Sorti l'an dernier, le premier long métrage de l'actrice Emerald Fennell, Promising Young Woman, est bien comme le dit son affiche un "thriller sur la vengeance à la fois frais, sauvage et mordant". Sous ses airs de film de genre, c'est aussi un manifeste post #metoo, qui donne à Carey Mulligan l'occasion de briller dans un registre inattendu. Une réussite, qui parvient même à faire regretter que ça ne se termine pas mieux pour l'héroïne.
Etudiant en médecine promise à bel avenir, Cassie a tout arrêté après l'agression sexuelle subie par sa meilleure amie, Nina, et son suicide. Aujourd'hui, à 30 ans, elle vit toujours chez ses parents et travaille dans un coffee shop tenu par Gail. La nuit venue, elle s'aventure dans des clubs et des bars où elle feint l'ivresse pour attirer des hommes qui la conduisent chez eux pour absuer d'elle, avant qu'elle ne les refroidisse leurs ardeurs.
Sur son lieu de travail, Cassie croise Ryan, un camarade de fac, qui mentionne le prochain mariage d'Al, l'agresseur de Nina. Elle échafaude alors un plan pour faire payer tous ceux qui ont été les complices du drame. A commencer par Madison, qui accable Nina et son comportement provocant. Cassie soûle Madison avant de la laisser à un homme pour qu'elle croit, à son réveil, avoir été violée par lui.
La prochaine cible de Cassie est Elizabeth Walker, la doyenne de la fac qui a étouffé l'affaire. Pour l'effrayer, Cassie lui raconte avoir livré sa fille, Amber, à un groupe de rockers dépravés sur le tournage d'un clip. Walker reconnaît alors sa responsabilité et désigne Al Monroe comme l'agresseur de Nina. Cassie se retire en rassurant Walker dont la fille l'attend en fait dans un bar voisin.
Ecoeurée par ce qu'elle a appris, Cassie se rend dans un club où elle aguiche un inconnu. Ryan la surprend et décide de rompre avec elle aussitôt. Cassie rend visite à Greene, l'avocat de Al, hanté par cette affaire. Troublée, elle lui accorde son pardon. Cassie va ensuite chez la mère de Nina qui lui conseille de tourner la page. Elle suit ce conseil et s'excuse auprès de Ryan avec lequel elle accepte de s'installer, le présentant même à ses parents.
Mais Madison resurgit, bouleversée, et remet à Cassie un enregistrement vidéo de l'agression de Nina, filmée sous l'emprise de l'alcool. Cassie remarque que Ryan figure parmi les témoins du viol et le confronte en lui soutirant l'adresse de l'endroit où Al va enterrer sa vie de garçon.
Déguisée en infirmière sexy, Cassie se fait passer pour une prostituée et drogue les boissons des invités pour mieux s'isoler avec Al dans une chambre. Elle me menotte au lit pour qu'il avoue tout mais il réussit à se libérer et la tue en l'étouffant. Le corps de Cassie est brûlé par Al et son témoin de mariage à l'aube dans la forête voisine. mais Elle aura sa revanche posthume car elle avait pris soin d'envoyer la vidéo du viol à la police, permettant l'arrestation de Al, Ryan et de tous les témoins.
Promising Young Girl peut se lire sur deux niveaux : le premier est celui du pur film de genre, à la fois film noir et revenge movie ; le second comme un manifeste social et politique. Emerald Fennell n'a pas voulu choisir et c'est ce qui fait la force mais aussi un peu la faiblesse de son entreprise.
La cinéaste, qui a été remarquée dans la série The Crown, n'a en tout cas pas peur Elle s'attaque à un sujet difficile sans prendre de gants, dénonçant de manière fûté le sexisme, la culture du viol, le rejet de la faute sur la victime. Et cela a d'autant plus d'impact que, si ce film avait été réalisé il y a quelques années, on n'y aurait vu qu'une fiction corsé et désespérée tandis que, aujourd'hui, dans la période post #metoo, après le scandale Weinstein, le scénarion également écrit par Fennell, résonne bien plus puissamment.
La jeune femme prometteuse du titre, c'est donc Cassie. Elle était une étudiante en médecine brillante mais qui a interrompu net son cursus après le viol de sa meilleure amie. Déjà au moment du crime, la faculté a tout fait pour étouffer l'affaire et accabler la victime, jugée provocatrice, et qui a fini par se suicider. Incapable de confondre les responsables, Cassie a donc tout plaqué et est retournée vivre chez ses parents. A 30 ans, elle travaille désormais comme simple serveuse dans un coffee shop.
C'est là qu'elle croise une vieille connaissance, Ryan, avec qui elle a étudié. En évoquant un certain Al, sur le point de se marier, il ne se doute pas qu'il vient de déclencher chez Cassie la motivation qui lui manquait pour venger son amie. Car Cassie a un secret, presque une double vie : chaque nuit, elle s'aventure dans des bars ou des clubs où elle fait semblant d'être invre pour que des hommes lui proposent de la raccompagner. Ils profitent de son état lamentable pour la traîner chez eux où ils comptent la violer... Juste avant qu'elle ne le révèle sa comédie et refroidisse leurs ardeurs.
Telle une actrice borderline, Cassie va s'employer à retrouver et effrayer d'anciens camarades de fac, susceptibles d'avoir assisté ou même participé au viol de Nina. Elle use de stratagèmes cruels, puisque tout consiste à supplicier ses victimes, Suggérer à l'une qu'elle a trompé son mari avec un inconnu sous l'emprise de la boisson, prétendre à une autre que sa fille est aux mains de rockeurs dépravés. Le spectateur est lui-même mal à l'aise avec les méthodes de Cassie tout en savourant le spectacle de ceux qui se sont tus quand ils pensent leur vie détruite ou leurs proches atteints.
Fennell prouve son habileté redoutable dans ces moments-là, mais c'est pourtant dans le face-à-face entre Cassie et l'avocat, Greene, qu'elle produit la scène la plus glaçante et la plus poignante du lot. En effet, le défenseur de Al savait son client coupable mais a quand même obtenu qu'il ne soit pas inquiété, et depuis cela le hante au point qu'il implore le pardon de Cassie. Après ça, le film a du mal à s'en remettre en entre dans une sorte de ventre mou. L'héroïne va-t-elle persister dans son plan machiavélique ? Ou rendre les armes ?
La réponse choisie par Fennell aboutira à un dénouement à la fois extrêmement noir (où Cassie laissera la vie, en ayant mésestimé l'adversaire) et artificiel (la revanche posthume, qui est certes appréciable mais qui évite surtout au projet d'assumer sa totale défaite). Ironiquement, en refusant toutes concessions, Fennell cède à une sorte de happy end décalée, où la vengeance est grimée en pseudo-justice.
C'est le seul, mais hélas ! non négligeable bémol de Promising Young Woman. En voulant à tout prix que les salauds paient, le film contente le spectateur qui le souhaitaient mais ayant sacrifié son héroïne. Les méchants seront bien punis, mais au final Cassie aura rejoint Nina dans la mort, ce qui donne un "score" toujours défavorable.
La cinéaste peut par contre s'appuyer sur un casting remarquable pour raconter son histoire, avec des seconds rôles puissants, qu'il s'agisse de Alison Brie (épatante), Connie Britton, et surtout Alfred Molina (fabuleux). Confier à des bellâtres insipides comme Bo Burnham et Chris Lowell des rôles de vraies ordures est une belle inspiration.
Mais évidemment, sans Carey Mulligan, le résultat n'aurait pas été le même. Avec sa silhouette gracile et les traits tirés, la comédienne impressionne par la détermination qu'elle donne à son personnage. Dès la scène d'ouverture, elle est crédible en petite chose qui cache une machine de guerre implacable. Carey Mulligan n'a pas l'aura de grandes actrices de sa génération, comme Emma Stone ou Jennifer Lawrence, mais sa filmographie parle pour elle : elle est toujours bluffante, fait toujours de bons choix, et mérite qu'on parle plus d'elle.
Le retentissement du film assure à Emerald Fennell un avenir prometteur : Warner Bros. ne s'y est pas trompé, qui lui a confiée l'écriture et la mise en scène d'un film consacré à Zatanna, la maîtresse de la magie de DC Comics. Si la major lui laisse les mains libres, ça va dépoter !
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