les Etats-Unis au sujet de Starfish.
- Une première scène post-générique de fin montre Weasel (la Belette), membre de l'escadron dirigé par Flagg quand il a accosté sur l'île, laissée pour morte, reprendre connaissance et s'enfuir dans la jungle, affolée.
- Une seconde scène post-générique de fin montre les assistants de Waller se rendre dans un hôpital militaire où a été transporté Peacemaker, placé en soins intensifs pour de futures missions...
Sorti il y a juste une semaine aux Etats-Unis (et Mercredi dernier en France), The Suicide Squad a reçu un accueil dithyrambique dans la presse mais réalisé un score mineur au box-office américain, dans un contexte il est vrai encore tendu à cause de la crise sanitaire et les contaminations dûes au variant Delta du COVID-19. Pourtant, ça n'a pas eu l'air d'affecter Warner Bros et DC Comics, visiblement ravis des résultats du long métrage.
La raison de cet optimisme se trouve sans doute dans le fait que The Suicide Squad est une sorte de miraculé, un film qui a bien failli ne jamais voir le jour - en tout cas sous sa forme actuelle. Pour tout comprendre, il faut remonter jusqu'en 2016.
A cette époque, David Ayer voit son adaptation de Suicide Squad (sans le "The" actuel) éreinté à la fois par la critique et le public. Pourtant, contre toute attente, le film sera un succès, trsè rentable. Déjà, le réalisateur critiquera le studio qui a remonté son long métrage pour en faire un objet ni fait ni à faire. Encore aujourd'hui, Ayer, s'appuyant sur la campagne de fans qui ont obtenu la diffusion de la Zack Snyder's Justice League, répéte à l'envi qu'il est en mesure de proposer sa version du film. Mais cette fois, peu de chance qu'on la voit un jour (et c'est heureux car si c'est pour se taper à nouveau 4 heures interminables comme pour la Snyder's cut, non merci. Y a un moment, faut se calmer avec ces director's cut.).
Puis en 2017, coup de théâtre : chez Disney, James Gunn, qui prépare le troisième volume de Guardians of the Galaxy, est renvoyé suite à la réapparition de tweets contenant des blagues sur la pédophilie, déterrés par des militants d'extrême-droite contre qui le réalisateur avait pris parti. Gunn aura beau expliquer qu'il était revenu sur ses propos, rien n'y fait (protestations de ses acteurs, soutiens de ses collègues), il est évincé. La Warner lui tend la main en lui donnant carte blanche sur un projet d'adaptation de comics, en misant sur le buzz et l'efficacité du réalisateur.
Il n'y a rien d'étonnant à ce que Gunn ait voulu s'approprier The Suicide Squad quand on connaît son oeuvre, remplie de personnages marginaux, opposés à l'ordre établi. Le studio tient ses promesses et n'interfère pas avec ses choix d'écriture ou de casting (contrairement à ce qu'ont subi d'autres cinéastes, comme Cathy Yan sur Birds of Prey and the Fantabulous Emancipation of Harley Quinn - qui reste une pépite injustement mésestimée). Scénariste et director, Gunn a la main sur le film et l'occasion de prouver à Disney son erreur.
Le résultat est spectaculairement bon. Et croyez les bons papiers qui disent que c'est le meilleur film de son réalisateur, surtout après Guardians of the Galaxy, vol. 2 qui était moins convaincant que le vol. 1. Comme un arc de comic-book, l'histoire est chapitrée et donc très facile à suivre, remplie d'humour (parfois noir), d'action (explosive) et d'une part de subversion( avec quelques effets bien saignants), sans oublier une vraie dimension absurde et assumée (propre aux comcis). D'ailleurs des inter-titres s'inscrivent dans l'image à des moments-clés pour souligner l'évolution du récit, ses coups de théâtre, ses retours en arrière, ses virages inattendus.
Gunn est un pur produit de la culture pop comme le sont Edgar Wright ou Quentin Tarantino ou Taika Waititi : son amour du matériau d'origine transpire à chaque plan, mais sans jamais trop se prendre au sérieux, juste la bonne distance entre respect et irrévérence. C'est incroyablement vivfiant, surtout dans le DCEU, ce véritable bordel sans queue ni tête où il n'existe aucune continuité, où les projets s'enchaînent de la façon la plus décousue, avec des castings improbables et une direction artistique nulle. Là, on a une vraie vision d'auteur, un esthétisme, un rythme, une science du récit, qui sont réjouissantes.
Pourtant, avec 2h 17 au compteur, on pouvait craindre des hauts et des bas. La séquence d'ouverture qui voit un nombre ahurissant de personnages être tués, souvent sauvagement, interroge sur la suite, et le choix de Starro le conquérant, cette gigantesque étoile de mer extra-terrestre dans le rôle du méchant de l'histoire excite autant qu'elle angoisse. Mais Gunn est en état de grâce : il réussit tout et offre un divertissement jouissif, violent, drôle, enlevé, démesuré et même absurde, exquis. On est très loin du sage premier film Wonder Woman de Patty Jenkins, du sérieux plombant de la trilogie Batman par Christopher Nolan, du maniérisme ridicule de Zack Snyder. Par contre, The Suicide Squad transforme tout ce que Birds of Prey... osait sans pouvoir aller jusqu'au bout, avec des personnages bien cernés, qui interagissent énergiquement, avec ici en plus une intrigue plus consistante et mieux tenue.
La promotion du film a été très habile en mettant en avant une distribution insensée : Michael Rooker (déjà dans Guardians of the Galaxy), Nathan Fillion, Jai Courteney (rescapé du film de Ayer).... Mais Gunn prend tout le monde au dépourvu en dézinguant tout ce beau monde très vite et se concentrer sur un groupe plus ramassé de fortes têtes. Il nous gratifie ainsi de la meilleure scène avec Harley Quinn/Margot Robbie qu'on ait vu jusque-là (quand elle s'évade). Il a convaincu Sylvester Stallone de prêter sa voix caverneuse à King Shark (entièrement créé en CGI). Joel Kinnaman, qui était réduit chez Ayer à reluquer le postérieur de Margot Robbie, a la possibilité de réhabiliter complètement Rick Flagg. Idris Elba remplace avantageusement un Will Smith totalement éteint chez Ayer en composant un Bloodsport attachant et implacable. David Datmalchian est irrésistible en home-confetti. Et surtout le film révèle Daniela Melchior, une inconnue portugaise au charme fou et au talent épatant en Ratacatcher II (son papa est joué dans des flashbacks par Taika Waititi). Seule Viola Davis est en retrait - c'est le seul bémol dans l'ensemble.
James Gunn n'en a pas fini avec le DCEU puisqu'il a enchaîné avec une série pour HBO Max sur le personnage de Peacemaker, et que le studio est prêt à lui refaire confiance pour un autre film (une suite ? Ou autre chose ?). Même Disney a pardonné à son enfant terrible en lui reconfiant Guardians of the Galaxy, vol. 3 (qui sera le dernier - et certainement les adieux du cinéaste à la major). L'Escadron Suicide, relancé dans les années 80 par John Ostrander (qui a un caméo dans le film), est bel et bien reparti pour un tour - et le DCEU à sa suite ?
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