vendredi 22 mars 2013

Critique 384 : HAWKEYE #8, de Matt Fraction, David Aja et Annie Wu


HAWKEYE : MY BAD PENNY est le 8ème épisode de la série, écrit par Matt Fraction est dessiné par David Aja avec la participation d'Annie Wu, publié par en Février 2013 par Marvel Comics.
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 La rousse incendiaire du #3 revient dans la partie...
 ... Et "this looks bad".
 Les girlfriends de Clint Barton sont aux premières loges...

Cherry, la jeune femme rousse avec qui Clint Barton a eu une aventure, tue un des mafieux russes avec lequel tous deux ont eu des problèmes et vient demander son aide à l'archer. Le retour de l'intrigante déplaît à toutes les amies d'Hawkeye (sa partenaire, Black Widow ; son ex-femme, Mockingbird ; et sa fiancée actuelle, Spider-Woman ; puis Kate Bishop), mais il passe outre.
Penny (le vrai prénom de la jeune femme) embarque Clint dans un club de strip-tease où elle récupère un coffre pendant qu'il affronte les malfrats qui tiennent l'endroit. Ce grabuge provoque évidemment l'intervention de la police qui embarque le Vengeur... Et la réunion du chef des mafieux russes avec les complices du Caïd, aboutissant au lancement d'un contrat contre Hawkeye pour les torts qu'il leur a causés.

Ce 8ème épisode (dont la sortie a été décalée et l'exemplaire renuméroté suite à l'initiative de Matt Fraction de publier un n°7 spécial au profit de la Croix Rouge américaine après que l'ouragan Sandy ait dévasté la Côte Est) marque plusieurs tournants dans le cours de la série.
Tout d'abord, narrativement, Fraction, qui construisait chaque épisode comme un "one-shot" (à part les #4-5, formant un dyptique), a décidé d'inscrire celui-ci dans une véritable continuité, en réutilisant des éléments antérieurs de son run (le retour de Cherry après le #3, la présence récurrente des "tracksuit draculas", la réapparition du Caïd et de ses alliés après le #2) mais aussi en laissant la fin ouverte, signifiant que ce qui se joue là va être développé dans l'avenir proche (et sans doute à plus long terme). 

Le scénariste ne déconstruit plus les scènes mais les déroule linéairement, c'est l'autre surprise de ce 8ème chapitre. Est-ce à dire qu'il s'est assagi, que la série est moins originale, stimulante ? Oui et non. Il est indiscutable que le rythme de la lecture, l'édification du récit sont plus convenus, mais ce qui se passe demeure efficace et ponctué par des surprises (comme l'emploi de fausses couvertures inspirées par les "romance" et "crime" comics des 50-60's, qui ne sont pas de simples gadgets mais compte dans une partie dans la résolution du mystère environnant le personnage de Cherry/Penny et son coffre).

La tonalité est également plus sérieuse : depuis le début de la série par Fraction, la menace des mafieux russes pèse sur le destin du héros, mais ce n'est qu'avec le #6 qu'on a pu mesurer à quel point ces méchants étaient prêts à en finir vraiment avec Hawkeye. Là, plus de menace, mais une décision qui va engager la série dans une direction assurément plus dramatique : Clint Barton est désormais dans le collimateur de toute la pègre new-yorkaise et un tueur va être recruté pour le supprimer.

Il subsiste néanmoins quelques répliques savoureuses, surtout au début (avec la scène où figurent Black Widow, Mockingbird et Spider-Woman, puis la suivante avec Kate Bishop), mais clairement, il n'est plus question de rigoler. Clint est dans le pétrin (il évoque même son possible renvoi des Vengeurs après que Tony Stark et Captain America lui ont téléphoné).

Nous verrons dans le prochain volet comment ce qui vient de se produire est perçu par les "Hawkgirls" puisque Matt Fraction va revenir sur des scènes à peine effleurées ici (la réaction de Spider-Woman, le sort de Kate Bishop, certainement l'intervention de Black Widow et Mockingbird). Le scénariste a également annoncé que le tueur lancé aux trousses d'Hawkeye apparaîtrait pour la première fois : il s'appelle le Clown et aurait un lien de longue date avec l'archer...
On entre dans ce qui ressemble fort à un deuxième round pour la série et ce sera intéressant de voir comment Fraction va transformer l'essai après un premier acte aussi magistral.

La partie graphique de cet épisode est encore une fois remarquable mais réserve donc des surprises. Sur les 20 pages de ce numéro, David Aja n'en signe "que" quinze. C'est toujours aussi brillant, mais sans doute moins flamboyant qu'à l'ordinaire.
L'artiste s'est mis au service du script, les effets auxquels il a recours sont plus subtils avec notamment l'usage de vignettes verticales dont le déroulement est rapide et fluide, avec des travellings avant/arrière suggérés pour souligner des moments tendres (des baisers échangés) ou tendus (des armes pointées sur l'ennemi). Cette façon de signifier par l'image l'attirance ou la répulsion est diaboliquement ingénieuse.
Aja est aussi malin quand il s'amuse à détourner des éléments de l'action au moyen de cadre dans le cadre : par exemple, quand Clint et Penny arrivent au club de strip-tease, Hawkeye neutralise le portier en deux coups de poings. Le premier est montré dans la continuité de la scène, avec un travelling latéral (plan général sur le décor, plans rapprochés sur le portier, plan moyen sur Clint qui donne le premier coup). Le second est en contre-champ (vu depuis l'intérieur du club, mais surtout à travers la vitre en forme de coeur de la porte : le contraste entre le coeur, icone sentimentale, et le coup de poing de Clint produit un effet gaguesque distanciant la violence de l'image).

Les deux dernières pages sont aussi de magnifiques compositions, avec des effets d'éclairage très dramatisants, rappelant l'influence de Mazzucchelli dans le dessin d'Aja.

Les cinq pages restantes sur la vingtaine que compte l'épisode ponctuent l'histoire et se révèlent être les clés de l'énigme du coffre récupéré par Penny et Clint. Concrètement, ce sont des splash-pages parodiant les romance/crime comics des années 50-60 comme autant de variations sur le caractère volage de Clint ou la cavale de Penny. On les doit à l'illustratrice Annie Wu, dont le style diffère de celui d'Aja, mais avec un trait et des compositions très séduisantes (évoquant un peu Marcos Martin). 
Je ne résiste pas au plaisir de vous les montrer (d'autant que d'autres sites les ont dévoilés avant la parution de l'épisode) :  





Un épisode de transition qui ouvre la voie à un nouvel acte dans la série. Et une nouvelle réussite éclatante pour ce titre dont la constante qualité a quelque chose de miraculeux. Vite la suite !

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