Batman Saga 6 :
Batman (#6 : Derrière la glace) : Pris au piège dans le labyrinthe de la Cour des Hiboux depuis une semaine, Batman, affaibli, est poignardé par l'Ergot, le tueur à la solde de cette société secrète. Il ne reste plus qu'à l'achever mais le héros puise dans ses dernières forces pour contrarier ses ennemis et malmener son adversaire direct. Il réussit à fuir par une rivière souterraine - mais cela ne signifie pas qu'il est sorti d'affaire...
Cet épisode vaut surtout pour l'empoignade entre Batman et l'Ergot, et Scott Snyder consacre plusieurs pages à leur bagarre. Ce qui donne un résultat en demi-teinte car, si le héros lutte avec l'énergie du désespoir, avec en prime des hallucinations corsées (Batman prenant l'apparence d'un monstre difforme), la vraisemblance en prend un bon coup : le voici dûment poignardé, perdant beaucoup de sang, après avoir été drogué, épuisé après une semaine à errer dans ce labyrinthe... Et trouvant encore les ressources pour se battre ? Et s'échapper (même si un nouvel obstacle se dresse devant lui in fine) ? Tout ça fait quand même beaucoup pour Batman, qui n'a aucun pouvoir mais se trouve dôté d'une résistance un peu exagérée (malgré un mental à toute épreuve).
Snyder fait durer un peu trop le plaisir (sadique, car il éprouve Batman comme jamais), et il serait bien inspirée, après déjà six épisodes, de suggérer au lecteur une issue au risque de diluer une saga dont l'intensité connaît des hauts et des bas depuis le #4.
Greg Capullo, qui avait fait feu de tout bois le mois dernier, semble lui-même moins en forme, même si le corps-à-corps entre Batman et l'Ergot ne manque pas de punch, et que son découpage est étonnamment élégant par moment.
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Detective Comics (#6 : Un Jeu Mortel) : Jill Hampton et son complice, Peau-de-Serpent, ont infiltré la Banquise, le casino-hôtel du Pingouin qui a réuni là quelques criminels pour en faire ses associés. Charlotte Rivers, qui est à la fois la soeur de Jill et la petite amie de Bruce Wayne, est également dans la place pour enquêter sur le malfrat. Batman doit se presser pour la rejoindre et la sauver...
Après son premier arc, aussi bref que glauque, Tony Daniel se (et nous) perd dans une intrigue trop sinueuse dans laquelle trop de personnages, aux intérêts divergents, opérent dans un lieu unique. Du coup, même si Batman reste très présent, on a l'impression paradoxal de peu le voir et (encore une fois) pour davantage subir les évènements que les anticiper (comme un stratège de son rang devrait en être capable).
Detective Comics peine vraiment à trouver sa voix (voie) dans les bat-séries, alors même qu'il s'agit du titre historique de la chauve-souris.
C'est dommage car le même Daniel au dessin est plus à son avantage (malgré une colorisation toujours aussi moyenne), mais visiblement à mesure qu'il s'améliore comme artiste, il prouve aussi, hélas ! pour lui, qu'il n'a pas l'étoffe d'un scénariste capable de cumuler.
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Batman & Robin (#6 : Le Vrai Moi) : Ayant suivi Morgan Ducard/Personne, Damian Wayne/Robin est testé par le tueur qui veut s'assurer de sa loyauté. Ayant capturé l'ambassadeur de Ragandie, impliqué dans un trafic, ils vont l'interroger ailleurs pour qu'il dénonce ses complices. Batman remonte la piste de son fils tout en continuant de se remémorer sa formation auprès des Ducard...
Chaque épisode de B & R est un miracle renouvelé puisque Peter Tomasi réussit, avec une insolente assurance, à garder le cap et maintenir le niveau (élevé) de son histoire, l'enrichissant désormais avec des flash-backs sur le passé de Bruce Wayne, et concluant avec des cliffhangers saisissants.
C'est LA série sur laquelle on se jette, une fois la revue achetée, impatient de découvrir où son auteur va nous entraîner. Ce n'est pas seulement admirablement efficace sur le plan de l'action que formidablement dense et poignant : on vibre pour les héros, le méchant a du charisme, l'intrigue de la profondeur, le récit un rythme implacable. C'est parfait !
Comme est parfait le dessin de Pat Gleason (et l'encrage de Mick Gray, les couleurs de John Kalisz - subtile variation de traitement pour les scènes du passé) : il faut voir comment il sait tirer partie des masses noires, varier plans serrés et plus larges, doser ses effets. Un modèle du genre, qui n'a pas faiblit depuis le début !
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Batgirl (#6 : Reconstruction) : la fin de ce 2ème arc est toujours aussi médiocre. Le titre français de l'épisode ressemble à une supplique du traducteur pour que le destin de l'héroïne soit confié à une scénariste plus inspirée (dont le seul mérite est d'écrire des histoires courtes) et un dessinateur qui aurait un niveau digne d'un professionnel (entre les visages d'une laideur radicale, les positions hasardeuses, et les angles de vue non maîtrisés, on se demande comment Ardian Syaf trouve du boulot).
J'ai voulu donner sa chance à cette Batgirl, mais après six épisodes aussi épouvantables, terminé. Cela ne mérite plus d'indulgence : c'est nul, mal écrit, mal dessiné - un naufrage.
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Bilan : toujourds aussi partagé - la revue dispose de deux des meilleures séries actuelles (même si Batman par Snyder et Capullo est surévaluée). Le reste va du moyen au complètement raté.
Wolverine 5 :
Wolverine & the X-Men (#9-10 : Avengers vs X-Men) : La Force Phénix est réapparu et détruit sur son passage les mondes. Son objectif prévisible : la Terre. Les Vengeurs, représentés par Captain America, considèrent cette manifestation comme une menace. Les X-Men, ou du moins la frange dirigée par Cyclope sur l'île d'Utopia, voient plutôt cela comme une bénédiction, d'autant plus que la jeune Hope semble vouée à devenir l'hôte de cette entité représentant à la fois la mort mais aussi, peut-être, la renaissance. Wolverine et ses alliés doivent alors faire un choix : aider les Vengeurs à retirer Hope de la garde de Cyclope ou se ranger du côté de Scott Summers. Cette décision va diviser l'institut Jean Grey et précipiter la guerre entre mutants et héros...
La saga évènementielle Avengers vs X-Men (AvX pour faire court) commence donc à impacter (et pour 9 épisodes !) la série écrite par Jason Aaron. Les conséquences sont immédiates : l'intrigue de ces deux nouveaux épisodes est entièrement annexée à l'event et la bonne humeur qui irriguait le titre disparaît quasiment complètement - ne subsiste que quelques rares répliques un peu légères, des éléments délirants appartenant désormais au décor (comme Krakoa) mais sinon l'ambiance est nettement plus grave et pesante.
Le charme de la série s'en ressent fortement, même si, miraculeusement, Aaron réussit à conduire son récit avec efficacité, en restant concentré sur l'essentiel (la dynamique entre élèves et professeurs, trajectoires de quelques personnages-clés comme Angel...). Néanmoins, on ne peut que regretter cette pesanteur de l'event sur une série qui séduisait par son côté atypique.
Il va falloir faire avec, en croisant les doigts pour que le scénariste sache rester suffisamment elliptique (comme dans le 10ème épisode où la bataille sur Utopia est expédiée en une image).
Chris Bachalo signe les dessins de ces deux chapitres: c'est un dessinateur avec lequel j'ai longtemps eu du mal, mais dont le style sert vraiment bien la série, et qui, finalement, se révèle sur certains points très intéressant (en particulier un découpage inventif, des compositions audacieuses). Malgré ses quatre encreurs et une colorisation parfois radicale, ses planches possèdent une cohérence étonnante et une vraie énergie - sur ce dernier point, il est meilleur que son suppléant, Nick Bradshaw, par exemple.
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Wolverine (vol. 4, #20 : Et ce fut la guerre) : L'ambiance est tendue entre les yakusa et la Main, dirigée par le Caïd. La mafia japonaise veut provoquer un conflit entre les deux organisations pour les dominer. Wolverine est mêlé accidentellement à ce réglement de comptes quand une de ses relations, Seraph, veille à ce que tout ne dégénère pas. Mais l'ennemi emploie de gros moyens pour cela et un vieil adversaire du griffu est leur bras armé...
Jason Aaron entame son dernier arc pour la série et commence très moyennement avec cet épisode qui manque de rythme. Il faut vraiment attendre la dernière page (et l'apparition du tueur employé par la mafia japonaise) pour se réveiller. Même les dialogues, d'habitude savoureux chez Aaron, manquent de sel. On va voir comment tout ça se développe...
Pour ne rien arranger, les dessins ont été confiés à Renato Guedes, toujours aussi peu inspirés, et même franchement laids (bon sang, la gueule du Caïd !).
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Bilan : "B moins" (lisez le premier épisode pour comprendre le clin d'oeil) - W & TXM reste très plaisant, mais je sens que ça va quand même être longuet, ce tie-in à AvX. Quant à Wolverine, il affiche une petite mine. Marvel fait un peu ch... avec ces crossovers qui s'immiscent partout (et c'est une des raisons pour laquelle j'ai passé mon tour cette année).
Marvel Knights 5 :
Daredevil & Spider Man (Spider-Man #677 & Daredevil #8 : Au diable les détails) : La Chatte Noire est accusée d'avoir volé un projecteur d'hologrammes dans les labos où travaille Peter Parker, alias Spider-Man. Pour la sortir de ce mauvais pas, ce dernier sollicite l'aide de Daredevil. Entretemps, Felicia Hardy a échappé à la police, résolue à se venger de qui l'a piégée. Mais en vérité, l'affaire est plus complexe encore : la voleuse a été achetée pour piéger Daredevil qui possède un objet convoité par plusieurs organisations criminelles et dont il faut l'éloigner pour le récupérer...
Ce crossover en deux chapitres, écrit par Mark Waid, est un régal et le scénariste exploite parfaitement les situations en menant le lecteur par le bout du nez. La réunion de Spidey et DD est tout sauf un banal prétexte pour utiliser les deux héros, et la présence de Black Cat ajoute du piment à l'intrigue en redistribuant les rôles de la séductrice et du séduit - cela aboutit à la réplique la plus drôle que le Tisseur ait prononcé depuis longtemps (même si elle n'est pas bien traduite en vf - mais toute la revue souffre des traductions de Khaled Tadil).
De l'action, des faux-semblants, de l'humour : comment ne pas être emballé ?
Ajoutez-y des dessins par Emma Rios (pour l'épisode de Spider-Man : résultat superbe entre Gene Colan et Charles Vess) et Kano (pour l'épisode de Daredevil : l'espagnol mériterait vraiment d'être plus souvent employé), et ce dyptique est vraiment irrésistible.
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Daredevil (#9 : Angoisse au cimetière ! - palme du titre à la con ajouté à la vf...) : Alors qu'il s'envoyait en l'air avec Felicia Hardy, Matt Murdock est contacté par Foggy Nelson au sujet d'une affaire de profanation. Problème : elle concerne le cimétière où reposait son père. DD s'embarque dans une virée spéléogique et croise les moloïdes et leur maître, l'Homme-Taupe, à l'origine de ce méfait...
Tout en faisant encore allusion à la précédente histoire, Mark Waid embarque son héros dans une aventure très originale au terme de laquelle il va affronter un ennemi inattendu. Comme il l'avait avec Klaw dans son premier arc, le scénariste confirme son intention de renouveler la galerie de méchants de la série, mais sans oublier d'en soigner les raisons. On verra avec le prochain volet que cette aventure aboutira à un dénouement trouble et troublant, qui vient nuancer le ton apparemment plus léger de la série depuis son relaunch...
Les dessins de Paolo Rivera sont splendides : dès le début de l'épisode, on a droit à une spectaculaire double-page superbement composée, avec des couleurs splendides de Javier Rodriguez. Le reste est au diapason, avec des trouvailles de découpage très simples mais très intelligentes (comme la "visite" de l'appartement de Matt par la Chatte Noire ou la traversée de la rivière de lave, comparable au styx).
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Ghost Rider (vol. 6, #8 : A cent à l'heure) : la série file tout droit vers sa fin (effective au prochain numéro) et, franchement, ce sera un soulagement et un gain pour la revue (qui aura en plus droit à un sommaire plus équilibré).
Je ne pense rien du scénario (ou ce qui en tient lieu) de Rob Williams, dont tous les effets ratent lamentablement leur cible : beaucoup d'action mais jamais palpitante, de l'humour pas drôle, un cliffhanger dont on se moque... Comment l'editor de la série pouvait valider ces épisodes ?
Quant aux dessins de Lee Garbett, il sont au mieux une pâle copie de ce que fait Olivier Coipel (qui n'est plus très fringant), avec beaucoup de fumée pour ne pas avoir à représenter les décors, et une colorisation laide.
Vivement qu'on soit débarrassé !
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Punisher (vol. 9, #8: L'appât) : Frank Castle rencontre enfin Rachel Cole-Alves là où plusieurs membres de l'organisation de la Bourse ont été liquidés. Ils comprennent que le carnage a été accompli par d'autres, sans pour autant savoir qui, pourquoi et convenir d'une alliance. Les inspecteurs Bolt et Clemons chargés de l'enquête sur cette tuerie viennent interroger Rachel, sans succès. Le Punisher a repris ses propres investigations tandis que Rachel, pris pour le justicier, tombe dans le piège des assassins...
Le traitement de la série par Greg Rucka est décidemment atypique mais séduisant : à l'image de ses héros, c'est un comic-book avare de mots, qui entretient avec science son mystère, dévoile progressivement ses rouages, soigne son ambiance (hivernale, crépusculaire, conspirationniste). L'expérience est déroutante, surtout pour ceux qui attendent d'un personnage comme le Punisher des aventures pleines d'action et de violence, mais pour peu qu'on s'y abandonne, c'est assez intense.
Marco Checchetto revient illustrer le titre (après les fill-in des deux précédents chapitres) et livre des planches superbes, magnifiées par la colorisation de Matt Holligsworth. Le résultat exploite parfaitement la mélancolie âpre du script de Rucka, avec des personnages bien campés, dans des décors soignés.
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Le Soldat de l'Hiver (#2 : Gare aux dormeurs...) : Bucky et la Veuve Noire, sur les traces de l'organisation du R.AI.D., sont en difficulté mais commencent à faire des découvertes instructives. Des agents dormants formés par le Winter Soldier lorsqu'il était à la solde des russes sont réactivés, mais leur objectif reste énigmatique : l'attentat contre le Dr Fatalis semble n'être qu'un moyen de provoquer le régent de Latvérie. Mais dans quel but ?
Ed Brubaker est dans son élément avec cette intrigue qui doit plus aux récits d'espionnage classique, avec un zeste de fantastique, qu'aux comics super-héroïques traditionnels. Ce qui rend le résultat addictif, c'est que le lecteur en sait autant (ou à peine plus) que les héros, ce qui suffit pour donner envie d'aller plus loin et de comprendre pourquoi. L'alternance entre les scènes d'action et les plages plus calmes, quoique tendues, est d'une efficacité redoutable.
Butch Guice est également en forme, même s'il faut reconnaître que les expériences visuelles qu'il tente pour la série peuvent dérouter. Plus que la lisibilité, il privilégie la sensation que chaque scène doit communiquer au lecteur, tour à tour confus, surpris, curieux, haletant. Certaines cases sont épatantes, d'autres volontairement déstabilisantes. En tout cas, voilà encore une série qui sort du lot visuellement (ce qui semble être le symbole de la revue).
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Bilan : très, très bon - à l'évidence, quand Ghost Rider aura dégagé, "Marvel Knights" sera qualitativement et quantativement un bimestriel au niveau exceptionnel. Revue du mois !
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