Pour redémarrer les critiques, priorité à une des rares nouveautés disponible en ce moment, une série rafraîchissante, ce qui ne peut que faire du bien...
En effet, Archie Comics a réussi à maintenir la parution de Sabrina the teenage witch : Something Wicked en ces temps troublés. Et on ne peut que les en remercier car la série écrite par Kelly Thompson et dessinée par Veronica Fish est un vrai feel-good comic, comme le confirme cet épisode.
Sabrina a découvert que ce sont ses tantes, Hilda et Zelda, qui ont lancé le sort transformant à la pleine lune Radka et Ren Ransom en monstres. Elle n'ose leur dire qu'elle les a démasquées ni que faire pour corriger la situation mais promet à Radka de l'aider... A condition que Ren soit mis dans la confidence.
Radka, mise au pied du mur, Sabrina doit encore composer avec sa vie sentimentale compliquée. Elle voudrait se confier à Harvey Winkle, un de ses prétendants, mais se retient en estimant qu'il ne la comprendrait pas bien qu'il ait deviné que quelque chose la tracassait.
Le peu de réconfort que peut trouver la jeune fille, c'est auprès de Della. En passant devant sa boutique, elle est invitée à une séance pour être initiée aux subtilités du savoir-faire, ce jeu de sorcières qu'elle souhaite apprendre. Elle se montre douée mais manque encore de pratique.
Le soir est tombé quand elle quitte Della et Ren Ransom lui propose de la reconduire chez ses tantes. En route, Sabrina s'interroge sur l'opportunité de tout révéler à son autre prétendant qui lui aussi, à sa manière, a une vie secrète. Il accepte de lui laisser du temps pour choisir lequel de lui ou de Harvey aura les faveurs de Sabrina.
De retour dans sa chambre, en compagnie de son chat Salem, Sabrina invoque un nouveau sortilège pour tenter d'améliorer la condition de Ren et Radka. Sur ces entrefaîtes, Della arrive et entraîne la jeune fille dans la forêt voisine... Afin de lui montrer que la magie a un prix...
Le dernier comic-book dont j'avais parlé était justement le premier épisode de Sabrina the teenage witch : Something Wicked. Je me demandais alors, vu la situation, à quand j'aurai le plaisir de lire la suite. Archie Comics a maintenu ses sorties et le deuxième chapitre de la série est disponible depuis une semaine.
C'est heureux car le récit concocté par Kelly Thompson est parfait pour se changer les idées dans une période aussi bizarre que celle que nous traversons. Bien que cette nouvelle "saison" du titre soit moins franchement légère que la première, publiée l'an dernier, c'est encore une BD rafraîchissante, divertissante, avec un charme persistant.
La volonté de la scénariste était de faire évoluer son héroïne vers quelque chose de plus mature sans sombrer dans la gravité. Il y a donc la menace d'un tueur qui rôde à Greendale, mais ce subplot est pour l'instant peu exploité. Ce qui demeure en avant, c'est le trouble de la jeune sorcière dans une situation particulièrement délicate.
Sabrina doit en effet résoudre le problème magique qui concerne Radka et Ren Ransom qui, à chaque pleine lune, se transforme en wendigos ; mais aussi savoir pourquoi ses tantes, Hilda et Zelda, ont jeté un sort sur Radka et Ren ; mais encore améliorer sa pratique de la magie auprès de Della ; et enfin désigner qui de Ren Ransom ou de Harvey Winkle sera l'élu de son coeur.
Bien entendu, à part Radka qui se souvient des événements de la première série et sait donc que Sabrina (et ses tantes) sont des sorcières, nul ne sait que la condition de la jeune fille. Et cela impacte durement ses relations avec les garçons qui ont deviné que quelque chose la tracasse mais à qui elle ne peut rien dire de sa vraie condition. Pour ne rien arranger, Sabrina a acquis la conviction que ses tantes sont responsables du malheur de Ren et Radka mais le leur cache.
Sur ce dernier point, le scénario de Thompson est peut-être trop allusif car on voit mal pourquoi Sabrina n'a pas une explication avec Hilda et Zelda (ce qui permettrait de comprendre pourquoi, si c'est effectivement le cas, elles ont ensorcelé les Ransom). Au lieu de ça, elle les évite. Et, de manière assez incohérente, ses tantes non plus ne cherchent pas à savoir pourquoi Sabrina se comporte subitement ainsi à leur égard.
Ceci suggère qu'il s'agit d'une évidente fausse piste. Il y a fort à parier que les tantes n'ont pas accablé les Ransom. En revanche, le rôle de Della semble plus complexe dans la mesure où elle apparaît bien opportunément dans la vie de Sabrina quand elle n'a plus personne sur qui compter. Je parierai volontiers que la boutiquière manipule notre jeune sorcière et conspire contre Hilda et Zelda. Reste à savoir si Della est aussi responsable du sort contre les Ransom - et pourquoi. Cela suffit en tout cas à alimenter un suspense, certes léger et diffus, mais accrocheur.
L'épisode se termine sur un classique des récits sur la magie puisque Sabrina découvre que lancer des sorts a des répercussions spectaculaires sur son environnement. Mais on peut là encore soupçonner une manoeuvre de Della (qui ne m'inspire décidément aucune confiance) pour appuyer son emprise sur sa disciple...
Thompson excelle dans la relation des épreuves romantiques liées à son héroïne : on partage facilement le désarroi de Sabrina qui ne peut parler de ses soucis ni à Harvey ni à Ren et on apprécie sa franchise quand elle avoue à ce dernier nourrir des sentiments pour lui et son rival. L'attitude des deux garçons est raisonnable : comme il ne souhaite pas perdre la jeune fille, il accepte ses cachotteries manifestes mais aussi la sincérité de ses aveux.
Mais Sabrina n'est pas qu'une petite chose fragile : elle sait remettre à sa place Radka quand elle la presse de résoudre son problème tout en rechignant à en parler aussi à Ren. La jeune fille est aussi pleine de ressort quand, revigorée après une séance d'entraînement de savoir-faire chez Della, elle cherche un nouveau contre-sort dans sa chambre.
Le plaisir qu'on retire de cette lecture est renforcé par la qualité des dessins de Veronica Fish. Il me semble qu'entre la première mini-série et celle-ci, l'artiste se lâche un peu plus, n'hésitant pas à combiner dans la même page un dessin figuratif réaliste et de manière plus ponctuelle quelque chose de volontiers plus cartoony, moins classique. Cela se précise aussi avec les couleurs de Andy Fish, qui, lui non plus, ne se retient pas quand il faut souligner une expression par un effet graphique plus tranché.
Les Fish maintiennent en tout cas une cohérence visuelle à l'ensemble. On sent qu'ils ont désormais bien en main les personnages, le cadre de l'action, les ambiances. Tout est plus vif, aiguisé dans cette nouvelle "saison".
Le découpage esst simple mais s'affranchit d'un certain académisme parfois, comme lorsqu'on assiste à la partie de savoir-faire entre Della et Sabrina, dans un feu d'artifices de couleurs et sans cases bordurées mais avec une belle fluidité dans l'enchaînement des figures, dans la représentation des pouvoirs magiques.
Une autre belle scène est celle où Ren raccompagne en moto Sabrina chez ses tantes. Le texte est formé par la voix-off de Sabrina tandis que le trajet est figuré par une succession de cases occupant toute la largeur de la bande et qui voit la moto et ses occupants évoluer de la gauche vers la droite depuis le haut de la page jusqu'au bas. C'est simple mais efficace, concis et malin.
Pour tout cela, Sabrina the teenage witch est une réussite, un projet rondement mené. Si Kelly Thompson peut donner l'impression de négliger certains aspects, on ne saurait s'en formaliser outre mesure tant elle paraît parfaitement savoir où elle va. Et le talent de Veronica Fish fait le reste pour animer une histoire finalement assez dense sous sa légereté apparente.
La regular cover de Veronica et Andy Fish
et les variant covers de Sweeney Boo et Rian Gonzales.
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